Tirer un as de pique [Pv Weiss]

Sujet: Tirer un as de pique [Pv Weiss] Mar 25 Mai - 14:20

Juni était rentrée à Tyrhénium. Elle avait regagné son logis avec soulagement. Le groupe ne lui avait pas manqué mais, Spectre si. Son loup lui avait sauté dessus, content de la revoir. Il était le seul pour qui elle éprouvait de l'affection. Elle partagea donc sa joie. Toutefois, quand ses compagnons la saluèrent, elle ne leur répondit que d'un signe de la main assez dédaigneux. Elle alla toutefois s'installer avec eux autour de la table. Dervin, son second, lui tendit une bière. Elle la saisit et but goulument. Malgré sa nonchalance, elle était contente de voir que tout le monde allait bien. Pourtant, elle était encore incapable de l'admettre. Ces maudits Terrans faisaient bien trop de sentiments. Tout ce qui comptait, c'était la puissance. Mais, la puissance devait être utilisée à bon escient. Voler, diriger. Tuer ne devait arriver qu'en dernier recours. Un mort ne pouvait admettre la puissance de son assassin. Quand on y regardait de plus près, cela n'aurait pas dû chagriner la Lhurgoyf puisqu'elle agissait dans l'ombre. Pourtant, c'était l'argument qu'elle donnait quand on lui demandait pourquoi elle interdisait de tuer.

La soirée s'écoula sans encombre. Juni n'avait pas décroché un mot, se contentant de prêter une oreille aux plaisanteries de ses camarades. Elle feignait de ne pas s'en préoccuper mais, c'était agréable d'être de nouveau avec eux. Toutefois, elle finit par se retirer et regagner sa chambre en compagnie de Spectre, son loup. Elle rentrait tout juste d'une mission et aurait dû être fatiguée mais, elle ne trouvait pas le sommeil. Elle décida donc de sortir et d'aller se balader en ville. Quoi de mieux pour s'occuper que d'aller échanger des trucs? Bien qu'ils ne manquaient de rien, c'était toujours utile d'anticiper. Ils n'avaient pas des fonds illimités et quand les ressources seraient épuisées, ils risqueraient d'être pris au dépourvu. De plus, on était jamais à l'abri d'une nouvelle arrivée au sein du groupe. Juni préférait donc être prévoyante. Puis, il fallait bien l'admettre, les échanges l'amusaient. C'était dans ces moments là qu'elle se sentait réellement vivre. Elle devait subtiliser un objet sans se faire remarquer et laisser un autre objet à la place. Après tout, ce n'était pas du vol puisqu'elle laissait quelque chose en contrepartie. Bon, il fallait bien admettre que les gens étaient rarement satisfaits. En même temps, se retrouver avec une coupe en bois, une queue de rat ou une pièce de tissu à la place d'un bijou ou d'une bourse remplie d'or, ce n'est pas ce qu'il y a de plus équitable.

La jeune Ladrini avait donc quitté le repère des "échangeurs" et arpentait les rues de Tyrhénium à la recherche d'une cible. Elle examinait les passants les uns après les autres. Il y avait là quelques miséreux à qui elle préférerait donner du pain plutôt que le leur prendre, des petits bourgeois naïfs qui, selon elle, n'étaient pas assez divertissants... La soirée commençait mal. Puis, elle vit cette femme. Peut-être une marchande... Juni n'en était pas sûre. En tout cas, elle dégageait quelque chose. Réussir à "échanger" quelque chose avec elle devrait être divertissant. La Lhurgoyf décida donc de la suivre. Elle se tenait suffisamment loin et faisait attention de ne pas faire de bruit. Elle aurait pu utiliser son pouvoir mais, ce soir, elle était d'humeur joueuse.

Son pouvoir lui permettrait de se dissimuler dans l'ombre et d'approcher sans danger mais, elle voulait sentir l'adrénaline monter en elle. Marchant d'un pas silencieux, elle commençait à se rapprocher lentement. Arrivée au niveau de la femme, elle la dépassa simplement comme si elle marchait dans la même direction. Là, elle fit mine de trébucher et se retrouva alors dans les pieds de sa cible, faisant tomber celle-ci à son tour. Elle en profita pour rapidement intervertir le contenu de leur besace puis, elle l'aida à se relever, s'excusa et fila en courant. Elle avait laissé à sa victime un livre pour enfant, un collier en toc et un sachet de graines variées. Sans regarder si elle était suivie, Juni continuait de courir jusqu'à ce qu'elle se retrouve dans une ruelle qu'elle pensait tranquille. Arrivée là, elle ouvrit sa besace et constata que ce qu'elle avait échangé n'avait pour elle aucun intérêt. Bah, tant pis, peut-être pourrait-elle revendre ça à un apothicaire... Ou alors, devrait-elle aller y rendre? Zut, plus le temps de réfléchir, elle entendit des pas se rapprocher. Il était temps de filer. Elle se remit donc à courir.

Tirer un as de pique

Weiss s'était présentée dans le courant de l'après-midi aux portes de Tyrhénium. Lecheval sur les talons, chargé de divers sacs dont le poids ne semblaient être dérangeant pour lui. Et Lachouette perchée à son épaule ... qu'elle labourait sans vergogne en essayant de maintenir son équilibre, définitivement précaire. Comme souvent, l'ex-Yorka n'était que de passage dans cette ville. Suivant un parcours bien précis, duquel elle répondait à ses obligations, quelques aléas, et honorait certaines commandes. Il était toutefois rarement question d'argent avec elle, mais davantage de troc directement ou indirectement lié à son domaine. En l'état Weiss pouvait se contenter ... de rien. Alors pourquoi demander plus ? Un toit pour la nuit. De quoi répondre aux besoins de sa monture et amie à plumes. Tout ceci lui était souvent et naturellement proposé.

Sa première adresse fut d'ailleurs celle de son hôte, situé dans les quartiers plutôt cossus de la ville. Lui-même apothicaire, il échangeait avec Weiss divers remèdes et baumes issus de sa région natale, et dont l'élaboration se faisait logiquement dépendamment du biome de celle-ci. Sur place. La Yorka délesta LeCheval et l'y laissa. Elle ne récupéra avec elle qu'un unique sac de voyage - quoiqu'imposant en comparaison de son propre gabarit, dans lequel se trouvait d'autres biens à acheminer. Un procédé aucunement assimilé à une forme de concurrence déloyale par le second apothicaire, puisque sachant que cela ne touchait pas sa propre et fortunée clientèle.

Rendue dans les quartiers populaires, accompagnée de sa chouette pour garde du corps, Weiss entama alors sa ronde. Routinière. De ses visites, la jeune femme esquiva quelques embrassades et conversations trop ... assourdissantes pour elle. Si physiquement elle ne ressentait plus la fatigue. Son seuil de tolérance face à l'enthousiasme débordant de ses bénéficiaires avait tout de même ses limites. Même après "tout ce temps". Le Temps, tiens. Une notion perdue dés lors que son cycle de sommeil fut rompu.

C'est finalement en fin de soirée, et pas plus allégée qu'à l'allée, que Weiss entreprit de regagner ses quartiers. La majorité ayant échangé ses produits contre des graines somme toute communes, quoique toujours utiles, tout comme des pots en terre cuite, de nouvelles sangles en cuir pour ses sacs ou le harnais de sa monture. Un livre traitant de l'alchimie. Une vieille dame avait même rapiécée ses gants. De délicates attentions. Le nez dans ledit bouquin reçu en cadeau, Weiss serpentait au milieu d'une ruelle moyennement fréquentée. L'instant suivant, elle sentit pourtant un effleurement sur son épaule. Proximité qui ne fut pas du goût de LaChouette, qui chuinta. Elle décrocha alors son attention dudit ouvrage pour aviser de la silhouette de pied en cap mais ...

Blam. Ou quelque chose s'en approchant.

LaChouette s'envola pour la première fois de sa vie - du moins sur un mètre - et Weiss se retrouva bêtement au sol après s'être entremêlée dans elle ne sait quoi. Ou qui d'ailleurs. Puisqu'une voix féminine se fit entendre, présentant aussitôt ses excuses à l'intéressée. Pas vraiment sonnée, ni et encore moins agacée. Elle rétorqua calmement et tout en se redressant.

- "Je ne regardais pas." Comme équivalence à des excuses. Alors qu'elle évitait subtilement, ou non, son contact lorsqu'elle voulut lui prêter assistance ; cette dernière se rabattant alors "innocemment" sur son sac pour le lui rendre. Un échange plutôt rapide. Car aussitôt elle fila. Weiss cligna lentement des paupières, alors qu'elle récupérait LaChouette revenue à ses pieds.

- "Au revoir ". Avait-elle dit machinalement. Politesse oblige. Avant que de son regard sombre se déporte jusqu'à son sac de voyage, dont un bruit semblait lui indiquer que certains pots n'avaient pas survécus à cette dernière cascade. De là, elle tiqua sur un autre détail. La besace en cuir. Ce n'était pas celle qu'elle avait précédemment récupérée et rangée. Du moins en un sens. Elle paraissait étrangement, différemment garnie. Elle esquissa une moue dubitative, tout en dénouant le double nœud qu'elle avait fait et inspecta le contenu. Un livre, un collier... des graines somme toute variées certes, mais rien à voir avec les siennes, ni dans les mêmes quantités.

Temps de flottement. Pense. Pense. Pense... La Femme ?

- "La femme. " Conclut Weiss, se lançant alors à sa recherche. Une idiotie. Après tout ce n'était que des graines. Ça ne valait pas le coup, au risque de se retrouver dans un coupe-jarret. Mais à défaut d'être réellement monnayable pour l'échangeuse, elles pouvaient être utiles pour notre botaniste.

- "Attends." Dit-elle d'une voix égale - et probablement inaudible - quand elle l'aperçue à quelques mètres de là ... Pour mieux la voir décamper sitôt qu'elle la verra. Une course-poursuite s'engagea, probablement vouée à l'échec. L'inconnue visiblement très rapide, ainsi que potentiellement agile et accoutumée des lieux. Sans parler d'un vieux chapeau incapable de rester correctement vissé à sa tête et qui, sans l'intervention de sa propriétaire, manquera de finir sous les roues d'un chariot. Se faisant littéralement aboyer dessus par son meneur.

Vaincue, mais têtue. Weiss essaiera tout de même de retrouver la trace de l'inconnue, vagabondant dans les rues avec l'assistance somme toute relative de LaChouette, qui en plus d'être incapable de voler n'est pas fin limier.

Cette soirée s'annonçait plus longue et bien moins routinière que ce qu'avait prévue Weiss, à son grand damne.

Codage par Libella sur Graphiorum

Pourquoi avait-elle repris sa course? Après tout, puisqu'elle envisageait de rendre le contenu de la besace, elle aurait pu attendre. Elle avait été surprise en pleine réflexion et avait agit par réflexe. Bien qu'elle s'était rendu compte que c'était un peu bête, elle continua de tourner rues après rues. Quand elle remarqua qu'elle n'était pas suivie, elle s'arrêta. Elle se tenait devant une auberge dont elle trouva le nom peu attrayant, "le chat riant". Elle décida toutefois de s'y arrêter pour boire une bière. Elle entra donc à l'intérieur et commanda. Il régnait sur place une ambiance terne. Quelques saoulards buvaient leur pinte dans un coin de la taverne. Toutes les autres tables étaient vide et leur propreté semblait d'avantage liée au manque de clients qu'à un bon entretien. En effet, on pouvait voir des cafards se balader de ci et de là. Juni s'en moquait. La petite bête ne mange pas la grosse. Enfin ce n'était pas tout à fait vrai. On mangeait bien du boeuf et l'animal en question était plus gros que celui qui le dévorait. De plus, quand on mourait, c'était de tous petits asticots ou bien des rats qui venaient se charger du corps.

Juni s'installa à la table la plus proche du comptoir. Non pas pour être servie plus rapidement mais, afin de ne pas être importunée par le groupe d'ivrogne au fond. Hélas, ça ne suffit pas. Très vite, ils la hélèrent et l'invitèrent à leur table. La Lhurgoyf, avec son mauvais caractère habituel, répondit:

"Restez entre vous les poivrots! J'ai pas que ça à faire de traîner avec des épaves dans votre genre!"

Vexés mais, n'étant pas de mauvais bougres, ils se contentèrent de la laisser tranquille. Au fond, Juni n'avait rien contre eux. En tout cas, rien de personnel. C'est juste qu'elle n'appréciait guère la compagnie. Elle but donc sa bière seule, paya puis, reprit sa route. Elle avait décidé de retrouver la femme qu'elle avait volé. Elle allait devoir partir à sa recherche mais, elle ne se souvenait plus où elle l'avait laissée. De plus, celle-ci avait également dû se déplacer pour la chercher. En plus, tout ce dont Juni se rappelait était qu'elle portait un drôle de chapeau et qu'elle avait un animal sur l'épaule. Probablement un oiseau. Bah tant pis, ce serait plus drôle ainsi. Après tout, la Lhurgoyf cherchait à s'occuper. C'était chose faite.

Juni décida donc de rebrousser chemin. Les vêtements de la femme ne semblaient pas idéaux pour courir. Peut-être n'était-elle pas encore très loin de là où elles s'étaient séparées. Le problème, c'était que très vite, Juni ne se rappela plus par où elle était passée. Elle connaissait bien ces quartiers de Tyrhénium mais, elle n'avait absolument pas fait attention où elle allait. Elle décida donc de se fier à son instinct. S'était-elle trompée? sans doute. Pourtant, par moments, elle était sûre de repasser à des endroits où elle était passée. Oui mais, pas de femme au chapeau... Malgré cela, elle ne baissait pas les bras. La nuit était encore longue et puisque la femme l'avait poursuivie, elle tenait probablement à retrouver ses biens. La Ladrini continuerait de chercher. Elles finiraient bien par se trouver.

Tirer un as de pique

Weiss inspira lourdement, alors qu'elle se retrouvait à la même intersection que ... toute à l'heure. Qu'on se le dise. Elle avait un très bon sens de l'orientation. Mais à quoi bon connaître les lieux si on ignore d'où une personne est parti. Et c'était exactement la situation dans laquelle se trouvait la Yorka. Le coup du chariot l'avait retenue bien assez longtemps pour que notre voleuse ait pris de l'avance et s'en soit même allée au-delà de ces quartiers. Et la nuit se profilant, les passants se faisaient plus rares ou de nature changeante. Alcoolisés. Disons-le clairement.

Elle crut toutefois avisé de se renseigner auprès de certains. Probablement ceux comptant le moins de gramme dans le sang ... et l'haleine. Bien que brève, Weiss avait tirée de son "altercation" quelques menus détails. Comme sa petitesse. Ce qui est plutôt notable quand on la compare à la sienne - 1m63. Une chevelure supposément claire, à la limite du blanc. Ayant entraperçue quelques mèches avant qu'elle ne prenne la poudre d'escampette. Possiblement sa tenue. Le tout rassemblé ... Qui sait.

Plus que patiente. Pour ne pas dire complètement entêtée. Weiss trouva finalement un semblant de piste. Qu'elle suivit jusqu'à atteindre une nouvelle ruelle. Elle promena son regard ci et là, puis leva les yeux lorsqu'un coup de vent fit grincé quelque chose en hauteur. Elle avisa l'enseigne. Le Chat Riant. Pardon.. ?

- "C'est un nom idiot. " Commenta Weiss dans un froncement de nez, perplexe. La Taverne serait plus simple. Approprié même. Puisque c'est une taverne. Pourquoi un chat ? Pourquoi riant ? Est-ce que les chats rient d'ailleurs ? Elle claque sa langue contre son palais. Un tic. Elle s'égare et elle le sait. Hors là n'est pas le sujet. Mais c'est plus fort qu'elle.

La Yorka esquisse un pas en arrière, suffisant pour observer depuis la fenêtre. Peu bruyante pour une taverne. Mal éclairée aussi. Mais ce n'est pas Weiss qui s'en plaindrait. Et puis ... maintenant qu'elle y est.

Remettant son chapeau en place et demandant à LaChouette d'attendre là - soit au rebord de la fenêtre, la jeune femme se décide à entrer dans l'établissement. Forcement, quelques regards se tournent vers elle. Puisque sortant complètement du cadre. Weiss les ignore. Une réaction plutôt habituelle chez elle. Quoique répondant spontanément, poliment aux salutations qui lui sont adressées. Elle se dirige ensuite jusqu'au tenancier, qui lui demande ce qu'il lui sert.

- "Je ne bois pas. Je cherche quelqu'un." Refusa Weiss.

- "Ne cherche plus. Je suis là !" Lâcha un des hommes dans un rire gras. Plutôt "Gros Riant" que Chat donc ... WEISS, on se concentre.

- "Vous êtes un homme, obèse et chauve. Ce n'est pas vous que je cherche. " Rétorqua Weiss d'une voix tenue. Une simple constatation qui fit lever ledit gros de son banc. Avant d'être sitôt rabroué par le gérant de la taverne et remis à sa place par ses comparses.

Donc.

Weiss crut bon de complémentariser son propos et fournit une brève description. "Pas aimable", fut ajouté. De ça, la Yorka n'en savait rien. Mais au moins, elle était passée par ici, à plusieurs minutes d'intervalle.

- "Merci." Dit-elle poliment, tournant ensuite les talons en direction de la sortie. Elle se stoppa néanmoins un instant. Pivotant du côté des messieurs pour présenter ses excuses auprès de l'homme qu'elle avait vraisemblablement vexé. Avant de reprendre son chemin sans attendre de réponse.

Une fois dehors, Weiss coula un regard en direction du perchoir improvisé de LaChouette, qu'elle récupéra et replaça à son épaule. S'excusant au passage de l'attente avant de reprendre son chemin. C'était une allée simple. Si elle ne l'avait pas croisée en s'aventurant ici, alors elle ne pouvait qu'avoir empruntée cette direction-là. La Yorka fit donc de même. D'un pas rapide. Infatigable. Increvable ?

Croisement. Croisement... Impasse. Chat ! On arrête avec cette histoire, Weiss. Demi-tour, on repart. Croisement. Passants beaucoup trop bruyants.

Attendez voir...

Dernière édition par E.Weiss le Jeu 10 Juin - 14:01, édité 3 fois

Juni tournait en vain. Elle réfléchissait. Cette femme n'avait pas l'air d'être ici. Elle devait pourtant la chercher. Elle pourrait couvrir une plus grande zone en se tapissant dans l'ombre mais, difficile de bien se concentrer pour voir. De plus, en réapparaissant, elle risquait de l'effrayer. Bon tant pis, elle continua donc d'arpenter les rues à pieds. Bien que ne pas la trouver l'agaçait, au fond, elle commençait à apprécier sa soirée. Après tout, elle voulait casser la routine, voilà qui était chose faite. Pour la première fois, elle avait laissé presque la même chose que ce qu'elle avait pris. Il ne s'agissait juste pas des mêmes graines ni du même ouvrage mais bon, un livre contre un livre, des graines contre des graines. Sa victime avait même gagné un collier en toc dans l'histoire. Bah, ce n'était pas la première fois que Juni perdait au change mais, cette fois, c'était quand même drôle. Elle aurait voulu le faire, elle n'aurait pas réussi. Enfin gagné au change était un grand mot. La Lhurgoyf n'était pas experte en graines ni en littérature alors elle n'avait aucune idée de la valeur monétaire de ses échanges.

Elle fit alors une courte pause. Elle devait être méthodique. Puisqu'elle ne la trouvait pas en tournant au hasard, elle devait envisager autre chose. Sa cible portait un chapeau comme on n'en croise pas toutes les nuits. Ainsi, si quelqu'un l'avait croisée, il devrait pouvoir lui dire. Elle se mit donc à alpaguer les passants qu'elle croisait.

"Hé t'as pas vu une fille avec un drôle de chapeau pointu?"

La plupart l'envoyaient promener ou répondaient par la négation. Certains l'avaient vue mais, n'avaient pas fait attention à la direction qu'elle avait emprunté. Au moins, elle ne devait pas se trouver très loin. D'autres, n'appréciant pas le ton de Juni lui répondaient d'un ton agressif. Ceux-ci se faisaient gratifier d'un "Vas te faire foutre!" enjoué. La Lhurgoyf se moquait bien que sa façon de parler plaise aux gens. Elle n'était pas là pour se faire des amis. Finalement, plusieurs personnes lui indiquèrent une même direction. Juni choisit de s'y fier puisqu'elle n'avait pas d'autre piste. Allait-elle enfin la retrouver? Elle accéléra le pas afin que s'il s'agissait bien d'elle, elle ne reperde pas sa trace.

Tirer un as de pique

De nouveau Weiss s'était reculée d'un pas, Lachouette exagérément inclinée pour observer, avant de prendre la direction où elle entraperçue un mouvement. Une vague silhouette, peut-être même un pan de cape. Qui sait. De son vivant, la vue de la Yorka a toujours été mauvaise, dépendante de la luminosité ambiante, de la distance ou de son état de fatigue. Ce troisième point ne rentrait plus en ligne de compte désormais. Certes. Mais force est d'admettre que cela n'en restait pas moins handicapant pour elle. Surtout quand vous cherchez quelque chose, ou quelqu'un. Comme dans ce cas présent. Vous lui retirez son sens de l'orientation inné - et à contrario particulièrement développé, et vous la retrouveriez dans une maison de passe à la place de l'auberge du coin. Ce qui, en soi, ne la dérangerait qu'à moitié. Rien à voir avec les "services" qui y sont proposés.

Dans le doute, Weiss s'était donc engagée sur cette voie, essayant de rattraper la supposée ombre en pressant le pas. Tout ça pour des graines et un bouquin, rappelleront certains. Mais avec Weiss tout est sujet à l'absurde. Et de manière inconsciente, quoique potentiellement horripilante, elle n'en démordra pas. Parce que c'est comme ça. Pas autrement. Et ce, peu importe le temps que ça peut lui prendre. C'est à se demander si mourir à 28ans n'était pas une forme de record.. Finalement. Car il y eut sûrement de quoi épuiser son capital "Chance" face à ce genre de situation.

Passons. Le Hasard faisant décidément bien mal les choses, Weiss perdit son fantôme au milieu de l'allée sombre. Si tant est que cette apparition ne fut pas le produit de son imagination. Elle esquissa un froncement de nez. Dubitative. Jusqu'à ce qu'une voix hèle plus loin. Son regard sombre lorgna alors à quelques mètres de là - sans distinguer quoique soit.

Féminine. Un peu mutine. Une histoire de fille avec un chapeau pointu. Un langage fleuri. Ou pas. Aller se faire ... quoi ? Réfléchie. Non Weiss, pas à ça ! La Yorka retire son chapeau et le détaille un instant. Hm.

- "Il n'est pas si pointu que ça ..." Commente Weiss dans un léger haussement d'épaules, avant que LaChouette décide de prendre les devants et quitte l'épaule de la Yorka, s'étalant sans aucune grâce sur le sol avant de filer à toute allure.

- He ! Ne pars pas toute seule . Tout en revissant son chapeau et lui emboîtant le pas en courant.

En chemin, l'animal passa entre les pieds d'un énième erre. Probablement celui qui fut invité à aller.. Bref. Ce dernier cria de stupeur : "Un Rat ! ". Tandis que Weiss l'esquivait en collant l'un des murs.

- C'est une Chouette ". Corrigea-t-elle à la volée.

- He. C'est toi la fille au chapeau pointu !" Dit l'inconnu en la pointant du doigt.

- Il n'est pas si pointu que ça". Rétorqua-t-elle d'une voix audible, avant de disparaître avec son volatile dans un autre dédale. Plus pentu cette fois, et au bout duquel aboutissait apparemment une série de marches.

Logiquement, Weiss aurait assuré son pas. Puisque se sachant bien capable de tomber une seconde fois - et ayant tout de même assimilée une forme de conditionnement pavlovien. Mais c'était sans compter sur sa compagne à plumes, autrement considérée comme une catastrophe plus ambulante que volante, qui fut prise dans son élan et envie d'atteindre cette cible. Enfin et bien visible.

De là il y eut un autre fracas. Avec in fine, une Yorka se retrouvant le séant par terre sur les marches, une main agrippée sur un pan de tissu - Dont elle avait possiblement arrachée quelques coutures, et l'autre tenant son chapeau comme pour réclamer l'aumône ... Avec au fond une chouette qui s'y tortillait et chuintait son mécontentement. Au moins, d'aucun des deux ne pouvait prendre la poudre d'escampette maintenant.

- "Hm. Trouvé. " Fut son seul constat, pas spécialement douloureuse malgré sa cascade.

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Tandis que Juni remontait une ruelle en pente, elle entendit un bruit de chute puis, constata en effet que quelqu'un tombait. Et ce quelqu'un, c'était justement la femme au chapeau pointu. Par réflexe, Juni allait faire demi-tour puis, elle se souvint qu'elle la cherchait justement. Elle s'approcha donc et entendit cette dernière dire qu'elle l'avait trouvée. Elle rit alors et dit:

"En effet, tu m'as trouvé mais, si je n'étais pas en train de te chercher moi aussi, je t'aurais encore filé entre les doigts. Alors, pas trop de bobos "chapeau pointu"? Un coup de main pour te relever peut-être?"

Elle commença à lui tendre la main lorsqu'elle entendit:

"Par ici, j'ai trouvé notre voleuse!"

Trois gardes arrivèrent alors. Ce que Juni ne comprenait pas, c'est que le seul échange qu'elle avait fait ce soir, sa cible était là avec elle. Elle répondit alors:

"Vous faites erreur, je ne suis pas une voleuse!"

Les gardes les encerclèrent alors et dirent:

"Bien sûr que non, je sais bien! C'est elle la voleuse?

-C'est quoi cette blague?

-Ce ne sont pas vos affaires!

-Justement si! Les affaires qui se trouvent dans sa besace sont à moi et je vous assure qu'elle ne m'a pas volée!

-Il suffit, on l'a vue s'enfuir en courant lorsqu'un homme l'a pointée du doigt en criant après la femme au chapeau pointu.

-Il n'est pas si pointu que ça..." répondit Juni qui avait désormais compris d'où venait le quiproquo.

Elle doutait pourtant que ce détail fasse changer les gardes d'avis. De plus, maintenant, ils semblaient vouloir les embarquer toutes les deux. Juni aurait pu s'enfuir facilement mais, puisque la fille au chapeau pas si pointu avait des ennuis à cause d'elle, elle ne pouvait pas l'abandonner. Elle allait donc devoir trouver une solution. Hors, la seule qu'elle vit n'était pas à l'avantage de sa compagnonne d'infortune. Tant pis, elles n'avaient pas le choix. Elle utilisa Magnétisme sur les armes des gardes afin de les repousser, saisit la main de la femme et l'entraîna à sa suite en courant. Bien que la course ne semblait pas être son fort, elles allaient devoir courir le temps de trouver une autre solution pour échapper aux gardes. Elle lui dit alors:

"Désolé pour les ennuis que je t'attire mais, promis, on va s'en tirer!"

Tirer un as de pique

Au début et semble-t-il prête à lui fausser compagnie. Weiss fut soulagée lorsqu'elle pivota de nouveau vers elle. Mais après tout, elle aussi s'était mise à sa recherche. Ses paroles le confirmèrent. Ajoutant que dans le cas contraire. Elle l'aurait encore semé. Mais de fait, il aurait été surprenant qu'elle prenne finalement la poudre d'escampette. à moins que c'eut été une forme de jeu. Ou un réflexe, peut-être ? Elle semblait prompte à s'attirer des ennuis. Dans son "domaine".

L'inconnue s'enquit néanmoins de Weiss après sa chute, main tendue vers elle. Notre ex-Yorka coula son regard ébène vers elle. Perplexe. Avant qu'elles ne soient toutes deux interpellées par autre chose. Voleuse. Plutôt échangeuse. Et pour autant qu'elle sache ... c'est elles que ça regarde. Toutefois, le tintement du métal informa Weiss qu'elle avait affaire à autre chose que de simples badauds. Possiblement et logiquement des gardes. De ça. Elle en fut moins enchantée. Encore un imprévu. Cela commençait à faire beaucoup pour elle.

Elle redirigea son attention en direction des hommes - et/ou femmes, au nombre de trois, qui les encerclèrent tandis que l'échangeuse plaidait sa cause. Tentative inutile. Puisqu'elle n'était surprenamment pas la cible de cette accusation. Contrairement à Weiss ... ... Pardon ?

Bien. Alors rectifions. L'échangeuse se retrouva à plaider LA cause de notre Yorka, essayant tant bien que mal de faire comprendre qu'il s'agissait de ses affaires. Là. Et qu'elle était donc logiquement bien placée pour savoir si celles-ci lui furent dérobées par l'intéressée. Ou pas. Comme quoi. Ça finissait toujours à l'absurde avec Weiss. Même quand elle ne demande rien. Et puisque le hasard fait très mal la chose. Il a fallu que notre duo improvisé tombe sur des flèches.

Il n'est pas si ... pointu que ça. Répondirent Juni et Weiss en cœur. Persistantes à ce propos. Mais qu'importe. D'aucun des trois ne voulaient en démordre et tant qu'à faire, autant rafler les deux désormais. De là. Et ce avant même que Weiss ne s'explique davantage. Sa comparse recouvrit ses vieux réflexes ; embarquant sa partenaire qui siffla à ce contact forcé avant d'être intriguée de voir les gardes ainsi repoussés.

Elle revissa son chapeau à sa tête ... LaChouette toujours en-dessous, tandis que la femme l'entraînait elle ne sait où. Désolée pour tout ça et lui promettant d'arranger ça. Weiss opina, la croyant sur la simple base qu'elle venait de lui promettre son aide. Forcée à suivre le rythme, aucunement essoufflée, mais bien moins agile et rapide. Elle lui fit cependant lâcher sa prise. Franchement inconfortable pour elle malgré le port de gants.

"Où est-ce que tu nous emmènes ?" S'enquit-elle.

Codage par Libella sur Graphiorum

Tandis que les deux jeunes femmes couraient, celle au chapeau demanda où Juni l'emmenait. Pour être franche, celle-ci n'y avait pas encore réfléchi. Elles devaient à tout pris échapper à ces gardes et elle n'avait pas franchement de plan. Elle aurait pu se transformer en ombre mais, sa camarade se retrouverait seule. Juni réfléchissait donc à d'autres solutions. Elle ne se voyait pas affronter les gardes. En effet, même si elle prenait le dessus, ce serait le début d'ennuis interminables. Il fallait fuir. Pour une histoire de vol non avéré, ils lâcheraient vite l'affaire. S'ils n'avaient pas déjà abandonné, c'était sans doute parce qu'il s'agissait d'une bande d'incapables qui n'avaient rien de mieux à se mettre sous la dent. Bah, Juni ne comptait pas se laisser attraper, ni elle ni sa partenaire.

"Loin de ces idiots, ça te va?"

Tandis qu'elle courait sans même savoir où, elle jeta un regard en arrière. Elles étaient suffisamment éloignées pour emprunter une ruelle pour les semer. Toutefois, elle devait s'assurer que ça ne soit pas un cul de sac. Son alliée ne grimperait pas aussi aisément qu'elle. Elle aurait bien pu utiliser le Magnétisme pour les projeter toutes les deux vers le haut mais, pour cela, il aurait fallu qu'elle la tienne. Il y aurait donc eu le risque qu'elle la lâche et qu'elle s'étale comme une crêpe. Ce n'était donc pas une bonne idée.

Quelques ruelles plus loin, Juni trouva son bonheur. Elle fit signe à sa camarade et tourna à gauche. Puis, elle fit de même au croisement suivant avant de directement tourner à droite. Au fur et à mesure qu'elles avançaient, Juni vit un établissement ouvert et, supposant qu'il s'agissait d'une taverne, elle y entra. Elles pourraient ainsi boire un verre tranquillement le temps que ça se tasse. Enfin, si ça avait bien été une taverne... Il s'agissait en fait d'un bordel. Malgré cela, elles allaient devoir trouver quelque chose pour rester là. Elle regarda sa camarade et lui dit:

"Je crois que décidément, c'est pas notre jour... Tu as une idée?"

Juni était quelque peu embarrassée. Après tout, c'était elle qui les avait mises dans ce pétrin.