Complot Altruiste

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Les Rumeurs

_ Il parait que des personnes hauts-placées seraient gravement malades.
_ Il parait que ça se bécotte "au bal de la Rose".
_ Il parait que des créanciers en sont après un des conseillers de Ridolbar.

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 Complot Altruiste

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Anonymous Invité
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MessageSujet: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMar 21 Aoû - 20:57

Cela faisait plusieurs jours maintenant qu'Irina faisait quelque chose dont elle n'avait pas l'habitude : elle avait pris le temps de passer du temps hors du temple, prenant même quelques jours consacrés au repos. Si théoriquement rien ne l'en empêchait étant donné son grade, ce n'en était pas moins un fait exceptionnel pour quelqu'un qui n'avait pas de temps pour elle-même. Pourtant c'est contrainte et forcée qu'elle avait du prendre cette décision, car son corps bien que continuant de guérir seul, s'épuisait très vite dernièrement. Ne faisant part de cette faiblesse à personne, pour une fois la jeune femme avait fait preuve de raison en se sauvegardant... Ce qui en disait long sur son état.

Mais le fait est qu'il y avait une multitude de choses à faire et à régler, car les projets ne manquaient pas. C'était plutôt le temps qui lui faisait défaut, et sa santé n'aidant pas actuellement, il était d'autant plus urgent de s'y mettre rapidement. C'est pour cela que contrairement à ses principes elle avait fait convoquer Veto Havelle, soldat du corps territorial de la garde. Grâce à ses contacts faisant partie de cette dernière elle avait obtenu que Veto obtienne une permission spéciale qui lui permette de venir la voir, officiellement pour se faire examiner et s'assurer qu'il ne ferait pas de rechute.
En réalité les motifs étaient tout autres, et il était probable que même le premier concerné ne se doute pas dans quel pétrin il était fourré. De fait bien qu'Irina abhorre la politique et les complots minables qui en étaient indissociables, elle était contrainte de jouer le jeu dans l'intérêt de l'Ordre. Son départ futur était certain et seuls quelques détails logistiques devaient encore être réglés, mais il était vital qu'elle garde un certain contrôle à Hellas malgré la distance. Pour cela une certaine influence sur le corps prétorial, et plus largement celle sur le corps territorial était requise.

La prêtresse ignorait encore comment s'y prendre exactement et quels moyens employer pour faire pencher la balance en sa faveur. La situation actuelle était si grave à ses yeux et l'état d'urgence si fort qu'elle était prête à faire n'importe quoi pour parvenir à ses fins. En cela elle se servirait d'un patient si nécessaire, bien que d'un certain côté cela la répugne. Seulement si besoin il y avait Exanimis et la force tirée de son désespoir balayaient ses réticences, lui procurant une détermination qui dépassait ses doutes. Lorsque Juniel vint ouvrir la porte, Irina se leva en ignorant les vertiges qui la prenaient. La maison n'était pas très grande mais elle était propre, et ferait parfaitement l'affaire pour la discussion qui allait avoir lieu. Lissant machinalement sa robe blanc et or, la rouquine se dirigea vers l'entrée et salua l'arrivant d'un sourire accueillant.


« Bonjour, Mr Havelle. Ou est-ce Lorindiar maintenant ? » Une petite révérence ponctua sa phrase, puis elle poursuivit. « Soyez le bienvenu dans mon humble demeure, et veuillez pardonner le manque de décoration et de faste. En tous les cas soyez le bienvenu. J'ose espérer que vous avez quelques minutes à accorder à une servante de Kesha... »
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeDim 7 Oct - 15:12

Le monde était en train de changer. Ce n’était pas sa courte existence qui le faisait penser à Veto. C’était ses connaissances de ce monde et d’une bonne partie de son histoire qu’il avait emmagasiné en cette courte période. Son étrange rencontre avec ce personnage sorti des temps anciens le hantait toujours. Malgré le fait que cette mission date de plusieurs mois, les paroles du désormais trépassé, ses présages d’apocalypse étaient-ils en passe de se réaliser ?
Le jeune Havelle n’en savait rien. Et malgré ses questionnements, il avait continué sa vie de caporal-chef et avait réussi plusieurs missions plus ou moins importantes. Rares étaient ses échecs, et peu cuisant étaient-ils.

Lorsqu’un jeune homme vint le trouver un jour, il était dans sa chambre, continuant de lire son éternelle encyclopédie sylphide. L’importun fut reçu avec peu de considération.


-Caporal-chef Havelle ?
-Je ne vous ai pas entendu frapper.

Le seconde classe s’étonna une seconde de cette remarque. En effet, la porte était grande ouverte et Veto était à son bureau. Cependant, il s’empressa de répondre à cette exigence et reprit.

-On m’envoie vous prévenir que…
-On ne se présente pas à un supérieur ?

Le soldat faillit s’offusquer mais, après un instant à chercher comment garder son calme, il reprit. Veto, lui, termina sa lecture et referma le grand grimoire avec sérénité et lenteur pendant qu’on le prévenait qu’il était convié à une visite médicale de vérification. Étrange. Ses derniers grands déboires corporels remontaient à un certain temps maintenant.

-Qui dois-je rencontrer ?
-Une dénommée Dranis, ou quelque chose dans ce goût-là, il me semble.
-Très bien. Vous pouvez disposer.
-Bien, mon caporal-chef.

Mais alors que le jeune militaire s’en retournait, il entendit derrière lui son supérieur ajouter :

-Seconde classe… Veillez la prochaine fois à ne pas oublier toutes les marques de respect dues aux servantes de Kesha, ou je vous les ferait imprimer dans votre mémoire durablement et personnellement.

Le militaire resta coi, et puis fit un garde à vous, salua le caporal-chef comme il se devait et repartit prestement.

Veto se prépara alors à sortir. Il laissa son armure de cuir et opta pour la tenue officielle, mais décontractée, du pantalon de toile bleu, assorti à la chemise épaisse, sur quoi il laissa tomber son lourd manteau fourré. Sa situation s’était passablement améliorée depuis qu’il avait quitté les dortoirs de la caserne. Rien que le confort offert par ses nouvelles bottes en était un indicateur frappant. À ses yeux du moins.

Il n’eut aucun mal à se faire mener jusqu’à la demeure de celle connue de tous comme la seconde de l’ordre. Il paya le cocher et se fit introduire jusqu’à la maîtresse des lieux. Qui l’accueillit, non sans rappeler ce qu’il pensait être leur première rencontre. L’homme affable qu’il avait été avec le soldat avait bel et bien disparut et le sourire qu’il affichait était tout à fait sincère.
Son comportement à la caserne avec les autres militaires avait lentement mais sûrement bien changé. Ses responsabilités, peut-être, à moins que ce ne soit le pouvoir, avaient progressivement remodelé son comportement. Il avait également appris à être moins aplatis face aux gens important. Il en côtoyait de plus en plus et comprenait désormais qu’il valait mieux ne plus se montrer intimidé et qu’il n’y avait d’ailleurs pas tant de raison de l’être.


-Dame Dranis, je ne me permettrais pas de juger une prêtresse ni même ses goûts en matière de décoration d’intérieur. De plus, cet habitat est toujours moins austère que celui de la caserne, vous devez vous en douter.

Il s’était incliné, une main en évidence sur le cœur.

-Cependant, vous évoquiez à l’instant ma nouvelle parenté.

Il se redressa et rouvrit ses yeux d’un bleu profond mais grisé.

-Je n’en suis pas peu fier et heureux, rassurez-vous. Mais, si cette entrevue avec une amie de mon père n’a aucunement besoin d’être encombrée de précautions, je vous demanderai cependant de taire ce détail à l’extérieur.

Sa voix n’avait rien de menaçant, bien au contraire, c’était une prière en bon et due forme.

-Peu de gens dans cette ville sont au courant, et j’aimerais qu’il en soit ainsi encore longtemps. Comme je vous l’ai dit, je n’en éprouve aucune honte, mais les rumeurs vont bon train, et déjà l’accession à mon grade actuelle m’a été difficile à expliquer. Rare sont ceux qui croient aux capacités personnelles de chacun. Il est plus facile de penser que notre situation achète nos places.

Il souriait d’un air gêné désormais.

-Et croyez-moi : il est difficile de se faire respecter de ses hommes lorsqu’ils ne vous juge pas digne de la place que vous occupez.

Il réalisa qu’il portait toujours son manteau et le confia à ce qui semblait être un majordome. Ceci étant sa seule possession, il reporta rapidement son attention à son hôte, se rendant alors compte qu’il avait épilogué.

-Mais veuillez m’excuser. Je parle, je parle. Vous m’avez fait convier pour une visite médicale, est-ce bien cela ? Je ne voudrais pas vous retarder dans vos occupations.
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 8 Oct - 18:08

Tandis que Veto passait le pas de la porte de celle qui était son antre, Irina s'était simplement levée pour le recevoir, mais laissa l'accueil à la porte à quelqu'un d'autre, ce qui en témoignait de la fragilité de sa condition. Cependant elle ne comptait pas le laisser voir et c'est pour cela qu'elle avait maintenant avec elle son sceptre de cérémonie. Cet objet simple uniquement surmonté d'une orbe dorée, sobrement appelée l’œil de Kesha. Certes il n'avait pas vraiment de valeur marchande puisque contrairement à celui porté par la Grande Prêtresse, il n'était pas serti de joyaux ou d'autres marques de richesse. Seul le bois blanc était un tant soit peu précieux, et encore... Mais cet objet rarement visible en public lui servait maintenant de garde-fou... au sens propre comme au figuré. Il était une marque d'appartenance à l'Ordre, qu'elle devait réaffirmer pour son propre bien, mais aussi un moyen détourné de soutenir sa démarche incertaine et de lui éviter de tomber.

Car là était bien la principale raison qui l'amenait à convoquer Veto loin du temple, qui pourtant pourrait être une carte à jouer. La santé de la rouquine avait drastiquement empiré dernièrement et seuls son apprentie et ses serviteurs, très peu nombreux, en avaient conscience. Par ailleurs recevoir le jeune homme en ces lieux était une marque de prestige et plus important encore, d'estime. Venant de sa part c'était assez rare pour qu'il le réalise, mais assez discret pour ne pas attirer de soupçons de la part de la hiérarchie, qu'elle soit militaire ou religieuse. D'un autre côté il lui suffit d'un coup d’œil rapide à ce visage familier pour qu'elle comprenne que les choses avaient changé. La lueur dans son regard n'était plus de l'insécurité mais de la détermination, et même sa posture était plus fière. Il avait changé... il avait grandi.

Il est vrai que lors de leur première rencontre officielle ils n'avaient pas eu l'occasion de beaucoup discuter... Notamment parce que les circonstances ne s'y prêtaient pas. L'empressement de l'urgence n'y était pas étrangère, mais la présence de Sire Lorindiar, à qui elle ne faisait nullement confiance, en était la principale. Ce jour-là Irina avait eu du mal à voir Veto autrement que comme un gamin naïf, pour ne pas dire crédule. Si d'un côté elle respectait sa piété et sa dévotion, ses maigres connaissances sur les relations humaines laissaient à désirer. Pourtant maintenant qu'elle le voyait là, fringant dans ses nouvelles responsabilités, elle comprit la différence qui allait bien au delà de son apparence soignée et de sa tenue qui reflétait son avancée en grade.
Ceci dit c'était loin d'être une mauvaise nouvelle en ce qui la concernait, au contraire. Plus il était influent – avec ou sans l'aide d'Ision – plus facile serait sa tâche. Toutefois la nouvelle assurance qu'il affichait lui disait que les choses n'allaient peut être pas aussi faciles à 'négocier' que prévu. En temps normal la jeune femme n'avait rien contre un bon défi, mais par les temps qui courent un peu de facilité ne serait pas de trop, surtout lorsqu'il s'agissait de vie ou de mort.


« Plus austère ? Vous dites ça parce que vous n'avez pas vu mon bureau, je vous assure. »

Elle lui sourit légèrement, repensant au chaos sans nom de son bureau et de son laboratoire, qu'elle n'avait qui plus est pas visités depuis un moment. En attendant elle l'invita à se mettre à l'aise et à faire comme chez lui, tandis qu'un serviteur mettait plus de bois dans la cheminée de la pièce principale. La pièce diffusait une chaleur réconfortante et bien que les canapés semblent vieux ils étaient confortables. Dans l'ensemble il n'y avait pas de décoration dans cette maison à la propreté irréprochable, si ce n'est le portrait d'une femme aux traits fins et aux cheveux noirs... Quelqu'un qui n'était visiblement pas de la famille d'Irina, si l'on en croyait ses traits presque sindarins. Néanmoins Veto connaissait peut être ce visage, si tant est qu'il y accorde un peu d'attention. La femme du portrait portait la robe blanche des prêtresses et regardait par une fenêtre, un livre posé sur les genoux. Il y avait quelque chose d'inflexible dans son regard songeur, et elle semblait sévère malgré sa beauté indéniable... Alana, ancienne Seconde de l'Ordre et Haute Prêtresse attendue de la population de Hellas, avant qu'Elerinna ne la remplace. Les stratagèmes utilisés pour ce faire eux étaient inconnus du grand public, mais peu importe.

Ne posant pas les yeux sur ce portrait qu'elle connaissait par cœur, Irina avait salué Veto et l'avait béni, avant de l'inviter à prendre place à ses côtés pour qu'ils puissent discuter. La remarque du militaire l'étonna alors quelque peu, même si elle respectait son choix en la matière. La parenté donnait certes des privilèges, mais aussi le fardeau pesant de la relève et du mérite que cela impliquait... la demoiselle était bien placée pour le savoir. Le fait qu'elle soit considérée comme une amie d'Ision la fit pourtant sourire avec amusement, car cela n'était pas dénué d'une certaine ironie. Ision et elles n'étaient clairement pas amis, et même le qualificatif « alliés » lui semblait surfait. Pour l'instant ils s'étaient mis d'accord afin de ne pas se mettre des bâtons dans les roues mutuellement, mais leur complicité s'arrêtait là. Un passé commun les reliait d'une certaine façon, mais ce n'était pas suffisant pour nourrir de la confiance, et encore moins de l'affection, un sentiment que la rouquine ne ressentait que très rarement. Son attachement pour quelqu'un était aussi fréquent que le soleil à Cimmeria... même si il était beaucoup plus persistant.


« Je comprends vos réticences, et je ferai de mon mieux pour ne pas aggraver les choses. Je suis bien placée pour savoir qu'un nom peut peser bien lourd, malgré toutes les bonnes intentions que nous pouvons avoir. J'ignore si je peux vous aider à ce sujet, mais si vous jugez que c'est le cas, jugez vous libre d'en parler. » Elle fit une pause dans son récit et prit place dans l'un des fauteuils, manquant de tomber même si elle s'était appuyée sur son bâton, qu'elle déposa à ses côtés une fois assise. Elle était pâle et chose rare, avait mis un maquillage léger afin de le dissimuler. Les apparences, toujours les apparences... même si cela n'avait rien à voir avec de la vanité.

« Ne vous inquiétez pas... Mes occupations sont pour l'instant assez restreintes. Et pour une fois j'ai décidé de m'accorder une pause après ma dernière mission. Je suppose que voyager de par le monde m'a vieillie prématurément, ce qui est assez regrettable ma foi. »

Son regard se perdit pendant quelques instants dans les reflets des flammes, qui semblaient se prolonger dans ses cheveux attachés en un chignon sur sa nuque. Lorsqu'elle reprit la parole elle semblait un peu se forcer, se faire violence pour s'arracher à ses pensées. Ce fait seul laissait voir à quel point elle avait également changé... même si il était dur de dire si cela était en bien ou en mal. C'était une femme malade, anormalement fatiguée, même si physiquement elle n'avait pas la moindre blessure. D'un autre coté elle était également moins rude, moins pragmatique, adoucie peut être ?

« C'est vrai que je souhaitais vérifier que votre état de santé ne s'est pas dégradé depuis la dernière fois... Car pour être honnête je ne fais pas confiance aux compétences de vos infirmiers en la matière. Sans offense... Je sais que vos moyens sont limités autant que ne l'est votre disponibilité. C'est pourquoi je préfère faire les choses moi même, tant que c'est encore à ma portée. Et puis c'est une bonne occasion de vous revoir n'est-ce pas ? » Un sourire sincère s'immisça sur ses lèvres tandis qu'elle le regarda franchement. Irina était trop fatiguée pour jouer ou faire semblant.

« Quoi qu'il en soit je ne vais pas vous mentir, bien que je veuille vraiment m'enquérir de votre état et constater par moi-même votre rétablissement, je voulais vous voir personnellement, loin de nos obligations respectives. Enfin... procédons par ordre de priorité, si vous voulez bien. Si vous êtes d'accord, je ferai sortir les serviteurs afin que vous puissiez me montrer vos plaies. » La jeune femme soupira et s'approcha du feu, réchauffant ses doigts gelés en attendant de savoir si Veto allait ou non coopérer. Le tout en dépendrait, car elle ne pensait pas avoir la force de faire preuve de toute la subtilité dont elle était capable.
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeJeu 11 Oct - 11:59

Veto la suivi au salon. Sa démarche lui parue étrange. Dans son souvenir, il n’aurait pas osé la décrire comme plus sèche ou cassante, pourtant, ces deux mots aurait très bien convenus. Aujourd’hui, elle semblait plus calme, plus posée. Elle ne rayonnait plus de toute la prestance dont elle avait fait preuve en tenant tête à son père la dernière fois.

Il garda cependant sa langue. Elle était encore loin de sembler réclamer de l’aide. Loin de là. Elle gardait encore ce quelque chose d’autoritaire et impressionnant. Mais sans doute que la nouvelle philosophie du garde l’enhardissait trop parfois pour qu’il se permette de détailler ainsi la démarche d’une haute prêtresse.

Il détourna ses yeux bleu-gris et s’attarda à nouveau sur la pièce. Il avait répondu sans vraiment réfléchir à comparer cet environnement au sien. La réponse polie lui était venue très vite.
Mais cette demeure était réellement austère. La seule réelle décoration attira donc naturellement son regard. Cette femme ne lui disait rien et il était clair qu’elle n’était pas de la famille directe de dame Dranis. Sa mise en évidence cependant, laissait entendre que ce n’était pas une peinture d’un model quelconque pour la propriétaire de cette toile. Et elle était bien mise en valeur, comme on accroche un ancêtre dont on est fier.
Une graine de réponse germa dans son esprit pour expliquer qui cette inconnue pouvait bien être.

Ils arrivèrent près de la cheminée et il attendit qu’elle s’assoie avant d’en faire de même, écoutant respectueusement ce qu’elle avait à dire, lui accordant toute son attention.


-Je vous remercie, Ma Dame. Je suppose que pouvoir enfin parler ouvertement de ma parenté ici, et en privé, sans soucis d’être entendu, me suffira de votre p’… Il avait commencé à s’assoir mais il s’interrompit dans son mouvement et sa phrase.

Le garde avait manqué de bondir pour rattraper la prêtresse. Mais déjà ses paroles cherchaient à le rassurer. Son visage et le maquillage montrait bien qu’elle ne cherchait aucune pitié et voulait plutôt montrer une bonne santé. Il finit de s’assoir et accepta tacitement sa volonté, continuant de l’écouter. Le fait était qu’elle avouait cependant à demi-mot être fatiguée plus que de raison, également par son comportement immédiatement après. Sa courte absence, le regard perdu vers le foyer embrasé ne fit que renforcer encore un peu l’idée de Veto qui lui disait que cette femme avait besoin de ménagement.

Il ne dit rien, attendant qu’elle reprenne. Aucune mission ne lui avait été assignée aujourd’hui qu’il n’ait pu confier à son caporal. Il s’était donc libéré pour rendre visite à cette connaissance tant pour répondre à la demande officielle, qu’à celle qu’il devinait maintenant officieuse. Elle avait décidé de le rencontrer pour autre chose que simplement vérifier son état de santé.
Cette convocation l’avait intrigué depuis le début et la situation actuelle le confortait dans ses pensées. Cela faisait plusieurs nuits qu’il avait rêvé à nouveau de ce tableau dans le hall, celui où une femme se penchait sur un couffin. Maintenant, un nouveau détail lui revenait. La femme de la peinture dans son sommeil, bien qu’encapuchonnée d’un habit de prêtresse, laissait s’échapper une mèche de couleur feu.

Irina Dranis. Cette femme était liée à son destin, comme tout ce que les tableaux de ce rêve récurent lui laissait entrevoir certaines nuits.

Le visage du jeune homme se voila légèrement ; non pas d’inquiétude, mais plutôt sous un fin film de réflexion. Les dires de la soigneuse religieuse firent naître un sourire doux sur son visage alors qu’elle lui avouait qu’il pensait juste.
La lumière chaleureuse du feu et cet étirement candide de ses lèvres illuminèrent joliment son visage encore jeune et un peu enfantin que la barbe naissante et les journées chargées ne parvenaient pas vraiment à faire disparaître. Malgré l’expérience que Veto accumulait peu à peu, une certaine dose d’ingénuité persistait au coin de ses yeux ou au fond de ses pupilles.
Veto était toujours, au fond de lui, l’enfant qui cherchait des parents à aimer. Si Ision Lorindiar avait quelque peu comblé un vide, une mère lui manquait toujours. Et depuis leur première rencontre, il ne pouvait s’empêcher de penser que cette Irina Dranis ferait une bonne mère pour lui.


-Cette entretient me comble d’honneur… Et de joie…

Mais puisqu’une auscultation n’empêche pas la conversation, il se leva et commença à retirer sa chemise comme elle le lui avait demandé. La déboutonnant avec dextérité, ses yeux se perdirent à nouveau vers le tableau.

-Est-ce... Alana ? Demanda-t-il presque dans un chuchotement.

L’habit de coton épais se posa délicatement sur un accoudoir du canapé alors que ses yeux revenaient sur la silhouette devant la cheminée. Le sourire doux et candide montrait désormais qu’il régressé à nouveau, retournant comme au passé, à une attitude que l’on aurait pu qualifier d’enfantine. Il était gêné par l’importance qu’avait cette femme au sein de la société, il se sentait tout petit à côté d’elle et quelque part, ça le réconfortait de pouvoir se comporter ainsi. Il redevenait un enfant sans autre soucis que celui d’essayer de plaire à sa mère.


-Je vous ai entendu en parler avec père.

Une personne importante pour votre mère l’est aussi pour vous. Veto avait envie d’en connaître d’avantage à propos de celle qu’Irina respectait plus que quiconque, au point de n’avoir d’autre tableau que celui seul de cette femme qui n’était même pas de sa famille.

Toute conversation importante commence par des banalités…

La liquette du garde dévoila enfin son corps blanc et rayé çà et là de cicatrice plus ou moins grande, dans le dos notamment. Certaines dataient d’une enfance qu’il avait oubliée et dont il ne pouvait soupçonner la violence. D’autre, plus récentes et rosées les recoupaient au fil des entraînement militaires drastiques. Des petites sur les omoplates lui venaient de son combat contre le Syliméa. D’autres, moins propres, semblables à des coups de fouets serpentait le long de sa colonne et sur ses épaules. Mais il se retourna pour montrer celle qui les avait réunis elle et lui avec Ision. Une longue estafilade blafarde barrait son abdomen juste au-dessus du nombril. C’était de loin la plus impressionnante.
Lorsqu’elle s’y intéressa, il lui sourit et chercha à la rassurer.


-Elle ne m’a plus fait souffrir depuis longtemps, grâce à vous, je dois dire.
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeVen 12 Oct - 19:11

Pour quelqu'un qui l'avait connue en pleine forme malgré le rythme de vie épuisant qu'elle avait toujours mené, il n'y avait pas de doute quand à l'état 'anormal' d'Irina. Mais malgré cette apparence qui bien que soignée laissait à désirer, l'esprit de la jeune femme était quant à lui plus éveillé que jamais. Il était juste de dire qu'elle avait pris un coup de vieux même si son âge n'était pas si avancé. Elle était entre deux eaux... pas assez jeune pour qu'on la prenne pour une débutante, mais pas assez vieille pour qu'on la croie sur la paille. Ça c'était pour ce qui était du plan professionnel, car sur le personnel c'était une autre histoire. Vingt neuf ans c'était bien assez pour qu'elle comprenne qu'elle était destinée à mourir vieille fille, et l'idée quoique rebutante, n'en demeurait pas moins proche de la réalité.
Cependant les ombres dans le regard d'Irina n'avaient pas changé sa silhouette frêle, son corps bien fait et un peu trop maigre... une trace indélébile que lui avait laissée son enfance dans les rues de Hellas. Son visage lui avait désormais une grâce mystique qu'il ne connaissait pas auparavant, comme si de très récents événements l'avaient profondément changée. C'était là tout le paradoxe de son état : si son corps était vidé de presque toute son énergie vitale, son apparence elle était plus rayonnante que jamais... Dotée d'une beauté qu'elle ne possédait pas à l'origine. Exanimis y était peut être pour quelque chose, elle n'en était pas sûre. Mais il était dur de trouver des réponses par les temps qui courent. Il y avait d'autres priorités, et contre cela même son égoïsme naturel ne trouvait rien à y redire.

Irina fut amusée par l'expression de Veto qui semblait reconsidérer ce qu'il avait dit par politesse. Elle ne lui en voulait pas pour ça, après tout c'était normal. Cette demeure n'en était pas vraiment une. Elle n'y dormait que très rarement, quelques fois par mois tout au plus. La plupart du temps elle dormait dans ses appartements du temple pendant une paire d'heures et puis se remettait au travail sur le terrain. Cette maison correcte se voulait simplement comme un refuge alternatif, loin des enjeux internes. Ce n'était pas un endroit pauvre mais il restait modeste et sans aucun signe ostentatoire. Irina craignait de tomber dans la faiblesse qu'elle avait toujours pointée du doigts chez les nobles les plus fortunés. C'était donc pour cette raison plutôt que par manque de moyens, que la demoiselle avait choisi cette simplicité.


Même son manque de forces ne l'y ferait renoncer, et le confort qu'elle s'accordait était basique. Elle paraissait par ailleurs assez soulagée que Veto n'accoure pas pour lui porter secours et qu'il respecte sa dignité. Le connaissant cela devait pourtant lui en coûter, ce qui en rajoutait à son appréciable effort. Se forçant donc à sourire pour montrer sa gratitude, elle était sincèrement heureuse qu'il soit venu... ce qui la surprenait elle-même. Congédiant Juniel et son majordome, les deux seuls autres présents, Irina respira profondément et répondit d'un ton calme et légèrement pensif.

« Oui c'est bien ça. Alana la blanche, ou Alana l’Éternelle, comme l'on l'appelle maintenant. C'est drôle, je n'aurais jamais pensé qu'une prêtresse, bien que radiée et tombée en disgrâce officiellement aurait pu marquer les esprits à ce point. Mais je suis heureuse que ce soit le cas. Quelqu'un qui a renoncé à tout pour les autres mérite un minimum de reconnaissance. »

Irina se rappelait d'elle d'une façon qui bien évidemment était plus proche et plus personnelle que n'importe qui, notamment parce qu'elle avait été sa seule apprentie. Alana avait été plus maternelle que sa mère de naissance. Contrairement à cette dernière elle ne l'avait jamais laissée tomber... Si ce n'est peut être lorsqu'elle avait sciemment accepté une parodie de jugement qui était voué à la condamner. La colère animait toujours la rouquine à ce sujet, ce pourquoi il était délicat de l'aborder sans la mettre en rogne. Cependant le temps aidant et une longue conversation l'avaient faite réfléchir de manière un peu plus lucide. Ironique que ce soit quelqu'un d'aussi manipulateur et égocentrique qu'Ision qui en soit le responsable. En y repensant Irina sourit avec sarcasme, bien que réellement amusée.

« Qu'avez vous entendu au juste, de notre conversation ? » Il n'y avait pas de ressentiment dans sa voix, ni aucun reproche. Toutefois il lui serait nécessaire de savoir ce que Veto savait au juste pour ne pas en dire plus qu'il ne devait en savoir. Finalement elle haussa les épaules et prit la parole alors qu'elle palpait les plaies. « Alana m'a élevée et nourrie toute seule. Elle m'a pris en charge et a partagé avec moi son savoir et ses maigres possessions. Elle m'a rencontrée pour la première fois dans les rues de Hellas, ou je errais seule. En ces jours une épidémie ravageait notre ville, les morts et infectés étaient alors plus nombreux que les vivants. Je l'ai assistée dans tous les soins possibles jusqu'à ce que tout soit fini... ce qui a pris des mois. Elle a ensuite décidé de me prendre sous son aile et de m'offrir une nouvelle vie. C'est ce qu'elle a fait en me ramenant au temple. J'ai été la plus jeune prêtresse confirmée de l'Ordre, et j'ai depuis fait mon possible pour qu'elle ne soit pas oubliée. »

Curieusement elle en avait plus dit au soldat en quelques minutes qu'à Ision malgré ses insistantes questions. Peut être était-ce à cause de sa santé compromise, ou bien du fait que le sylphide de par sa nature même ne pouvait comprendre. Le fait est qu'elle avait choisi de se livrer sans pour autant rechercher la pitié ou la compassion. Ses mains avaient rapidement pris le pouls du jeune homme, puis avaient inspecté son abdomen avec douceur mais précision pour voir si les organes internes se portaient bien. Voyant que son patient ne semblait pas ressentir de douleurs particulières, elle le laissa enfin tranquille, levant la tête pour lui parler.

« Un mentor est exactement comme un parent, Veto. Si par honneur nous sommes tenus de ne pas leur faire honte et de faire preuve de loyauté, rien ni personne ne peut nous forcer à quoi que ce soit. Ne laissez pas votre sentiment de gratitude et de dette vous faire renier votre morale. Les remords vous tueraient. »

Ce n'était pas là la prêtresse qui parlait, mais bien la femme, celle qui se cachait la plupart du temps et qui se montrait si rarement qu'Irina allait jusqu'à douter de son existence. Cela ne l'empêchait pas de sourire pour autant, et de reprendre place dans le canapé. Au fond d'elle même elle y avait encore une fillette fragile mais qui avait la rage de vivre... de survivre par tous les moyens. Son corps affaibli réveillait des sensations enfouies, une attitude qu'elle avait abandonnée il y a longtemps. Mais qui refaisait surface sans demander son reste.

« Ce n'était pas encore votre heure, ainsi en a décidé Kesha... Et je suis contente qu'il en soit ainsi car cela me fait plaisir de vous revoir. En plus de cela la garde cimmérienne protège les citoyens tous les jours... Il est donc normal que les prêtresses leur offrent les meilleurs soins possibles. » Elle lui servit alors une tasse de tisane en usant du service qui se trouvait sur la table basse, en compagnie de quelques gâteaux au miel et des fruits. « Je vous en prie servez vous. Cela ne vous fera pas de mal de prendre un peu de poids. » Elle plaisantait c'est certain, mais la vérité c'est qu'elle ne savait comment aborder la suite. Il y avait-il seulement un moyen qui ne soit pas abrupte ? Soupirant tout en se servant également une tasse, elle tendit la sienne à Veto puis prit son courage à deux mains.

« Je... ne sais comment être sincère sans être brutale, c'est l'un de mes plus grands défauts. Ne m'en tenez donc pas rigueur. Je crois que malgré nos brèves rencontres, vous avez compris que je suis une personne indépendante, trop fière. Je n'ai donc pas trente six manières de vous le dire... » La rouquine se pencha vers lui pour le regarder dans les yeux. « J'ai besoin de votre aide. Pas seulement du soldat que vous êtes, mais surtout de l'homme. A quel point donneriez vous de votre personne pour non seulement assurer ma survie, mais aussi celle de l'Ordre tel que nous le connaissons ? »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMer 24 Oct - 0:17

Alors qu’Irina présenta plus en détail la femme du tableau, Veto admira la peinture comme s’il rencontrait une divinité en personne. Il se sentait réellement comme un enfant désormais. Un enfant alors pris en faute, comme si on prenait conscience qu’il avait écouté aux portes. Même si ce n’était pas le cas, même si le prénom d’Alana avait simplement fait irruption dans des conversations en sa présence entre Irina et son père, il ne se sentit pas moins coupable d’être au courant d’une chose qui semblait gênait sa… « bienfaitrice » ?

« J’ai… J’ai simplement entendu ce prénom prononcé et des allusions à l’affection que vous lui portiez. » Balbutia-t-il.

Pourtant, elle ne fit qu’enrichir sa connaissance au sujet de cette femme. C’était décidément une grande prêtresse. Et il écouta avec attention alors que son corps devenait des rouages et des engrenages dont on inspectait l’imbrication et l’huilage des axes.

Lorsqu’elle fit allusion à un mentor, Veto ne put empêcher la vision d’un sylphide apparaître. Cette fois, ce n’était pas Ision, mais Azryel. Ce médecin de la grande cité blanche avait endossé ce rôle malgré lui. Comment Veto aurait-il pu nommer autrement cet être qui l’avait éduqué, élevé et vu grandir toutes ces années, sinon « Père ». Pourtant, l’immortel l’avait toujours interdit. Alors Veto s’était habitué à l’appeler mentor. Que devenait-il désormais, cet être sans mort ? Quelle vie menait-il ? Les lettres qu’il lui avait envoyées étaient toujours restées sans réponse.

Mais déjà son regard perdu dans le vide revint dans la pièce et il comprit qu’il pouvait se rhabiller.

Pourtant, l’espace d’un instant, les paroles de la prêtresses tournèrent dans l’esprit du garde .Que voulait-elle dire à propos de l’honneur. Parlait-elle encore d’Alana et d’elle ? Était-il question d’Ision Lorindiar ? Savait-elle pour Azryel ? Veto avait l’étrange sensation de n’être qu’un livre ouvert en présence de cette jeune femme, un livre qu’elle connaissait par cœur et ne feuilletait que par habitude.

Le jeune Havelle, malgré son trouble, se força à reprendre contenance et à échanger les mêmes mondanités que son hôte. Se rasseyant, il remercia sincèrement et engloutit un gâteau au miel, libérant ses mains et attrapant avec précaution la tasse qu’on lui tendait. La boule de pâte sucrée mit un instant à descendre dans son œsophage mais une gorgée de thé aida.


« Délicieux. » Mentit-il. Y avait-il une boisson plus écœurante que l’eau chaude aux herbes ? Mais il sourit à la boutade de la prêtresse et reprit un gâteau avec un appétit non feint.

Pourtant, il l’avala plus doucement cette fois-ci. Les paroles qui furent énoncées prenaient une toute autre dimension. Une dimension qui impliqua la seule réponse que l’on pouvait attendre de la part d’un jeune homme qui devait sa vie au temple et aussi à cette personne-ci en particulier.

Un genou au sol, une main sur le sol, la tête basse, la voix solennelle d’un jeune impétueux monta solennellement vers celle à qui il jurait son dévouement.


« Ma Dame. Ma vie ne serait pas assez pour prouver le respect que j’ai pour vous et la cause que vous partagez avec vos sœurs. Elle est déjà passée par vos mains et je l’y remets volontiers. Si je pouvais vous être d’une quelconque utilité, je tâcherais de me montrer digne des années que vous m’avez sauvegardées. Il n’y a nul désire de votre part auquel elles ne sauraient se consacrer. »

Immobile, il resta là, à peine vêtu de sa liquette, prosterné devant une femme dont il ne savait pas grand-chose mais qu’il jugeait l’une des plus pures sur cette terre, comme chacune de ses consœurs.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeSam 27 Oct - 6:06

En d'autres circonstances ou il y a quelques temps de cela, Irina aurait sans doute cherché à faire payer à Veto ses oreilles indiscrètes... Mais ce soir là elle se contenta de hausser les épaules d'un air condescendant, bien décidée à ne pas perdre son temps avec une affaire aussi dérisoire. Alana était une femme connue de cette ville et son lien avec elle n'était pas un secret. Ce n'était certes pas quelque chose qu'elle criait sur tous les toits pour diverses raisons, mais il n'y avait pas lieu d'en avoir des regrets. Qu'elle le veuille ou non, et malgré son ressentiment envers sa mentor pour l'avoir abandonnée si jeune à son sort, cette femme faisait partie de ses racines bien plus que sa mère biologique. D'un autre côté évoquer la femme représentée sur le tableau la rendait nostalgique, un sentiment qu'elle n'appréciait pas et qui était aussi inutile que dangereux.

La rouquine ouvrit donc un placard et en sortit deux bouteilles qu'elle déposa sur la table. Il y avait une liqueur aux fruits et une eau de vie, qu'elle disposa à portée de son hôte si l'envie lui en prenait. Ce n’était pas parce qu'elle ne recevait pas souvent qu'elle ne reconnaissait pas une mine renfrognée lorsqu'elle en voyait une. Simplement elle avait présumé que Veto préférait quelque chose de chaud pour se réchauffer, à tort. Néanmoins elle ne fit pas de commentaires pour ne pas le mettre à l'aise, et agit comme si elle lui offrait juste plus de choix. Finalement la demoiselle se rassit avec lenteur, contrôlant ses mouvements afin de ne pas se fatiguer inutilement. Ce qu'elle avait à dire aurait bien tôt fait de lui voler le reste de ses forces.
Quoi qu'il en soit, ce fut la spontanéité désarmante du jeune caporal-chef qui l'interrompit, ce qui contre toute attente déclencha son hilarité. Étonnamment il n'y avait pas de moquerie dans son expression, seulement un amusement sincère face à la dévotion aveugle du jeune homme. Il était encore innocent à bien des égards et plein de bonne foi, ce qui se faisait de plus en plus rare. Il y avait en lui quelque chose de pur, de cette même pureté dont il investissait les prêtresses. Et ce n'était pas plus mal, car elle aurait besoin de bases pour soutenir ce qui allait suivre. Posant une main bienveillante sur son épaule, elle lui fit signe de se lever. Si le don de soi était nécessaire, il n'y avait pas besoin de faire dans les courbettes et autres faux-semblants qui lui faisaient horreur.


« Je sais que ce que je m'apprête à dire vous choquera et je le comprends parfaitement. Depuis la minute où vous êtes entré ici je me suis répétée que tout ceci était une idée de mauvais goût qui aura tôt fait de vous faire fuir, mais je ne peux faire machine arrière maintenant. Je vais donc être franche et en venir aux faits sans détours. »

Les yeux dans les yeux, elle avait pris la main de Veto dans les siennes, comme pour l'obliger implicitement à au moins écouter ce qu'elle avait dit jusqu'au bout. Son plan était aussi farfelu qu'audacieux, c'était aussi le seul qui lui semble viable, alors il lui était interdit d'abandonner. Ne lâchant pas sa main, elle le regardait en levant les yeux, la lumière du feu accentuant ses traits pâles et malades.

« De par mon rang et mes prises de position, je suis une cible toute désignée pour mes ennemis et pour ceux de l'ordre, cela vous le savez déjà. La lutte d'influence entre la Grande sœur et le maire n'est plus à démontrer et chaque jour qui passe elle s'envenime. Je... sais bien plus que ce que je ne devrais, et à moi vous n'avez pas besoin de mentir. C'est à moi que vous avez transmis le message au temple. Je ne sais pas tout, mais assez pour que cela me mette en danger. » Elle serra sa main, essayant de se donner confiance. « Je suis rongée par quelque chose dont j'ignore la nature. Mes forces s'évanouissent et même si j'ai appris à me défendre seule, ce ne sera pas suffisant à l'heure actuelle. J'ai bien assez de mal à m'acquitter de mes tâches journalières alors combattre... Je... j'ai besoin de protection, et je ne fais confiance à personne d'autre que vous pour cela. » Un sourire ironique dansa sur ses lèvres, dans une auto dérision et un humour noir assez... étranges.

Lasse de lever la tête pour pouvoir le regarder, Irina libéra Veto de son contact et se rassit. Elle se fatiguait à une vitesse alarmante, et refusait de s'arrêter maintenant qu'elle était lancée. Des mèches lui tombèrent sur les yeux, comme pour dissimuler la pudeur qu'elle était en train de braver pour des raisons qui dépassaient de loin sa seule survie. Si elle venait à périr, qui aurait la force et surtout l'intellect pour s'opposer aux manœuvres d'Elerinna ? Personne n'en aurait le courage, ou l'impudence selon le point de vue.

« J'ai une vérité à vous apprendre, et il est probable que vous ne me croyez pas. Cependant cela s'avérera nécessaire afin que vous compreniez pourquoi j'ai besoin de vous. » Il était le seul à avoir assez de cœur et de compassion pour comprendre le désespoir qui l'animait. C'était aussi la seule personne digne de confiance qui pourrait occuper la place toute désignée qu'elle lui réservait. Mais une chose à la fois... Elle prit une grande inspiration, ses joues tournant à l'écarlate. Elle se cacha derrière ses cheveux, sincèrement gênée. « Contrairement à mes sœurs, j'ai décidé depuis le jour ou j'ai été initiée que je me dévouerais uniquement à Kesha, et ne laisserais jamais un homme me détourner de cette route. J'ai toujours scrupuleusement respecté cet engagement, seulement... Je porte un enfant, Veto. Un enfant que les anciens dieux m'ont offert. Par la déesse je le jure, jamais un homme ne m'a touchée! » Elle serra les poings pour réprimer la colère, ayant beaucoup de mal à voir cet enfant comme un cadeau et non un fardeau. Ce faisant, elle sentit le contact d'Exanimis qui la conforta un peu de ses ténèbres abyssales et lui permit de continuer.

« Pour l'instant tous l'ignorent, mais dans quelques mois mon corps trahira le secret, et alors... Alors le scandale s'abattra sur moi et me dévorera. En théorie rien n'empêche les prêtresses d'être mères... seulement je sais qu'Elerinna attend le moindre signe de faiblesse de ma part pour me réserver le même sort qu'à Alana. Elle m'accusera de pervertir l'ordre, et si je leur parle de l'origine de cet enfant, elle criera au blasphème... et je serai déclarée hérétique. » Irina déglutit et ferma les yeux un instant, exprimant finalement tout haut les pensées qui la dévoraient depuis des semaines, lorsqu'elle était revenue de son expédition aux chutes nébuleuses. « Cela me tuerait. Une servante de la déesse, c'est tout ce que je suis. »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeJeu 1 Nov - 18:07

La tête vers le sol, Veto fermait les yeux, pleinement convaincu de ce qu’il disait. Sa dévotion aux prêtresses était réelle. Elles l’avaient sauvé de la morsure du froid quand les gardes l’avait trouvé dans le désert et c’était d’ailleurs pour ça qu’il s’était engagé dans la garde. Mais il avait également une dette envers Irina. Il était prêt à tout pour la rembourser.

Ses yeux se rouvrirent brusquement. Elle riait. Pourquoi ? N’était-il pas crédible ? Ses paroles étaient-elles stupides ?
Lentement, il releva la tête pour poser ses yeux sur son visage souriant. Il chercha ce qu’il avait fait dans ses yeux pour mériter la moquerie, mais il ne trouva dans son regard que de l’attendrissement. Il l’aurait donc simplement surprise ?
Elle lui prit la main et le releva. Sa peau était douce et ses doigts réchauffés par la tasse de thé, mais le reste de sa main était froide. Elle garder sa main prisonnière des siennes et la serrait doucement. Veto sentit ses joues s’empourprer légèrement et son souffle manqua de se couper. Les confidences qu’elle lui faisait l’emplissaient d’une gêne et d’un honneur tous deux grandissants, créant une sorte de joie diffuse et intériorisée. Elle disait lui faire confiance, qu’elle avait besoin de lui, de sa protection, de son soutien.

Il resta immobile, la main levée, là où elle avait été maintenue auparavant. La prêtresse s’était rassise mais lui ne pouvait bouger. Il attendait la suite. Qu’est-ce qu’elle voulait exactement. Qu’elle parle ! Il n’aurait qu’une hâte : s’exécuter !

La suite n’eut d’autre effet comparable que celui d’une gifle démentielle. Disait-elle vrai ? Si c’était vraiment le cas, si elle était vraiment une vierge enceinte, cela remettait en question toutes ses convictions. Lui, l’adepte de la pensée sylphide, l’athée de Hellas qui passait son temps à le cacher, lui, était face à ce qu’un autre aurait appeler miracle sans hésitation.

Lui ne put que céder face à cette aberration : il tomba à genoux, les deux cette fois, ses bras ballant et le regard perdu, aussi atterré que le reste de son visage.


« Kesha… »

Sans s’en rendre compte, sa main se leva doucement et se tendit, tremblante vers Irina, vers son ventre plus précisément. Il resta un instant comme ça, ses doigts avançant lentement, jusqu’à ce qu’il se ressaisisse et ramène son bras à lui. Les yeux bleus et gris levèrent vers le visage rougi derrière les mèches couleur de feu.

« Dame Irina… »

Son visage était semblable à celui d’un incrédule. La mâchoir pendante et les yeux légèrement écarquillé. Il jeta un nouveau regard à ce ventre qui abritait déjà l’incroyable et puis revint sur ce visage honteux et déprimé.

« Ma Dame… Je ne reviens pas sur mes paroles, si risible puissent-elles vous sembler. Je suis et je reste votre débiteur et même sans cela, votre rang et votre dévotion seuls m’interdisent de vous délaisser dans votre peine. Quelle que soit l’aide que je puisse vous fournir, je le ferai sans retenu, dussè-je y laisser la vie. »

Ce fut lui qui prit ses mains cette fois et son visage affichait désormais l’image de l’homme d’arme qu’il était.

« Moi Veto Havelle, caporal-chef de la garde territoriale de Cimméria, ne serait pas même un homme si je venais à délaisser la haute prêtresse que vous êtes. Mon glaive et mon bouclier son votre Ma Dame. Sur mon honneur et sur ma vie, je jure d’être déjà vôtre. »

Il se releva, mit une main sur son cœur, l’autre dans son dos et s’inclina bas et raide. Qu’importe s’il la faisait à nouveau rire. Il ne saurait comment prouver plus sincèrement sa dévotion. Cette femme manquait d’être une mère pour lui, elle serait une mère sous sa protection et peut-être la femme qui le pousserait à enfin croire en quelque chose de métaphysique.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeSam 10 Nov - 11:58

Contrairement à ce qu'on pourrait croire ou attendre d'une personne aussi réfléchie et autoritaire qu'Irina, l'idée d'attendre un enfant la paralysait. On peut même dire que si elle n'était pas apte à contrôler ses peurs comme elle en avait la capacité, elle aurait sûrement été envahie par la terreur. Car même si en ce moment précis elle se servait quelque part de cet état de fait, les choses n'étaient pas simples. Si au départ ses plans étaient de manipuler Veto afin qu'il serve ses propres idéaux, désormais il s'agissait plutôt de limiter la casse. Utiliser sa faiblesse comme une force... Voilà de quoi il était question. Pourtant dans l'aigreur que lui suscitait ce destin invraisemblable, la jeune femme se forçait à ne rien montrer de sa détresse autant que faire se pouvait.
Dans ses réactions il n'y avait donc pour l'instant aucune malveillance ni même d'arrière pensées cruelles. Irina devait sauver sa peau ainsi que celle de cet enfant à venir, et pour cela elle ne reculerait devant rien. Abdiquer d'une partie de son orgueil devant cet homme trop bon pour survivre était un mal nécessaire... Et l'endurcir serait sûrement un cap inévitable pour assurer leur sécurité à tous les deux. Car la sécurité à laquelle elle aspirait n'était pas seulement physique, mais aussi morale. Il lui restait de nombreux mois de grossesse à tenir, et Elerinna essayerait de profiter de la situation, elle en mettrait sa main à couper. Une mort en couches... quoi de plus regrettable. Ou bien une rencontre malheureuse la nuit tombée... ou n'importe quel autre subterfuge du genre. Les idées sombres de ce qui pouvait lui arriver traversèrent son esprit en un éclair, avant qu'elle ne les balaie pour son propre bien.

L'expression atterrée de Veto la blessa, notamment parce qu'elle était le reflet de sa propre confusion. Il n'était pas le seul à voir ses convictions profondes ébranlées car l'esprit scientifique d'Irina ne comprenait pas non plus ce qui lui arrivait. Mais les faits étaient là, et les signes physiologiques ne mentaient jamais. Elle était médecin, elle connaissait son corps par cœur... et c'était bien parce qu'il n'y avait pas d'erreur possible que les choses en étaient définitives. Ses croyances lui interdisaient de se débarrasser de l'enfant, d'autant plus qu'elle ne faisait confiance à personne pour effectuer une chirurgie aussi risquée avec succès... Le tout sans l'éventer aux quatre vents.
Tandis que le jeune homme levait une main tremblante vers son ventre, Irina fit un effort et la prit, la posant sur le tissu fin qui recouvrait sa peau. Il ne sentirait rien car quatre mois ce n'était pas assez pour que le bébé commence à bouger, mais sait on jamais. Après tout la normalité avait été bannie de sa vie depuis qu'elle portait Exanimis... et peut être Veto aurait il une vision, un flash, quelque chose... N'importe quoi. La vérité c'est qu'Irina était désireuse qu'il ressente la preuve de ce qu'elle avançait, qu'il constate de lui même qu'elle ne mentait pas. De plus ce serait aussi le signe que la folie ne la dévorait pas pour lui faire voir des choses qui n'existaient pas. Parfois elle s'interrogeait sérieusement, ne pouvant trouver de réponse certaine. Après tout elle n'en avait parlé à personne. Prenant une grande inspiration la rouquine libéra sa main, et baissa ses yeux timides sur son visage.


« Je regrette de vous emprisonner ainsi à votre devoir, Veto. Vous devez certainement avoir des plans bien plus réjouissants pour votre avenir. Je commets peut être une erreur en vous mêlant à tout ceci, mais je mentirais si je disais que j'ai d'autres options. C'est vous que j'ai choisi et nul autre. »

Chaque mot était pesé et sincère, aussi étonnant que cela puisse paraître, surtout pour la première concernée. Le jeune soldat avait de nombreux défauts mais il était un homme digne de confiance, quelqu'un de droit et de tenace. Deux traits qui manquaient terriblement à Hellas ces dernières années. Intérieurement Irina se jura de faire son possible pour appuyer l'ascension sociale et martiale de Veto, même si elle le passait sous silence. Il ne comprendrait pas ses intentions et voudrait s'élever par son seul mérite, ce qui était admirable mais trop naïf. Les justes se devaient d'être préservés et propulsés en haut si il le fallait. La Serpentine n'était peut être pas une de ceux là et n'y prétendait pas, mais au moins elle pouvait aider ceux qui étaient plus valeureux. Pour son Ordre et sa ville, elle le ferait sans sourciller, quitte à se salir les mains.
Rougissant toutefois au serment du caporal-chef, elle pensa secrètement que ces paroles sonnaient presque comme une des sérénades dont regorgeaient les livres d'Alix. Son visage semblait soudainement rajeuni et plus féminin, comme si tout d'un coup elle avait cessé de se considérer scientifique pour revenir à sa condition de femme. Une femme sensible aux belles paroles d'un homme qui plus est. Se mordillant la lèvre inférieure, Irina faisait de son possible pour revenir sur terre, en vain. La joie et le soulagement qui l'envahissaient étaient tels qu'ils éclipsaient l'espace d'un instant l'angoisse et le poids de son fardeau. Elle n'était plus seule, et c'était tout ce qui comptait.


« Déjà mien ? Vous n'avez donc pas peur de tomber entre les griffes d'une jeune mégère ? » Elle sourit de sa propre plaisanterie avec une légèreté non feinte. Il valait mieux dédramatiser maintenant que de laisser tomber les larmes de joie qu'elle retenait avec tant de mal. Alors à la place elle attendit qu'il se relève et se rapprocha simplement, n'osant pas le toucher. Le compromis entre ses émotions fortes et sa timidité fut donc de poser son visage contre le cœur du Dévoué. Son geste comptait bien plus qu'elle ne pourrait jamais expliquer, et sa proximité loin de la rebuter, la rassurait.

« Je vous remercie de votre bonté, vraiment. J'espère juste que vous ne nourrirez pas de regrets à l'avenir, et qu'un jour en voyant le visage de l'enfant que je porte, vous serez fier de votre décision. » Irina posa une main sur son torse en fixant le sol. « Je ne pensais vraiment pas que vous me croiriez, je suis soulagée que ce soit le cas. J'ai besoin d'autre chose que de jugements faciles pour aller de l'avant et avec vous à mes côtés c'est désormais chose possible. » Levant enfin ses yeux de jade pleins d'espoir vers Veto, la demoiselle continua. « Ces dernières semaines j'ai commencé à rechercher une propriété qui me permettrait de me retirer de la vie publique et d'échapper aux regards. C'est à regret que je vais devoir m'exiler hors d'Hellas pendant un certain temps. Pas tout de suite car mes obligations m'attendent, mais je tiens à prendre mes précautions pour quand viendra le jour. Je finirai les négociations sous peu... Et j'espère que vous me ferez l'honneur de votre visite. C'est l'ancien duché d'Arghanat qui aurait appartenu à un Gélovigien, il est situé loin de tout et me coûtera toutes mes économies. Mais cela en vaut la peine... les installations sont en bon état et je n'aurai plus qu'à trouver du personnel compétent et de confiance. »

C'était la porte de sa vie qu'elle était en train d'ouvrir, une entrée vers un monde inconnu où la folie était maîtresse, mais assez subtilement pour ne pas attirer l'attention. Le tout était de ne pas effrayer le pauvre Veto qui tout doucement devrait passer de l'enfant perdu à l'Homme responsable et endurci. C'était la mission qu'Irina se fixait pour leur bien à tous les deux. Et qui sait où tout cela pouvait bien les mener...
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMar 27 Nov - 0:14

À peine s’était-il redressé qu’elle le frappait à nouveau. Ce n’était pas un coup physique, bien sûr, plutôt une gifle à son esprit de nouveau. Sa tête était posée sur sa poitrine. Rapidement, il mesura à travers ce geste et ses paroles combien elle souffrait de son isolement et de son silence. Sans doute cette confession lui faisait du bien en réalité…
Veto resta immobile, un air hagard sur le visage, du rose aux joues. Il avait aimé, il avait même embrassé. Non, ça n’avait jamais été plus loin. On lui avait pris sa belle avant qu’il n’en soit autrement. Aux balbutiements de leur aventure, elle avait été sacrifiée par un autre pour le faire souffrir. Il avait alors tué pour la seconde fois.
Le garde cimmérien avait seulement pris deux vies dans toute sa carrière, et même avant de devenir militaire, ses mains étaient restées immaculées aussi loin qu’il s’en souvienne… Irina avait-elle besoin de savoir cela ? Le choisissait-elle parce qu’elle le croyait doué pour ôter des vies ou parce qu’elle le pensé apte à les protéger ?

Son regard revint du vide dans lequel il s’était perdu. Ses mains tremblante en l’air, loin du corps de la jeune femme qu’il n’osait touchait. Elle releva la tête et leurs regards se croisèrent.


« Le duchet du Duc Seh… C’est une belle demeure, en effet assez isolée… »

Il détourna son regard et fronça les sourcils. Où avait-il appris cela ? Une mission. Oui. Il était déjà allé là-bas… Il escortait quelqu’un d’important. Mais ce n’était pas tout… Il revoyait des ombres et des couloirs sombres et étroits…
Un vertige le prit et passa alors qu’il faisait un pas en arrière, une main au visage.


« Pardonnez-moi. Ma vision s’est brouillé l’espace d’un instant. J’ai… »

Sa main gauche, celle qui avait touché le ventre de la prêtresse se fit nette devant ses yeux et le vertige le reprit et soudain il s’effondra, renversant la table basse, le thé et bousculant le canapé.

*

Veto était debout face à un tableau dans le grand hall blanc de ses rêves. Sur ce tableau, un énorme serpent était peint, enserrant un petit cadre représentant un grand manoir sombre. En face, un loup blanc était des plus menaçants sous un grand tableau de ce même domaine, cette fois-ci radieux.

Mais rapidement, il s’en détourna, sentant qu’il était attiré par autre chose. Fixant le sol et son dallage de marbre blanc, il rejoignit un épais tapis immaculé et monta sur une mezzanine par un imposant escalier. Suivant la rambarde à gauche, il atteignit le mur et écarta un rideau, exhibant une nouvelle toile. Une assemblée de silhouette blanche encapuchonnait encerclait ce qui semblait être le grand hall d’un temple sombre. Un rayon de lumière tombé du ciel sur le centre au premier plan. Une autre silhouette se penchait sur un couffin, une mèche couleur de feu sortant de sous sa capuche. Elle levait une main vers le berceau portait par un bras vêtu de bleu. Sur le bas de son visage qui était visible, on voyait un sourire.
Mais elle tendait son autre main vers le porteur du panier.


*

Veto se redressa en sursaut. Encore une fois, il n’avait pas terminé de détailler tout le tableau mais chaque fois il en décelait plus d’éléments.
Il était au sol et vit le visage d’Irina tout près. Son expression de surprise disparut et il sourit à pleine dent, d’une expression sincèrement heureuse.


« Tout va bien. Les plans de mon avenir sont ce qu’ils devaient être… »

Il porta une main au visage de la rouquine et caressa une mèche de cheveux qui s’égarait. Il n’avait pas dû s’assoupir plus de quelques secondes. C’était la première fois que ça lui arrivait. Sans doute cette vision était importante, à moins que ces souvenirs inaccessibles à propos du duché n’aient été l’élément déclencheur de cet évanouissement.

Il se redressa sans problème, comme s’il n’avait fait que trébucher et s’épousseta les mains et le pantalon.


« Oh ! Veuillez m’excuser pour le désordre… » et il commença à ramasser les débris de tasse par terre. « S’il vous plait, ne me tenez pas rigueur pour cette absence ! Ça ne m’arrive jamais ! »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMar 27 Nov - 14:27

Le duc Seh... Le nom lui était jusque là inconnu, mais Irina le mémorisa rapidement, se promettant de faire une enquête sur le sujet. Certes cet homme était réputé mort, mais il n'était pas question de prendre des risques. Et puis elle était bien placée pour savoir qu'en cherchant bien on pouvait toujours trouver des cadavres au placard de tout le monde. Le tout était surtout que cela ne lui retombe pas dessus tout ça parce qu'elle aurait fait le mauvais achat. D'un autre côté elle était assez surprise que Veto, en tant que garde de Cimméria, connaisse une personne qui n'était pas si célèbre que ça et qui n'avait manifestement aucune propriété à Hellas. Cela lui mit la puce à l'oreille c'est certain, mais les investigations seraient pour plus tard.

Seulement la demoiselle n'eut pas le temps de réfléchir aux questions qu'elle pourraient poser à Veto, car il sembla pris d'une sorte de vertige et recula brusquement. Irina en perdit l'équilibre et faillit tomber lamentablement, mais se rattrapa de justesse sur un meuble. Elle était affaiblie mais toujours aussi adroite, heureusement. Par contre son protecteur avait un comportement étrange et des plus inquiétants. L'espace d'un instant la rouquine se demanda si son malaise n'était pas une conséquence du fait qu'il l'ait touchée. Il était difficile d'avoir une réponse à ce sentiment, d'autant plus que peu après le concerné perdit conscience et tomba avec fracas au milieu de son salon.


« Juniel ! Junieeeel ! » Elle ne se tut que lorsque la jeune servante aux longs cheveux noirs fit irruption dans la pièce, apeurée que quelque chose soit arrivée à sa maîtresse. Si elle se détendit quelque peu en voyant que cette dernière allait bien, elle fut toutefois renvoyée illico. « Va chercher une bassine d'eau, et la sacoche d'herbes rouges. Dépêche-toi, bon sang ! »

Comme d'habitude Juniel entendait crier et écopait des émotions virulentes d'Irina, sans pour autant oser protester. Elle revint donc peu de temps après avec ce qui lui avait été demandé, et entreprit même de chercher un coussin pour leur invité souffrant. Après tant de temps à son service, la jeune fille avait fini par adopter les bons réflexes pour apporter les premiers soins. Restant donc à disposition, elle regardait sa maîtresse alors que cette dernière tapotait la nuque et le front du soldat d'une serviette avec un air inquiet qui ne lui était pas habituel. Son indifférence et professionnalisme s'étaient envolés, quand bien même ses gestes eux étaient toujours aussi confiants.
Vérifiant qu'il respirait fréquemment, elle avait frotté des pétales de pivoine entre ses doigts qu'elle avait mis sous le nez de Veto. L'odeur était florale et légèrement mêlée à de la cannelle, ce qui pour une fois changeait des habituels médicaments immondes au goût comme à l'odorat. Passant sa main libre dans ses cheveux, la jeune femme se sentait légèrement coupable, pensant toujours qu'il avait perdu connaissance à cause du contact avec elle.


« Allez réveillez-vous, ne me faites pas ça... »

C'était un murmure qui avait fui d'entre ses lèvres avant-même qu'elle ne s'en rende compte. Surprise de ce qu'elle venait de dire, Irina se mordit la joue et respira profondément pour chasser toute trace d’irrationalité. Enfin il ouvrit les yeux tout d'un coup, avec l'expression de quelqu'un qui vient de faire un rêve merveilleux. Fronçant les sourcils avec une mine aussi contrariée qu'inquiète, la terrane ne comprenait rien à ce qu'il racontait. Le temps qu'elle s'interroge il caressait son visage, la troublant encore plus.

« Et quels sont les plans de votre avenir ? »

Ce n'était sûrement pas de devoir prendre en charge une femme et un enfant qu'il n'avait pas désirés et qui en plus n'étaient pas les siens. Ce n'était sûrement pas de prendre des risques inutiles pour sa sécurité et sa carrière afin de tenir un serment improbable. Déglutissant avec peine, craignant intérieurement le contenu de sa réponse, Irina le laissa se relever mais resta immobile, assise sur ses talons. Absente ou en tout cas distraite par ses propres pensées, elle s'en fichait des tasses brisées à ses pieds ou la table renversée. Tout cela était sans importance.

« Je ne vous en veux pas, mais vous m'avez fait peur. La prochaine fois j'espère que l'annonce de l'achat de mon nouveau chez moi ne vous fera pas un tel effet. »

Elle lui avait répondu sans le regarder, les mains entrelacées dans son giron tout en caressant mécaniquement l'anneau d'obsidienne qui brillait à son doigt, l'air ailleurs.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMer 28 Nov - 0:11

Veto était accroupi au-dessus de ses dégâts et s’évertuait à ramasser les morceaux de la porcelaine brisée sans se couper. C’était assez surprenant de voir ces grosses mains un peu calleuses faire preuve d’autant de minutie. Pourtant, elles se débrouillaient plutôt bien. Mais elles se figèrent comme tout le corps de Veto lorsqu’Irina lui demanda ce qu’il entendait par sa dernière phrase.

Dans un premier temps, il s’était vu vraiment très heureux de voir ses décisions prises à l’instant se révéler tout à fait en accord avec ce que ses rêves lui montraient de son avenir avec tant de parcimonie. Car il l’avait compris désormais, ces rêves lui montraient ce qui l’attendait dans un avenir plus ou moins proche. C’était parfois de manière très métaphorique, mais il fallait le reconnaître, tout à fait limpide une fois la situation vécue. Ces tableaux dans son esprit montrer les choix importants qu’ils feraient, les évènements importants qu’il vivrait, les personnes qui guideraient sa vie ou la menaceraient…
Chaque nuit devenait enfin des éléments de réponse après tant d’années où elle n’avait fait que lui poser des questions sur la signification de ces rêves récurant et sans sens…
Mais maintenant, il avait peur que ce don ne lui apporte la disgrâce de sa nouvelle maîtresse. Même s’il lui affirmait que ça ne lui arrivait jamais d’habitude, elle pourrait le croire désormais inapte à faire ce qu’il avait promis. Pouvait-il lui parler de ce qu’il avait vu, de ces rêves qu’il faisait régulièrement, aussi étranges que surprenant parfois ? Le croirait-elle ?

La nouvelle réplique de la prêtresse le ramena sur terre. Sa servante se présenta à ce moment à son côté et lui tendit une pelle à poussière. Voyant que l’on n’avait plus besoin d’elle, elle s’était permis d’aller chercher de quoi faire place nette. Le jeune homme déposa les débris dans la pelle et s’apprêta à s’en saisir mais la soubrette lui fit comprendre qu’elle s’en chargeait.

Il se redressa, toujours un peu gêné, et puis posa les yeux sur son hôte. Elle était toujours prostrée et il s’en trouva tout contrit. Dans un élan, il se pencha sur elle et l’incita à se relever pour l’aider à s’assoir sur le canapé.
Après un dernier coup de chiffon, la domestique les laissa à nouveau seuls et Veto termina de chercher ses mots.


« Ma Dame. Je regrette de ne pas atteindre la perfection dont vous auriez bien besoin pour vous soutenir. Cependant, je jure de tout faire pour devenir l’homme de toutes les situations que vous aurez à traverser. Mes desseins étaient flous jusqu’à ce que je vous jure allégeance aujourd’hui. Je vivais depuis trop longtemps une vie sans plus savoir pourquoi. Vous redonnez un sens à mon existence et elle vous sera consacrée. » Le garde lui prit délicatement les mains. « Chaque parcelle de temps libre sera consacrée à mon perfectionnement. Je servirai encore cette ville car elle est la vôtre et celle de l’ordre que vous chérissez, et non plus parce que je n’ai rien trouvé de mieux à faire. Mais cet enfant vivra et j’espère aider les choses en ce sens autant que je me pourrais et que vous me le permettrez. »

Le contact entre leurs mains était empli de douceur et de ferveur, sans pour autant les retenir prisonnières : ça ressemblait plus à un support solide et chaud qu’à une étreinte. Il voulait devenir la marche qui lui permettrait de surmonter les difficultés qui se mettront sur sa route.

Il resta silencieux un instant et puis un petit rire bref résonna dans sa gorge.


« Votre future demeure n’est pas la cause de mon absence. Du moins pas essentiellement. Je crois comprendre que l’un de mes pouvoirs avait quelque chose à me montrer. Pour cela j’avais besoin de m’endormir. Et je crois comprendre qu’il voulait approuver mon choix de vous suivre. J’ai effectué une mission dans ce duché dont vous avez fait l’acquisition. Il m’était alors apparu sombre et effrayant, comme si des choses malsaines se tramaient en sous-sol. Pourtant, le décor était idyllique. Chaque chose était telle qu’elle devait être ; et la présentation semblait avoir l’effet escompté sur ceux qui étaient là. Maintenant, je sais que ce sont mes rêves qui m’avaient mis en garde contre ce lieu. Aujourd’hui, ils m’ont montré ce que vous en ferez, je crois ; ce que je devrai protéger. Et ce sera magnifique. Votre enfant ne pourrait pas rêver mieux que moi. » Il chercha son regard et eut un air amusé et tendre.

Il se leva ensuite et redressa la table qu’on avait oubliée dans la pagaille avant de se retourner, une main à nouveau sur le cœur, l’autre dans le dos, avant de s’incliner légèrement, la tête basse et les yeux clos.


« Ma Dame, je n’ai plus qu’une question : « qu’attendez-vous exactement de moi ? ». Parlez et je m’exécuterai. »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMer 28 Nov - 19:49

Musical Theme ♪


Les peurs de Veto concernant la réaction d'Irina étaient légitimes et plutôt compréhensibles car peu de gens pouvaient appréhender l'ensemble de sa situation. Cependant la prêtresse n'était pas en position de lui donner des leçons, d'autant plus qu'elle aussi s'était confiée au sujet d'épreuves personnelles assez incroyables. Reconnaissante qu'elle était pour la preuve de confiance qu'il lui avait donnée, elle avait désormais un esprit plus ouvert à des confessions qu'elle aurait auparavant qualifiées de fantasques. Par ailleurs en tant que religieuse il lui avait été donné de voir beaucoup de choses, y compris ce que le commun des mortels qualifierait de miraculeux. Si en temps normal elle aurait plutôt donné crédit aux explications rationnelles, après ce qui lui était arrivé dans les ruines du temple de Noathis, tout était possible.

Pendant quelques minutes, l'esprit d'Irina revécut des flashs du peu dont elle se souvenait, comme si sa mémoire se refusait à tout lui révéler. La sensation d'être complète lorsque Exanimis avait pris possession de son corps sans son consentement lui restait toutefois, en un souvenir tenace qui ne la quittait plus. N'être qu'un avec les ténèbres les plus profondes, être protégée de leur noire enveloppe... C'était une plénitude qu'elle n'avait jamais ressentie, comme si elle l'avait attendue toute sa vie. Même la douleur qui lui avait alors déchiré les entrailles lui avait paru dérisoire comparée à ce paradoxal bien être. Mais qui pourrait donc comprendre cela ? Même Veto ne pourrait jamais la voir sous ce jour sombre, même lui ne supporterait pas le monstre qu'elle dissimulait aux yeux de tous. Le monstre qu'elle était et avait toujours été, au delà des apparences. Répondant sans lever les yeux, Irina avait peur de ce qu'il aurait pu y découvrir.


« Je n'ai pas besoin de perfection. J'ai par principe de ne jamais exiger plus que ce que je ne peux moi-même offrir. J'ai maints défauts, mais je vois dans le cœur des hommes. Le votre est plus fort que vous ne semblez le penser. »

Sa voix était faible mais douce. Il était clair qu'elle disait ce qu'elle pensait et n'attendait pas que cette discussion tourne à l'échange de compliments. Elle rougit néanmoins lorsqu'il lui prit les mains, sans pour autant se dérober. Avec son aide elle ne tarda pas à se relever, bien que son équilibre laisse encore un peu à désirer. Ignorant les vertiges qui n'étaient en rien liés à la grossesse mais plutôt à l'épuisement que causait cette dernière, Irina leva doucement le visage pour le regarder, soulagée de l'entendre rire. Cela lui faisait du bien de voir qu'elle pouvait causer autre chose que du mépris ou du chagrin.
Un de ses pouvoirs aurait quelque chose à lui montrer, des rêves prémonitoires... ? Aurait-il tout comme Ision, un certain don de prédiction ? C'était curieux. Il arrivait également que la serpentine connaisse l'un de ces pressentiments, mais c'était plutôt lié à son lien avec Kesha et non un don personnel. Le regardant autrement maintenant, Irina était sérieuse mais pas plus distante qu'avant. Elle en apprenait simplement plus sur Veto, et ce n'était pas une mauvaise chose au contraire. Il valait mieux être au courant de ce qu'il pouvait faire ou non afin d'échafauder une stratégie visionnaire pour la suite. Ne retirant pas encore ses mains d'entre celles de son hôte, la rousse prit une profonde inspiration. Si seulement ses rêves pouvaient voir juste...


« Oui j'en suis sûre, vous êtes celui qu'il faut. Sur ce point je n'ai pas de doutes. » Il était celui qu'il fallait à l'enfant... Mais et pour le reste ? Cette question lui revenait sans cesse. Puis il en vint à lui demander ce qu'il lui faudrait faire concrètement, ce qui la coupa l'herbe sous le pied. Le fait qu'il ait accepté aussi facilement et aussi vite l'avait surprise, lui donnant peu de temps pour réfléchir à la suite. Quoi qu'il en soit il s'attendait à ce qu'elle lui prête lieu de guide spirituel, et la moindre des choses c'était qu'elle s'acquitte de cette tâche. Cela ne devrait pas être si compliqué... en théorie. Le fait qu'il la loge en haut d'un brillant piédestal ne simplifiait pas les choses. Si chute il devait y avoir, ce serait de haut. Soudainement appréhensive, elle le cacha du mieux possible et prit place dans un canapé.

« Quand bien même l'idée d'être suivie partout me répugne, je pense qu'un ou une garde du corps ne serait pas de refus. Il n'est pas impossible que ma rivale cherche à me supprimer dès que je baisserai ma garde. Je vous fais donc confiance pour choisir quelqu'un de la garde cimmérienne, ou d'ailleurs si tel est votre choix, afin de s'en charger. » Elle prit une pause, réfléchissant à ce qu'elle venait de dire. Être sous bonne garde signifiait qu'elle ne pourrait plus se déplacer librement, qu'elle ne pourrait probablement plus se rendre en secret à son laboratoire, et qu'en plus elle abdiquait d'une partie de ce qu'elle avait de plus cher : sa liberté. Prenant alors son courage à deux mains afin de continuer sur un sujet encore plus délicat, Irina hésitait et cela se voyait. C'était une brèche grande ouverte dans son bouclier. De rosies ses joues passèrent à écarlate, alors qu'elle usait d'un euphémisme à l'extrême qu'elle avait en tête sans oser le formuler. « Si jamais... Si... ou plutôt quand... » Elle déglutit, confuse.

« Quand ma grossesse viendra à être rendue publique, j'aurai besoin d'un alibi. Si jamais Elle apprend la vraie nature de l'enfant, alors je serai excommuniée et envoyée à Zaléra. L'enfant lui sera alors confié, et je n'ose imaginer ce qu'il deviendra entre ses mains. » Il serait plutôt ironique que comme sa mentor Alana avant elle, Irina connaisse le même triste sort. Zaléra... la labyrinthe de glace... La prison à ciel ouvert de tous les disgraciés.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 17 Déc - 19:03

Alors que l’allégresse commençait à peine à prendre Veto à la gorge et qu’il luttait contre le petit rire nerveux mais joyeux qui voulait naitre dans le fond de sa gorge ; la réalité les rattrapaient. Lui servir de garde du corps ? Mais il ne pourrait jamais s’acquitter de cette tâche ! Entre ses missions et ses obligations, il lui était impossible de s’acquitter de cette mission. Aucun de ses hommes ne le pouvait non plus. Ce n’était pas à la garde territoriale de s’occuper des prêtresses à moins que celles-ci ne quitte le territoire.

Mais il y avait peut-être un moyen…

Oui, lentement, une idée germait dans son esprit, une idée nécessitant qu’il se sépare de certains de ses hommes et qu’ils décident « d’eux-mêmes » de se faire muter dans le corps prétorial et se placent sous les ordres d’un certains jeune caporal-chef promu récemment. Un homme qui était comme un frère pour Veto. Maintenant, il lui fallait une raison pour se séparer de ses hommes… Et il l’avait. Sa réputation dans la garde territoriale commençait à se faire grande. Son dernier caporal était démissionnaire et ne tarderait pas à quitter l’armée dès que son engagement serait terminé… Veto l’y pousserait et passerait lui-même le concours pour devenir sergent ce qui impliquera la dissolution de son équipe. Le destin faisait que tout concordait, comme toujours dans la vie du militaire. Il lui semblait suivre une grande ligne droite, passant par les cols de chance pour redescendre dans les gouffres de souffrance mais toujours le chemin continuait, inexorablement. Ce qui devait arriver arrivait et il n’était qu’un jouet malmené par monts et par vaux.

Il allait exposer son plan à celle qui serait désormais sa souveraine lorsqu’elle bafouilla. Il prit alors conscience de la gêne qui se lisait sur ses joues. L’inquiétude perlait de désespoir seyait à ce visage comme le diadème à une reine.

Zalera… Ce lieu que même le maire avait décidé de ne plus utiliser au profit d’Umbriel était encore usité par la grande prêtresse ? Le pauvre Havelle commençait à désespérait de ses dirigeants. Il n’y en avait donc pas un pour rattraper la morale de l’autre, même dans l’ombre du premier ?

Sans savoir pourquoi, Veto fut pris d’un élan et il enlaça la demoiselle dans ses bras puissants.


« Dame Dranis, moi vivant, votre enfant restera à vos côtés et grandira heureux dans le domaine que vous lui bâtirait. Je serai votre escorte lorsque vous partirez vous exiler à Arghanat. Vous partirez avant que quoi que ce soit ne se remarque et vous vivrez en paix avec cet enfant miraculeux. »

Il sombra dans le silence, ne relâchant pas son étreinte douce. « Et puis… » murmura-t-il, une sombre option venant le hanter.

« Même si votre grossesse devait être découverte, pourquoi la Grande Prêtresse aurait-elle plus de droit sur cet enfant que son père ? »

Il la libéra et plongea son regard dans le sien. Il eut alors un moment d’hésitation encore, ou plutôt un instant pour chercher ses mots, car la décision était déjà prise pour sa part.

« Je suis prêt à endosser tout ce que vous me demanderez, ma Dame, y compris la colère de la personne la plus respectée de ce pays. »

Le bleu et acier du garde ne fléchit pas et montra toute la détermination qui était la sienne lorsqu’il s’agissait de tenir une promesse.

« J’ai déjà promis de protéger l’avenir de cet enfant comme s’il était le mien. Quant à votre sécurité, laissez-moi quelques jours et un caporal-chef de l’ordre prétorial viendra vous trouver. Je m’en porte garant comme de ma propre personne. »

Une lueur brillait dans la prunelle de ses yeux. Était-ce de la bravoure, ou bien de la déraison ?
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeSam 22 Déc - 21:48

Il n'était pas très compliqué d'imaginer à quel point sa demande pouvait paraître absurde, et surtout difficile à combler. La prêtresse se doutait bien qu'assurer sa protection ne serait pas une chose aisée, mais il ne lui était pas possible de faire autrement. Cette décision avait été prise en toute conscience des sacrifices qu'il lui faudrait faire pour atteindre son but. Un but qui actuellement se résumait assez simplement par la survie. C'était assez déroutant de se sentir de la sorte après tant d'années. En fait Irina se sentait aussi confuse que lorsqu'elle vivait dans la rue et devait faire des pieds et des mains pour s'en sortir. Si le contexte était différent, on ne pouvait pas en dire autant de son état d'esprit.
Sur les traits de Veto elle vit une intense réflexion, signe qu'il n'avait pas écarté complètement les possibilités les plus épineuses. C'était une bonne chose... il avait l'esprit ouvert et était assez ingénieux pour bâtir un nouveau plan de toute pièces. Irina sourit de satisfaction. L'enfant qu'il était lorsqu'elle l'avait soigné devenait un homme, et elle était heureuse de pouvoir assister à ce changement. Elle allait le remercier pour sa promptitude à s'adapter lorsqu'elle fut prise de court par un élan d'affection du caporal-chef. Ne sachant trop ce qu'il fallait faire, perdue entre les clichés de la bienséance et sa maladresse naturelle, elle ferma les yeux et posa les mains contre son torse. Aussi étrange que cela lui paraisse, elle était touchée par ce geste.


« La séparation avec Hellas sera moins dure à vivre si vous m'escortez jusqu'à Arghanat. Par ailleurs ce n'est plus le nom de cet endroit. J'ai le sentiment que des choses terribles s'y sont produites. Je veux donc recommencer en brisant les liens avec ce qui a pu s'y passer auparavant. Désormais c'est le duché de Nivéria. »

Nivéria, ou le mois de la saison froide, particulièrement rude dans leur région nordique. Mais même là, jusque dans le nom de cet endroit, se lisait une certaine nostalgie. Ce n'était pas de gaieté de cœur qu'Irina quitterait sa terre natale, et ce qu'elle avait dit ce n'étaient pas des mots en l'air. Car quand bien même des gens allaient la précéder jusque dans les plaines, ce n'était pas la même chose sans le charme silencieux et blanc de de leur hiver. Aucune ville du monde, -pas même Cimmérium qu'elle imaginait pourtant majestueuse- ne pouvait rivaliser avec la cité de son cœur. Ses yeux mi-clos se firent tristes à l'idée de partir.
Se reculant alors avec une expression pensive, elle regarda Veto droit dans les yeux, jaugeant sa résolution. Il n'y avait pas d'hésitation dans sa voix, et il paraissait sincère et déterminé. Pendant plusieurs secondes elle tenta de lire dans son âme, comme si elle se demandait jusqu'à quel point il pouvait être loyal. Ce n'était pas qu'elle ait des raisons de douter, mais c'était plus fort qu'elle. Ne donner sa confiance à personne avait longtemps été son mode de se défendre, alors il était compliqué de changer ses habitudes après autant de temps. Finalement sur ses lèvres rosées apparut un sourire bienveillant. C'était soulageant de voir qu'il pouvait lire entre les lignes et lui éviter une certaine forme d'humiliation.


« Je suis désormais convaincue que cet enfant vivra dans l'honneur même si je venais à disparaître, et pour cela je ne pourrai jamais assez vous remercier. »
Il ne manquait plus qu'à espérer que Elerinna ne perce pas ses manœuvres à jour et n'élimine pas Veto en même temps que sa plus grande rivale. En y repensant, Irina sentit une autre responsabilité s'ajouter à la liste. Inclure Veto dans ses alliés signifiait en assumer les conséquences, dont protéger ses arrières de toute attaque.

« Mais détrompez vous, je ne veux pas que vous endossiez sa colère. Il y a des affaires que je suis la seule à pouvoir régler, et celle là en fait partie. Je suis une prêtresse avant d'être une femme, et il y a des valeurs que je veux préserver. Sacrifier ceux qui se proposent de m'aider n'en fait pas partie. »

Mêler le jeune homme à cette guerre intestine serait une erreur qu'elle ne commettrait pas. Non seulement parce qu'il n'était pas question de le mettre en danger, mais aussi parce qu'elle ne pensait pas qu'il comprendrait les méthodes qu'elle pouvait employer pour supprimer son adversaire du paysage de l'Ordre. Qu'elle soit obligée de se retirer ou qu'elle meure peu lui importait tant que Kesha pouvait à nouveau porter un regard fier et bienveillant sur ses servantes. Et si par éthique elle préférait que tout soit réglé sans que le sang ne soit versé, sa rancune intérieure elle voyait les choses autrement. Elerinna avait perverti de nombreuses apprenties, sans parler du meurtre déguisé d'Alana. Il y avait mille et unes raisons de lui en vouloir...
Irina était dévorée par ses ténèbres, obnubilée par la vengeance, aveuglée par une violence grandissante. Cependant au milieu de tout cela certaines personnes avaient su l'apaiser, la faire changer de cap pour prendre une direction différente. Simalia et Veto étaient de ces personnes, et leur présence tout comme leur bonté avaient un effet positif sur son self-control.


« Je vous fais confiance pour cela. Lorsque le moment sera venu j'enverrai une missive qui vous arrivera en mains propres, apportée par un corbeau. »

Son expression était désormais plus détendue, plus calme. Ses traits étaient plus proches de l'Irina habituelle, comme si un énorme poids avait été retiré de ses épaules. C'est plus droite et plus digne qu'elle soupira avant de reprendre.

« J'ai planifié de partager le duché avec des gens de Hellas. Des anciens marchands, de paysans et un forgeron ont décidé de me suivre pour s'installer dans une autre terre, plus fertile et accueillante. Pour la plupart ce sont des gens malades ou sans terre qui ne parviennent plus à joindre les deux bouts ici. Avec la saison froide il y a moins de travail, et ils ont l'air ravis de pouvoir travailler pour moi. Je ne sais pas trop si cette vie sera à la hauteur de leurs espérances, mais je l'espère de tout cœur. » Elle leva les yeux vers le soldat, ne sachant pas comment dire les choses. Elle en retourna donc à la simplicité. « Lorsque vos devoirs vous le permettront, et peut être en prétextant vérifier la sécurité des citoyens de la ville...Je... ne voudrais pas abuser de votre gentillesse mais... Viendrez vous me voir en ma terre d'exil ? »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 7 Jan - 23:51

Veto observa les expressions qui passaient sur le visage de la jeune femme. Le soulagement, la tristesse, la surprise, la détermination… Il aurait réellement souhaité avoir cette femme pour mère.
Au lieu de ça, il venait de prêter serment pour l’aider à être celle d’un enfant miraculeux. Malgré ses convictions scientifiques et athées, il était curieux d’en savoir plus de cette histoire mais ne se sentait pas encore assez proche de la prêtresse pour entrer ainsi dans les détails.

Lorsqu’elle fit sa demande avec une gêne dans la voix plus pesante que le silence qui la suivie, Veto resta muet. N’était-ce pas une réelle preuve du fait qu’il comptait déjà pour elle ? Il ne savait pas comment réagir à une telle démonstration d’affection. Il n’y était pas habitué, pas préparé.
Avec un raclement de gorge, il attrapa sa chemise et l’enfila, cherchant toujours ses mots.


« Je… Je suis touché par cette demande. Bien évidement. Je… Je suis à vos ordres désormais. J’ai prêté serment d’allégeance à votre cause, votre enfant et vous-même. Il n’y a rien que vous ne puissiez me demander. »

Il avait fini de reboutonner sa chemise et s’assit dans le canapé, les mains entre les genoux. Sur la table, des gâteaux au miel étaient encore éparses, renversés par sa chute de tout à l’heure. Il les contempla un instant et reprit sur un ton moins gêné et plus enjoué.

« S’il y a bien quelqu’un capable de chasser les ombres qui planaient sur ce lieu, c’est vous, Ma Dame. Vous avez d’ailleurs déjà commencé. Nivéria est la période de l’année que je préfère, avec son manteau immaculé qui rend notre pays si beau et si pure… Vous créerez un paradis pour ces pauvres hères… »

Ses yeux se perdirent par la fenêtre où le ciel gris ne saupoudrait pas de flocon pour une fois. Le soleil perçait même en certains endroits la masse nuageuse. C’était magnifique.

« Mais vous semblez si triste… »

Sa voix était basse, comme s’il hésitait à dire ce qui sortait de ses lèvres.

« Vous aimez tellement cette ville… Si seulement c’était possible de vous éviter de partir… J’aimerais tellement faire plus… »

Ses yeux s’étaient posé sur ses genoux où ses points se serraient, impuissants.

« Et vous semblez si esseulée… » Alors ses yeux harponnèrent ceux de la future mère. « Vous avez dis « ceux qui se proposent de m’aider », je ne suis donc pas le seul ! Vous n’êtes donc pas seule ! »

Tout son corps se pencha vers elle alors qu’il prenait appuis à côté de lui sur le canapé, un regard implorant accroché à ses yeux, brillant d’une flamme presque démente : passionnée.

« Que pouvons-nous faire ? Que puis-je faire de plus ? Je puis forcément me rendre plus utile qu’en servant de simple escorte et recruteur de gardes du corps ! Quels sont vos projets pour moi ! Dites-moi, que je m’exécute ! »

Une sorte de frénésie s’était emparé de son esprit. Il ne pensait plus que par elle. Il attendait depuis si longtemps quelqu’un à qui se dévouer et qui lui rende en retour de vraies marques d’affections. Les quelques contacts physiques qu’ils avaient échangés jusqu’ici lui semblaient si généreux ! Il voulait en mériter d’avantage ! Il n’aurait de cesse que de la satisfaire, de lui faire honneur, de la rendre fière de lui.

Sans s’en rendre compte, il s’était relevé et avait à nouveau pris les mains de la jeune femme dans les siennes et avait placé son visage tellement près du sien que ses joues ne tardèrent pas à s’empourprer alors qu’il la lâchait et reculait en se raclant la gorge, n’osant plus lever les yeux de la table basse.


« V… Veuillez excuser cet emportement. C'était... C'était tout à fait déplacé. »

Il n’avait pas cherché à l’embrasser, loin de là ; plutôt à entrer dans sa tête chercher les réponses qu’elle tardait à lui donner et qui lui auraient permis de la rendre heureuse.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 14 Jan - 18:44

Rien qu'elle ne puisse lui demander... Quelle naïveté. En fait si, malgré sa bonne volonté et son esprit chevaleresque, il y avait bien des dizaines et des dizaines de choses qu'elle ne pouvait lui demander car elles étaient moralement condamnables. Au départ lorsqu'elle avait connu Veto, un soldat manipulé sobrement par lord Lorindiar, elle avait pensé que lui damer le pion serait une initiative intéressante dans leur quête mutuelle de concurrence et de compétition. Ça tout comme le fait de s'être alliée au Grand Maître sylphide c'étaient des moyen de lui prouver que même lui n'était pas à l'abri de l'échec. Il pouvait perdre face à meilleur joueur si celui-ci était fin stratège. Mais les choses avaient changé radicalement au fur et à mesure qu'elle avait appris à connaître le caporal chef. Il faisait -tout comme Alix et Simalia- partie de ces gens qu'il fallait épargner, il était de ceux destinés à bâtir le nouveau monde auquel elle aspirait.

D'un autre côté, bien moins idéaliste et plus égoïste, Veto était capable de faire quelque chose que personne jusque là ne pouvait : la rendre meilleure. Car malgré la disparition définitive d'Exanimis, Irina ne se leurrait pas. Les ténèbres qui étaient déjà bien ancrées en son âme avant qu'il ne la prenne momentanément pour hôte étaient désormais partie intégrante de ce qu'elle était, causant un équilibre mental plus que précaire. Depuis cet épisode ses assauts de rage étaient encore plus fréquents, et sa folie meurtrière, ses pulsions macabres se manifestaient d'autant plus intensément. Les cadavres dans son laboratoire avaient fini par s'amonceler en horribles tas tellement elle avait eu besoin de laisser libre cours à ce qui la dévorait. De cela elle n'était pas fière, non parce qu'elle le regrette, mais parce qu'elle n'était pas capable de garder l'entier contrôle sur ce qui se passait. Veto semblait être la solution, même si elle ne comprenait pas encore comment.

Le regardant boutonner sa chemise tout en parlant avec plus d'espoir en elle qu'elle n'en serait jamais capable dans cette vie et dans l'autre réunies, Irina haussa les épaules avec modestie. Nivéria n'était pas sensé être un paradis, notamment parce qu'elle savait que ce serait impossible.


« Plutôt qu'un paradis j'espère qu'il représentera au moins un nouveau départ pour ces gens. Tout ce dont ils rêvent c'est d'une nouvelle chance, et la liberté de vivre comme ils l'entendent. »

La liberté... à bien y penser, c'était aussi ce qu'elle recherchait. La liberté de vivre sans avoir peur d'être suivie, sans avoir l'impression de se noyer dans une manie de la persécution qui bien souvent s'avérait réelle. Irina ne voulait plus avoir à s'inquiéter, ou du moins pas pour les raisons actuelles. Et puis en cela peut être que prendre congé des affaires de l'Ordre pendant quelques mois lui donnerait l'occasion de respirer. C'était du moins ce dont elle essayait de se convaincre, étant donné que la médecine était son oxygène. Elle soupira.

« Vous faites déjà bien plus que vous ne le pensez. Cette ville, aussi crasseuse et fourmillante qu'elle soit fait partie de moi. C'est pour ces petites ruelles que je l'aime, pour ses enfants des rues et son marché, pour sa neige et le calme de sa solitude. Mais cette chère ville m'attendra et s'en sortira très bien sans moi. »

Se tenant au dossier d'un fauteuil, Irina semblait plus calme. Il y avait bien de la mélancolie dans ses yeux, mais pas de tristesse. La jeune femme était résignée et avait accepté son sort. Ce n'était pas son genre de se plaindre et de geindre quoi qu'elle puisse ressentir de toute façon. Autour de son cœur se trouvait une épaisse couche de glace, ce qui la rendait forte mais aussi terriblement fragile même si cela ne se voyait pas. Le fait que Veto soit comme un feu brûlant lui avait simplement permis de voir au delà des apparences qu'elle maintenait avec tant de ferveur... Elle finit par s'asseoir pour continuer la conversation. Lorsqu'il se pencha vers elle, la demoiselle ne se déroba pas, mais se demanda la raison de ce geste. Elle n'y comprenait rien au langage corporel hormis dans le contexte médical.
Tout d'un coup Irina se retrouva debout, dans un équilibre précaire, non loin d'une table sans dessous dessous et une myriade de mets à terre. Mais ce n'était pas ce qui avait son attention, ses yeux ne quittant pas le visage masculin. Les joues empourprées, sûrement le reflet de sa propre apparence, les yeux brillants et pleins d'espoir et d'attente. Une attente qu'elle voulait étrangement combler sans trop savoir comment s'y prendre. L'impression de profiter de lui ne la quittait pas, et contrairement à ce qu'on pourrait penser, elle n'aimait pas ça.

L'espace d'un instant elle ferma les yeux, leurs fronts se touchant sans qu'il n'y ait d'autre contact. Ce n'était pas de la timidité feinte, et elle n'attendait pas non plus à ce qu'il l'embrasse car elle n'imaginait pas qu'il le veuille une seule seconde. Simplement elle pesait et réfléchissait aux mots qu'il avait employés. Quels étaient ses projets pour lui ? Ce serait mentir que de dire qu'elle n'en avait pas, mais il n'était sûrement pas prêt à les entendre à ce stade. Par conséquent elle ne répondit pas, mais tenta de l'apaiser dans ses angoisses. Ouvrant les yeux, elle sourit sincèrement.


« Cessez de vous excuser. Vous savez j'ai une règle très simple qui me permet de m'imposer des limites... Je n'exige jamais de quelqu'un d'autre ce que je ne suis pas prête à faire moi-même, ce que je ne suis pas capable d'être ou de faire de mes propres mains. Je ne vous demande absolument pas d'être parfait, alors ne vous mettez pas tant de pression, Veto. »

Se retrouvant un peu bête alors qu'il reculait tout d'un coup, elle essaya de l'empêcher de se dégager, puis avait finalement laissé retomber ses bras ballants, impuissante. Parfois exprimer ce qu'elle ressentait devenait très compliqué, tels étaient les murs qu'elle avait dressés pour se protéger. En comparaison parler de manière rationnelle et dire ce qu'elle pensait était simple... Tentant de trouver un compromis dans sa tête, elle finit par inspirer profondément, puis dire doucement.

« Je vous dirai ce que vous voulez savoir. Mais avant s'il vous plaît répondez moi honnêtement. Qu'attendez vous vraiment de moi ? »

N'était-elle rien d'autre qu'un guide spirituel pour lui ? Une mère de remplacement ?
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 28 Jan - 9:12

Quelles autres personnes avait-elle bien pu regrouper autour d’elle ? Les raisons de leur rassemblement étaient-elles différentes des siennes ? L’avaient-elles été en raison de leurs compétences ? De leurs sens moral ? Pourquoi l’avait-il été lui-même ? Il n’était pas le meilleur militaire qui existe… D’autres étaient plus gradés et non sans raison.
Mais s’il en avait été autrement, le garde se serait-il autorisé à penser autre chose ? Non. Il était trop humble pour cela. Il se voulait fort, il faisait tout pour devenir sans cesse meilleur et se comporter de la manière la plus juste qui soit à ses yeux ; mais en aucun cas, il se serait permis de se penser supérieur à quiconque.

Il sourit d’ailleurs, timidement, lorsqu’elle annonça à nouveau qu’elle n’exigerait jamais mieux de sa part qu’elle n’eut pu faire elle-même. Pouvait-il seulement l’égaler dans quelque chose ? Le combat peut-être… Une prêtresse n’est pas censée être une farouche guerrière. Mais était-il lui-même digne de servir sa cause ? Il refusait de le croire, ou plutôt, n’arrivait pas à le faire.

Veto en était arrivé là. Après la joie d’être choisi pour servir la seconde prêtresse de l’ordre venait la peur de la décevoir. Même s’il savait qu’il ferait tout pour y arriver, il perdit le peu de confiance en lui qu’il avait alors qu’il appréhendait l’envergure des projets de la prêtresse.

Une question persista hors de son esprit cependant. Pour lui, cela semblait normal d’ainsi se sacrifier, se mettre à genou devant cette femme. Pourtant, il ne la connaissait pas vraiment, ne l’avait qu’entrevue et n’avait rien demandé de ce qu’elle attendait de lui. On aurait pu être en droit de se poser la question « pourquoi ? ».
La réponse n’était en fait pas exceptionnelle. De deux choses, l’une était que cette femme était une membre éminente de l’ordre qu’il admirait, qui l’avait sauvé et qui était le plus estimé dans toute la cité ; l’autre était que ses rêves -ceux montrant des tableaux annonçant des futurs métaphoriques- avait offert à son esprit la représentation d’une femme rousse. Et une force invisible lui affirmait qu’il ne pouvait s’agir que d’elle. Ces rêves étaient un pouvoir magique qu’il ne maîtrisait que peu mais il avait l’intime conviction qu’ils lui révélaient des bribes de son futur. Le fait n’était pas qu’il pouvait simplement rejoindre cette femme pour n’importe quelle raison qui aurait pu sembler plus ou moins logique ; le fait était qu’il devait le faire. Il devait la faire entrer de façon majeure dans sa vie comme les rêves le sous-entendaient.
Cet état de fait, le garde n’y avait à aucun moment réfléchi mais savait que cette union était inéluctable.

Mais malgré cette obéissance aveugle et inconsciente à un instinct étrange, pouvait-il avoir une raison de la suivre, un idéal ? Bien sûr que oui. Veto était un idéaliste et avait une aversion de l’injustice.

Depuis un instant perdu dans ses pensées, le regard dans le vide, il osa enfin à nouveau la regarder dans les yeux et son visage sembla métamorphoser. Une expression de maturité avait ressurgi ; comme si ses réactions enfantines et ses sentiments déséquilibrés n’avaient aucune importance ; comme si cette apparence n’empêchait en rien le développement d’une conscience adulte et dur comme la pierre.


« J’espère de vous que vous redonniez à ce pays une dirigeante digne de ce nom, qui balaiera tout ce passé de manipulation et de corruption. Je veux que les prêtresses dirigent Hellas comme une mère guide ses enfants. Je veux que ce maire indigne des enfants des glaces disparaisse et que soit destituée cette pieuvre aux tentacules immondes du poste de Grande Prêtresse. Je veux que vous preniez sa place et qu’enfin je sois fier de ce pays sans plus rougir de notre gouvernement. J’espère qu’avec vous au poste de grande prêtresse, l’ordre enfin officialisé gouvernement de ce pays qui lui est entièrement dévoué, vous rétablissiez une politique juste pour chacun. »

Il continua de la fixer après cette déclaration des plus solennelles. On aurait pu douter, en le voyant réagir de manière si spontanée et irréfléchie -en apparence- depuis toujours, de son intellect ou du fait qu’il ait un réel opinion politique ou même un avis sur la société. Mais voilà, il avait été élevé par l’un des sylphides les plus objectifs qui soient, attaché à la droiture et la justice, prônant l’égalité des droits entre chaque êtres vivants, stupides ou évolués, civilisé ou non. De plus, ces années passées en tant que garde au service de ce pays l’avaient amené à constater de telles situation insupportable, qu’il ne pouvait pas rester de marbre et sans avis tranché sur ce pays qu’il aimait.

Sa main se porta, poing serré, sur son cœur sans que ses yeux ne cillent un instant.


« C’est avec le plus grand honneur que je souhaite vous voir faire de ce pays un pays juste et libre de toute souillure. Le peuple aime les prêtresses et plus d’un doute de son maire. Soyez celle qui leur redonnera espoir et raison. »

Ses yeux brillaient presque alors que son visage restait grave et impassible. Après un instant, il ne tarda pas à se sentir ridicule et laissa retomber son bras. Elle s’était amusée de le voir se prosterner. Que pensait-elle maintenant qu’elle les voyait, son salut militaire et lui.

Il soupira tristement et ses yeux passèrent sur les flammes de la cheminée. L’image d’un brasero dans une cave obscure lui revint à l’esprit, ramenant avec elle le bruit des chaînes, le gout du sang et de l’urine, les picotements dans son dos laissés par le fouet, les échos sourd dans son corps lorsque les matraques le frappaient…

Son regard redevint dur. Fixant les braises dans l’âtre, il reprit sur un ton plus sombre, plus empreint de ressentiments.


« Notre gouvernement est malsain et dangereux pour notre peuple. »

Son regard revint sur elle et flamboyait désormais d’une colère nouvelle.

« Il se cache derrière des faux-semblants et fomente dans l’ombre des atrocités. Ils usent de nous comme de pion que l’on peut sacrifier sans remord. Ils ne pensent qu’au pouvoir et aux machinations pendant que dans nos rues, des gens meurent de faim et de froid. Les riches s’enrichissent et les pauvres s’appauvrissent ou périssent. Il est temps que cela cesse et que ces fous disparaissent, que quelqu’un rétablisse la justice. »

Ce n’était pas de cette rage qui vous ronge avec pour but la vengeance, c’était la haine du patriote qui veut voir son pays libéré du joug de la trahison et de l’opprobre.

« Cela fait trop longtemps que je refuse d’entendre les allégations que je croyais médisantes mais toujours plus nombreuses. Je vous crois lorsque vous dites la grande prêtresse malfaisante. Et je sais le maire insensé. Vous êtes la lumière que j’espérais voir un jour. S’ils aiment tant les jeux d’ombres, renvoyons-les loin dans les ténèbres. »

Sans qu’il ne s’en rende compte, ses poings s’étaient serrés le long de son corps, blanchissant ses jointures. Sa tête s’était même légèrement baissée, accentuant le froncement de ses sourcils dans le champ de vision de la prêtresse. En l’espace d’une seconde, il avait semblé grandir et laisser s’échapper une aura dangereuse de son corps.
Et c’était presque le cas.
De minuscules paillettes couleur jade et aigue marine s’étaient mises à briller dans ses iris. Il n’avait aucune idée de l’existence de ce phénomène ni même de ce qu’il annonçait. En réalité, c’était le signe qu’il était sur le point de perdre le contrôle de son essence divine et déjà l’air s’était rafraichie dans la pièce, malgré le feu et l’absence de courant d’air.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeSam 9 Fév - 0:16

[Désolé, c'est pas terrible]

Irina était une femme complexe à bien des égards, mais en ce qui concernait la cause qu'elle défendait, les choses étaient plutôt simples. Cela faisait des années qu'elle menait en secret une bataille intestine contre tous ceux qui dénaturaient son ordre de son chemin premier, et ce quelles qu'en soient les conséquences. Pour cela la jeune femme avait lentement cimenté un ensemble d'alliances, ouvrant les yeux de ses consœurs et protégeant les nouvelles arrivées afin de s'assurer qu'elles ne se perdent pas à leur tour. Petit à petit le nombre de ses partisans avait augmenté, qu'ils soient parmi les gens du temple ou en dehors. Alors pourquoi avoir choisi Veto pour se livrer à titre personnel, surtout étant donnés ses lourds secrets ? C'était une bonne question, mais aussi une interrogation sur laquelle elle ne tenait pas à se pencher à l'heure actuelle, pour plusieurs raisons.

Écoutant attentivement les explications de Veto, elle fut surprise de l'entendre parler avec tant d'assurance et tant de conviction. Rassurée, elle sourit malgré elle. En fait ce qu'il disait était plein de sens, même si ce n'était pas particulièrement ce à quoi elle s'était attendue. Incapable de trouver quoi lui répondre dans un premier temps, Irina ne se pressa pas. Elle n'avait jamais douté des capacités intellectuelles du soldat, quand bien même elle ait longtemps pensé qu'il avait besoin de quelqu'un pour le prendre sous sa coupe. Cela était probablement du au comportement toujours énigmatique et calculateur d'Ision Lorindiar, qui trouvait toujours un intérêt personnel jusque dans les gestes les plus anodins en apparence.


« Je souhaite tout comme vous, voir ce pays retrouver sa gloire originelle, et un dirigeant juste et digne de ce rang. » Sur ce point là ils étaient d'accord, sans aucun doute. Mais pour ce qui était du reste les choses se corsaient. Contrairement à Veto, la jeune femme était très loin de penser qu'elle était la personne adéquate pour remplacer Elerinna. Bien sûr pour l'instant c'était une étape obligatoire, puisque personne d'autre ne semblait avoir le courage de la défier, ou la force de se battre quitte à se salir les mains. Irina serait cet instrument macabre, ouvrant la voie pour un nouvel avenir. Toutefois il n'était en aucun cas question qu'elle garde ce poste. Si la sindarine était pourrie jusqu'à la moelle, on ne pouvait pas dire que son cas soit très différent. Il s'agissait juste de souillures différentes, mais cela n'empêchait pas les faits : Irina n'était pas digne de la pureté qu'on exigeait de la position de Haute Prêtresse.

« Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que la justice soit rétablie, tel que je l'ai toujours fait dans la mesure de mes moyens, c'est une promesse. » Les yeux se portant sur son interlocuteur, la serpentine était très sérieuse. Elle pensait chaque mot, mais elle se demandait jusqu'à quel point elle pouvait vraiment dire toute la vérité à Veto. « Tout ce que je souhaite, c'est qu'elle soit déchue, et que quelqu'un d'autre prenne les rênes de manière équitable. Je serai cette personne si cela s'avère nécessaire, mais je ne rêve que de trouver quelqu'un de mieux que moi afin de la hisser à cette place. C'est pour cela que je protège Alix, mon apprentie, comme si elle était mon enfant. Je crois que j'espère secrètement qu'elle pourra rester assez pure tout en ayant les yeux ouverts sur la vérité. J'espère qu'elle vivra assez longtemps pour témoigner et survivre à toute cette guerre ridicule... Et surtout qu'elle apprendra de nos erreurs. »

Prête à continuer sur la lancée de ce qu'elle disait, la flamboyante s'arrêta net en voyant l'aura étrange qui émanait de son invité. Se levant alors naturellement, une impression de déjà-vu la prenant aux tripes, elle s'approcha de lui, lentement. Pas à pas, elle remarqua à quel point il semblait soudainement absent, et un sentiment d'inquiétude tenace l'assaillit. Posant une main sur sa joue, elle regarda dans ses yeux, sans pourtant avoir peur de ce qu'elle pouvait y trouver. La peur n'existait pas en elle, peu importe le danger. Mais peut être cette dernière s'était-elle simplement mue en témérité chez elle depuis toujours.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeJeu 21 Fév - 16:15

Les paroles de la prêtresses pénétraient l’esprit du garde et s’imprégnait au fin fond de son cerveau, mais il ne pouvait y réagir. Une sorte de transe l’avait pris, alors qu’il perdait le contrôle de lui-même, de ses émotions, et malheureusement, de ses pouvoirs.
Des images passaient doucement à l’arrière de ses yeux vides, rivés en direction du foyer enflammé. Des souvenirs lui revenaient : ceux de son incarcération et des séances de tortures, les confidences du major Millenia et l’infiltration dans le duché d’Arghanat, des scènes mises en peinture semblant sortir de l’un de ses rêves certainement déjà vécu et retenues seulement dans son inconscient.
Toutes ces réminiscences se brouillaient et saturaient son esprit.

Les tisonniers de ses bourreaux passés fendent l’air dans les combats silencieux des alcôves secrètes du duc ; entre deux seaux d’eau bouillantes apparaît l’illustration d’un homme nu, le corps en partie tapissé d’une étrange texture sombre, allongé dans un champ de fleurs blanches ; le visage d’Irina se superpose à celui de la prêtresse encapuchonnée d’une peinture et puis à celui de son major, avant de prendre les traits de l’inquisiteur dans le cachot ; le duché apparaît tantôt radieux, tantôt digne d’être hanté, ses jardins fleurissent, puis meurent ; un enfant apparaît au creux des racines d’un grand arbre dont le feuillage s’inscrit dans trois quartiers de ciel et s’adaptent immédiatement à eux alors qu’ils défilent comme les rayons de la roue d’un chariot dévalant une pente… Il croit deviner Niveria, Riguéar et Langdum, les trois seules vraies saisons en Cimméria.

À l’extérieur de cet esprit hors de contrôle, il y avait un corps figé, et face à lui, un autre qui s’approchait, animé d’une curiosité malsaine ou d’un courage presque trop similaire à la folie.
Irina ne semblait pas remarquer ce qui se passait à leurs pieds ; ou plus particulièrement, aux pieds de son obligé. La poussière et les jointures pulvérisées entre les dalles du sol s’étaient amassées autour de lui et formaient un cercle étrange. Par sursaut, elles s’animaient, la petite trainée se dressant et s’affaissant en une fraction de secondes comme de petits bras fins décharnés. Ils retombaient ensuite au sol, dessinant doucement un étrange triskèle entre les pieds du garçon.

Et doucement, l’air se rafraichissait encore ; trop au regard du foyer flamboyant non loin.

Mais elle le toucha. Alors, un étrange crépitement se fit entre eux. À l’endroit du contact, la douleur d’une brûlure glaciale se fit ressentir mais seul une fine pellicule de givre resta, la blessure s’étant immédiatement résorbée au-dessous : un soin magique minime mais réalisé avec une efficacité et une rapidité surprenante, surtout pour Veto qui commençait tout juste à maîtriser et développer ses pouvoirs jusqu’à maintenant.

Le regard de Veto se vida encore un peu et ses yeux commencèrent à se révulser alors qu’il s’effondrait.
Cette fois, ce phénomène ne dura qu’une seconde et il revint à lui. Mais déstabilisé par ses jambes molles, il perdit l’équilibre et tenta de se retenir à ce qu’il put. Sa main attrapa celle de la prêtresse et il se laissa tomber sur le canapé.

Le jeune homme haletait, soufflant avec force des panaches de buée. Sa main tremblait, crispée autour de celle qu’il avait agrippée au vol. Elle était glacée mais il ne s’en rendait pas compte.
Les images qu’il avait vues se démêlaient lentement et ses yeux ne quittaient pas le signe tracé au sol. En ressortait de la colère, des questionnements, de la peur… La peur de devoir un jour revivre les tourments du passé ; la colère d’avoir subi ces injustices sans jamais pouvoir contrer le destin funeste qu’était le sien ; les questions suscitées par des images qu’il ne comprenait pas et un dessin au sol, vraisemblablement tracé par lui ou son inconscient, et qu’il n’avait pas souvenir d’avoir vu un jour… La réponse se trouvait-elle encore dans les tableaux de ses rêves ? Que signifiait ce symbole ? Quelque chose lui soufflait qu’il fût l’emblème de quelque chose. Quelque chose d’ancestrale.

Incapable de faire naître la moindre réflexion vis-à-vis de cette vision, son esprit se contenta de ressortir une réponse formée plus tôt dans ses songes.


« Je… Je vous fais confiance… »

Ses yeux ne voulaient pas quitter le sol, ni son visage cette expression incrédule. Après un instant, il fronça les sourcils et prit un air plus concentré, sans jamais quitter cette marque des yeux.
Sa main se desserra et il se la passa sur le visage, prenant soudain conscience de sa température : tout son corps entier était froid. Mais il s’en fichait. Il se sentait même plutôt bien ainsi.


« Vous… Je ferai comme vous voudrez… Je vous laisse juge de ce qui serait le mieux pour notre pays. Et vous avez mon entier consentement. »

Elle ne lui ôterait pas de l’idée qu’elle semblait la plus apte à faire de ce pays un pays libre, juste et grand. Mais Kesha tout puissante ! À quoi correspondait ce triskèle !
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeJeu 28 Fév - 6:36

Que la vérité soit dite en toute simplicité : Irina ne comprenait absolument pas ce qui se passait, et encore moins pourquoi tout d’un coup Veto semblait avoir perdu le contrôle de lui-même. Si ce phénomène n’avait rien d’habituel ou de compréhensible, il n’était pourtant pas bien compliqué de réaliser que quelque chose ne tournait pas rond. C’était pourquoi elle avait pris le risque de s’approcher de lui, quitte à subir une réaction qui elle aussi serait anormale.

Le regard du soldat était hanté et vide, comme confronté à quelque chose de trop terrifiant son esprit essayait de se faufiler hors de son corps. Il y avait sur son visage une expression qu’elle ne lui avait jamais vue, alors que pourtant elle avait déjà pu voir ce que cela donnait sous la douleur. Mais ceci, quoi que ce puisse bien être, c’était bien au-delà de ça. Posant une main sur le bras du jeune homme, elle marcha sur un des gâteaux qui avait volé plus tôt et posa les yeux sur le sol. Ce qu’elle y vit lui fit froncer les sourcils, car cette poussière en suspens ne lui disait rien qui vaille. Était-il en train de se protéger d’une façon involontaire ? Quel danger pensait-il percevoir ?

Prise d’un frisson, la demoiselle n’osait pas quitter son invité des yeux de peur des conséquences. Instable comme il était, il valait mieux ne pas baisser sa garde, car d’une manière ou d’une autre, cela pourrait lui être fatal. Sa main trembla au contact du corps de Veto, comme si une tension presque physique s’était soudainement installée entre eux. Inquiète d’être incapable de pouvoir intervenir efficacement pour l’arrêter, la prêtresse essaya de le lui parler pour le ramener à lui. Il y avait bien sûr une panoplie d’autres méthodes moins douces, mais commencer par le plus léger lui semblait logique. Et puis quitte à y être, autant être sûre que ce n’était pas par peur qu’il agissait ainsi. Son toucher se fit bienveillant, et elle chassa ses craintes grâce à ses pouvoirs.


«Veto… Veto regardez-moi. Tout va bien, nous ne craignons rien ici. Nous sommes chez moi. »

Rassurer quelqu’un en dehors des annonces médicales n’était vraiment pas son fort, car elle n’avait que peu d’expérience en relations humaines. C’était paradoxal pour quelqu’un qui œuvrait autant en médecine et finalement en social, mais ce n’en était pas moins réel. D’un autre côté la rouquine n’avait pas reculé même sous cette menace implicite que l’on pouvait aisément ressentir dans l’aura du soldat des glaces. Elle n’était simplement pas femme à reculer même face au danger. Surtout face au danger en fait.
Elle-même maintenue par un équilibre précaire, Irina avait toutes les peines du monde à soutenir le caporal-chef. Entourant sa taille de son bras elle avait cherché à éviter qu’il ne tombe en se faisant mal, mais échoua lamentablement. Le poids de l’homme étant trop important pour sa toute petite stature et surtout étant donnée son actuel manque de forces, elle fut rapidement entrainée par lui lorsqu’il s’accrocha par réflexe à sa main. Le résultat en fut une position assez embarrassante, qui l’aurait probablement faite rire si elle n’était pas aussi préoccupée par ces drôles de circonstances.

Évitant de justesse de tomber assise sur les genoux du jeune homme, une situation qui les aurait tous les deux laissés dans la gêne la plus profonde, la serpentine s’était retrouvée à genoux au sol, contre les jambes de son protégé. Certes ce n’était guère mieux, mais au moins elle ne lui imposait pas une proximité dont il ne voudrait pas. Levant les yeux elle vit qu’il semblait être redevenu lui-même, bien qu’elle ne s’explique toujours pas le pourquoi du comment. Une main posée sur les jambes masculines et une autre toujours prisonnière des siennes, la demoiselle ne se rendit pas tout de suite compte de l’image qu’elle devait donner. Il avait semblé perdre conscience de ce qui se passait, et maintenant qu’il reprenait ses esprits la voilà à moitié vautrée sur lui… Que penserait-il ?

Rougissant jusqu’aux cheveux -c’était le cas de le dire- Irina ne se formalisa pas de la température glaciale de son corps, qui tranchait avec une chaleur éruptive de son côté. Trop distraite à regarder tantôt le visage de Veto, tantôt le drôle de symbole tracé sur le sol, elle ne lui avait fait aucun reproche, mais tentait vainement de saisir la signification de la triskèle.


« Je… Je vous fais confiance… »

C’était sans nul doute vrai. ‘Peut être ne devriez-vous pas.’, pensa-t-elle, mais les mots ne dépassèrent pas sa bouche. Il était dangereux de faire confiance à quelqu’un comme elle, à quelqu’un qui n’était pas plus compréhensible que ce qui venait de se passer. À quelqu’un qui pourrait le blesser et le détourner de sa route sans même qu’il ne s’en rende compte. Il semblerait qu’ils soient tous les deux abasourdis par ce qui venait de se passer, et bien que ce soit pour des raisons différentes, ils étaient tous deux restés immobiles.
Assise sur ses talons, la prêtresse était confortable, au-delà des apparences. La présence de Veto ne la dérangeait pas comme c’était le cas pour la plupart des gens. Petut-être avait-elle simplement accepté ce fait comme quelque chose de naturel. Ne bougeant donc pas à moins qu’il n’en manifeste le besoin, elle relâcha sa main et l’observa discrètement. Il avait repris la discussion là où il l’avait interrompue, ce qui pour elle était somme toute déroutant. C’était comme ce qui s’était passé n’avait été que le fruit de son imagination. Pourtant la triskèle ne laissait pas l’ombre d’un doute. Ignorant donc cette dévotion qu’il lui témoignait parce que c’était le moins compliqué à gérer, Irina tenta de sourire.


« Comment vous sentez vous ? Vous êtes glacé… Réchauffez-vous donc près du feu. Et puis… si vous me racontiez ce qui vous a mis dans un tel état, hum ? »

D’une certaine façon elle le maternait un peu, mais d’un autre elle ne se forçait pas le moins du monde. Son inquiétude était sincère et sa curiosité l’était d’autant plus après cette manifestation de pouvoir inexpliquée. Cependant il y avait beaucoup de choses qu’elle gardait pour elle, car elle avait peur d’effrayer Veto. Soupirant à en fendre l’âme, la jeune femme posa une main sur l’appui coude du canapé afin de se lever, ne sachant pas trop si rester là était dérangeant ou non.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMer 20 Mar - 1:31

Il sentait que la pièce s’était passablement refroidit ; il sentait à l’endroit où Irina l’avait touché cette sensation particulière inhérente à un de ses sorts de soin ; il savait que tout ce qu’il avait vu n’était pas issu de ses souvenirs et que son pouvoir de rêve éthéré avait sans doute agrémenté ses pensées de visions avant que le sommeil ne manque de le prendre ; et par-dessus tout il voyait bien cette marque de terre et de poussière dessinée au sol.

Comment ce faisait-il que tous ses pouvoirs s’étaient réveillés en même temps ? C’était physiologiquement impossible !
* À moins qu’ils n’aient fait que s’activer les uns à la suite des autres, successivement… *
C’était étrange une telle capacité à changer ainsi de pouvoir, surtout pour lui dont la maîtrise de la magie était très récente et superficielle. Pourtant ça semblait l’explication la plus probable.

Mais encore et toujours, la voix d’Irina le ramena à la réalité. Il se rendit compte que la main de la prêtresse dans la sienne lui paraissait bouillante en comparaison de la sienne. Cependant, lui se sentait bien dans cette ambiance glacée. Mais il fallait savoir qu’il en avait toujours été ainsi. Les instructeurs en magie avaient expliqué cette remarquable tolérance au froid comme étant une sorte d’expression passive du contrôle qu’il avait sur la glace.

Mais personne ne pouvait se douter encore que ce réel bien être face au froid provenait d’une spécificité bien plus fondamentale.


« Oui… Pourquoi pas… »

Il détacha enfin son regard du triskèle et se leva, aidant la prêtresse à l’imiter en la supportant de la main qu’elle lui donnait et de celle qu’il posa sous son autre bras.
Alors il la lâcha mais se dirigea plutôt vers le fauteuil que vers la cheminée. Se saisissant du dossier, il lui montra un large sourire et ajouta avant de le déplacer
« mais vous m’accompagnerez bien, n’est-ce pas ? ».

S’inclinant et tendant un bras pour présenter le siège désormais près du feu, il attendit qu’elle s’y installe et s’approcha enfin lui-même des braises flamboyantes. À moins d’un mètre du foyer, il posa son avant-bras sur le haut de l’âtre et déjà son front s’était plissé dans une expression d’intense réflexion.

Après une seconde, il jeta un nouveau regard au triskèle derrière lui et se tourna vers elle.


« Avez-vous déjà vu ce symbole ? » Nouveau regard pour la figure au sol. « J’ai l’impression de le connaître… Mais je ne suis même pas sûr de l’avoir déjà vu un jour ! C’est très étrange comme sensation. Et j’ai la certitude qu’il est très ancien… »

Son regard se perdit à nouveau un moment vers le tracé et puis il secoua la tête avec un léger sourire. D’un air amusé, il tendit une main comme pour réfréner la prêtresse dans ses réflexions.

« Désolé ! Cette histoire est démente et n’a aucun sens… Je… Je suppose que mon esprit embrumé aura pris le contrôle de mon pouvoir et aura dessiné ce symbole vu sans y prendre garde dans un livre. J’ai eu bon nombre de nuits plutôt courtes ces temps-ci et je… Je suis fatigué. »

Alors qu’il terminait sur un air un peu plus désabusé qu’au début, un sourire toujours aux lèvres cependant, il avait porté une main à son torse pour le frotter doucement, cherchant à se débarrasser d’une légère démangeaison subite. Depuis quelques jours, une irritation apparaissait de temps à autre au-dessus de son plexus solaire. Est-ce que ça avait un rapport avec le squat dont il avait participé à l’évacuation la semaine dernière ? Une jeune femme semblant bien malade l’avait agrippé au col et légèrement effleuré sa peau…

Doucement, les vagues de chaleur projetées par les flammes assaillaient son visage baissé vers elles. L’aura froide et nébuleuse qui flottait autour de lui était lentement déchiqueté et déjà les langues brûlantes léchaient ses pommettes. Le cimmérien ferma les yeux et se laissa masquer par cette sensation presque aussi apaisante qu’une immersion du visage dans une bassine d’eau fraiche.
Il était réticent à la chaleur mais il devait bien reconnaître qu’un bon feu de cheminée était rassérénant et réconfortant.

Ses yeux finirent par se rouvrirent et il expliqua ce qui lui était passé par la tête :


« Tout à l’heure, avant cette crise, je repensais à tout ce que j’avais vu à force de malchance ; ou de chance peut-être… À l’envers du décor de Hellas, les coulisses de son gouvernement… Je suppose que c’est ce qui m’a particulièrement énervé. Je n’ai jamais supporté l’injustice mais depuis quelques temps, on peut dire que j’ai atteint un point de non-retour. J’ai définitivement perdu espoir en notre gouvernement. La tentative du maire d’essayer de se procurer des esclaves… les infiltrés de la grande prêtresse dans l’armée pour l’assurer de toujours avoir des oreilles qui trainent lorsqu’il va à l’étranger rencontrer d’autres puissants… les méthodes de la garde municipale… »

À cette dernière énumération, il ne put s’empêcher d’observer son poignet. La manche un peu tirée laissa voir la cicatrice autour de son poignet, vestiges de ses quelques jours d’emprisonnement et de torture dans les cachots souterrains de l’inquisition municipale. Les souvenirs de douleur et de la peur de ne pas en ressortir étaient encore bien présents.
Et puis, il se redressa et sourit à nouveau vers la prêtresse.

« Mais vous… Presque toutes nos rencontres ont eu lieu car vous étiez à même de réparer mon corps. Pourtant, c’est aussi mon âme que vous avez reforgée. Vous m’avez redonné confiance en la vie, en Hellas, en Cimmeria. Lorsque je pensais à vous, je savais qu’il n’y avait pas que du mal en notre terre glaciale, que la bonté et la pureté existaient encore parmi nous, parmi les prêtresses. J’ai eu envie de croire en vous, de croire que vous, charismatique et meneuse comme vous l’êtes, vous seriez capable de refaire de ce pays un sanctuaire immaculé.
« Je suis un infiltré comme en a la grande prêtresse. Pourtant, à votre service, je sais que je ne servirai pas à maintenir un statu quo entre deux partis corrompus qui cherchent de nouvelles cartes pour obliger l’un à améliorer les privilèges de l’autre. Je le sais ; j’en suis sûr ; vous voulez un ordre nouveau. »

Ses yeux brillés à nouveau. Il les avait, avant la fin de sa tirade, retournés vers le feu, incapable de supporter plus longtemps le regard de l’objet de son admiration.
Depuis lors, il semblait bien impossible de déterminé si c’était réellement la chaleur du feu qui faisait rougir ses joues ou autre chose.
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeJeu 4 Avr - 0:48

La température ambiante tout comme la froideur de Veto ne dérangeait pas Irina, même si son corps était quant à lui assez chaud pour le contrebalancer. Probablement un effet secondaire de la capacité qu'avait son corps à se régénérer. Parfois elle en venait même à se demander si son vieillissement n'était pas ralenti en apparence, car il était difficile de deviner ses vingt-huit hivers. Se levant grâce à l'aide du jeune homme, Irina paraissait embarrassée, ses joues trahissant une rougeur certaine, même si elle ne pouvait pas égaler celle de sa crinière ardente. Baissant les yeux, elle avait répondu d'une voix timide qui ne lui ressemblait pas.

« Oui,... toujours. »

Avait-elle répondu sans le regarder, bien plus sérieuse que ce qu'elle avait voulu. Lentement mais sûrement elle s'impliquait personnellement, et quelque part cette sensation ne lui plaisait pas. C'était hors de sa zone de confort, hors de son domaine de compétence. En fait elle sentait que la situation lui échappait de plus en plus... Ce qui l'irritait... mais lui plaisait aussi. Sûrement par goût du risque.
Avec des gestes lents, elle accepta de prendre place dans le siège qui lui était préparé, tout en profitant pour observer le garde sans être vue. Il était différent, transformé au sens propre comme au figuré, et cela bien au delà de cette étrange preuve de force avec le triskèle. Cependant cette manifestation de pouvoir l'intriguait également, et aucune explication n'était pour l'instant suffisante pour comprendre la situation. Quand bien même les réponses soient introuvables pour l'instant, la demoiselle se promit de mener l'enquête plus tard. Peut être que la bibliothèque du temple pourrait éclaircir ce mystère, sait-on jamais.


« Je pense déjà l'avoir vu quelque part, mais je ne peux être affirmative. Il ne m'est pas familier dans tous les cas. Toutefois je doute que ceci soit poussé par quelque chose d'aussi trivial. »

Puisqu'il ne voulait pas chercher plus loin elle n'insisterait pas, mais cela ne l'empêcherait pas de lui dire ce qu'elle en pensait vraiment. Ce genre de phénomènes ne pouvait pas être provoqué par quelque chose d'aussi anodin, elle se refusait à le croire. Lui pouvait peut-être se bercer d'illusions mais elle et son esprit rationnel s'y refusaient. Un demi-sourire sur les lèvres, elle avait continué, les yeux émeraude rivés sur les flammes.

« Vous devriez vous reposer, demander quelques jours de permission peut être. Cela vous ferait du bien, j'en suis sûre. Si vous appliquez ce conseil, je pourrais éventuellement faire de même. »

L'idée de le voir en dehors de ses fonctions la traversa, mais elle n'en souffla mot. D'un autre côté, si il était aussi dépendant de son travail qu'elle, il serait difficile de le convaincre. En toute honnêteté elle n'était pas en position de le blâmer, mais elle le ferait tout de même si c'était nécessaire... Question de principe.
S'adossant à son siège, la demoiselle croisa une jambe sur l'autre, perdue dans ses pensées pendant un court instant.
Son expression s'assombrit à l'évocation de toutes ces injustices, ces supercheries en série qui tâchaient cette ville de sang et de déshonneur. C'était une idée qui lui était insupportable, ne fusse que parce qu'elle avait vu de ses yeux que les plus puissants étaient les plus véreux de tous. Au moins dans les rues malfamées il n'y avait que la loi du plus fort, et personne ne se cachait derrière de détestables faux-semblants. Tel un lion en cage elle se releva finalement, marchant d'un côté à l'autre comme si cette seule énonciation la rendait folle, ce qui n'était pas loin de la réalité.

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Se tournant vers lui, elle avait silencieusement posé sa petite main pâle sur les traces maculant le bras de Veto, cherchant à le réconforter de façon maladroite. Mais ce fut alors un flot de souvenirs qui défila devant ses yeux hagards, lui coupant le souffle tellement ils étaient intenses. Des flashs de cris se perdant entre des murs de pierre, d'une douleur si vive qu'elle manqua de lui faire perdre la raison et d'un défilé de visages méprisants la prit de court. Se retenant à un mur elle manqua de tomber et avant qu'elle ne se rende compte, ses mains se portèrent sur ses cuisses à la recherche de la trace des tisonniers. Il lui fallut une paire de secondes avant de se rendre compte que ce qu'elle avait vu n'était qu'un souvenir si imprégné de peur qu'il l'avait assaillie sans qu'elle le désire. Il était venu à elle plutôt que l'inverse comme c'était habituel. De deux choses l'une... Soit l'ampleur de son pouvoir était devenu plus fort sans qu'elle ne s'en rende compte, soit un lien s'était établi tout seul au contact de la blessure.
Ce qu'elle avait vu lui donna un haut le corps, lui rappelant soudainement l'état dans lequel elle avait trouvé Veto cette fois là. L'origine de ses plaies, contusions et autres brûlures trouvait maintenant explication. Légèrement tremblante, Irina déglutit et se força à sourire pour le rassurer, comme si de rien n'était. Un goût âcre lui monta à la bouche, et elle parla avec de la douceur dans les yeux mais une expression presque triste.


« Je suis touchée que penser à moi vous apporte ne fusse qu'un peu de bien être ou de réconfort, quoi que le mot soit un peu fort. Mais toute Rose a ses épines, Veto. » Ce fut tout ce qu'elle en dit, sachant pertinemment qu'il avait une opinion un peu différente sur la question. Elle le regarda tout de même, parlant avant le regretter. « Oui je veux un ordre nouveau, c'est vrai. Les arrangements sous la table, complots et autres mouvements politiques me rendent plus malade que je ne pourrais l'exprimer. Je veux y mettre fin, non pas pour rétablir un sanctuaire immaculé, mais pour au moins nettoyer le sang qui le souille. Pour cela j'aurai besoin de personnes comme vous. Et non, pas comme l'on use de pions. Je ne mentirai pas. C'était mon but initial... Cela a changé. Vous n'êtes pas seulement un simple infiltré comme un autre. C'est bien plus compliqué que cela. » Elle le vit lui tourner le dos, et resta plantée là, debout en plein milieu de la pièce, les mains serrées contre la poitrine, sans savoir si elle devait continuer ou se taire. Ses joues montraient combien parler de la sorte lui était difficile. « Vous êtes important pour moi, et cela n'a rien à voir avec le soutien stratégique que vous m'offrez, qu'importe ce que cela veut dire. » Elle se mit à regarder son dos, indécise sur le désir qu'il la regarde ou non. Elle fit un pas dans sa direction, leva la main, mais n'osa pas le toucher. Dans ses yeux se lisait une grande confusion. La prêtresse se mit à machinalement jouer avec Exanimis, toujours à son doigt. La pierre froide brillait d'un éclat discret mais toujours présent.

« Je ne serai pas comme elle. Non, je ne veux pas être comme elle. Promettez-moi que si je perds la raison, si jamais je viens à trahir l'Ordre ou ses idéaux,... Promettez-moi que vous me tuerez sur le champ. »
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeLun 8 Avr - 16:56

Alors qu’il parlait, elle avait eu un moment de faiblesse mais cette fois-ci, il ne l’avait pas remarqué. En effet, il était trop plongé dans ses pensées et, à vrai dire, il n’osait pas non plus vraiment la regarder dans les yeux…

Et lorsque vint le moment des déclarations, il ne trouva pas plus le courage de se retourner. Qu’était-il si ce n’était un pion ? Est-ce que l’étrange sentiment qu’il ressentait pour elle était réciproque ? Et si celui-ci n’était autre que ce qu’il avait déjà ressenti auparavant pour une autre femme ?

Le visage d’Emmanuelle lui revint à l’esprit au milieu des braises. Combien de fois avait-il lu et relu le rapport de la mission où elle avait péri, cherchant entre les lignes la vérité, tentant de comprendre de quelle manière leur caporal-chef de l’époque l’avait laissé mourir. Il l’avait avoué, et Veto n’avait aucun doute sur la véracité de cette affirmation. Cet homme lui en voulait trop à l’époque pour ne pas avoir été prêt à ce genre d’extrémité. Et puis,le meurtre de l’amant dévasté aurait été vidé de tout sens si ce n’était pas le cas. Cela voudrait dire qu’Alexandre Monod, son presque frère, se serait accusé à sa place pour une mauvaise plaisanterie et qu’il serait donc en fuite suite à un mensonge.

*Non !* Il ne pouvait en être autrement. Emmanuelle était morte à cause d’Osbor et Veto l’avait tué pour ça avant qu’Alex ne s’accuse pour le couvrir.
Mais… Et si Osbor avait sacrifié sa vie pour ruiner celle de Veto…

*Non !* C’était stupide de croire cela. Il s’était défendu ! Il ne voulait pas mourir ! Et ce serait stupide d’oublier si facilement une femme pour qui deux hommes avaient sacrifié leur intégrité !

Il sentait la présence d’Irina toute proche derrière lui. Elle, était plus que « importante » pour lui. C’était sa nouvelle motivation, la nouvelle personne pour qui il avait envie de se surpasser, celle qui donner un sens à sa vie et à ses efforts. Et pourtant, il se refusait à l’aimer. Emmanuelle devait être et rester la seule et unique femme qu’il aurait aimée.
L’amour était trop dangereux. Ça n’impliquait pas que deux être et il ne voulait plus se retrouver dans une situation comparable à celle du meurtre d’Osbor.

Dehors, la cloche du beffroi sonna une nouvelle heure et brisa le silence qui s’était installé dans la demeure sans que ses occupants ne s’en soit rendu compte.


« Je… »

Son poing se serra et il ferma les yeux. Il ne pourrait jamais faire ce qu’elle voulait qu’il promette. Quoi qu’il arrive, quoi qu’il décide, Emmanuelle s’effaçait doucement pour laisser place à quelqu’un d’autre… Et il ne pourrait jamais prendre la vie de cette personne.
Alors il tourna légèrement la tête vers le côté, ses cheveux masquant ses yeux et un sourire que l’on devinait triste étirant la commissure de ses lèvres.


« Vous ne deviendrez pas cela. J’ai confiance en vous. »

Immédiatement après, il se détourna et alla prendre les affaires qu’il avait pu laisser encore posées sur le canapé. Toujours sans un regard vers elle, il ajouta « Je dois partir. D’étranges cas de lèpre se sont déclarés dans un quartier pauvre. Je dois y être dans une heure à peine. Je vous laisse. À Kesha, Ma Dame. » et alors il prit la direction de la porte d’un pas décidé et rapide, sortant dans le hall et fermant la porte derrière lui.

On lui apporta son manteau et il l’enfila sans un mot, sortant dans le froid et sous la neige ; marchant vite, la tête basse, engouffrée sous sa capuche. Et bien que personne ne puisse le voir, il se trouva qu’une goutte tombait de temps à autre du disque noir cachant son visage. Veto fuyait quelque chose qui l’avait déjà rattrapé et ne se doutait pas que ce soir, il serait emporté dans une nouvelle spirale infernale de l’histoire de ce monde.

Lorsqu’un mendiant tenterait de s’accrocher au col de son vêtement, il serait déjà trop tard…
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MessageSujet: Re: Complot Altruiste   Complot Altruiste Icon_minitimeMar 9 Avr - 8:47

La discussion c'était terminée abruptement et sans qu'elle ait eu l'occasion ou la force de répondre quoi que ce soit. Pourtant le frisson qui parcourut le corps de la prêtresse ne devait rien au courant d'air qui envahit la pièce lorsque la porte se referma derrière Veto. Les paroles du soldat planaient encore dans l'air, dans un douloureux et interminable écho qui résonnait seulement dans ses oreilles. Il n'était pas compliqué de comprendre qu'il avait beaucoup de choses en tête, même si bien entendu elle ignorait le contenu de la plupart d'entre elles.
Confuse et à moitié sonnée par ce qui venait de se passer, elle n'arrivait toujours pas à croire qu'elle avait eu le courage de lui dire toutes ces choses. La honte et la confusion la gagnèrent, tandis qu'elle prit à nouveau place sur l'un de ces sièges, les yeux rivés sur ce même feu qui l'avait réchauffé. Ses joues étaient toujours écarlate et son salon transformé en champ de bataille semblait lui rappeler ce qui venait de se passer, lui aussi.

Veto et elle étaient indubitablement deux opposés complets... Le feu et la glace. Deux natures et deux philosophies très différentes malgré un but et des aspirations communes. Se sentant faible physiquement comme mentalement, Irina serra les dents en laissant finalement son expression refléter ses vraies émotions maintenant qu'elle était seule. Tout cela ne lui ressemblait pas. Ce n'était pas elle qui mollissait ainsi, se faisant si bienveillante et altruiste, si douce, si... Si humaine. Le constat lui fit taper du poing contre l'accoudoir du canapé, pleine de rage contre elle-même. Comment était-ce possible ? Comment pouvait-elle tomber aussi bas après ce qui s'était passé avec Simalia ? Les yeux baissés, les sourcils froncés en pleine réflexion, la rouquine cherchait en elle les réponses qui lui manquaient. Intérieurement elle tenta même de s'aider des souvenirs d'Exanimis pour comprendre ce qui la prenait... Mais une voix intérieure n'avait pas tardé à lui répondre, d'un ton méprisant et hautain :
« Es-tu sûre que tu veux réellement savoir ? »

Un blanc dans sa tête fut sa réponse. Non elle n'en était pas certaine car cela comprenait un sujet sur lequel elle ne connaissait rien, un sujet où elle était aussi vulnérable et aussi pathétique que n'importe qui... Que tous ceux dont elle avait passé sa vie à se moquer. Tous ces autres qui laissaient leurs sentiments obscurcir leur logique et leur bon sens. C'était ironique.... non, ridicule de se retrouver dans cette situation à son tour.
« N'est-ce pas frustrant ? Mais pas plus que de se mentir, ma chère. Allez admets le. » Irina se tint la tête à deux mains, tentant de faire taire cette voix devenue familière dans son esprit.
« Admets le. Admets le. ADMETS LE ! »

Dans un seul geste, la demoiselle se leva comme un ressort et arracha Exanimis de son doigt avant de le jeter de toutes ses forces contre le mur d'en face, le regard empli de haine. L'anneau rebondit d'un bruit sourd avant de retomber au sol, rebondissant plusieurs fois avant de rouler dans sa direction, sans une seule griffure. Comme pour la narguer le bijou restait là, intact, insensible à ses accès de colère et à la folie qui lentement la dévorait. « Crois-tu pouvoir m'échapper si facilement ? Quelle naïve tu fais. Tu ne peux pas me fuir... Pas plus que tu ne peux fuir ce qu'il a réveillé en toi. »

Nouveau silence, nouvelle grimace. Longtemps Irina resta là, immobile, sourde aux appels et questions inquiètes de Juniel, sa servante. Cette dernière finit par repartir et la laisser tranquille, dans une sage décision pour laquelle elle n'eut même pas la force de la remercier. Alors lentement, comme timidement, la jeune femme tendit sa paume ouverte, appelant Exanimis à elle par la pensée. Sans encombres la pierre vint s'y loger, scintillant comme pour signifier sa satisfaction de retrouver celle qui était sa place. Irina la regarda de longues minutes, noyant ses doutes dans la noirceur réconfortante qui pulsait contre peau. Puis finalement, lentement... elle referma son poing, y refermant cette partie d'elle-même ainsi que la faiblesse de son cœur battant à tout rompre.
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