Invitation au Bal de la Rose

Sujet: Invitation au Bal de la Rose Dim 19 Avr - 12:52

Le cavalier solitaire chevauche depuis plusieurs jours. Il ménage sa monture et sa propre endurance. Il évite les mésaventures qui parsèment parfois sa route. Son message est important mais ne requiert certes pas qu'il prenne davantage de risque. Au matin de sa dernière halte, il prend soin de soigner son apparence et arbore avec fierté le symbole de son duché, un lion ailé or sur fond rouge.

Il arrive en début de journée aux portes de la cité, chef lieu du duché de Nivéria. On reconnait rapidement sa qualité de messager et s'il y est autorisé, il ira jusqu'à la salle d'audience de la duchesse de Nivéria. Se redressant, il dépliera un parchemin jusqu'ici soigneusement roulé et clamera haut et fort :

- Ma Dame Lehoia veuillez accueillir les salutations de la maison Vanes. A l'occasion du dix-huitième anniversaire de Mademoiselle Pandora Vanes, vous et votre famille êtes cordialement invités à rejoindre les festivités et le bal qui auront lieu sur les terres de Vanes le 15 du mois de Mirios.

Le messager reprend une inspiration et poursuit :

- De nombreuses festivités se tiendront à Heldor pour l'occasion, célébrant la beauté de notre glorieuse nation. Le Bal sera l'occasion de revêtir vos plus beaux atours ainsi que, exceptionnellement, un masque de votre convenance. Soyez assuré que votre présence sera appréciée.

Une nouvelle pose, cette fois, le temps pour le messager de se saisir d'une petite boite de bois et de la tendre, ouverte, à la duchesse elle-même ou au premier serviteur qui se chargera de mener l'objet jusqu'à la duchesse.

- Vous trouverez en ce modeste présent, l'attention particulière que nous portons à votre invitation.

La boite renferme un masque finement ouvragé, un travail d'orfèvre remarquable qui fait en partie la réputation du duché de Vanes. Le soin avait été apporté de faire apparaitre de manière subtile, les symboles du duché de Niveria, ici il s'agissait de référence à deux produits emblématiques du duché, la porcelaine blanche et le grès noir.

- Bien entendu des appartements seront préparés pour vous et votre famille, dès que notre messager rapportera votre réponse. Nous l'espérons positive. Veuillez agréer, madame la Duchesse, de notre considération distinguée.

Le message enroule son parchemin et s'incline avec respect, marquant la fin de son monologue ainsi que l'achèvement de sa noble mission. Il repartira dans l'heure, porteur de la réponse de son destinataire.

Sujet: Re: Invitation au Bal de la Rose Dim 19 Avr - 18:56

L’air soucieux et les sourcils légèrement froncés, la toute nouvelle duchesse était assise sur une chaise en bois de chêne déjà usée et polie par des années de pratique, et des séants tout aussi nombreux. Ses dernières matinées avaient été occupées par divers problèmes, dont elle devinait pour beaucoup à peine l’existence. La chasse de gibiers, le contrôle du nombre de sangliers dans les vallées, les querelles de chasseurs, les exigences d’un artisan qui réclamait une meilleure matière première. Milles questions plus ou moins importantes mais qui méritaient égal examen. Cela la changeait des messes et des pèlerins, même si elle ne savait pas encore si c’était pour le mieux ou pour le pire. Dans de longues audiences où le semblant de hiérarchie finissait par s’effacer rapidement, chacun s’octroyant un temps de parole égale pour débattre sur un pied d’égalité, la sirène finissait par chercher chez Ursa une réponse avisée.

Mais ce jour-là, il n’était question ni de viande, ni de cuir, ni du nombre de truites abattues dans le mois. Un message était arrivé la veille pour sommer la prêtresse au Haut-Monastère, et un petit convoi s’apprêtait à quitter Nivalessa dans la journée, Othello en son cœur. Et alors qu’on préparait encore les fournitures d’étude et de culte, la jeune femme, auréolée de son interminable crinière bouclée qui tombait jusqu’à ses mollets, et à cet instant dans la poussière des dalles de pierre, avait l’air consternée devant le grand discours d’Ursa et de Balthazar sur le nombre de mains armées à amener, surtout après l’attentat qui avait eu lieu au Monastère la dernière fois.

« - N’avez-vous pas fini vos disputes ? » Finit-elle par trancher, roulant son visage de porcelaine et croisant ses longs doigts diaphanes. « Il est inutile de revenir sur ce qui a été décidé, Ursa. Tout ira bien, ne t’en fais pas. »

Le quinquagénaire à la trogne hideuse prit un air encore plus bourru sous sa barbe épaisse. Ancien chambellan cimmérien, il servait le duché depuis plusieurs années, et était pour Othello plus un père qu’un serviteur. Il la couvait comme on veille un enfant, et ne prenait plus la peine ce cacher qu’il faisait plus de zèle que nécessaire. Ses yeux sombres s’illuminèrent d’une étincelle revancharde et alors qu’elle comprenait qu’il allait répliquer, la porte s’ouvrit en grand sur un autre maître de maison, qui entra dans la pièce suivit d’un messager. Les blasons qu’il arborait fièrement à la poitrine représentaient un lion ailé, un symbole qu’elle identifia difficilement comme étant ceux du duché voisin. Elle peinait grandement à mémoriser les autres armoiries, mais celui des de Vanes s’était plutôt facilement gravé dans sa mémoire.

« - Ma Dame, Mesdames et Messieurs de la cours. Un message du duché de Vanes. » Annonça le chambellan.

Alors que les autres membres de l’assemblées se retournaient vers elle dans une certaine expectative, elle leva la main, baissant ses épaules et reculant doucement sur sa chaise. D’un regard doux, elle indiqua au jeune homme de procéder.

Il entama son discours, et la jeune femme écouta avec un grand intérêt. Un bal, donc ? Un sourire amusé se dessina bien malgré elle sur son visage, alors que le mot déterrait des souvenirs embrumés pas si anciens que ça. La danse, les marchands… Les baisers volés et les déclarations sur les balcons. Le fantôme de Fenris se dessina un temps au dessus de son épaule, et elle cilla bien malgré elle pour le laisser partir.
L’idée n’était pas déplaisante, mais elle s’interrogea alors sur la logistique que ce voyage engendrerait. Ils en avaient certainement pour une douzaine de jours à voyager jusqu’au Haut-Monastère. Le duché de Vanes étant son plus proche voisin, il lui faudrait au moins autant de jours pour s’y rendre, compromettant grandement sa présence au monastère. Mais après tout, elle ne comptait pas s’y éterniser outre mesure sans en savoir plus sur les motivations du Haut-Prêtre de Delil, et surtout avec la fièvre qui ravageait la nation.

Alors qu’elle sombrait dans une moue songeuse, ses traits de poupée doucement absent, le messager découvrit alors un coffret ouvragé qu’on lui porta du bout des doigts – il la tendit vers ce qu’il prit pour un employé, mais qui se trouvait en réalité être un éleveur de chevaux qui se chargea de lui remettre le bien. Quand elle découvrit l’intérieur de la boîte, elle fut éblouie par la qualité du masque qu’on lui offrait, un hommage non dissimulé aux biens du duché. Un ouvrage d’un prestige indéniable et impressionnant, et Othello resta de longues secondes à le contempler. Aussi, quand le messager eut fini, elle releva vers lui ses deux yeux d’ébène. Dans une inspiration profonde, Ursa se prépara à prendre la parole, mais elle le coupa dans son intention tout aussi brusquement, remplissant la pièce de sa voix claire.

« Monsieur, merci pour tout. » Elle se leva et s’avança jusqu’au messager, marchant d’un pas évanescent sur le protocole et l’étiquette qu’elle ne maîtrisait pas vraiment, et qu’elle se permettait volontiers d’oublier sur ses terres. « Votre maison nous a fait un cadeau remarquable, et vous pourrez leur répondre que je serai ravie d’assister à la célébration. Si je peux faire quoique ce soit en ma qualité de prêtresse, vous me verriez obligée. » Ses mains jointes se détendirent doucement, effacées par un sourire sincère et pur.

Il était inutile de regarder Ursa pour le voir grimacer de désaccord. Mais elle s’arrangerait bien pour faire le voyage entre le monastère et le duché de Vanes, et assister à l’anniversaire de la jeune fille. Un tel présent devrait être honoré, et elle se rappela des vœux qu’elle avait fait au roi. Après tout, il n’y avait nul meilleur moyen de se présenter à ses nouveaux voisins qu’à les découvrir ainsi. De plus, elle craignait grandement, en sa qualité de nouvelle venue dans le grand jeu du pouvoir, qu’une absence de sa part soit très mal perçue. C’était ainsi tranché : le messager pu repartir vers ses terres, ou vers les autres missions qui lui ont été assignées. Ursa soupira : dans l’après-midi, ils étaient partis vers le Haut-Monastère.