" Celui qui peut dire de quel feu il brûle, ne brûle que d'un petit feu "
Shemhazai. Voilà bien un nom que l'on pourrait croire être donné à une glorieuse famille, mais il en est rien. Il n'est que le poids d'un péché passé, un poids qui se porterait de siècles en siècles, comme une malédiction dont on ne pourrait se défaire, car comme elle, le nom ne nous quitte pas. Le changer? Inutile, nous naissons avec un nom, tout chose porte un nom. Shemhazai... voilà ce que le père donna à la fille et le fils, voilà son fardeau à porter comme une marque de culpabilité. Mais pourrait-il présager également ce que ferais l'enfant?
◈◈◈◈◈
Naissance sous la dualité
C'était il y a une époque dont les livres ne parlent plus, une époque qui n'est plus que légende dans la bouche des érudits. Pourtant, où est la frontière de la vérité à travers le mythe? Nul ne le sait vraiment, mais voilà ce que l'on conte...
Le mal aurait engendré un homme, un lhurgoyf dont le sang était si pur, si mauvais que nul autre ne pourrait prétendre être comme lui. Il se nommait Asmodée, " celui qui fait périr ". Cependant, il était une erreur de créer pareil individu car la pureté peut être souillée. Une erreur que payera peut-être cher le monde dans les générations à venir. Il n'y avait pas un être plus terrible que lui, aussi cruel et vicieux. Comble d'ironie, il portait sur son visage les traits d'un ange, pour parfaire à la duperie, un avantage idéal pour ouvrir de plus grand terrain de chasse. Ce démon là était un mangeur de cœur, se nourrissant de cet organe symbolique comme un met luxueux. De nombreux victimes périront à cause de sa faim insatiable mais on lui imposa des limites contraignantes, dont celle de peser sa fureur et son choix de victime, car il était capable de ne point faire preuve de discernement. Quelque soit la race, un cœur était un cœur pour lui. Asmodée incarnait le mal sur tous les fronts... Seulement, un jour, sa pureté maléfique fut entachée par la plus improbable des choses.
Alors qu'Asmodée venait à peine de calmer son appétit, il vit au loin une jeune femme dont la beauté l'émut, aussi étrange que cela puisse paraître. Le démon sentit alors son sang bouillonné, la désirant rapidement mais... différemment de ces proies habituelles. Cette nouveauté l'effraya, un sentiment qu'il ne connaissait pas. Après tout, en avait-il? Son trouble était si poussé qu'il n'osa approcher l'inconnue pendant un temps. Puis ce fut l'angoisse qui le gagna et la peur... des choses répugnantes à ses yeux. La seule solution qui lui vint à l'esprit était d'anhilée cette créature féminine pour que le repos le gagne à nouveau. Fou de rage, il s'en alla s'en prendre à cette pauvre innocente, car aussi pur que lui était démon, elle était son antithèse et n'était que bonté. Néanmoins, quand il la trouva, la tenant enserrée dans sa main en bout de gorge, sa volonté faiblit et il ne réussit pas à resserrer son étreinte. La jeune femme semblait ne pas être effrayée, alors il la haït, autant qu'il la désirait. L'histoire ne conte pas ce qu'il se déroula après, mais on dit qu'Asmodée devint encore plus fou qu'auparavant, mais la rage qu'il contenait, il la retourna envers ses propres frères démons.
La jeune femme n'était pas morte, bien au contraire, elle vivait et gagnait toujours en beauté de jour en jour. Et aussi incongru que cela paraisse, elle était devenue l'amante d'Asmodée. Ce qui enrageait le démon plus que tout était qu'il se sentait incapable de manger le cœur de cette femme, qu'il la désirait toujours sans se lasser... Ce n'était pas digne d'un homme de sa trempe, néanmoins, quoiqu'il fasse, il semblait céder devant la bonté de sa tendre... Mais l'amour n'était pas le propre du mal, et cela le rongea comme une maladie.
Tout éclata quand la jeune femme dont le nom ne fut pas retenue, ni sa race, tomba enceinte. Voilà bien quelque chose qui n'était pas prévu et qui allait tout changer car cette nouvelle parvint jusqu'aux oreilles de démons majeurs qui ne voyaient point cela d'une bonne augure. L'un d'eux, peut-être le plus sage, avait le don de lire l'avenir. La femme se devait de mourir, sa progéniture également car il n'était autre qu'une infamie démoniaque. Quand au sort d'Asmodée, il devait être puni. Seulement, le démon mangeur de coeur tua ses " supérieurs ", une rébellion contre sa race qui ne méritait autre que la mort. Ce fut ainsi qu'il gagna son nom : Shemhazai, signifiant " rébellion infâme ", marquant à vie sa traitrise.
Pendant que le démon châtiait les siens, ne comprenant pas lui-même son propre comportement, la jeune femme vaquait à ses occupations, le ventre rond... mais des lhurgoyfs avaient été lancés à sa poursuite bien avant que la décision soit officielle à son encontre. Quand Asmodée arriva, il était trop tard. Sa bien aimée avait été sauvagement lacérée et il la trouva ensanglantée, prête à être mise à mort. Il réussit tant bien que mal à tuer à nouveau les siens, puis s'en retourna auprès de celle qui fut sa faiblesse. Là,il sut que l'enfant en son ventre était encore en vie, mais qu'il ne le saurait plus pour longtemps. Mais ce qu'il pensa être un était en réalité deux, des jumeaux. On ne sait quelle magie employa alors Asmodée, mais il arracha les enfants qui n'étaient pas encore viables du ventre de sa mère, et le porta en lui, le temps nécessaire. Maudit depuis ses actes barbares envers son peuple, le lhurgoyf allait sacrifier sa vie pour sa descendance par un acte contre nature. On raconta plus tard, qu'un cri déchirant brisa le ciel et fit trembler la terre, que la nature elle-même était inquiète. Asmodée pleurait la mort de son aimée, mais il la haïssait toujours pour l'avoir asservie et amener à sa fin, car c'était ce qu'il en était. Voilà ce qu'il en coûta d'engendrer un démon purement maléfique.
Toutefois, ce qui devait arriver arriva. Si les mois précédents la terre avait tremblé, Istheria n'avait jamais pu entendre un hurlement aussi terrifiant que celui qui déforma le beau visage d'Asmodée. Mais sa déchirure se stoppa net. Puis vint le silence. Les oiseaux ne chantèrent pas, le vent ne siffla pas. La vallée de Hillem d'où se détacha les hurlements tomba dans un mutisme sinistre quand brusquement, des pleurs cristallins résonnèrent. Cet étonnant appel attira alors l'attention d'une jeune voyageuse, une femme Yorka aux oreilles félines qui suivit alors la piste des larmes avant d'afficher une horrible mimique de dégoût sur ses traits. Là, dans une mare de sang, gisait deux nourrissons : une petite fille et un petit garçon. Mais au delà de la curieuse présence de ces petits êtres, la forêt était maculée de sang et de morceaux...de chair. Asmodée avait physiquement implosé, sacrifiant sa vie pour payer son péché pour mettre au monde des jumeaux de manière spectaculaire. La vagabonde eut beaucoup d'instants d'hésitation avant de finir par s'avancer et se pencher sur les deux bébés. Mais brusquement, terrifiée, elle recula. Les deux enfants changèrent de forme pour quelque chose de plus monstrueux, quelques secondes. Elle comprit que les deux être étaient des lhurgoyfs. La Yorka qui prit peur, s'apprêta alors soudainement à repartir, faire marche arrière mais... ce n'était que des enfants non? Quelque soit leur race, n'avait-il pas le droit de vivre? Finalement, la voyeuse les prit avec elle, le temps d'un parcours, le temps de quelques jours.... elle apprit à les aimer un peu, à les nourrir, les nettoyer... Mais elle ne pouvait les garder indéfiniment. Pour seule solution, elle les ramena dans le continent le plus sombre, Phelgra, seul endroit où ils auraient la chance de trouver quelqu'un de leur peuple pour s'occuper d'eux. Si le destin et les dieux d'Istheria en avaient décidé autrement, alors c'était qu'ils ne devaient pas voir le jour....
◈◈◈◈◈
Jumelés sous une étoile différente
Umbriel. La cité souterraine, lieu sombre et lugubre où il fait mauvais vivre. La lumière du jour ne parvint jamais jusque là, on ne croise que la mort et les déments, les exclus de la société et bien des pauvres fous. Ce fut dans ce milieu lugubre que deux enfants grandirent, un frère et une sœur. Ils avaient déjà une douzaine d'année à cet époque, ils vivaient l'un pour l'autre, se protégeant mutuellement. Ils furent élevés dans l'esclavage, trouvé par un homme qui tenta de faire d'eux leurs pantins. Si le frère l'intéressa au point de de lui offrir quelques privilèges comme être délivré de ses chaînes, la fille n'eut aucun traitement de faveur. Jézabel et Ekzékiel. Les jumeaux maudits. Cependant, si le petit garçon était étonnamment aimé de son maître, il n'y avait rien de réciproque, bien au contraire. Ekzékiel portait un amour inconditionnel pour sa sœur qu'il estimait devoir protéger et de devoir supporter la vision de sa maltraitance ne faisait que nourrir la haine qu'il avait pour le tortionnaire. Jézabel, fillette intelligente, pria ce dernier de devoir accepter cet état de fait jusqu'à ce que tout deux soient un jour capable de pouvoir se dresser devant leur maître. Et c'était ce qui arriva. Après l'ultime fois où le jeune lhurgoyf se fit spectateur des coups de bâton que se prit sa sœur, ce dernier s'éveilla dans toute sa monstruosité. Une forme angélique déformée par l'apparence d'un démon, la chose que Ekzékiel devint ne fit que charpie des chairs du maître, amoncelant son corps en lambeaux. Jézabel assista alors à une horreur dont elle se serait bien passée, toutefois, comment pourrait-elle tenir rigueur de l'acharnement dont fit preuve ce dernier pour la protéger? Il était son frère, une moitié d'elle-même. A partir de ce jour là, Jézabel fit le vœu de protéger ce frère contre lui-même et contre n'importe qui, souhait qui était de son secret. Tout jeune encore, trop jeune sans doute, les jumeaux vécurent dans la plus pire pauvreté qui soit au cœur d'Umbriel, les poussant à commettre bien des crimes dont on n'aurait pu les penser incapable de faire. Mainte reprise, ce fut le frère qui en fut l'organisateur, face à l'impuissance du sœur maternelle ne put faire quoique se soit, mais cette vie sauvage forgea leur caractère et les poussa à faire preuve d'une indépendance hors norme. Se battre, manger, chasser, voler, tuer.... voilà les leçons que leur offrit leur maîtresse souterraine, ville insidieuse où seul le mal paraissait les attendre à chaque coin de rue.
Les années n'eurent jamais raison du lien que tissait les jumeaux, bien que leur différence était bien nette. Si Ekzékiel était le soleil, Jézabel serait la lune. La jeune fille devint une fine fleur d'une beauté bien trompeuse. Athlétique, fine lame, d'un caractère secret, cette lhurgoyf était d'une intelligence curieusement raffinée malgré son milieu. Réfléchie, posée, sereine, elle se montrait douce même lorsqu'elle offrait la mort à ses adversaires. Ekzékiel lui, était d'un tempérament enflammé et bourru, direct et puissant. Il était un homme qui n'avait guère de patience et il ne devait le maigre calme qu'il avait qu'à sa sœur et la présence apaisante qu'elle exerçait sur lui. Il était désespérément beau autant qu'il pouvait être monstrueux et barbare. Il était dépourvu de sentiments de clémence et de pitié, belliqueux et contestataire, il pouvait se révéler d'une violence malsaine. Paradoxalement, il vouait une étrange admiration pour celle qui le complétait. Il l'aimait, sans doute un peu trop pour un frère, il ne la souhaitait que pour lui, il voulait être que son seul protecteur, son père et son maître. Sans nul doute que Jézabel n'avait pas vu le mal qui le rongeait à l'époque, car si elle avait su alors....
Les jumeaux quittèrent Umbriel pour visiter le monde, même si le leur était encore bien petit. Phelgra n'était pas encore la nation que l'on connaissait aujourd'hui, Thémisto leur capitale brillait même d'une gloire qu'elle ne connut plus par les siècles avenir. Les deux Shemhazaï vécurent un bon nombre d'années au sein de la cité noire. Ce fut d'ailleurs là bas que le fossés de la différence entre Jézabel et Ekzékiel se creusa d'autant plus. Si le temps s'écoulait, la violence du frère ne faisait qu'empirer. La jeune femme dut même se dresser devant lui alors qu'il s'apprêtait à tuer un enfant qui l'avait bousculé. Même si l'acte de sa sœur le laissa perplexe, il se soumit à la volonté de sa jumelle qui craignait de plus en plus l'emprise que la démence exerçait sur ce dernier. Mais si ce frère était un personnage important de sa vie, un autre entra dans son existence peu de temps après : Sirion. Il était un lhurgoyf et un bel homme de surcroît. De belle harangue et d'une fine ruse, il rencontra Jézabel bien après son frère avec qui il se lia d'amitié. Rivaux par les armes, Ekzékiel et lui ne se ressemblait que peu, mais ils s'entendaient naturellement. Ce fut en ramenant ce dernier qui avait forcé sur la boisson qu'il rencontra Jézabel. Il fut étonnamment ébloui par la prestance de la jeune femme et la finesse de ses mots, la trouvant lunaire et mystérieuse. Un seul regard, et ils furent capturés l'un par l'autre. Leur relation fut d'abord et bien longtemps platonique, pour la simple raison qu'aucun d'eux ne désiraient succomber à leur attraction mutuelle, ne serait-ce que pour Ekzékiel. Sirion savait que son ami vouait un amour fraternel ambigüe pour la jeune femme, il suffisait de l'entendre parler d'elle pour comprendre qu'il tenait à elle plus que mesure. Était-ce peut-être l'intrigue qu'elle créait qui l'attira, Sirion n'en animait que plus de sentiments pour cette démone inaccessible. Mais un jour, à force de tentation, les deux lhurgoyfs cédèrent à l'appel de leurs sentiments, à l'abri du regard du frère. Ce mensonge ne leur plaisait pas, mais ils s'adaptèrent, ne connaissant que trop la personnalité virevoltante d'Ekzékiel. Toutefois, qu'importait les secrets, les regards furent traître et attisèrent l'attention du jumeau possessif. Jézabel ne compta pas le nombre de désaccord et de dispute qu'elle eut avec son frère, se refusant d'avouer la vérité qu'il ne pouvait ignorer. Elle aimait un homme et ce n'était pas lui. Elle n'était plus sa moitié mais celle d'un autre. Ce fut une véritable trahison à ses yeux, et peut-être que cette faute charnelle et de sentiments allait être la cause de sa démence ultime. Elle était sa jumelle, elle devait lui appartenir et à lui seul.
◈◈◈◈◈
Folie & déraison
Jézabel était celle qui vivait le plus difficile la situation. Son frère était sa seule famille et bien qu'elle connaissait les mauvais côtés de ce dernier, elle se pensait responsable de lui. Il avait beaucoup fait pour elle et la protéger, apprenant à supporter d'horribles images d'elle soumise à de multitudes tortures trop jeunes, cela aurait pu lui tourner la tête... si elle avait été une femme plus forte et indépendante, peut-être n'aurait il pas vouer une telle haine à tout ce qui pourrait la toucher... Toutefois, à cet époque, elle se refusa à briser les liens qu'elle avait avec Sirion. Il était un homme qui lui permettait d'avoir une plus grande vision des choses et puis la curiosité qui l'animait en sa compagnie la rendait légère. C'était une époque de sa vie, qui malgré les conditions et leurs actes, était la plus heureuse de sa vie. Tous les droits se battaient avec ensemble, riaient ensemble jusqu'à ce que plus rien ne soit. Ekzékiel avait fini jusque là par surmonter sa colère, bien que lorsqu'il se faisait rival avec Sirion, il faisait preuve d'un acharnement que le jeune homme ne lui connut pas auparavant. Plus le temps avançait, plus la noirceur grandissait. Mais Jézabel se voilait les yeux d'une épaisse brume, ne souhaitant affronter la terrible vérité qui l'attendait par la suite... elle était la lune, comment aurait-elle pu percevoir le soleil se consumer... lui qui était déjà si loin...
Ce furent les évènements politiques d'Istheria qui eurent raison de leur groupuscule.La guerre éclata et bon nombre de civils furent recruter. Ekzékiel se prit rapidement d'une fougueuse envie de bataille, de pouvoir tuer comme il l'entendait au nom de la guerre, enfin succomber aux violences qu'il retenait dans ses chairs pour l'amour de sa sœur. Cette dernière s'enrôla à son tour afin de protéger ce dernier, Sirion en fit de même pour la volonté de sa bien aimée et de son ami. Dans l'armée de Phelgra, les trois lhurgoyfs rencontrèrent le pire que l'on pouvait imaginer. Ils participèrent à une guerre dont ils ne comprirent guère le motif, trop jeune, trop volontaire... Jézabel encore aujourd'hui raconte avec beaucoup de sagesse l'imbécilité qui fut la sienne de vouloir protéger quelqu'un qui était déjà perdu. A quel prix? Elle souilla ses mains du sang d'un bon nombre d'innocents, croisant le faire avec des hommes dont elle ne connaissait la motivation, usant de magie jusqu'à l'épuisement afin de rester en vie dans la barbarie. Les armées de Phelgra avaient été l'une des plus puissantes, ayant à son service des personnes qui ne souhaitaient que la bataille, ayant le goût des larmes. La jeune femme se battit parmi eux alors qu'en elle grandissait des sentiments qu'elle ne s'expliquait pas. Jour après jour, pendant des mois, chaque fois qu'elle se levait pour revenir dans les nouveaux assauts en se posant toujours la même question : qu'est-ce que je fais là? Est-ce que c'est vraiment pour protéger mon frère? Est-ce que je ne suis pas en train de découvrir une part sombre de moi-même? Pourquoi est-ce que je lève mon épée pour frapper ce homme et cette femme là? Pourquoi l'ai-je tué? Et alors que les corps s'écroulent en affichant un visage horrifié, cette expression qui annonce qu'il laisse derrière lui quelque chose à regret, vous percevez une silhouette qui s'acharne avec horreur sur sa victime, votre frère. Ekzékiel était beaucoup plus qu'un démon, mais un dément. Mais dans une guerre, il n'y a pas de héros, il n'y a jamais de vrai victorieux. Alors vous vous cachez derrière des mensonges, vous cherchez à vous convaincre que ce que vous faites était une bonne chose ou la meilleure chose à faire. Et le jour suivant tout recommence....
Sauf que ce jour là, tout fut différent. Le champ ne bataille ne vibrait plus, les adversaires sont aussi épuisés que vous. Jézabel avait dans les derniers jours faits face à des individus ayant perdu leur énergie et leur instinct de bataille... les corps qui commençaient à se putréfier autour de vous vous rappelle l'horreur, vous ne marchez même plus sur le pavé, mais dans des mares de sang poisseuses. Mais alors que vous vous obstinez à ne pas abandonner, vous vous rendez compte que tout était déjà fini avant même de l'avoir compris. Parmi les combattants, une once de secondes, elle avait cru percevoir son frère s'attaquer à Sirion, mais cela était impossible, non? Pourquoi s'en prendrait il à son meilleur ami et votre fiancé? Vous pensez à un mirage avant d'ouvrir les yeux sur l'irréparable. Siron enfonçant sa lame dans le corps d'Ekzékiel. Votre bouche se déforme dans un cri déchirant, vous l'appeler, vous insultez les cieux.... Vous voyez les yeux de votre frère, un sourire, son dernier sourire... tout s'efface autour de vous et qu'importe les ennemis, vous courrez dans sa direction. La rage qui vous consume vous dépasse.... Mais Ekzékiel mourra dans vos bras avec une mystérieuse expression, celui d'un homme apaisé que vous ne lui connaissez pas, vous prenant dans les bras alors que vous versez des larmes. Mais Jézabel devait trouver un coupable, elle devait trouver un responsable. Sans quelle ne puisse se contrôler, elle s'arma pour affronter l'homme qu'elle aimait. Sirion avait été l'ombre de lui-même, prêt à céder devant la détresse de la femme qui l'aimait, il lutta un temps avant que Jézabel n'ait le dessus sur lui et dresse son arme sous sa gorge. Le visage de la lhurgoyf était à la fois maculé de sang et de pleurs, et l'expression de ses yeux indiquaient la tragique douleur qu'elle ressentait. Le jeune homme attendit, il attendait alors la mort avant qu'elle ne lâche son épée à vos pieds. Qu'avait-elle vu au travers de son regard? Elle ne dit mot, muette, incapable d'expliquer tout ce qui se déroulait là alors qu'à ses pieds se trouvaient le corps sans vie de son jumeau. Et elle disparut...
◈◈◈◈◈
Nouvelle vie
Pendant des années, des siècles, Jézabel avait cherché à fuir sa vie passée et la douleur de la perte de son frère. Il avait été sa faiblesse et elle avait failli, elle n'avait pas fait preuve de discernement. Quant à Sirion, elle avait finalement impliqué dans une histoire qui ne le concernait pas parce qu'elle n'avait pas eu la trempe nécessaire pour faire face à la réalité. Et ce fut par lâcheté que finalement elle lui tourna le dos. Il lui fallut un bon nombre d'année et d'erreurs pour qu'elle finisse par accepter ses fautes. Bien qu'en réalité personne ne sut avec exactitude ce que traversa la jeune femme pendant une très longue période, elle réapparut mystérieusement sereine et assagie par les années, bien que son visage lisse ne trahissait nullement son âge. La première fois, on la vit à Hespéria, capitale des Terrans où elle y fait une très brève apparition avant de se fondre dans la nature. On dit que ce fut à cette période où la ville était encore de moindre population qu'elle aurait fait la rencontre d'une Eryllis qui aurait été attiré par son étrangeté. On ne connaît que peu les circonstances qui la firent entrer dans leur rang, mais on dit que cela remonte à l'époque de la naissance des amazones. Aussi étrange que cela fut, Jézabel y apporta beaucoup et comme pour redémarrer à zéro, elle changea de nom. Jézabel Shemhazaï la maudite n'existait plus, mais la sauvage Sighild allait apparaître.
Sighild était une sœur normale parmi les Eryllis, avant que son nom gagne en importance parmi elle. Sage, intelligente, redoutable, elle se montrait des plus efficaces. Elle protégeait les siens comme personne, elle éduquait les autres femmes à leur nouvelle vie comme un guide. Ce fut avec un grand naturel que la jeune femme prit la place de l'ancienne dirigeante de leur groupe, nominée par les autres jeunes femmes à l'époque qui donnèrent leur appuis dans ce choix. Elle hésita curieusement longtemps avant d'accepter, ne se sentant pas idéale pour ce poste jusqu'à ce qu'elle cèda, faisant une promesse que personne ne connaît aujourd'hui encore à l'ancienne meneuse des Eryllis. Pendant des années, notre lhurgoyf dût faire ses preuves, elle dût s'imposer et faire placer sa propre loi.... pour peut-être enfin retrouver l'estime qu'elle avait perdu d'elle-même...
◈◈◈◈◈
► Début de l'An 1302, ère de Félicité
Le début de l'année 1302 aurait pu être des plus banals si une mystérieuse créature ne causait pas la disparition de nombreux voyageurs et l’éviscération de créatures de Noathis. La région forestière était devenu la scène de théâtre d'évènements aussi étranges les uns que les autres, notamment l'assassinat d'un conseiller des cavaliers de Sharna qui répondait au nom de Ivan Mackori. Afin d'éviter un conflit avec le continent sombre, une grande recherche fut organisée pour découvrir l'identité du meurtrier qui finit par être trouvé. Il s'agissait d'un fanatique répondant au nom de Gorvack dont on ignorait l'origine (un des premiers syliméas apparut sur Isthéria). Dangereux et irraisonné, Sighild s'opposa à ce dernier avec plusieurs isthériens afin de l'arrêter, mais ce dernier ne se laissa faire et obligea l'Eryl à en finir avec lui après que ces compagnons l'eurent assailli. Bien que la bataille aurait pu être anodine, elle marqua toutefois la forêt où l'énigmatique Gorvack laissa son empreinte dans le lieu que l'on appelle "Les Terres Mortes".
► Fin de l'An 1302, ère de Félicité
Cette année là se trouvait bien éloignée du terme de félicité car le monde découvrit le terrible fléau qui portait le nom de Sarnarhoa, la maladie de pierre. Alors que Sighild eut le malheur de perdre plusieurs de ses sœurs sous cette malédiction, elle entreprit de s'associer avec d'autres aventuriers afin d'enquêter sur le point d'origine de la maladie. Cela la conduisit à traverser le monde pour retourner dans un lieu qu'elle évitait le plus possible : Taulmaril. Si cela fit remonter en elle parmi les plus douloureux souvenirs, elle n'en fit pas moins preuve d'audace et de courage en se dressant face à la cause du présent malheur des terres isthériennes : le colosse, le premier éveillé. Là, elle et ces compagnons de l'époque découvrirent qu'un seul contact direct avec la créature gigantesque engendrait la maladie et que le seul moyen de l'arrêter était de s'en prendre à l'impossible tâche de s'attaquer au colosse.
Alors que l'impétueuse Eryl prit part au combat, elle fut touchée par la sarnarhoa, mais dans un acte désespéré, elle accéléra son mal en usant de sa magie jusqu'à ce que la maladie s'empara en grande partie de son être et y perdit le bras, sans savoir qu'à quelques lieues de là, dans la cité voisine, un remède avait été trouvé. Celle qui autrefois se faisait appeler Jézabel pensait que la mort viendrait la faucher, qu'il s'agirait d'un dernier acte de sa vie jusqu'à ce que la plus improbable des personnes viennent à lui sauver la vie : Démégor, le chef des sombres cavaliers de Sharna. Ce jour-là, elle découvrir que derrière le masque du plus méprisé des êtres de Phelgra se cachait en réalité son frère disparu, Ekzékiel. Le colosse repartit se mettre en sommeil, Sighild amenée auprès de soigneurs qui la guérirent in extremis.
► L'An 1303, ère de Félicité
Après avoir découvert que son frère était toujours en vie, Sighild plongea dans une grande période de trouble et de remise en question. Pendant des siècles, cette dernière s'était sentie coupable du sort funeste de son frère et en avait même fini par repousser Sirion qu'elle imaginait coupable de sa mort. Une vérité si violente qui lui fit s'interroger sur ses capacités à gérer l'ordre des Eryllis, alors qu'au même moment, la protection du village caché des amazones était en train de faiblir, sans qu'elle ne trouva une solution - ou plutôt se refusa à appliquer une solution qu'elle connaissait, un secret bien gardé des Eryl.
A cette même période, un nouveau colosse s'éveilla et engendra ce que l'on appela : le myste rouge, une matière entravant la magie de quiconque se trouvait à proximité du nuage. Si la peur s'empara de la population mondialement, Sighild se lança à nouveau dans cette quête pour ne plus avoir à penser. Le secret du colosse se trouvait néanmoins à Noathis et amena à la découverte du cité oublié et engloutie par la végétation, la cité d'Elgondor. Après avoir compris que l'immense colosse n'était pas un être hostile - bien que responsable des émanations de myste rouge - et qui se rendormit comme pour celui de Taulmaril, Sighild décida de reprendre les rênes de sa vie et choisit de faire migrer ses soeurs vers la cité nouvellement trouvée. Elgondor allait devenir le nouveau fief des amazones et le colosse serait leur protecteur involontaire.
► L'An 1304, ère obscure
Le monde commençait à changer, après l'apparition des deux premiers colosses, les isthériens commençaient à se rendre compte de la fébrilité de leurs existences. Les divers royaumes d'Isthéria cherchaient à nouveau leur place et les jeux des politiciens nouveaux commençaient. A cette même occasion, l'Eryl savait pertinemment qu'il était temps pour elle et ses consœurs d'étudier une nouvelle façon de co-exister avec ce monde changeant mais aussi de prévenir les potentiels regards qui pourraient se tourner vers les richesses de leur territoire. Trouver des nouveaux alliés de confiance et de poids allaient devenir primordial, tout comme trouver de nouvelles camarades pour renforcer leur rang.
Ce fut à cette occasion qu'un troisième colosse s'éveilla en l'apparition d'une créature plus petite que les autres, mais toute aussi puissante. Se trouvant alors à Hespéria la grande capitale, Sighild dût faire face à un nouveau phénomène qui l'obligea à faire face à une autre angoisse très personnelle : sa transformation monstrueuse. En effet, la terrible créature provoqua une énorme vague de changement pour chacune des créatures d'Isthéria, les obligeant à faire face à ce qu'ils étaient vraiment. Par chance, le royaume Eridanien qui avait hérité à nouveau d'un roi vit son armée mettre à mort le colosse nouvellement apparut.... mais les dégâts causés furent nombreux et désastreux. Quant à Sighild, elle réussit à ne faire de mal à aucune créature autour d'elle et à maintenir sa conscience de manière absolue. Elle n'avait plus aucune raison d'avoir peur d'elle-même.
► L'An 1305, ère obscure
Après deux années à passer à ignorer Démégor, Sighild se décida à se rendre à Phelgra, non pas pour le rencontrer lui, mais l'un de ses cavaliers qui souhaitaient la rencontrer. Bien qu'à l'issue de cette réunion, elle ne réussit pas à bien déterminer ce que voulait cet homme, le destin plaça sur son chemin la personne dont elle n'avait plus croisé le regard depuis la guerre de Taulmaril, Sirion, qui ironiquement devait lui remettre une missive de la part de son frère. Leur retrouvaille fut comme une révélation. Bien que des siècles s'étaient écoulés et malgré le mal qui leur fut causé, leurs sentiments communs n'avaient étonnamment pas changés. Ce fut autant une douleur qu'une joie profonde, et ils n'échangèrent aucun mot. Ils s'aimaient toujours.
Après des retrouvailles passionnelles et une mise au point de leur situation personnelle, ils prirent tout deux de grandes décisions, dont celle d'enfin pouvoir affronter directement le responsable de leurs maux : Démégor lui-même. Mais avant d'engager tout combat qui pourrait sceller leur destinée, Sirion demanda la main de Sighild tout en ayant que faire du statut qui était le leur. Leur lien était une évidence qu'il voulait sceller par un acte symbolique et Jézabel lui répondit par l'affirmative. Dans le plus grand secret, les anciens amants s'unirent enfin à Amaryl alors même que le monde tremblait sous les effets de l'étrange phénomène de Convergence. Ce fut sur cet acte qu'ils se séparèrent pour affronter leur destin : Sirion allait s'opposer à Démégor et Sighild allait préparer ses sœurs à prendre de nouvelles dispositions pour protéger leur royaume.