The Red Rose Riding Hood

La nuit était calme sur les monts enneigés. Trop sans doute. La tempête gronderait bientôt, sans doute plus ardemment à l'intérieur des hauts murs du temple de Kesha qu'au dehors. Avant que le vent de se lève et que les nuages noircissent, une dernière rose éclorait. Sous la lumière de Kesha, ses pétales noires s'épanouissent en silence. Elle attendait là depuis longtemps, attendant, patiemment, son heure. Ses racines avaient parcourus tout le pays, fait quelques boutures sous la neige éternelle. Aujourd'hui, c'était une de ces fleurs qui se parait d'un capuchon rouge.

Dans son panier d'osier, elle portait précautionneusement, ce petit pot de beurre que les loups s'arracheraient. A la porte de mère-grand, la délicieuse innocente, frappa trois coups.

A l'arrière du temple de Kesha, une cuisinière ouvrait une des nombreuses portes de services. Laissant la lumière et la chaleur de sa cuisine se répandre sur le dehors glacé et la silhouette emmitouflée d'une jeune femme.

Tu en as mis du temps ! S’esclaffe la femme à l'intérieur, s'emparant du panier que portait la fine silhouette avant de lui faire signe d'entrer. Entre vite, tu vas faire entrer le mal !

Le petit chaperon rouge s’exécute sagement. Il ne faudrait pas faire entrer le diable dans la demeure de la déesse. Nulle corne sur la tête brune qui se dévoile.

Pardon soeur Qaniit, j'ai du faire un détour pour éviter la taverne.

La femme acquiesce lourdement, c'était elle qui avait conseiller ce détour à la jeune fille. Elle n'était pas bien épaisse et si elle n'était que d'une beauté assez banale avec ses yeux noisettes et ses lèvres abimées par le froid mordant, elle pouvait faire de bien mauvaises rencontres à cette heure de la nuit. Mieux valait ne pas risquer les problèmes. La jeune fille en avait vécu sans doute assez. La cuisinière se rasséréna et posant le panier sur la table déjà chargée, reprit son travail.

Tu prépares les petits déjeuners pour les prêtresses ce matin.

Se séparant de sa cape rouge, la jeune fille s'empare machinalement des ingrédients, comme si elle avait toujours été là. Une petite main dans la vaste machine qu'était le temple de Kesha. Une véritable usine actuellement avec le nombre de malades grandissant.

Ne devrais-je pas continuer de servir les malades plutôt ? Si vous tombiez malade..

Elle n'osait pas finir sa phrase. La cuisinière agite la main et l'incite à se remettre au travail.

Ne t'occupes pas de ça Ulva, contente-toi d'être prête pour les prêtresses, certaines se lèvent même avant le premier soleil maintenant. Nous avons la précieuse mission de les nourrir et de leur donner assez de force pour tenir la cadence !

La dénommée Ulva acquiesce avec gravité, consciente de l'importance cruciale de remplir les ventres des soigneuses en première ligne. Là était aussi la raison de ses livraisons nocturnes. Il fallait avant que les prêtresses ne se lèvent, que leurs repas soient prêt. La nuit était donc devenue une horaire habituelle pour les humbles serviteurs qu'elles étaient. Ulva n'était pas une prêtresse, peut-être ferait-elle bientôt ses voeux, si elle le souhaitait mais pour l'heure, le temple avait besoin de toutes les volontaires, prêtresses ou non.

Avant que la cuisine ne devienne un véritable arsenal de guerre, envahit par des dizaines d'autres serviteurs et des prêtresses pressées, les bras faméliques mais tenaces d'Ulva se chargeraient de plateaux. Elle était devenue douée pour cela, parcourant les longs couloirs du temple, sans faire tomber ses précieux repas. Elle se perdait encore parfois mais c'était une erreur qu'on lui pardonnait volontiers..

Aujourd'hui cependant, elle n'eut pas à se perdre, rejoignant les appartements des prêtresses du premier ordre. Elle distribuait ses repas rapidement jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'un. Frappant à la dernière porte avec douceur, elle se fit connaitre de l'occupante.

Soeur Kennocha, je viens vous servir le petit déjeuner, puis-je entrer ?

La décision avait été prise récemment, de faire manger les prêtresses guérisseuses dans leurs chambres afin d'éviter que des malades ne contaminant la nourriture dans les salles de restauration finissent par contaminer leurs soigneuses. Une théorie qui n'était pas vraiment avérée mais, une fois le doute installé, il était bien difficile de le faire partir.