| | Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] | |
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Invité Invité | Sujet: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Mer 13 Juil - 0:22 | |
| Dans le creux d'un soupire, rien est interdit, tout semble s'arrêter dans l'instant qui ne prend fin que lorsque l'on est conquis, notre égoïsme sur un plateau d'argent, servi avec une fine coupe de sang, nous buvons en l'honneur de ceux qui ont été trop faibles ou qui avaient bien trop de raison pour subir le règne de notre volonté. Dieu que j'aimais la nuit, son calme et ses discrétions : la faune grouillait, les hommes se cachaient de ce qu'ils ne pouvaient voir et maitriser, il n'y avait pas moins de mouvements, juste plus modestie; nul besoin de rugissements, de violences et de sang, on aimait juste sa tranquillité, niché au creux du noir tant aimé que le phare lunaire ne pouvait feindre. Ces millions d'étoiles que les perdus pensaient êtres des proches disparus, au dessus de nos têtes, nous qui pensions toujours qu'ils étaient jaloux que nous vivions alors qu'ils comptaient les instants éternels, personne ne s'est jamais demandé s'ils ne riaient pas de l'étroitesse de nos esprits mortels. Que la terre était plate lorsque le ciel fermait les yeux, que j'étais à mon aise dans cette ambiance brûlante mais rafraichie par cette brume de glace que les cascades faisaient naitre de leur folie créatrice.
Je ne l'avais oublié. Elle avait été ce petit fait qui, dans une partie d'échec, vous fait perdre la tête et vous mène par le bout du nez jusqu'à perdre contrôle de soi. Sighild, l'amazone qui n'avait que pour seule faiblesse de ne pas en avoir une seule. Les lions semblent ne pas pouvoir être abattus mais on les met en cage, on les dresse, on les caresse dans le sens du poil jusqu'à ce que la docilité l'emmène droit à l'esclavage. Les cavaliers de Sharna, Démégor, tout ça me semblait si... Lointain. Suite à la trahison de la forêt de sphènes, parce que oui, Démégor n'était dupe et que mon comportement devint différent, je fus exilé en terres sauvages où nulle vie civilisée n'avait trouvé domination. Il ne m'en voulait pas pour avoir assassiné un garde suprême des cavaliers ou par avoir fait foirer un plan minutieusement préparé et d'avoir pactisé avec l'ennemi juste ensuite. Non, il m'en voulait parce que j'étais devenu, différent. Ma vision des cavaliers n'était guère peinte de gloire et de fierté, c'était certain mais depuis ma rencontre avec Sighild, tout m'ennuyait. Je pensai parfois à elle, puis je repensai à m'ennuyer de plus belle. Notre projet sur la mine gargantuesque de catalyseurs menait droit à l'échec et personne d'autre que moi n'avait les épaules. Alors puisque je m'ennuyais, puisque je voulais un peu de piquant, j'allais goûter aux plaisirs de l'exil forcé en terres desquelles le faibles ne ressortent jamais en vie. Il attendrait mon retour ou l'annonce de ma mort, peu lui importait mon destin car faible, je ne l'intéressais plus et je le comprenais au fonds, je ne supportais l’incompétence, peut-être m'en avait-il trop appris pour que j'en corresponde à un archétype singulier créé par ses propres angoisses, celles de n'être compris par personne, de n'être que craint par l'humanité qui connaissait encore son nom, incapable d'agir pour sa gloire mais uniquement pour faire fuir.
Alors oui, c'est sûrement pour ça que je me trouvai là, tant de mois après. J’étais sorti de son piège mais n'étais jamais retourné le voir. J'étais sorti des griffes du monstre et le Frankenstein qu'il avait lâché, plus précisément l'homme que j'étais, respirai librement, loin des cavaliers de ma haine. Ainsi, je sautais de la cascade nébuleuse puisqu'elle embaumait ces terres qu'elle faisait vibrer dans sa colère torrentielle; la mort me frôlait, me caressant de sa douce étreinte avant que l'adrénaline ne me rappelle que je n'avais jamais été aussi vivant et que je ne plonge dans une eau aussi clair que le paradoxe de mon âme souillée. Au fond de ces amas de gouttes vaines, je me sentais en sécurité, mon ouï était brouillée par la densité des fonds marins légers et je me sentais comme à l’abri de tout. Cet instant, en effet, dura une éternité mais ce ne fut pour me déplaire, car de l'éternité, j'en avais à revendre à n'avoir assez le temps de ma vie pour le compter. Sans respirer, mes idées tournaient et s'envolaient de l'exalte de l'apnée qui tournait à cet étouffement subtil : la mort m’enlaçait doucement de nouveau. C'était mon nouveau jeu, mes défis d'un soir, vivre sans m’accommoder de prudences ou de méfiances, tellement las des manipulateurs.
Remontant à la surface alors que je tournai de l’œil, mon corps dénudé si pâle que la neige rougissait ne faisait qu'un avec la brume qui cachait mes pêchers, l'eau acheminé de la cascade lavant mes alibis susceptibles de discréditer le regard noir qui était devenu naturel. Admirant les éclats d'une lune qui avait vu tant de sang couler, je lui souriais nié en lui contant avec ironie : « Puisqu’on a donné un nom aux astres, que des gros amas de roches deviennent des dieux miséricordieux ou belliqueux, mais toujours adulés. J'ai donc bien peur d'être devenu quelqu'un de bon. Pour peu qu'il faille choisir. Que ce monde est sot. »
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|| Informations || Fonction: Pouvoirs, spécialités & Don: Relations & Contacts: :: L'Eryl :: Sighild | Sujet: Re: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Ven 29 Juil - 22:19 | |
| La journée aurait pu être belle si elle n'avait pas été tourmentée, la nuit aurait pu s'annoncer douce si une maladie insidieuse n'envahissait pas vos chairs. L'une de ses maladies dont on ne pouvait se défaire, une de ses maladies qui ne quittait jamais votre ombre. Elle vous poursuivait, vous rendait souffrante et parfois, elle se calmait, s'évaporait... mais en réalité, ce n'était que les symptômes qui n'avaient de cesse de vous torturer pour un temps. Et enfin, elle revenait encore, encore et toujours. Ne cherchez pas à apposer un nom en particulier sur cette chose car il ne s'agissait nul autre que la culpabilité, mêlée à la mélancolie. Cela était comme un serpent qui s'était enroulée dans votre poitrine, sur votre cœur, rendant chacun de ses battements plus pénible à chaque minutes qui s'écoulaient. Cela vous étouffait toujours un peu plus jusqu'à en devenir insoutenable. Toutefois, ce qui touchait Sighild était autre, tout aussi fort, tout aussi puissant et pourtant si différent. Et comme chaque nuit pour soulagée sa douleur, elle se rendait dans les marais brumeux, là où personne ne viendrait la chercher, là où personne ne la verrait et là où personne ne venait jamais... ou presque.
Elle y avait son propre rituel, ses propres habitudes qui pouvaient paraître bien étranges. Là bas, elle oubliait sa condition de femme ainsi que celle de l'Eryllis. Elle n'était plus qu'une simple lhurgoyf qui devait faire face à sa nature la plus ancienne, son monstruosité, sa violence, sa rage. Les rumeurs et les légendes comptaient parfois que l'on entendait la complainte d'une créature étrange, que l'on disait aussi terrifiante que son appel était torturé. C'était le chant de Jézabel, de celle qu'elle était autrefois. Elle abandonnait sa coquille humaine pour redevenir une démone. Elle s'habillait simplement de cette immense armure cuirassée, parsemée par d’innombrables appendices épineux. Son visage n'avait plus rien de sa beauté douce et docile, mais il était défiguré par un hideux sourire muni de dents si acérés que les créatures de la forêt les redoutaient eux-mêmes. Il n'y avait plus rien d'agréable, il n'y avait plus rien de beau quand elle portait ce masque. L'unique chose qui semblait rester identique était l'expression de ses yeux, ces deux perles ambrés qui brillaient.
Dans cette région là, elle s'oubliait et elle pleurait, avec son attitude de monstre. Elle trainait avec une lenteur curieuse son corps si lourd et pourtant d'une agilité étonnante, les bras ballants, l'attention ailleurs. Elle ne suivait jamais une route réelle, et elle pleurait. Mais pensez-vous que les pleurs d'un monstre pouvaient s'entendre de la même façon que les larmes d'une femme? Non... cela se traduisait par des cris au son profond et résonnant, comme des rugissements graves d'un fauve à l'agonie. On pouvait se sentir effrayé et à la fois si triste. Puis tôt ou tard, la complainte cessait, et dans l'ombre finissait par se dessiner la silhouette d'une femme.
Sighild s'était livrée à sa sérénade comme à son habitude, et elle comptait à présent pouvoir se retrouver un peu seule, toujours un peu plus seule, dans les méandres des marais brumeux. Toutefois, sur sa route, elle fut surprise par la nature lui insufflant qu'elle n'était pas seule, qu'il y avait un autre ôte dans la vallée. Intriguée, et presque oubliant le temps précieux qu'elle avait décidé de s'offrir, elle préféra reprendre son rôle de gardienne de Noathis. Ce fut néanmoins avec une grande tranquillité qu'elle suivit alors son intuition jusqu'à arriver près des chutes nébuleuses. Certes, en tant normal, elle n'aimait guère les intrusions impromptus pourtant, la faune environnante ne semblait pas perturber par cette présence, elle ne pouvait donc être mauvaise et ce qu'elle trouva était de l'ordre de l'incroyable coïncidence, une chose à laquelle elle ne s'attendait, pas à cette heure, pas aujourd'hui.
Là, devant elle, au sein même du point d'eau dans lequel les chutes venaient s'éteindre, il y avait une visage familier, nu, qui se baignait tranquillement au mépris du danger. Oh! Sighild se souvenait parfaitement de cette personne qui était intervenue lors d'une attaque des cavaliers de sharna. Elle n'avait pas eu l'occasion de se faire une opinion plus profonde à son sujet, mais elle portait quand même à son égard une certaine méfiance. Non pas à cause de son attitude, mais plus vis à vis d'elle-même et l'étrange impression que ce dernier lui faisait, un sentiment familier, étrange, curieux... En tant normal, elle se serait dévoilée immédiatement, cependant, elle resta là, immobile, loin de son attention et de ses yeux afin de simplement l'observer. Il n'y avait rien de pervers dans son comportement, elle n'y voyait d'ailleurs pas le mal à cet instant, oubliant même le simple apparat du jeune homme. En réalité, elle cherchait tant bien que mal à comprendre ce qui pouvait à ce point la troubler chez cet individu, sans être capable de mettre le point dessus. Retrouvant alors un temps soit peu ses esprits lorsque le jeune homme s'adressa à la lune, elle se décida alors à simplement sortir de l'ombre...
" Voilà des paroles bien cruelles envers le monde qui nous a fait. "
Les propos de Sighild étaient bien entendu tintés d'une certaine ironie, sans doute à l'image de Sirion. A ce même moment, elle sortait alors simplement des ténèbres pour se dévoiler sous la lumière argentée des lunes sœurs d'Istheria, amusantes vues du ciel étoilé. Les cheveux de la jeune femme semblait prendre vie sous cette lumière, et sa peau paraissait de nacre. Quant à ses yeux, il se dessinait comme ceux d'un félin.
" Veuillez m'excuser d'apparaître à un tel moment devant vous... mais je ne voyais pas comment faire autrement. "
Certes, elle aurait pu continuer à l'observer jusqu'à la fin, discrètement, sans avoir à intervenir, cependant, leur première rencontre n'avait pas été de bonnes augures, peut-être que cette fois-ci, les choses tourneraient autrement.
" Cette fois-ci, vous n'aurez pas à me sauver ou même me mettre en garde... mais je peux vous rendre la pareille aujourd'hui. Les nuits sont dangereuses sur Noathis, ici est un point d'eau de créatures dont il serait plus sage d'éviter. "
La voix de la lhurgoyf était calme et sereine, sombre et suave, pouvait-on en attendre autrement du visage caché des Eryllis... |
| | | Invité Invité | Sujet: Re: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Dim 25 Sep - 15:23 | |
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Et au cœur de mon souffle le plus douloureux, je la pensais bien trop.
Tout ce que nous étions, cet élan d'humanité, je l'avais enlacé avec tant beauté que je l'avais haïs. Et de ma vie, de ces cendres qui s'envolaient, je n'avais été épris que par son visage délicat. Nous étions tous différents, nous avions tous nos ambitions, nos rêves déchus et des peines que nous peignons, incapables de vivre autrement que dans le passé. Ces chaines émotionnelles n'avaient que pour seule clé, ma seule volonté détruite ; pourtant nous comptions le temps avec candeur et je soupirai au désir de la rencontrer à nouveau. Accroupi au rivage de mes songes, dans le tumulte des cascades qui s'abattaient sur mes maux, ce qui m’assommait m'avait rendu plus combatif, mais je la pensais bien trop. De cet élan d'humanité, j'avais autant perdu que le jour où j'avais abandonné mes sentiments, où je m'étais noyé dans les ténèbres de Sharna et où cela suffisait à penser mes plaies béantes. Ceux qui médisaient à ma carrure parfaite ne pouvaient entrevoir ce qui torturait l'homme en proie au regret sans retouches. Mais jamais, jamais je n'avais espéré éprouver à nouveau de l’humanité; les dieux m'en étaient témoins, cette chimère de femme était apparu une nuit avant de s’essouffler dans la lenteur de notre rencontre et de s'en aller.
Accroupi, abattu par le silence de ses mots assassins, mon regard supportait le vide nocturne en priant qu’elle puisse me revenir un jour. Et dans la brume qui portait les hommes à l’onirique, une autre hallucination me vint d’une teneur faisant suer la glace ; mes yeux s’écarquillèrent, étonné que les dieux aient eu pitié de mes plaintes, ils m’amenèrent à son reflet intouchable sans me prévenir des pesanteurs de notre lien mystérieux. Elle m’était à la conscience ce que la muse était au poète subissant l’hiver de ses idées et dès l’instant où la brume se dissipa et où ce rêve faucha nos réalités, elle m’apparut telle que je l’avais laissé. Ce même sentiment de déjà-vu, ce même instinct me soupirant de la chérir alors que je ne connaissais que la teinte de son nom d’Eryllis. Pouvais-je dépeigner tous les mystères qui virevoltaient autour d’elle ? Sighild m’était plus que familière mais si les apparences pouvaient tromper l’homme, le parfum si particulier qui embaumait l’horizon entre fraicheur et ardeurs, ne pouvait faillir au Lhurgoyf qui sommeillait en moi sans jamais oser se réveiller.
Je levai la tête, posant tout le poids de mes chaines dans le regard que je lui portai sans le lâcher un seul instant ; j’eus pourtant si peur qu’elle disparaisse le temps de cligner des yeux car la folie avait peut-être tout simplement envahie tout repère de mon cerveau malade et peut-être n’était-elle pas vraiment là, se faisant l’expression d’un désir enfui trop longtemps. Cependant, sa voix fit s’effondrer tout rempart de folie, tout doute s’enfuit sans demander son reste et j’eus la conviction indubitable qu’elle était bien là. Ma tête levée laissait paraitre le visage rustre d’un homme exilé ; j’étais de ceux qui aimaient être propres sur eux en toute circonstance, impeccables jusqu’au détail invisible à l’œil nu ; le paradoxe d’une pilosité exacerbée sur le visage, une chevelure plus longue, plus animale et des cicatrices encore rougeâtres sur tout le corps avec une concentration maladroite sur le torse. Quelle ironie à vouloir cacher ses couleurs de Lhurgoyf et à porter le masque du beau prince ténébreux s’il s’avérait que le charmant était devenu la bête sans même avoir à enlever le masque et à montrer sa forme monstrueuse que l’on passe tant de temps à ne pas refléter.
Pourtant, je pouvais bien m’en ficher, j’étais en vie, peu importait les coutures et la façon de présenter une chose qui ne pouvait se prétendre belle par nature. Et j’étais conscient de toute l’aventure qu’il me restait à conquérir, conscient que chacun devrait payer pour ses fautes et que je me ferai bien vengeur des victimes de tous ceux qui se seront crus un jour au-dessus de toute loi. Mais ce temps viendrait, me ramènerait à Istheria, un monde que, moi en tout cas, je n’avais pas oublié si lui avait fait disparaitre toute trace de mon passage sur ses sentiers. Mais Sighild m’avait-elle oublié ? J’étais peut-être loin du compte à la pensée de ces idées, pourtant, j’étais plutôt satisfait de la revoir, moi qui étais certain qu’un tel évènement ne surviendrait plus, perdu sur cette île des pêchers. Elle était peut-être la seule personne que j’estimais encore en ces contrées brûlées par l’hypocrisie et l’assassinat.
« Est-ce moi ou Istheria s’est figé dans le temps durant mon absence ? » dis-je avec légèreté, le sourire grandissant à une pointe seulement. Entre douceur et bestialité, Sighild n’avait toujours pas trouvé sa voie et la nature dans son arborescence demeurait son seul repos. Ses yeux d'ambre faisant figures d'éternité. Et j’étais toujours là, au cœur de ce que l’homme ne pouvait apprivoiser, dans cette flore interminable que la fin n’aurait voulu être découverte par aucun conquérant atteint du mal de l’ennui.
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|| Informations || Fonction: Pouvoirs, spécialités & Don: Relations & Contacts: :: L'Eryl :: Sighild | Sujet: Re: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Sam 12 Nov - 19:21 | |
| La rencontre qui avait lieu à cet instant là avait tout ce qu'il y avait plus de surréaliste et de plus étranges. Deux personnes que rien ne prédestinées à une nouvelle confrontation, loin du sang, loin du conflit, se retrouvaient dans l'endroit le plus improbable qui soit, endroit qui semblait énigmatiquement apaisé leurs âmes tourmentées. Et là, alors que leurs regards se croisaient, le silence s'imposait naturellement, il n'était pas pesant et agressant, il était seulement troublant. Pourquoi? Pourquoi la présence d'un tel homme semblait si magnétique? Pourquoi était-elle étrangement attirée par lui, pourquoi désirait-elle le comprendre, lui, un inconnu? Mais un inconnu qui lui semblait toujours si familier, une familiarité agréable, chaleureuse, dénuée de la méfiance qu'elle accordait à tout autre quand elle n'était munie que de sa raison. La folie l'avait-elle donc enfin atteinte après toutes ces années de lutte contre elle-même?
Curieusement, Sighild ne conserva pas ses distances, elle approchait du bassin d'eau, sans pour autant oublier de garder une certaine sécurité de quelques mètres. Là, elle se posta alors tout près, toujours si mystérieusement impérieuse dans son allure mais ses yeux félins ne quittaient pas la silhouette de Sirion pour qui elle semblait avoir une soudaine fascination malsaine dont elle avait intimement honte. Et toujours cette question qui la taraudait : pourquoi. Ce fut alors que dans son élan, peut-être avec l'envie inavouée de continuer de parler avec ce dernier, elle répondit à sa phrase bien légère.
" Tout dépend de la durée de votre absence.... et du regard que vous portez sur Istheria. Et puis, le changement est malheureusement un facteur inéluctable. Mais qu'est-ce qui est le plus effrayant? Que le monde change autour de nous sans nous prendre dans sa tourmente? Ou bien que nous soyons les seuls à changer et que le monde reste le même? "
Un sourire plein d'ironie s'afficha alors sur le visage de la jeune femme, avant que son expression se radoucisse énigmatiquement, laissant alors échapper quelque chose qu'elle aurait en tant normal garder pour elle-même.
" Mais en toute honnêteté... parfois, il est bon et rassurant de ce dire que certaines choses ne changent pas... "
Si seulement cela pouvait être vrai... peut-être faisait-elle référence à ces lieux? Ces chutes majestueuses n'avaient pas changées depuis des années. Peut-être était-ce même pour cette raison inconsciente qu'elle venait toujours ici. Après tout, même sa chère forêt n'était plus la même qu'il y avait dix ans, ces camarades Eryllis vieillissaient et mourraient alors qu'elle demeurait inchangée, une raison pour laquelle elle ne se liait jamais trop avec ces jeunes femmes qu'elle cherchait à protéger contre tout. Et le monde... Ho le monde lui se mouvait inexorablement, sa politique, ses dirigeants, ses mœurs... la seule constatation qu'elle notait était que ce royaume, Istheria, plongeait toujours un peu plus vers des abîmes d'une profonde noirceur, colorant de la même couleur le cœur de ses habitants. Mais parfois, malgré tout cela, il existait d'infime lumière qui pouvait laisser croire que l'espoir était toujours présent... même pour les plus désespérés d'entre eux.
" Dite-moi... que venez-vous faire ici? Vous êtes bien loin de vos... compatriotes... "
Voilà une autre question qui la taraudait toujours au sujet de cet inconnu. Il semblait si différent des Cavaliers traditionnels, du moins, en apparence. De plus, n'en avait-il pas fait la preuve en venant l'aider face au danger? Mais n'était-ce pas une manœuvre de sa part pour gagner sa confiance? Cela aurait tellement été plus facile de voir les choses ainsi, et même si cela aurait pu être une vérité, elle demeurait toujours étrangement captiver par lui, si seulement elle savait... |
| | | Invité Invité | Sujet: Re: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Sam 21 Jan - 12:54 | |
| " Le plus effrayant en ce monde et le fardeau à notre nature, c'est la contemplation. Le monde ne change pas, il pourrit. Son infection putride nous détruit mais sa maladie, il la doit aux hommes épris d'ambitions. Et nous contemplons chaque jour le ciel qui s'effondre et les océans qui nous engloutissent. Peu importe la miséricorde des croyants, personne ne nous sauvera de notre lâcheté. Je ne sais de vous que l’appellation populaire que l'on vous donne, mais par votre état de Lhurgoyf, vous avez pu constater sûrement par vous même l'horreur et la beauté de nos vies. " tournant à présent autour de la beauté suffocante, ses yeux perçant la nuit d'une lumière noire repoussant jusqu'aux ténèbres, il ne pouvait rien expliquer, juste constater, tel était le fardeau dit de la contemplation.
" Je suis de ces diables de Sharna car aucune autre famille n'aurait accepté toutes ces ombres qui dévorent lentement mon coeur. Je ne vis que par les remords qui m'ont amené jusqu'à eux et n'aspire qu'à un peu plus de noirceur pour calmer cette rage qui a gangrené tout mon être. Ils m'offrent ce que je désire et en retour, je leur donne ce qu'ils veulent. Mais si vous saviez le sort que je leur réserve, tous autant qu'ils sont. Vous ne trouverez meilleur comédien qu'un homme qui désire se venger plus qu'il ne désire respirer. Et à ce jeu dangereux, personne ne saurait délier ma nature. Bon ou mauvais ? N'est-il pas plus effrayant un homme sans morale qu'un homme à la morale meurtrière ? Si la mort venait m'arracher dès cet instant à ce corps qui se prétend immortel, quel dieu me recracherait en premier ? Le bon ou le mauvais ? "
Son corps restait droit et rigide, aucune souplesse dans le moindre de ses mouvements. En tournant autour d'elle, il laissait paraître toutes ces cicatrices sur son dos qui ne disparaîtraient sûrement jamais mais sans s'y arrêter, son regard saisissant ne laissait jamais s'échapper celui de Sighild. Il était assez étrange de concevoir que le temps pouvait à lui seul anéantir le coeur d'un homme, le rendre irascible, incapable d’éprouver le moindre sentiment et à l'inverse, le rendant porteur de toutes les pitiés de ce monde qu'il pouvait déverser sur qui il jugerait méritant. On lisait en ces yeux son errance et dans son souffle court, on sentait qu'il était le monstre qui ne trouverait jamais la sortie d'un labyrinthe qu'on avait conçu pour le domestiquer, plus docile, il saurait être un cavalier utile aux desseins des diables qu'il comptait tant jusqu'à lors. En quoi croyait-il ? Qu'aimait-il ? Vivait-il, le coeur porté sur les horizons ou cloîtré entre les murs de sa folie ? L'âme vagabonde mais le corps enchaîné aux terres brûlées par la haine de Sharna. Oui, qui n'aurait pas eu crainte de l'homme dont on ne pouvait prédire l'alliance ? Qui désirerait s'approcher de l'ombre qui apparaît puis disparaît en un soupire ? Sirion savait qu'il était condamné à bien plus que la malédiction des Lhurgoyfs, soumis aux pêchers de la solitude, il ne trouverait le repos que dans la mort et pourtant dieu sait qu'il cherchait un chemin à fouler, un rêve autre qu'un peu de sang versé par les victimes de son passé.
" Pourquoi être loin de mes compatriotes ? Car parfois, il est rassurant de savoir que certaines choses ne changeront jamais. " et le silence de la nuit se pris d'une étrange envie, nous berçant à confirmer qu'ici, rien ne nous décevrait.
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|| Informations || Fonction: Pouvoirs, spécialités & Don: Relations & Contacts: :: L'Eryl :: Sighild | Sujet: Re: Le Diable au creux du coeur de l'Ange. [Sighild] Lun 23 Jan - 20:29 | |
| Les paroles de l'intriguant personnage en disaient bien long sur son état d'esprit. Etait-il donc si désabusé de la vie pour parler ainsi, avec des mots si lourds? Pourtant Sighild ne les comprenait mieux que personne, peut-être en cela, son trouble ne pouvait en être que plus grand. La vie d'un lhurgoyf pouvait être longue, mais bien souvent elle était écourtée à l'aube de leur existence à cause de leur seconde nature, si violente, si sauvage, ce visage que la jeune femme refusait de montrer. Pourtant, cela allait à l'encontre totale de ce qu'elle était : un monstre, une énormité qui jouait avec plusieurs visages et cela tout au long de sa vie. Elle fut une esclave, elle fut une meurtrière, elle fut une fuyarde, puis une femme comme les autres, avant de devenir un soldat de Phelgra le temps d'une guerre qui lui faucha les choses les plus importantes de ce qui fut sa vie. Puis le cycle reprit, et elle porta d'autres masques qui la conduisirent à être celle qui était à la tête des Eryllis. Alors, le fardeau de sa nature, elle la portait autrement, non avec de la contemplation mais avec de la culpabilité d'être ce qu'elle était. Peut-être était-ce un châtiment trop cruel, peut-être était-ce de la lâcheté... Elle ne pouvait décidément pas être juge d'elle-même.
" L'horreur et la beauté de nos vies... mais avec vos mots, votre vision terriblement réelle, il est bien difficile d'en cerner la moindre beauté. Existe-elle seulement pour nous? "
Une réponse comme une autre qui exprimait une toute autre vérité. Son peuple avait deux visages, mais aux yeux du monde, il n'y en avait qu'un : celui de leur monstruosité qui finalement ne participait qu'un peu plus à l'horreur du monde. Leur beauté n'était qu'une illusion...
" Un diable de Sharna qui me semble munie d'un cœur, noir ou non, c'est déjà bien plus que ce que possède vos... compatriotes. Au moins vous bénéficiez d'une conscience qui vous permet de conserver assez de lucidité pour tenir un tel discours sur vous même. Vous seriez étonnée de savoir qu'il existe encore des âmes nobles qui vous offrent l'espoir d'une rédemption, même si dans notre cas, nous savons que nous ne la méritons pas. Mais cette seule idée... dans mon cas, m'offre plus de courage que je n'en ai jamais possédé. J'y ai vu une lumière. Elle n'effacera peut-être pas les ténèbres qui m'avaient envahi et que je me dois de porter, mais elle les réfrène et m'empêche d'y céder. C'est déjà bien plus que je n'aurais pu espéré. Si cela fut valable pour moi, une lhurgoyf comme moi qui a commis tant d'erreur, qui a été faible, qui a les mains plus sales que je ne saurais l'avouer, prenez-moi pour une optimiste si je vous dis que cela pourrait être valable pour vous... quelque soit l'objet de votre vengeance. "
La jeune femme se surprenait, elle se surprenait à vouloir étrangement trouver quelque chose de bons chez cet homme qui lui semblait si familier et pourtant.... Elle ne le quittait des yeux, elle ne le pouvait pas, analysant le moindre de ses traits malgré sa nudité flagrante qui aurait pu être gênante en d'autres circonstances. Elle cherchait à comprendre pourquoi elle était habitée par une si étrange sensation en sa compagnie. Après tout, on ne pouvait dire que son discours était des plus agréables dans le contenu mais elle s'y sentait à l'aise. Quoi de plus naturel, non? Ils étaient issus du même peuple... non, il n'était question d'origine, c'était bien plus que cela... mais plus elle cherchait, plus le voile s'épaississait.
Lorsque ce dernier lui répondit à reprenant sa propre phrase, cela lui arracha un sourire. Décidément, il était un être diaboliquement intéressant ce cavalier là. Toutefois, cela ne signifiait guère qu'elle baissait sa garde, elle était méfiante de nature. Toujours immobile au bord de l'eau, elle laissa un long silence s'installer entre entre eux. Elle ne savait que dire, mais leur regard parlait pour eux sans aucun doute.
" La nuit va se rafraîchir... vous ne devriez pas rester dans ces eaux... "
Sighild ne trouva rien d'autre à dire, rien de plus simple qui trahit une gêne palpable à cette situation. Il était bien difficile de décontenancer cette jeune femme... mais pas impossible. Cela eut l'avantage de mettre fin à leur jeu de regard et elle ne trouva rien de mieux qu'à lui tourner le dos. Pourquoi en avait-elle honte? Parce qu'il lui faisait oublié ce qu'ils étaient... lui un cavalier, elle une éryllis, deux mondes opposés et pourtant... |
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