EVENT Convergence : PHASE FINALE

- Nous allons être en retard, mon seigneur, l'avertit son page. Il ne faudrait pas rater votre première apparition en tant que comte...

Walter lui lança un regard incendiaire mais ne fit aucun commentaire. La remarque était tout à fait juste. La journée avait été déjà bien chargée, et il lui fallait encore être présent pour la grande cérémonie - ou était-ce une fête ? - organisé par le Roi pour l'événement grandiose qu'allait être la grande convergence.
Les effets de cette dernière s'était fait ressentir un peu partout depuis quelques temps, mais ce soir, ce serait le pinacle de cet événement cosmique. Pour être honnête, Walter n'avait que peu expérimenté les effets déroutants de la convergence jusqu'à maintenant et ne savait absolument pas à quoi s'attendre.

D'ailleurs, il n'avait pas trop eu le temps d'y réfléchir depuis qu'il avait accédé au titre de comte de Béon. Trop de responsabilités, de marques à prendre, de choses à comprendre, d'arbitrages à rendre, d'obligations à remplir... Sa vie de chevalier errant lui semblait si loin désormais... Il repensa fugacement à son ancienne écuyère. Que pouvait-elle bien faire en ce jour historique ? Sans doute s'en fichait-elle simplement... Sa présence lui manquait, la vie qu'ils avaient menés avait été simple, tandis que sa nouvelle vie était pleine de complications.

Il enfila la tenue qu'il avait choisi lui-même pour l'occasion. Il s'agissait d'un pourpoint bleu marine, à la coupe martial, avec les armoiries de la maison Veldar sur le cœur. Son pantalon était également simple. Mais le tout formait une simplicité élégante et convenait parfaitement à Walter, qui était avant tout un guerrier et pas un courtisan. Son pourpoint avait un col serré qui remontait jusqu'à la moitié de son cou, renforçant son allure militaire. Malgré la simplicité de sa tenue, il était évident pour qui s'attardait un minimum sur lui que les vêtements étaient d'une facture très luxueuse.
Ses bottes étaient toutes neuves, achetés dans la journée chez un cordonnier réputé de la capitale. Elles étaient en cuir sombre et lui allaient parfaitement.
Il finit de se préparer en passant sa ceinture en cuir, la même qu'il portait quand il n'était que simple chevalier errant. Sur cette dernière était attaché le fourreau de son épée. Il ne comptait pas la dégainer de la soirée, mais les comtes de Béon était des seigneurs guerriers. Il se devait de tenir son rang. Son chambellan, resté à Béon, lui avait bien fait comprendre qu'il recevrait un rapport sur les actions de son nouveau seigneur afin d'être sûr que ce dernier se comportait comme il sied à son rang. Le vieux renard faisait en sorte de lui faire rattraper son retard en termes d'éducation seigneuriale, et c'était un tuteur impitoyable.

Il se dépêcha de sortir de l'appartement où il logeait. Il enfourcha son destrier et se rendit sur la Grand Place d'Hespéria. La grande estrade réservée aux nobles l'attendait. La plupart s'y rendait en carrosse, lui avait choisi d'y aller par lui-même sur sa monture. Grendel, son fougueux destrier, plus habitué aux combats qu'à la parade, était nerveux. Certains passants héritèrent de coups de sabots vicieux, ce qui libéra promptement le passage. Le tout nouveau comte eut cependant la courtoisie de s'excuser à la volée envers les passants.
Plus il progressait vers le coeur de la ville, plus la foule grandissait. Il profita de certaines ruelles transversales et trouée dans la masse de badauds pour progresser rapidement.

Finalement, il atteignit l'entrée vers l'estrade, là où de nombreux nobles arrivaient en carrosse avant de se diriger vers leurs pairs. De nombreux petits groupes s'étaient déjà former pour discuter ou juger les autres nobles, ou la populace un en bas de l'estrade.
Son arrivée passa relativement inaperçu, compte tenu du fait qu'il n'était pas dans une voiture tractée par des chevaux. Son page arriva derrière lui avec sa monture, plus placide.
Walter sauta à terre et lui tendit les rênes pour qu'il aille s'occuper des chevaux. Il devait y avoir un endroit prévu, à côté des carrosses.

Après avoir fait quelques pas, il se retourna vers le jeune homme, soudain tout nerveux à l'idée de tenir les rênes du fléau qu'était Grendel.

- Tu t'en sortiras ? demanda le comte, inquiet à l'idée d'un incident et d'une blessure du garçon.
- Ou.. Oui, mon seigneur,répondit fébrilement le page.
- Le secret, c'est d'être ferme !

Sur ce conseil aussi creux que son ventre, il laissa là ce qui lui faisait office d'écuyer car il était affamé. Il s'avança vers l'entrée de l'estrade à la suite d'une noble toute de rose vêtue qui s'entretenait avec un officier militaire qui, à en juger par son apparence, ne cachait pas sa vocation guerrière.

Il fut surprit lorsqu'un héraut annonça d'une voix forte et portante :

- Sa seigneurie, le comte de Béon !

Il se stoppa en regardant le héraut. Ce dernier le fixait droit dans les yeux, comme pour dire "Je t'ai reconnu !"
Walter lui adressa un signe de la tête respectueux et reprit son chemin, désormais sous le regard de la noblesse éridanienne. Comme il l'avait constaté devant les portraits de ses ancêtres ornant la forteresse de Béon, il leur ressemblait énormément. Même cheveux d'un blond sombre et filasse, apanage des comtes de Béon depuis plusieurs générations, même yeux bleus pâles, tirant vers le gris. Plus étonnamment, il avait découvert avoir un nez spécifiquement Veldar, comme son père, son grand-père et son arrière-grand-père.
Face à la débauche de luxe et de sophistication des autres nobles, il eut l'impression de faire tâche, mais il fut également soulagé de ne pas avoir à porté nombres des tenues qu'il apercevait. Sa tenue simple, martial et élégante lui suffisait. Il se languissait même de son armure de chevalier.

Il salua d'un signe de la tête solennelle l'assistance, qui était plus intriguée par le carrosse qui arrivait juste derrière Walter que par le nouveau comte de Béon.
Walter s'avança, à la recherche de quelque chose à manger. Sa journée avait été chargé. Cela avait été sa première visite à Hespéria depuis la confirmation de sa succession. Il avait donc dû rencontrer le Roi, pour renouveler l'allégeance de sa maison, son comté et de lui-même à la Couronne. Il avait dû rencontrer divers fonctionnaires pour régler des détails et il n'avait eut que le temps d'aller acheter ses bottes. D'ailleurs, il remarqua avec plaisir que ses bottes, à l'allure simple, était de facture souvent supérieure à celles de ses pairs masculins.

- Il n'y a pas de petites victoires, se murmura-t-il à lui même.

[Joueurs associés = Pandora Vanes, Guisor Agésilas]

Alors que la convergence approchait la famille comtale d'Odessa c'était rendu à la capitale afin d'y assister.

Alana avait suivi sa fratrie, sa sœur se trouvant déjà sur place. Une loge était réservé pour la noblesse dont la jeune fille faisait partie bien qu'elle l'oubliait parfois trop facilement.

Peu à l'aise avec le protocole propre à son rang Alana se contentait de jouer la dernière fille parfaite. Elle s'était habillé comme il sied à son rang, avec une robe anthracite mettant en valeur ses courbes langoureuses. Bien que n'en ayant pas conscience elle était tout simplement éblouissante. Il lui suffisait de sourire aux hommes pour leur faire oublier ses lacunes protocolaire et la plupart des femmes étaient trop occupés à la jalouser pour s'en préoccuper.

Une fois sur l'estrade et à la recherche de sa place, elle laissa son regard se porter sur les alentours. Un héraut annonça d'une voix puissante le seigneur de Béon. Elle avait entendu ses frères en parler. Un nouveau comte à l'histoire flou mais dont l'obtention du titre semblait légitime. Une histoire de famille décimé par la peste rouge d'après les rumeurs qu'avait pu entendre la jeune noble.
Cela étant Alana devait avouer que le jeune comte, qui devait avoir la trentaine, était un homme charismatique. Il était sans doute plus à l'aise entrain de manier l'épée, la jeune femme avait remarqué ses mains caleuses, mais elle avait l'intuition qu'il s'adapterait vite à son récent statut.

L'étrange association d'un jeune visage surmonté d'un rose éclatant porté par une jeune noble et la présence à ses côtés d'un général aux traits sévère et au maintien de guerrier attirèrent son attention. La jeune femme était forcément Pandora de Vanes. Bien que n'étant pas proches elle connaissait la jeune fille ne serais-ce que de réputation et l'avait sans doute croisés lors de leur enfance. En effet le Comté d'Odessa et le Duché de Vanes étant voisin leur deux pères se connaissaient bien et se fréquentaient à l'occasion.
Quand à l'homme elle était presque sur qu'il s'agissait du général Agésilas d'après les descriptions qu'elle avait pu en avoir, ses frères en connaissaient certainement bien plus qu'elle à son sujet.

Dans tous les cas une sixième enfant d'un comte désormais décédé était de bien peu d'importance par rapport à ces trois personnes là. Alana continua de jeter des coups d’œil à droite à gauche tout en essayant de se rappeler de son éducation sur les différentes familles de la noblesse.
Elle se rendit rapidement à l'évidence, mis à part les personnes de première importance elle ne se rappelait pas grand chose.

Elle finit finalement par se retrouver à sa place, entre son plus jeune frère et sa sœur ainée. Elle attendait tout autant avec l'impatience des érudits qu'avec l'émerveillement propres aux enfants le résultat de la convergence.

Posé sur un toit, Arkan observait son amie se déplaçant dans la foule en-dessous.
Il était nerveux, inquiet. Et pour une fois, ce n'était même pas dû au monde présent. L'ambiance, bien qu'en apparence festive, était très clairement tendue et il le ressentait bien.
Quand Amaya avait entendu parler de cette fête, elle avait immédiatement décidé de s'y rendre, même si cette idée ne lui plaisait pas beaucoup à lui...

Oui, elle avait absolument voulut venir malgré les réticences d'Arkan car elle espérait trouver quelqu'un qu'elle connaîtrait... et après tout, peut-être que cette fête pourrait s'avérer intéressante.
Amaya observait ce qui l'entourait tout en avançant au milieu des badauds. Elle avait aperçut ce qui semblait être la place principale un peu plus tôt mais avait préféré continuer son chemin dans les rues environnantes.
Contemplant avec curiosité les différents étals, son attention en fut détournée quand elle vit un peu plus loin dans la foule un groupe d'enfants riants et dansants joyeusement. Elle sourit avec amusement, ils ne semblaient pas touchés par le malaise ambiant et jouaient innocemment.
À ce moment, une autre scène attira son regard. Un homme à la stature imposante menaçait un second bien plus frêle.
Elle hésita un peu et regarda autour. Aucun garde à proximité, évidemment. La sindarine soupira, cette histoire ne la concernait pas mais le déclenchement d'une bagarre pourrait facilement mener à des blessés si cela venait à s'étendre dans ce climat sous tension.
Amaya fronça les sourcils en voyant le premier diriger sa main vers une arme à sa ceinture. Elle s'approcha d'un pas décidé et attrapa son bras.

-Faites attention avec ça, vous pourriez regretter votre geste après. Dit-elle doucement.

Il la regarda avec agacement.

-En quoi ça vous regarde ? Passez votre chemin.

-En rien, c'est vrai.

Elle posa sa main sur la poignée de son arme tout en ne le lâchant pas du regard.
Mal à l'aise et nerveux face à son assurance, il finit par dégager son bras et faire demi-tour pour se fondre dans la foule.

-Merci beaucoup pour votre aide. Lui dit l'autre homme. J'habite au coin de cette rue, si un jour vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à venir.

Elle le remercia alors qu'il désignait la rue en question puis lui adressa un dernier signe de main avant de s'enfoncer à nouveau dans la foule.

Walter courait à travers les bois et les ruines de Canopée. Maitre Balibe et celle qui se faisait appeler Kaly courraient à ses côtés également. Le vieil homme qui leur avait porter secours avait disparu alors qu'il s'apprêtait à comprendre la situation et leur avait donné rendez-vous sous l'ancien dôme royal de la ville.
Un bruit venant du ciel se rapprochait d'eux. Comme un bourdonnement métallique ! L'avertissement et la peur de l'ermite avaient suffit aux trois voyageurs du passé pour se mettre à l’œuvre. La fuite ne semblait pas déshonorable ni stupide. Les outils et pouvoirs des gens de ce temps semblaient démesurés et ils n'avaient que des lames à leur opposer.

Le souffle du comte commençait à faiblir. L'avancée au milieu de la végétation était peu aisée. Le fourreau de son épée battait sur le côté et le gênait dans sa course, l'obligeant à le tenir de sa main gauche, et ralentissant encore plus ses mouvements.
Une migraine nauséeuse s'emparait de lui, ses forces faiblissaient, mais Walter continuait à courir, à avancer ! Un pied après l'autre, le bruit de cette menace inconnue du futur se rapprochant toujours plus.

Les muscles du chevalier lui faisait un mal de chien, comme s'ils étaient fait d'acier tranchant. Son corps se mit à trembler, le bruit des machines du futur envahirent son esprit, ainsi que celui de la végétation et de la faune autour de lui. Il ferma les yeux. Et une grande douleur ainsi que l'impression de tomber dans le vide le traversa, manquant de le faire défaillir et de vomir.


Les sensations du comte de Béon lui revinrent peu à peu, ses muscles se détendirent et il finit par reconnaitre les sons et les odeurs autour de lui. Il apparut sur l'estrade de la grande place d'Hespéria alors qu'il courrait. Il parcourut trois mètres avant de s'arrêter. Sa vitesse n'était pas si grande, tant la fatigue le tenaillait et sa course avait été difficile.

Il était en sueur et ses vêtements étaient plein de terre et de poussière. Il mit quelques instants à réaliser qu'il était revenu à l'endroit d'où il était parti. Les souvenirs de ce qu'il avait vécu était là mais comme dans un voile flou.
Un peu perdu et confus, Walter regardait frénétiquement autour de lui, cherchant ses camarades d'infortune qui courraient avec lui dans la forêt des ruines de Canopée ou leurs poursuivants, voire même le vieil ermite. Mais il ne les vit nulle part.

Autour de lui, les nobles et aristocrates éridaniens semblaient tous confus, apeurés et choqués. Sur la place, avec le peuple, la même confusion régnait et menaçait de se transformer en chaos. La belle tenue et le fonctionnement quasi mécanique de la noblesse éridanienne était totalement désorganisé. Certains criaient de peur, ou demandaient des explications. Des pleurs et des exclamations outrés retentissaient un peu partout.
Les jeunes femmes n'avaient plus la posture aristocrate du début de soirée.
Finalement, Walter faisait moins tâche qu'au début de la soirée, malgré sa tenue sali. Il était certes choqué et avait l'esprit confus, mais il tenait debout et regagnait ses esprits sans céder à la panique.

Un rapide coup d’œil à la foule rassemblé sur la place l'inquiéta. L'expérience de la Convergence avait affecté tout le monde semblait-il et en avait traumatisé plus d'un. Son regard se leva vers le ciel, mais la course des astres avaient repris comme rien ne s'était passé...

Une grande inspiration et un verre de vin rouge englouti plus tard, Walter commença à relever les gardes qui se remettaient aussi de la Convergence et à leur ordonner de maintenir un semblant d'ordre et d'éviter un départ d'émeute si besoin.
Les officiers commençaient à reprendre leurs esprits et ne tarderaient pas à remettre de l'ordre dans la confusion et la panique qui s'installaient doucement.

Il alla voir les différents nobles sur l'estrade qui semblaient avoir besoin d'aide, mais il ne put pas faire grande chose que prononcer des paroles rassurantes un peu vide.

La Convergence était passé. Comment ce qui été arrivé avait-il été possible ? Car Walter croyait dur comme fer que ce qu'il avait vécu avait bien été réel. Trop de chose incroyables qu'il n'aurait pu imaginer s'était déroulé devant ses yeux.
Le prêtre à fleur Balibe avait-il retrouver son temple ? Et cette Kaly avait-elle pu rentrer chez elle ?
Alors que ces questions lui traversaient l'esprit, son regard était fixé sur les astres du ciel, emplit de crainte et de fascination...