☠ Chroniques du Roi des Mers du Sud ☠

L'Aguamantis est une véritable fourmilière. Des centaines d'hommes vont et viennent par tous temps sur le pont supérieur du navire pirate, vaquant à leurs quarts, lustrant le bois et ajustant les cordages, s'assurant que les lames et le cuir ne souffrent pas du sel rejeté par les vagues et que les toiles sont pleines quand l'exige le capitaine, et fermement attachées quand il l'ordonne. Murat Reïs vocifère ses ordres et frappe les hommes qui rêvassent sur le pont, tandis que le maître d'équipage se charge de maintenir en ordre les cargaisons des cales jonchées de cages renfermant tant d'animaux sauvages que d'esclaves en peine fouettés par des maîtres esclavagistes, sinuant entre les tonneaux et les caisses de vivres et les tas d'or éparpillés partout sous les couchages puants et dégoulinants. Ferristan Guartem sillonne le pont et escalade lui-même les cordages de son navire, pour pendre de nouvelles victimes et en jeter d'anciennes à la mer. A la proue sont fermement attachés à la figure de léviat'hran les mutins beuglants que les lames de l'océan lacèrent jusqu'à ce que mort s'en suive, tandis que le Roi des Mers du Sud hurle de rire par-dessus le bastingage, se repaissant de l'agonie des traîtres. Ainsi la vie à bord de l'Aguamantis !

Ferristan s'est construit lui-même et a gagner ses galons par la force de sa volonté et celle des armes. D'abord corsaire pour le compte de la couronne d'Argyrei, il a finit par répondre à l'appel de la liberté et se fit pirate. Son ascension fulgurante lui valut bientôt de rejoindre les Marins de Noxis, et ce fut pour lui l'occasion de bâtir un véritable empire sur les mers du Sud, duquel il s'auto-proclama le Roi. Son ambition et sa soif de vengeance, doublées d'une violence imprévisible, lui attirèrent les foudres de ses homologues de la bannière bleue, qui l'arrêtèrent et le traînèrent jusqu'à son procès, où il avait à répondre des crimes commis à l'égard des Ascans d'El Bahari. Mais Ferristan parvint à évincer l'histoire en pointant du doigt les cales de ceux qui l'avaient incriminés : les trésors ascans y furent retrouvés, tandis que les cales de l'Aguamantis demeuraient vides. Ferristan fut pardonné, et ses adversaires punis. Reste que les Marins de Noxis sont méfiants à son égard, d'autant plus que Ferristan projetterait actuellement de faire tomber Kilal et Omério, les obstacles les plus sérieux à son règne.

La réputation et la notoriété grandissantes du pirate attirèrent l'attention sur le continent. Et réciproquement, les activités et l'efficacité de certains groupes agissant sur terre plurent au capitaine. Les Ladrinis en particulier, avec à leur tête le chef des assassins : Enteri. Cet homme mystérieux et légèrement paranoïaque et lui se rencontrèrent en terrain neutre alors qu'ils s'étaient mutuellement fait part de leur souhait de collaborer ensemble. Ferristan les fournirait en denrées et en passes-droits sur ses territoires maritimes tandis que les Ladrinis lui offriraient leurs services en ce qui concerne l'espionnage et l'assassinat. Ferristan ayant beaucoup d'ennemi à terre comme sur mer, c'était une occasion qu'il ne pouvait pas manquer. Leur collaboration permit par ailleurs au vieux pirate de s'en sortir indemne alors qu'il était traîné face à ses semblables à l'occasion d'un procès attenté contre sa personne et son équipage du fait de ses agissements criminels à l'encontre des Ascans. Ses cales furent mystérieusement vidées alors qu'il était enfermé, et l'on retrouva les trésors volés dans celles de ses adversaires qui l'avaient incriminés. Ferristan fut pardonné et ses adversaires punis, et ce coup de maître n'est dû en secret qu'au talent des Ladrinis.

Ferristan Guartem a bien plus d'ennemis qu'il n'a d'alliés, et ça n'est pas pour lu déplaire ! C'est qu'à force de violence et de mépris pour la vie en général, on finit par s'attirer les foudres des plus fervents défenseurs des droits isthériens. Les Nérozias lui ont déjà fait savoir qu'ils n'appréciaient guère ses méthodes en matière de traite d'esclaves. C'était contre leur principe, voilà pourquoi le pirate n'est pas parvenu à fricoter avec eux. De ce fait, plutôt que de s'en faire de précieux alliés, il s'en est fait de précieux ennemis, car son commerce d'esclaves ne fait que grandir et son mépris gonfle en proportion. Le capitaine a déjà eu affaire plusieurs fois à des tentatives d'assassinat et autres attentats contre sa personne ou ses affaires. Mais il n'a jamais perdu grand chose. Il s'attend néanmoins à ce que la férocité des Nérozias à son égard ne fasse que s'agrandir. Et il attend ce moment avec beaucoup d'impatience...

Il arrive à Ferristan de travailler occasionnellement avec des civils : rencontrer un hors-la-loi pour le pousser à collaborer, un magistrat à des fins de corruption, ou encore des marchands pour leur faire des offres qu’ils ne peuvent pas refuser. Pour s’implanter sur le continent sans trop de risques et avec les meilleures couvertures, il lui est obligatoire de rencontrer ces êtres minables et répugnants qu’il juge plus bas que tout de par leur importance négligeable et leur vie monotone déplorable.