[EVENT] Voyage entre ladrinis {Enkara}

Aussi étrange que cela était, la nouvelle venue ne se braqua pas quand il l’appela simplement femme encore plus, elle l’appela par le même type de vocabulaire. Enfin une personne normale ? Peut-être bien. Et cela lui allait tout à fait qu’on ne se frustre pas d’une telle appellation.

« D’ici cinq heures je serais prêt. Je t’attendrais dehors, à l’entrée. » Raël marcha quelques pas encore. « Tu peux dormir dans cette pièce si tu en as besoin. Je vais là. »

Il ne lui adressa qu’un seul bref regard avant de la quitter des yeux et d’aller se poser. Un peu moins de cinq heures lui seraient suffisantes pour se reposer, il ne tarda donc pas à se coucher dans un coin matelassé de la pièce. Pour une fois qu’il avait l’occasion de dormir dans un endroit ou personne, ni animal, ni autre être humain ne viendrait le déranger, il n’y dirait pas non. Pas vraiment du genre à s’interroger avant de dormir, le scorpion ne tarda pas à s’endormir.

Comme bien souvent, aucun rêve ne vint le perturber et c’est peu avant vingt heures qu’il ne se réveilla. Pour autant, il n’avait pas l’impression d’être aussi en forme que d’habitude. Il avait un léger mal de tête et se massa la tempe avant de simplement se préparer une décoction à la tenace. Il ne tombait que rarement malade, mais cela pouvait bien arriver, pour autant, cela ne l’alarma pas. Il vérifia le contenu de son sac, sortant un peu en avance pour récupérer de l’eau dans ses bouteilles et de la viande séchée. Le voyage ne serait pas de tout repos. Il se contenta ensuite d’attendre la femme alors que les soleils avaient déjà quitté le ciel depuis un long moment, la capuche bien sur sa tête.

Raël ne dû pas attendre bien longtemps avant d’apercevoir la silhouette de cet après-midi. S’il pouvait lui donner une humeur, il aurait pu dire au son de sa voix car elle avait l’air d’avoir autant d’entrain qu’il y a quelques heures. Elle avait même elle aussi pensé à faire quelques courses. Ce qui présageait déjà de quelqu’un qui savait se débrouiller en voyageant dehors. C’est ainsi que, toujours sans chaussure, il commençait à marcher en direction de la sortie de la ville, n’ayant rien dit mais ayant fortement supposé qu’elle comprendrait. Ce chemin il le connaissait très bien et le voyage ne serait pas long. Peut-être un peu ralentis par la météo, et encore, son corps lui permettait d’être relativement efficace même en ces temps qu’il exécrait.

C’est avec plaisir qu’il remarqua qu’elle n’était pas le genre à faire des pauses trop fréquemment et qu’il n’avait pas besoin d’adapter son rythme de marche. D’habitude, il le faisait avec les clients car ces derniers le payaient, en revanche, il n’avait en général pas l’intention de le faire avec les gens qui étaient d’égal à égal, excepté si les personnes étaient loin d’être rompues à l’exercice. Raël était bien silencieux, si bien qu’il ne connaissait toujours pas le nom de la demoiselle qui l’accompagnait et elle le sien. Dans tous les cas, cela ne sera pas lui qui ferait le premier pas c’était certain. Lui pouvait bien voyager avec un ou une inconnue sans que ça ne le dérange.

En hiver le danger était un peu moindre, les animaux hivernaient ou hibernaient, laissant les quelques voyageurs tranquilles.

Une fois le jour arrivé, Raël trouva opportun de faire une vraie pause et s’arrêta à un point d’eau. S’étirant et enleva sa capuche, déposant son sac le scorpion allait se revigorer en aspergeant un peu son visage d’eau. Elle était froide mais quoi de plus normal ? Ce n’était pas comme s’il n’avait pas l’habitude. Raël ouvrit sa cape mais la garda. Il ne savait pas s’il pouvait faire confiance à la personne à côté de lui, même s’il voyageait avec elle. Et de toute façon, il n’avait jamais fait confiance de suite. Malgré la tenace, il ne se sentait pas aussi en forme que d’habitude. Etait-ce à cause du froid ? Etait-il vraiment tombé malade ? Il devait faire en sorte que cela ne se voie pas… Du moins, il l’espérait.

L’eau sur son visage, bien que froide, lui fit du bien, et il laissait couler quelques gouttes dans ses cheveux et sur son torse en soupirant. Raël avait un peu plus chaud qu’à l’accoutumée Etait-ce à cause de sa marche alors qu’il faisait froid ? Ou de la fièvre ? Cela pouvait être, pour le moment, l’un comme l’autre alors il ne préférait pas spécialement s’en inquiéter. Ce n’était de toute façon pas vraiment le genre de garçon à avoir peur d’une fièvre, bien qu’une maladie pût être fatale en pleine nature il avait tout ce qu’il fallait dans son sac pour s’en occuper si la légère sensation de faiblesse qu’il ressentait devait devenir plus sérieuse.

La demoiselle ne mit pas si longtemps que cela pour débuter une conversation. Lui n’y était pas fort -première nouvelle- alors il avait tendance à suivre le rythme de conversation des autres. Du moins, quand il n’était pas dérangé de parler et quand on ne lui posait pas de questions indiscrètes. Ce qui n’était pas le cas ici. Raël ne considérait pas sa race comme une question gênante. On la lui posait parfois, et il y répondait toujours la même chose.

« Un yorka. »

Le ladrini préférait laisser la partie scorpionesque de son anatomie à côté, pas qu’il considérait cela comme indiscret, mais que certaines personnes n’étaient pas tout à fait à l’aise avec ce fait. Ce n’était pas non plus comme si leurs réactions étaient si importantes pour lui, et là, il ne savait pas vraiment quoi en penser. Il ne lui retourna pas la question, il était plutôt évident qu’elle était une sindarine.

« Et cela dépend de ce que tu veux savoir de moi. »

Les limites, les limites, tout de suite. M’enfin il pouvait en dépasser certaines dépendant de la confiance qu’il accordait aux personnes. Lui n’avait pas l’habitude de retourner les questions, pourtant ce n’était pas pour cela qu’il ne s’intéressait pas aux autres, mais il avait du mal à le montrer…

S’asseyant à un endroit sec, sous un arbre, Raël découpa de la viande séchée avant d’en manger, et prit aussi un fruit. Il tendait aussi de la nourriture à la sindarine. Pas bavard, mais pas trop inamical pour autant…

Qu’elle veuille ou non de la viande ou des fruits, il le laissait déposé dans son sac, haussant les épaules, elle pouvait se servir si elle le désirait.

Dès lors qu’il lui annonçait que cela dépendant, la jeune femme ne tarda pas à le harceler de questions diverses tout en donnant aussi des informations sur elle, justifiant cela par une probable rencontre d’ennemis… Ce qui n’était pas tout à fait une mauvaise idée et pouvait suffire à Raël pour donner quelques informations sur lui. Comme il l’avait déjà vu, elle maîtrisait la glace, mais elle avait aussi un contrôle télékinésique et d’absorption d’essence. Avec toutes ces informations sur elle, il pouvait bien se permettre de partager les siennes, ce n’était pas comme si cela le mettrait en danger.

« Je suis un scorpion. » La première information était donnée. Il n’allait pas donner autant de détails, il n’en avait pas vraiment besoin et ce n’était pas le genre… « Et mes pouvoirs se concentrent sur le poison. »

Plutôt cohérent avec sa race. La dame pouvait donc deviner aisément que la masse qui partait du bassin du scorpion était un long dard. Si elle connaissait un tant soit peu ces petites bêtes, elle pouvait savoir qu’ils n’y voyaient pas bien, qu’ils étaient résistants aux températures et qu’ils avaient un rythme de vie nocturne. Et si en plus, elle s’y était interessée, elle n’aurait certainement pas peur de son dard car très peu de scorpions étaient mortels pour les humanoïdes… Et il n’en faisait pas partie. Enfin, cela, elle ne pouvait pas le deviner…

Etait-ce donc la peine de garder sa cape ? Marf. Il l’enleva donc. On ne voyait pas nettement son métasome, mais, au moins le bout, courbé vers lui, suivant un peu sa jambe pour éviter de s’asseoir dessus. Prenant un peu d’eau, il alluma un feu en créant un petit foyer avec des bois secs qu’il avait récupéré le long du chemin, et quelques feuilles pour faire chauffer de l’eau dans le but de se faire une infusion pour la fièvre, prenant quelques herbes.

Si on attendait de lui qu'il continue la conversation en posant d'autres questions...

Une fois la réponse à sa curiosité apportée, la femme n’avait pas l’air d’avoir envie de lui en poser d’autres. Il en conclut qu’il devait avoir satisfait sa curiosité, et sans doute qu’elle se posait ces questions depuis le début mais qu’elle avait eu la décence (ou non) de ne pas les poser immédiatement. Il se sentait bizarrement observé, elle ne serait pas la première qui lui poserait des questions sur ses attributs yorkas, cela attisait souvent la curiosité et rendait les gens moins polis… Mais ce n’était pas comme si le scorpion était du genre à être poli en toute circonstance ou…. A l’être tout court, n’est-ce pas ?

Partageant simplement quelques fruits sans attendre quoi que ce soit, il avait débuté une petite infusion, espérant que cette fois, les plantes feraient un peu plus d’effet. Celles-ci étaient bien plus indiquées et puissantes que la tenace, alors sans aucun doute que cela marcherait.

Et le scorpion s’était attendu à un peu tout, attentif aux environs mais pas à ça… Pour être surpris, on peut dire que oui. Il eut un mouvement de recul et lâcha même… un grognement… Une réaction parfaitement instinctive et naturelle. Non pas de sa part animale, mais parce qu’il n’avait jamais eu de réels contacts avec les gens. Vraisemblablement surpris, le scorpion fit la moue. Il n’était pas habitué à ce qu’on vienne le toucher ainsi, surtout avec un geste aussi maternant. Au moins, elle n’avait pas touché autre chose que son front… Il fronça les sourcils à sa question. Est-ce qu’elle s’inquiétait pour lui ou bien simplement parce qu’il pourrait être moins rapide s’il était malade ?

« Je vais bien. Mais ne recommence pas. Humpff. »

De toute façon elle avait bien dû se rendre compte qu’il n’était pas un homme très tactile. Et puis c’était très étrange de se faire approcher, encore plus lorsqu’elle savait à présent de quelle espèce il était… Les gens avaient tendance à agir totalement différemment… Et Raël lui-même avait tendance à penser que c’était une bonne chose.

Sans dire autre chose, il prit simplement le récipient qui lui servait de tasse pour y mettre l’infusion, attendant un peu que le tout refroidisse pour la boire, gardant un œil attentif sur la femme pour pas qu’elle réitère ce qu’elle venait de faire. Pour autant il ne lui en voulait pas, n’était pas fâché envers elle, il se contentait simplement de grogner son mécontentement.

Et bien heureusement que la jeune femme n’a pas demandé son autorisation, en effet, sinon, elle n’aurait jamais pu le toucher. Dans tous les cas, vu qu’elle n’avait pas l’air d’être dégoûtée ou apeurée par son physique (en fait, elle avait presque l’air du contraire), il n’était pas dérangé d’être observé par ce qu’il pourrait dénommer comme étant une « saine curiosité », du moins, à peu près. Les apparences yorkas avaient souvent attisés la curiosité et le dégoût (ou les deux), et Raël n’était pas assez cortiqué (ou il n’en avait pas envie, à vous de choisir) pour s’interroger sur une probable curiosité malsaine et complexe de la part de son interlocutrice. Après tout, tant qu’elle n’avait pas l’intention de se moquer de lui, elle pouvait bien faire ce qu’elle désirait, même si elle risquait de se confronter à ses grognements… Sauvage hein ?

Buvant l’infusion qu’il s’était fait, il observait son animal qui réclamait câlin. Iri n’était heureusement pas comme ça, son aigle avait bien l’habitude du comportement de son maître et excepté lorsqu’il le sifflait, l’oiseau était totalement indépendant. Il chassait, trouvait un abri seul, bien qu’il puisse parfois squatter Raël lorsqu’il le désirait, particulièrement par temps froid ou de pluie, le scorpion ne chassait pas l’animal.

Tiré de son observation du ciel avec son aigle qui faisait quelques tours par les paroles de la demoiselle, Raël reposa son regard sable sur elle.

« Nous allons en effet dormir de jour. Sauf si tu souhaites avoir un rythme de journée. Je peux m'adapter. Et je pense dormir en premier, pour profiter des effets de l’infusion. »

Raël n’était bien sûr pas égoïste, il pouvait dormir de nuit, ou mi-nuit et mi-jour, ce ne serait pas la première fois, la sindarine n’avait pas à s’adapter complètement à lui. Il n’allait cependant pas le répéter plusieurs fois, considérant qu’elle était assez grande pour s’affirmer ou non.

Après un énième tour d’arbre, Iri, le volatile se posa sur l’épaule de Raël, serres toutes dépliées. Avec sa peau solide, il n’avait pas eu besoin de lui apprendre à rétracter les serres, ce qui était parfois problématique lorsqu’il posait ses pattes sur d’autres gens. Mais cela arrivait très rarement. Avec la rareté des proies, Raël prit un peu de viande séchée pour la donner à son aigle. Il devait sans doute avoir un peu froid là-haut.

Le scorpion allait attendre un peu avant de s’endormir, pas bien longtemps, mais il voulait tâter l’ambiance de la forêt avant de fermer l’œil.
 

 La sindarine avait l’air intéressée par son aigle. Ce n’était pas la première, et cela ne serait pas non plus la dernière. Elle ne tarda pas à l’interroger sur son sexe. Il ne comprit pas forcément en quoi c’était intéressant, mais il n’était pas dérangé à divulguer cette information.

« C’est un mâle. »

Avoir une femelle serait un peu compliqué en réalité, notamment si celle-ci devait porter ou prendre soin des petits, elle ne pourrait plus vraiment quitter l’endroit où elle avait fait son nid. Alors il était bien plus pratique d’avoir un mâle qu’une femelle. Hochant simplement la tête à ses propos, il aurait pu lui dire que ce n’était pas la peine de le réveiller mais il n’en fit rien. Il se contenta d’observer son comportement avant de fermer les yeux.

Le Scorpion ne dormait que d’une oreille, du moins, en général. Là, contre toute attente, il atteignit plutôt rapidement un sommeil profond, et, pouvait-on l’espérer, réparateur. Pourtant, devant des étrangers -ou même, devant des gens- il ne dormait jamais aussi profondément, et surtout pas, lorsqu’il était en forêt. Il fallait croire que la fièvre l’avait aidé à passer dans un état de sommeil plus profond.

Il ne recouvra ses sens que lorsqu’elle s’approcha « un peu trop près », sursautant presque. Hmm… Il s’était endormi si profondément ? A tel point qu’il lui fallait quelques secondes pour émerger. Et quelques secondes quand on est attaqué… C’est toujours dangereux. Il ne tarda pas à avoir un visuel net de la sindarine et de se redresser. Il n’était pas du genre à faire des rondes, car il pouvait ressentir les différents mouvements à proximité mais bouger lui semblait être une bonne idée, d’autant plus qu’il pourrait ainsi se rendre mieux compte de son état. L’infusion avait eu l’air de marcher en tout cas, il se sentait plus reposé.

S’était sans rien dire, Iri était quant à lui sur une branche solide juste au-dessous d’où dormait Raël. Le scorpion n’avait pas grand-chose à dire. Inutile de demander si la garde s’était bien passée, elle n’avait pas l’air d’être blessée, alors c’était que tout allait bien. Sa discrétion avait du bon, il laissait ainsi la jeune femme dormir.

Alors que la journée était bien entamée, Raël alluma un feu discret dans le but de manger autre chose que des fruits. S’il était malade, alors il avait besoin de forces, et ils en avaient tous les deux besoins pour marcher. Il prépara alors ce qui ressemblait à un -bon- ragout, laissant une part à la demoiselle alors qu’il surveillait encore les environs, attendant son réveil.
 

Au salut du mati Raël ne répondit qu’un seul regard, c’est-à-dire, rien. Au moins, il l’avait vu. Il distribua ainsi la nourriture. Excepté un remerciement, Enkara ne lui avait pas adressé la parole. C’était une bonne chose, car le scorpion avait besoin de longs moments de silence quand il voyageait avec quelqu’un, surtout quand ce n’était pas un client et qu’il n’était pas dans un minimum d’obligation de faire bonne figure. Enfin, ce n’était pas pour cela qu’il changeait de personnalité, en général, on se doutait bien vite que le scorpion n’était pas du genre à papoter, et on faisait avec ou bien on se prenait des vents.

Rangeant son matériel, ils reprirent la route tranquillement dans le calme de la nuit. Iri avait fait sa nuit et voletait au-dessus des deux, lançant quelquefois des cris, tout comme d’autres animaux nocturnes. Après avoir marché un moment dans le silence, la sindarine finit par parler, pour lui demander s’il était d’accord de trouver un point d’eau. Cela faisait en effet partie des envies du scorpions, il avait aussi envie de remplir ses gourdes mais bien évidemment de se laver. Surtout quand on marche constamment pieds nus et sans grande protection, mais ça, il s’y était habitué. Elle s’inquiétait aussi de son état.

« Je ne me sens pas mal. » Avait-il fini par consentir à dire. En vérité, ça allait, il sentait une légère fébrilité qui semblait passer avec l’infusion, mais doucement revenir petit à petit, il s’en ferait une plus tard, voire, en préparerait pour quelques jours. « Et, oui, trouvons un point d’eau. »

Plusieurs heures plus tard, une rivière pointait enfin le bout de son nez, ainsi le grand bleuté déposa son sac à côté, à un arbre à proximité. Enkara elle était à côté, l’invitant presque joyeusement à venir se rafraichir. Vu les températures hivernales, c’était presque étrange comme concept, mais soit. De toute façon il en avait déjà l’intention. Ôtant sa cape, il l’accrocha à une branche d’arbre à sa hauteur, finissant ainsi torse-nu. Le scorpion se pencha pour se rincer un peu le visage. C’était agréable, comme d’habitude.

Le scorpion avait bien envie d’immerger tout son corps nu comme il le faisait d’habitude. Et ce n’était pas la nudité qui le gênait, pas moins que de montrer son métasome. M’enfin elle n’avait pas l’air de vouloir le découper pour l’étudier – du moins pas trop-. Il fit alors plusieurs pas sur le côté, au même endroit où se trouvaient son sac, l’eau était plus profonde et lui permettait d’immerger une grande partie de son corps. Il défit ainsi le tissu épais et lourd qui empêchait de bien voir son métasome des deux côtés de ses flancs avant de le déposer au même endroit que sa cape. Il se débarrassa bien plus vite de son bas… Finissant nu comme un vers. Si la demoiselle était gênée par cela, elle n’avait qu’à détourner le regard. Il entra ensuite dans l’eau, prenant soin d’étirer ses muscles et de bouger son métasome, avant de mettre la tête sous l’eau et de remonter à la surface… L’air plutôt, à l’aise.

 

Comment ça ce qu’il faisait ? Eh bien il allait se laver ? En l’entendant, Raël avait tourné la tête vers la demoiselle, haussant un sourcil d’incompréhension. Ce n’était pas la première qu’il se lavait dans l’eau froide, et si c’était désagréable au début on s’y habituait, d’autant que les températures ne descendaient pas trop. Il fallait donc en profiter. Il ne répondit pas à cette question, car la réponse était plutôt évidente, d’autant qu’il n’était pas persuadé qu’elle attendait réellement une réponse.

Puis, elle semblait s’embrouiller dans ses paroles. Il n’avait jamais vraiment compris pourquoi certaines personnes avaient du mal à mettre un mot sur appendice. Surtout les femmes, bizarrement. Comme il ne voulait pas non plus qu’elle ne sache pas par ou le prendre, ou comment l’appeler, il l’arrêta dans ses bégaiements.

« Ça s’appelle un métasome. »

Et non, ce n’est pas parce qu’il se sentait détaillé qu’il allait lui proposer de venir le toucher, bien au contraire, ce n’était pas du tout son genre. Elle avait fini par lui tourner le dos et mentionnait aller remplir les gourdes, et même les ranger. La sindarine réagissait tout de même étrangement, mais il ne pouvait savoir ce qui n’allait pas si elle ne le lui disait pas. Et non, il n’allait pas demander. Le scorpion de son absence pour bien relâcher les muscles de son bassin et bouger son métasome. Ses os craquèrent lorsqu’il s’étirait.

Bien heureusement pour elle, il n’était pas capable de discerner qu’on l’observait, alors elle pouvait bien le regarder au loin il ne s’en rendrait pas compte. Sa vue ne lui ne permettait pas de distinguer des formes d’aussi loin. De toute façon, il savait que ce n’était pas dans un but de lui vouloir du mal, alors, qu’elle le regarde ou non lui importait bien peu.

Après avoir profité des bienfaits de l’eau froide, Raël n’y restait pas longtemps. Il se releva donc, essora ses cheveux bleus qui gouttaient encore un peu avant de simplement enfiler son pantalon, il attendrait de sécher pour le reste. Tout cela mettait en valeur ses tatouages rouges qui parcouraient son torse et ses bras. Il n’hésita pas non plus à faire un feu pour commencer une petite décoction pour lutter contre cette fièvre. Une fois Enkara revenue, il ne se retint pas de lui dire que la place était libre.

« Tu peux y aller. »

Sous-entendu « je ne regarde pas ». Lui n’avait aucun problème avec la nudité, mais ce n’était pas le cas de tous. Enfin, surtout de toutes. Il avait remarqué que les femmes étaient bien plus gênées par cela, sans en comprendre la raison. Et puis de toute façon, à quelques mètres il ne distinguait pas grand-chose, alors, elle n’avait rien à craindre.

Raël ne comprenait pas vraiment pourquoi elle s’excusait, du moins, et même quand elle avait fini de parler, il ne comprit pas plus. Pour lui, il n’avait rien de fascinant, son espèce était certes, assez diversifiée mais rien qu’il ne pouvait trouver fascinant ou qui devait donner envie d’être touché. C’était un mystère qu’on lui dise qu’on avait envie de le toucher, au-delà de la simple curiosité d’enfant. Enfin, comme elle l’avait déjà monté en l’invitant à venir avec elle, elle était différente des autres femmes. Plus directe, plus sincère et vraisemblablement plus sociable et plus compréhensive, peut-être.

Alors qu’il aurait pu répondre à ses envies (d’une façon défavorable, malheureusement), elle était partie beaucoup trop vite pour qu’elle ne dise un mot, se dirigeant vers le ruisseau lui signifiant qu’elle allait se laver. Soit. Elle était finalement partie un peu gênée sans que le scorpion n’eu véritablement compris -il ne comprenait décidément rien à rien ce yorka- et haussa simplement les épaules avant de s’installer confortablement et de préparer à nouveau sa mixture, pour plusieurs fois, parce qu’apparemment, la fièvre avait décidé de s’installer. Il ne se connaissait pas particulièrement faible et n’avait aucune maladie alors il ne se faisait pour le moment pas de souci, cela allait bien finir par partir.

De retour, elle semblait être un peu calmée. Elle l’interrogeait sur son état de santé. C’est vrai que vu qu’il préparait une autre potion, c’était qu’il devait se tramer quelque chose. Elle ajouta aussi une autre question, qui avait plus de sens. Voulait-elle savoir s’il était en état de marcher ? S’il serait un poids ? S’il serait trop lent pour elle ?

« Rien d’inquiétant. Ne t’en fais pas, je ne te ralentirais pas. »

Ces paroles étaient presque un peu tristes. Pour Raël, si on se préoccupait de son état de santé, c’était forcément à dessein et non pas par charité ou par amitié. Alors la réassurance qu’il proposait lui paraissait tout évidente.

« Et la réponse à ta question précédente est non. »

Il n’avait aucune l’intention de la laisser le toucher, encore moins son métasome, son corps n’était pas une curiosité et il ne comptait pas justifier de la raison. Un non était un non.

Contrairement à ce que l’on pouvait penser Raël n’avait pas entendu parler de la maladie. Empoisonner oui, herboriste certes, mais il n’avait pas assez de contact social avec les gens et passait parfois plusieurs mois sans voir une seule personne ou s’adresser à quelqu’un plus que quelques minutes. Mais ça dépassait rarement quelques minutes. Il ne comprenait toujours pas pourquoi elle voulait s’occuper de lui, mais Raël préférait ne pas s’en alarmer. S’il était malade alors la fièvre mettrait quelques jours à tomber. Il ne s’en inquiétait pas.

« Je m’en occupe déjà avec les infusions que je fais. »

Avait-elle une quelconque magie de soin qui lui permettrait de guérir plus vite ? Si c’était le cas, ce serait utile même s’il ne le demanderait jamais, surtout qu’il ne se sentait pas si mal que ça pour le moment.

Sage, après avoir fini de manger, le fameux scorpion de compagnie ferma les yeux pour lui aussi, se reposer alors que le jour allait bientôt se lever. Alors qu’il ne voulait pas dormir complètement, c’est au final ce qui arriva bien malgré lui. Ils eurent la chance de ne pas se faire attaquer cette nuit et le bleuté se réveilla quelques heures avant que le soleil ne se couche. Il ne pouvait pas se contenter de ne vivre que lorsque le soleil était couché autrement ses jours chauds seraient bien courts. Enfin, nous étions en saison froide alors les soleils avaient un peu plus de mal à les atteindre.

Dès qu’il fut réveillé il reprit sa routine. Infusion, nourriture, départ. Et comme cela pendant tout le temps que durait le voyage. Il ne discutait (c’est un bien grand mot) avec Enkara que lorsqu’elle lui adressait la parole ou pour lui dire des choses comme il y a quelque chose devant sans non plus définir la manière dont il savait que quelque chose ou quelqu’un approchait. Durant quelques jours, il avait vraiment eu du mal à avancer et à marcher, il avait du ralentir la cadence même s'il n'appréciait pas. Et puis, après du repos et des bonnes herbes, sa situation avait eu l'air de s'améliorer. Alors qu'ils arrivèrent dans la ville où Enkara devait effectuer sa mission, Raël allait beaucoup mieux, il restait quelques courbatures et de fatigue, sans plus.


« Je t’attends là. »

Le scorpion ne désirait pas se mêler à la foule et se montrer plus que nécessaire.