Contes d'Istheria

◈ Vieille contine ◈

Une mère, pour son plus grand bonheur, se vit donner par la nature quatre enfants.
Chacun semblait différent, chacun avait ses qualités et imperfections.
Mais de tous, il en était un particulièrement polisson.
Il rendit par plusieurs fois fou sa pauvre mère qui ne sut lui faire entendre raison.
" Tu attireras les foudres de l'ignoble Syli si tu n'es pas sage ", lui disait-elle,
" Il viendra te prendre une nuit et te rongera jusqu'à la moelle. "
Mais qu'importait les paroles effrayantes de sa mère, le garçon ne tremblait pas.
Au contraire, il continuait ses mauvaises actions de bien vilain garnement.
Toutefois, une nuit, une étrange lumière apparut devant la fenêtre du petit vaurien.
Attiré, il alla vers elle et tenta de l'attraper alors qu'elle attirait dehors.
Mais voilà que soudain, la petite lumière se mit à parler :
" Que voilà un curieux garçon, dehors à une heure si tardive. "
Ce dernier se vanta et répondit rapidement.
" Je suis presque un homme, et j'en ai la force. "
Bien loin de rester muette, la lumière parla à nouveau.
" Voilà qui me convient, je préfère les petits garçons dodus à ceux qui n'ont que la peau sur les os."
Le pauvre garçonnet ne comprit que trop tard son malheur.
La belle luciole se transforma alors à un bien hideux monstre qui l'avala tout cru.
Il ne resta plus rien du chenapan que le cuir de ses chaussures.
Le lendemain, il eut alors une mère qui pleura, avec ces trois derniers, la disparition de son petit vilain.
" Voilà ce qui l'en coûte de ne pas écouter et de mal se comporter,
le Syli a tôt fait de vous emporter. "

◈ Conte ◈


Il était une fois une petite fille pleine de vie. Elle était la joie de vivre incarnée et animait tout le petit village dans lequel elle était née. Le nom de ce village a depuis longtemps été perdu mais par la suite, il fut certainement appelé la place étincelante.

Le plus grand défaut de cet enfant, cependant, était qu’elle ne pouvait s’empêcher de mentir. Ses mensonges n’étaient pas mauvais, ne blessaient personne et ne lui apportaient que rarement des bénéfices.
Le fait était qu’elle ne pouvait s’en empêcher. C’était une manie que les habitants avaient fini par ne plus prendre au sérieux, jouant même parfois à lui poser leurs questions tout en s’attendant à devoir interpréter les réponses erronées qu'elle leur fournirait par la suite.

On ne comptait plus le nombre de fois où ses parents ne s’étaient pas disputés ou remariés, de petits frères et petites sœurs imaginaires qu’elle n’avait pas eu, d’aventures extraordinaires qu’elle n’avait pas vécu ou de lieux où elle n’avait pas habité… Les gens du village en avaient même oublié la date réel de son anniversaire tant elle le fêtait par an.

Mais un jour, un étranger vint s’installer dans la vieille maison abandonnée à la sortie de la ville. Bon nombre de rumeurs se mirent à circuler sur lui, toutes plus extraordinaires les unes que les autres. Bien sûr, la petite menteuse ne put s’empêcher d’en colporter quelques-unes, celles qui lui semblaient les plus fabuleuses, les plus amusantes aussi,… et même les plus effrayantes.

Et un jour où elle était avec d’autres de ses petits camarades, elle se mit à leur raconter plusieurs histoires. Ceux-ci avaient beau savoir qu'elle n'était que la petite menteuse qui leur narrait ces choses extraordinaires, ils en furent tous retournés.

Mais après un long moment, une ombre se glissa derrière la jeune fille et tous prirent leurs jambes à leur cou et disparurent. La petite menteuse, elle, n’eut pas le temps de s’enfuir et une main puissante se referma sur son épaule gracile. C’était une main froide et pâle. Lorsqu’elle se retourna, elle était face à l’étranger et resta pétrifiée. Il resta un long moment face à elle, son visage caché derrière un masque de terre cuite, lisse et orné de deux joyaux brillants à la place des yeux.

« Il y a du vrai dans ce que tu dis petite. T’en rends-tu compte ? » demanda-t-il alors soudain.

La petite menteuse resta interloquée par cette voix rocailleuse qui semblait résonner comme du fond d’une caverne.

« Ah… Ah bon ? » balbutia-t-elle.
« Oui. Peut-être pourrions-nous démêler le vrai du faux ensemble ? »
« Je ne sais pas trop si j’en ai envie… » mentit-elle.

Alors un petit rire sembla secouer l’étrange silhouette.

« Moi je suis sûr que si, au contraire. Pourquoi ne me raconterais-tu pas toutes ces histoires une à une encore une fois? Je te dirais ce qui est vrai et ce qui est faux. »

La petite menteuse hésita un moment et puis se lança. Car si elle était menteuse, elle était aussi pipelette et curieuse. Tout cela était de moindres maux en comparaison de sa manie mythomane mais qui avaient tout autant leur importance dans cette histoire.
Elle raconta tout ce qu’elle avait pu entendre, déformer, imaginer, deviner à propos de cet étrange individu qui la fixa de ses deux pierres précieuses tout au long de leur conversation.

« Et bien, je crois que nous avons fait le tour de toutes tes histoires. Rien de ce que tu ne m’as dit au final n’est vrai. N’as-tu donc plus d’idée ? Non ? Une autre réponse m’aurait étonné. Mais je pense pourtant que tu me caches le vrai fond de ta pensée petite fille. Oh oui ! Toi que l’on appelle la petite menteuse, tu es bien incapable de dire ce que tu sais vraiment. Te voilà bienheureuse d’avoir contourné toute cette affreuse vérité car savoir véritablement pourrait te mettre dans une bien mauvaise situation. Cependant, maintenant, tu es condamnée à savoir mais à ne jamais pouvoir le dire, ni même avertir. Garde-toi, petite, d’un jour arrêter de mentir, car si tu venais à dévoiler mon secret, toute personne le comprenant disparaîtrait. »

Il montra alors le ciel nocturne d'un geste de la main et le temps qu’elle leva les yeux au ciel et admira la pluie d’étoiles filantes, il n’était plus là. Il n'y avait plus aucune trace de lui si ce n'était de la poussière d'étoiles. Personne ne sut jamais ce qu’il était advenu de cet homme masqué, ni ne le rencontra à nouveau.

Mais le lendemain au petit matin, nombreuses furent les personnes qui avaient disparues. On ne tarda pas à lier ces tragédies à l'homme masqué, qui, forcément coupable, se dénonçait de lui même par son absence.
On découvrit alors, par les petits amis de la petite menteuse, qu’elle était la dernière à lui avoir adresser la parole. Une grande réunion fut organisée sur la place du village et tout le monde posa des questions à la fillette qui semblait terrifiée.

Après quelques heures, forts de l’expérience qu’ils avaient de l'interprétation des mensonges de l'enfant, usant de nombreuses questions retorses, les villageois ne tardèrent pas à découvrir l’histoire de l’homme au masque, celle que les affabulations de la petite fille dissimulait.
Alors, une personne se rappela que l’un des disparus avait raconté de manière tout à fait convaincu une histoire similaire le soir de sa disparition. Mais, ne fut-ce pas le cas de tous les disparus?

La fillette se mit alors à sangloter de plus belle, assise et désespérée sur sa chaise au milieu du village. Elle n’osa pas enlever les mains de ses yeux en pleurs. Plus ses larmes coulaient, plus le silence s'installait. Et même lorsque plus aucune voix ne parvint à ses oreilles, elle resta dans le noir, terrifiée à l’idée de rouvrir les yeux et de voir qu’elle n’avait pas réussi à cacher la vérité, terrifiée à l’idée de revoir les étoiles et leurs poussières, terrifiée à l'idée de se dire qu'elle savait et qu'elle n'avait rien pu faire.

[Contribution de Veto Havelle]

◈ Conte ◈


Il était une fois, un roi qui vivait dans un royaume prospère où il faisait bon vivre. Il avait reçu tout ce qu'il pouvait désirer et la providence lui donna même sept fils, tous aussi différents les un que les autres. Toutefois, personne n'est éternel et voyant son heure arrivée, il décida qu'il était temps de mettre à l'épreuve ses sept fils afin de déterminer qui serait celui qui deviendrait le nouveau souverain.

Il décida alors de tous les appeler, et de leur donner un défi à chacun. Le défi serait pour chacun une tâche difficile et qui parfois, allait à l'encontre de leur personnalité. C'était une manière pour lui de savoir qui aurait les meilleures épaules pour faire face à ses prochaines responsabilité.

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" Amon, mon premier fils, tu es celui qui est le plus dur et le moins diplomate. Pour cette raison, je vais te laisser pour une journée, la tâche de t'occuper des doléances de nos sujets. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Le premier fils s'exécuta, et reçut un bon nombre de ses sujets. Il rejeta la plupart des demandes et alla même jeter dans les geôles ceux qui se plaignaient de ses décisions. Lorsqu'il vint faire son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu as condamné toutes les demandes qui t'ont été faites et tu n'as pas pu trouver le moindre terrain d'entente. Si tu n'es pas capable d'écouter ton peuple, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Belor, mon second fils, tu es celui qui a le plus de mal à faire la part des choses et à juger de manière équitable ceux qui fautent. Tu auras la tâche de punir nos sujets à la hauteur de la faute commise. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Fier de l'autorité que lui concéda son père, le second fils se fit juge. Il condamna tous les meurtriers à la potence et les autres violents aux geôles à vie. Lorsqu'il vint faire son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu n'as pas cherché à écouter les hommes près à faire pénitence, ni étudier leur cas en détail. Si tu condamnes aveuglément sans comprendre , tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Cicien, mon troisième fils, tu es celui qui est le plus superficiel et le plus dédaigneux. Tu auras la tâche d'aider les plus miséreux qui te répugnent et soigner ton prochain. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Le troisième fils trouva son défi facile et engagea ses domestiques pour donner de l'argent aux pauvres et fit acte de présence dans l'hôpital des miséreux. Lorsqu'il vint faire son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu as préféré faire exécuter la tâche que je t'ai confié à d'autres, plutôt que toi même. Si tu n'es pas capable de faire preuve d'humilité, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Dorian, mon quatrième fils, tu es celui qui possède le plus de couardise et tu refuses toujours le combat. Tu auras la tâche de chasser les pilleurs du village et de protéger ses habitants. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Le quatrième fils se rendit dans le village envahi et tenta de négocier avec les pilleurs. Il leur promit une grosse somme d'argent en échange de leur départ. Lorsqu'il vint faire son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu n'as pas protéger honnêtement les villageois et tu as négocié avec des ennemis de la paix qui pourront revenir n'importe quand. Si tu n'es pas capable d'honneur et d'assurer la protection de ton peuple, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Eloan, mon cinquième fils, tu es le plus doux et le plus fragile de tous. Tu auras la tâche d'occire le chef de l'ennemi qui s'est installé dans la vallée voisine et qui nous menace. Il te faudra faire preuve de férocité. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Le cinquième fils prit avec lui une partie de l'armée de son père, et se lança à l'assaut de l'ennemi. Toutefois, ce dernier resta en arrière et ne participa pas à la bataille bien que les soldats sortirent vainqueurs. Lorsqu'il fit son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu as laissé tes hommes se sacrifier pour toi et tu n'as pas eu le courage de mener le combat avec tes loyaux soldats. Si tu n'es pas brave et courageux et que tu ne peux donner l'exemple, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Fongor, mon sixième fils, tu es celui qui a le moins de respect pour notre culture et la nature qui nous apporte ses bienfaits. Tu auras la tâche de réaménager l'ancienne cour qui servait de camp d'entrainement pour nos soldats en quelque chose d'utile à notre société. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

Le sixième fils trouva les meilleurs ouvriers et architectes afin de réaménager l'ancienne cour et le transforma en luxueux jardin public. Lorsqu'il fit son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu as transformé la cour en un jardin superficiel, plutôt qu'en un champ ou un potager, bien plus utile pour un peuple pauvre et affamé. Si tu n'es pas capable de soutenir ton peuple, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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" Hélion, mon septième et dernier fils, tu es le plus ingénu et tu es celui qui donne trop aisément sa confiance aux autres. Tu dois être capable de reconnaître la vérité au travers du mensonge. Si tu échoues, tu ne pourras jamais devenir roi. "

On mena devant le roi chacun de ses autres fils, et demanda au septième de déterminer lequel d'entre eux était le plus sincère dans l'amour filial qu'ils lui portèrent. Ce dernier était convaincu que chacun de ses frères aimaient leur père. Lorsqu'il fit son rapport, son père le roi ne fut pas satisfait.

" Mon fils, tu as cru à tord que tes frères seraient incapable de mensonge car vous partagez les liens du sang. Mais tous t'ont menti. Si tu n'es pas incapable de douter de ceux qui te sont proches et que tu es trop aveugle, tu ne possèdes pas les qualités pour être un bon roi. "

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Le Roi rassembla alors chacun de ses enfants et leur expliqua qu'aucun d'eux n'était digne du royaume, qu'ils ne possédaient aucune des qualités requises pour devenir un bon seigneur.

Furieux, tous autant les uns que les autres, n'acceptèrent pas que le pouvoir leur échappe, et se refusèrent de perdre leur privilège à cause d'un vieil homme incapable de faire un choix. Mais eux, en firent un bien malheureux, et assassinèrent leur père, qui dans son trépas, réussit à prononcer quelques mots.

" Mes fils, vous ne possédiez pas à un seul toutes les qualités d'un roi mais vous auriez pu les posséder à tous. Malheureusement, votre folie et votre égoïsme me prouve que j'aurais été trop optimiste. Vous êtes indignes de votre lignée et vous serez maudits pour vos actes, à essayer de posséder ce que vous n'avez pas, vous ne deviendrez jamais roi. Quant à moi, ma malédiction sera d'avoir eu sept fils ingrats. "

Le déshonneur tomba sur les sept fils qui ne comprirent pas la subtilité des défis de leur père, ils furent tous chasser du royaume. Aucun d'eux ne fut jamais roi, ni aucun autre ne le devint. Le Royaume disparut avec le bon roi, alors que les sept fils ingrats seraient éternellement condamner à essayer de posséder ce qu'ils n'auraient jamais : les qualités d'un roi.