[QUETE] L'Ombre et la Lumière.

Sujet: [QUETE] L'Ombre et la Lumière. Lun 16 Jan - 0:59

Ces hauteurs vertigineuses couvertes de brume avaient sans nul doute quelque chose de mystérieux voire même de mystique et d'inexplicable. Être ici suscitait de nombreuses émotions en Irina, mais le fait qu'elle apprécie la nature et le climat clément n'arrivait pas à dissiper l’appréhension. Une fois de plus la Serpentine avait du entreprendre un long voyage pour le bien de l'Ordre ainsi que de tous ceux qui bénéficiaient de ses services. Cependant malgré le fait qu'elle voyage seule depuis le village le plus proche avec seulement une sacoche avec quelques maigres possessions, le chemin lui avait paru long et fastidieux. Ses fameuses chutes étaient isolées, comme coupées du reste du monde, perchées dans les hauteurs et se déversant dans un flot bruyant et ininterrompu. Le bruit de fond qu'elles causaient n'avait d'égal que les vibrations qui faisaient trembler le sol, donnant à la jeune femme l'impression qu'elle pourrait perdre son équilibre.
C'était pourquoi elle avait décidé de faire un arrêt stratégique sur cette crête escarpée, qui surplombait les environs de par son altitude et qui lui offrait une vue imprenable sur les fameuses chutes nébuleuses. Elles portaient bien leur nom, il n'y avait aucun doute là dessus... Car la vapeur qui s'échappait de ce rideau cristallin chargeait l'air d'une brume semblable à un brouillard humide. Assise à même le sol dans un apparat des plus simples, la prêtresse était assise sur ses talons, face à un petit menhir rituel qui faisait office d'un autel rudimentaire en ces lieux ou la nature était reine. Le Dieu Delil avait certainement béni cet endroit, duquel il aurait très bien pu être le créateur. La demoiselle avait déposé au pied de la pierre plusieurs gâteaux au miel et de la viande séchée. Malgré son air détendu qui était souvent mépris pour de la nonchalance, la rouquine était dans un état de méditation qui était la seule chose lui permettant de supporter cette chaleur humide si étouffante comparée au climat de sa terre natale.

Résister à la température et à ses conditions loin d'être faciles lui demandait beaucoup de concentration, et quelque part sa communion avec Kesha lui donnait la force dont elle avait besoin. Pour une fois elle ne semblait pas en proie à la folie, comme si sortir de l'enceinte tu temple et des intrigues qu'il abritait lui donnait un nouveau souffle. Ici il n'y avait pas le brouhaha des malades ni l'exigence des responsabilités. Il n'y avait que la tranquillité et le silence à moitié brisé par les bruits naturels. Sa robe avait été partiellement été délaissée pour un pantalon de cuir noir qui était bien plus pratique pour l'équitation et le crapahutage en pleine jungle. Son haut était toujours constitué d'une toge blanche (ou presque étant donnée la poussière de la chevauchée) tissée d'or, avec un long voile couvrant sa tête et tout son visage à l'exception de ses yeux. Elle avait sorti cet attirail afin de couvrir sa peau fragile et de préserver son corps des coups de soleil, qui pourraient lui coûter la vie, puisque personne ici ne pourrait lui prêter assistance. A moins que Kesha ne la prenne en pitié, ce qui était somme toute impossible étant donné que les ténèbres dévoraient son cœur.

Qu'importe. Irina ne s'attendait plus à être écoutée de la déesse ni même protégée depuis longtemps. Ce n'était pas ce qui la motivait à venir ici, bien que des spécimens de plantes rares aient attiré son regard dans le coin. Certes elle en avait cueilli certaines, espérant qu'elles se conserveraient assez longtemps pour qu'elle puisse les utiliser. Cependant si elle tuait le temps et prenait son mal en patience c'était parce qu'elle attendait. Après les derniers événements elle avait finalement décidé d'enquêter sur la disparition d'Alana, et de découvrir les tenants et aboutissants de son exil. Le doute et les questions avaient suffisamment hanté son esprit, et désormais elle voulait faire le deuil de sa mentor disparue. Pour cela elle avait fouillé les affaires personnelles de cette dernière à la recherche d'indices, ayant au préalable bien dissimulé ses possessions afin qu'Elerinna ne soit pas tentée d'y fouiller aussi. En lisant les différents carnets de note et autres références diverses, la jeune femme avait découvert de mystérieux passages qui mentionnaient cet endroit, ainsi qu'une série de noms. Cela datait de quelques mois avant sa disparition, mais c'étaient les dernières entrées, les dernières références. Les derniers mots d'Alana.

Prise en étau entre le désespoir et la curiosité, Irina avait alors lu les ordres émanant des plus hautes sphères, tout comme les indications qui lui révélaient un lien de coopération entre les Gélovigiens et l'Ordre. En effet ils menaient des recherches concernant l'emplacement d'un temple antique, probablement en ruines. Voilà la raison de sa présence ici, si loin de ses sœurs. Elle avait tout simplement décidé de s'acquitter du dernier engagement de sa mentor, qui consistait à s'allier à un envoyé des Gélovigiens dans une expédition aux résultats plus qu'incertains. Une explication étrange elle en convenait, mais elle n'avait guère plus à en dire si ce n'est qu'elle était poussée par un sentiment personnel et secret qui était totalement irrationnel. Risible ou non, sa décision était prise. Elle prenait la relève de celle qui n'était plus, pour le meilleur et pour le pire. Surtout pour le pire.

« Ô dame lumineuse. Donnez moi la force d'accepter la vérité quelle qu'elle soit et la force d'esprit de me battre contre la fatalité. Puisse ma route me donner les obstacles qui forgeront ma conviction. »

Se parlant à moité à elle même et à moitié à Kesha qu'elle priait, Irina était en train de faire se qu'elle s'interdisait toujours habituellement. Elle manifestait au grand jour sa foi, qui loin d'être feinte était sincère et discrète. Sa croyance profonde l'amenait à penser que faire de grandes cérémonies uniquement pour l'esthétique était ridicule, surtout lorsqu'il était question de préserver les apparences. Et puis il lui faudrait toutes les forces disponibles si elle voulait garder espoir de trouver un temple qu'elle n'appercevait nulle part malgré sa longue balade dans les bois. Et dire que le soleil n'était même pas encore à son zénith... La journée risquait d'être très longue.

Quelques jours auparavant...

"Devrions nous réellement la déranger? Voilà deux semaines à présent qu'elle médite il ne serait pas sage..."
"Vous avez lu la missive, nous attendons cette réponse depuis trop longtemps et elle est la seule à pouvoir mener à bien cette quête..."

Il s'agissait de deux hommes, d'environ 40ans portant les habits des prêtres de l'ordre Gélovigiens. ils venaient de recevoir une missive, une réponse des prêtresses de Cymmeria, le chemin n'était pas aisé entre leurs deux lieux d'habitation et le temps que emttait le courrier à arriver était plus ou moins aléatoire. Quoiqu'il en soit, le conseil s'était mit d'accord, la mission devait être alloué à Simalia car on ne reconnaissait de créature qui comme elle, avait réussit à expier le mal qu'elles avaient en elle. Autrefois Earil-Ganiel avait affronté ses peurs et les recoins les plus sombres de son âme, elle leur avait parlé et finalement n'avait pas céder à la facilité. Elle avait réussit, elle avait montré au mal qu'elle n'avait pas peur de lui et que plus rien ne pouvait naitre d'une peur quelconque, elle acceptait sa différence, son statut de morte vivante et se donnait exclusivement à la méditation et la communion avec l'essence divine.
Les deux religieux décidèrent de frapper à sa porte, lorsqu'elle les autorisa à entrer, tout dans la pièce était en lévitation, parcouru d'un étrange halo d'une grande puissance et pourtant extrêmement calme et apaisant. Simalia était là, les jambes croisées, en position du lotus. Lorsqu'elle s'aperçu de leur présence, elle brisa cet état et chaque meuble redescendit à sa place, parfaitement aligné...

"Que puis je pour vous, mes frères?"

Les deux prêtres restèrent bouche bée, ils avaient parfois entendu parler de son pouvoir mais l'avaient rarement contemplé. Le plus jeune des deux prit la parole...

"Ma sœur, une lettre quant à votre requête d'aller explorer les chutes nébuleuse, les prêtresses de Cymmeria y envoient également quelqu'un, le conseil approuve votre décision et vous demande de partir sur le champ afin de ramener l'artefact dont vous avez sentit la présence dans l'essence divine..."

"Mes frères, l'essence parle, elle réagit et se transforme, mais jamais elle n'ordonne ou ne demande, je me réjouis de la décision du conseil, transmettez leur ma réponse et le fait que j'explorerai au nom des Dieux ces terres et que je jugerai moi même de l'avenir des objets pouvant y demeurer, car l'héritage de nos pères fondateur ne doit pas finir entre des mains mauvaise."

La voix de Simalia était toujours douce, calme, non pas froide, mais il était difficile de la contredire ou de pouvoir s'énerver face à ce petit brin de femme.

Temps présents...

Simalia avait entreprit ce voyage, se rappelant de son passé guerrier, elle savait faire un sac et arnacher un cheval. L'ordre lui prêta un double poney, adapté à sa taille, marron tacheté de blanc avec lequel elle ferait le chemin jusqu'à la ville la plus proche des chutes.
Lorsqu'elle partit ce matin là, personne n'était là pour lui dire au revoir, elle en avait l'habitude et ne ressentait aucune mauvais sentiment, elle savait qu'elle était étrange pour la plupart de ces gens, trop mystérieuse et que l'être Terran avaient des difficultés avec ce qu'il ne pouvait pas véritablement appréhender. Elle mit sur sa selle ses deux épées à une main et elle accrocha dans son dos un arc et un carquois rempli de flèche à la pointe d'airain, elle chasserai sur place si le besoin s'en faisait sentir, mais le pain et les quelques rations qu'elle emportait lui suffiraient certainement amplement.

Aussi chevaucha t elle, au galop la plupart du temps, bonne cavalière, elle aimait cette sensation de liberté proche de sa méditation. Et lorsque la monture avait atteint une vitesse respectable, elle se permettait de fermer les yeux et de sentir l'essence divine lui parcourir le visage. Elle avait apprit à appréhender cette force qui était constamment autour d'elle, qui lui avait redonné la vie à son trépas, étant désormais de ceux que l'on nommait Gorgoroth. Vêtue de sa tenue de voyage habituelle surmontée d'un manteau à capuchon, elle était faite dans une matière lui permettant de résister au froid de la nuit et de pouvoir voyager ainsi même lorsque le soleil avait caché ses rayons. Sur son front était son antique tiare, datant de Taulmaril la grande, c'était le seul bijou visible au dessus de ses vêtements. Elle chevaucha ainsi jusqu'à la veille de rencontrer la prêtresse, dans un des derniers bourgs où elle laissa sa monture, préférant faire les derniers kilomètres à pieds. Comme à son habitude, elle arriva avec quelques heures de retard, oui on peut avoir envie de sauver le monde et être en retard, c'était un des défauts de la jeune femme...

Elle vit une jeune femme, agenouillée devant une pierre en l'honneur des dieux, Simalia ne fut pas particulièrement discrète, mais son pas était léger et même ses deux épées à sa ceinture semblaient ne pas faire de bruit. Elle avait également prit son arc et ses flèches, autour de son bras, ce que l'on pouvait prendre pour un bracelet serpentin lui enlaçant le bras du poignet à l'épaule était en vérité son serpent, Ivy, vert aux yeux d'obsidienne, calme il ne pressentait aucun danger. Simalia avait les mains jointes et un chapelet qu'elle égrainait souvent. Autour d'elle émanait comme un véritable sentiment de paix et de repos, comme si rien en ce monde ne pouvait atteindre la sérénité qui émanait d'elle, elle ne faisait rien d'extraordinaire, mais elle amenait avec elle cette sensation de mort et de mort, propre aux gorgoroth, comme si la mort elle même était sur les lieux. Mais Simalia incarnait la mort douce, calme, apaisante.

"Ce sont de belles paroles je suis certaines que Kesha les apprécie et elle voudra rendra cette prière au centuple. Je suis honoré de rencontré une dame de l'ordre des prêtresses. Je me nomme Simalia Earil-Ganiel de l'ordre des Gélovigiens, que la bénédiction des dix soit sur vous. Pardonnez mon retard..."

Simalia était un petit bout de femme, et pourtant aucune des armes qu'elle portait ne semblait la gênait ou mal adaptés à son mètre soixante.
Elle regarda un instant le paysage, magnifique, comme un lieu que l'on aurait préservé de toute présence humaine pour qu'il puisse se développer en harmonie avec l'essence divine.

"Par Delil que cet endroit est magnifique, l'essence ne m'avait donc pas trompé... (elle se tourna vers Irina et la gratifia d'un magnifique sourire, faisant oublier les peurs et le regards sombre qu'elle pouvait avoir en permanence) c'est un bel endroit pour servir les Dieux, je... ne peux pas vous expliquer tout de suite pourquoi j'ai demandé à votre ordre de l'aide, mais vous as t on expliqué quelque chose? Vous êtes vous reposer? Désirez vous quelque chose?"

Prenant toujours soin de son entourage, Simalia ouvrit le besace qu'elle avait avec elle et rompit en trois un morceau de pain qui sentait bon l'huile d'olive...

"Que Teneis puisse nous apporter son aide... tenez, mangez..."

Elle lui tendit un morceau de pain et en déposa un autre sur l'autel de pierre en prononçant en Terran ancien une phrase de protection pour leur voyage. Elle s'assit à côté d'Irina et attendit une réaction de la jeune femme...

Concentrée qu'elle était dans sa méditation et apaisée par ce silence, Irina remarqua tout de suite le bruit de pas. Mettez ça sur le compte de son esprit paranoïaque ou bien sur le simple fait que les êtres humains dans le coin n'étaient pas légion, peu importe. Le fait est qu'elle ne se retourna pas pour autant, préférant largement finir ce qu'elle avait commencé avant de saluer celui ou celle qui venait d'arriver. A chacun ses priorités n'est-il pas ? La présence de cette personne qui qu'elle soit avait quelque chose d'étrange. Quelque chose de magnétique et en même temps d’oppressant sans être mauvais. Cette femme qu'elle aperçut du coin de l’œil avait l'air inoffensif, mais quelque chose en elle, dans son regard et son expression pacifistes lui paraissaient étranges... Et ce n'était pourtant pas à cause de l'attirail d'armes qu'elle possédait.
Après tout Irina n'avait sur elle que son épée-fouet et quelques petites armes de son cru, que ce soient des fioles au contenu douteux ou bien des armes artisanales et néanmoins mortelles qu'elle avait inventé. Elle avait certes un style moins clinquant et guerrier, mais au moins cela la rassurait. De plus elle doutait fort que les bêtes environnantes soient impressionnables par un arsenal volumineux ou d'autres choses du genre... Donc il valait mieux aller à l'essentiel et efficace, même si cela lui donnait un air vulnérable de jeune fille frêle et aussi fragile qu'une brindille. Les apparences étaient trompeuses après tout.

En outre le côté crédule de cette Simalia la fit sourire derrière son voile. Elle était encore de ceux qui croyaient béatement que les dieux se donnaient la peine d'écouter chaque être. Oui certes Irina était d'accord sur le fait qu'ils les entendent. De là à dire qu'ils les écoutent, il y avait pourtant de la marge. Ceci dit elle se voyait mal la contredire sur ce point, car cela ne lui aurait rien apporté. Et puis ce serait d'autant plus amusant de savoir pourquoi elle avait été choisie pour venir ici, car à première vue cela ne lui crevait pas les yeux. Elle savait se battre et semblait avoir la foi... mais quelque chose lui disait que ce n'était pas assez. Elle se prit alors à espérer qu'elle possède des ressources bien cachées, car elles risqueraient d'en avoir besoin.

« Je suis Irina Dranis. Seconde haute prêtresse de l'Ordre de Cimméria. »

Sa voix était rocailleuse mais douce, probablement parce qu'elle avait attendu deux bonnes heures à ce même endroit, après avoir exploré les environs depuis que le soleil l'avait permis. La soif la tiraillait bien plus que la faim, et elle faisait un effort surhumain pour contenir son impatience. Pour une fois elle bridait son mauvais tempérament et elle espérait que cela lui serait bénéfique, ne fusse que pour privilégier sa coopération avec la Gélovigienne. Elle l'avait saluée de la tête avec respect mais sans exagérations, car elle se voyait mal lui serrer la main. Non que cela soit vraiment un problème seulement cela serait étrange entre deux femmes.

« L'essence vous dites ? » La rouquine n'avait pas compris de quoi il était question, alors autant l'interroger. Son interlocutrice déciderait elle-même si elle voulait en parler ou non. « Non, personne ne m'a rien expliqué. Je suis venue ici pour remplacer celle à qui la lettre a été adressée. Je fus jadis son apprentie, et désormais je suis l'héritière de son savoir. Je suis la seule à même de prendre sa place et c'est pourquoi je me présente ici aujourd'hui. J'espère juste honorer sa mémoire en m'acquittant de son engagement. »

Oui c'est vrai qu'elle jouait sur la veine émotionnelle de la chose, devinant qu'il serait plus facile de mettre Simalia dans la poche si elle la prenait par les sentiments. De plus elle n'avait pas menti... Elle avait seulement présenté les choses sous un autre jour, qui ne ressemblait pas à ce qu'elle aurait exprimé en temps normal. Et puis si jamais sa technique d'approche ne marchait pas, elle pourrait toujours tenter autre chose... L'essentiel était de toujours avoir quelques cartes dans la manche au cas où ! C'était ce qu'elle se disait lorsque cette femme qu'elle ne connaissait ni d'Adam ni d’Ève, aux airs étranges et avec ce qui ressemblait à un serpent autour du bras lui posa plein de questions... un peu comme si c'était elle le médecin qui craignait qu'elle n’attrape un mauvais rhume. Irina faillit pouffer mais finalement se contint en voyant l'expression sérieuse de l'étrangère. Acceptant le pain qui lui avait été tendu plus pour ne pas la froisser que pour autre chose, elle la regardait un peu ébahie.

« Je me suis autant reposée que le trajet l'a permis et je vais bien je vous remercie. Je ne désire rien de particulier si ce n'est peut être trouver le temple dont je n'ai toujours pas trouvé l'entrée. Cependant c'est vous qui paraissez fatiguée et trop pâle. Si j'étais vous je m'inquiéterais davantage pour ma propre santé et moins pour celle de quelqu'un qui se porte bien... »

Mangeant tout de même le bout de pain qu'elle ne voulait pas gaspiller, elle en savoura la goûteuse fraîcheur avant de se lever avec aisance, comme quelqu'un qui est habitué à être toujours occupé, toujours en mouvement. Irina était quelqu'un d'actif voire d'hyperactif, et rester plantée là lui avait demandé un certain effort. Néanmoins elle n'allait pas prier toute la journée et risquer de se mettre en route à midi, lorsque la chaleur était la plus lourde... Si Simalia était fatiguée grand bien lui fasse, après tout elle n'avait qu'à arriver à l'heure...

Lorsque Irina s'était présenté, Simalia avait baissé les yeux et l'avait salué profondément. Avoir en face de soi une haute responsable des prêtresses de l'ordre de Keysha, bien que elle même prêtresse Simalia respectaient plus les Dieux que les hommes, jugeant que certains d'entre eux avaient perverti la parole divine et que d'autres encore avaient agit sans ressentir ce qu'était véritablement l'essence divine offerte par les très hauts. Simalia était pieuse et même si elle n'avait pas de preuves concrètes que l'essence et les Dieux étaient liés elle était intimement convaincu que c'était le cas, enfin sa Foi jouait aussi grandement sur la puissance divine et sa capacité à la percevoir comme un élément à par entière de ce monde.
Le fait qu'Irina demande ce que la gorgoroth voulait dire par "essence" la plongea dans un sentiment étrange, elle était une prêtresse, elle aurait dût comprendre et pourtant... enfin, peu importe elle lui expliquerai par des actes plutôt que par la parole, elle avait remarqué que les "miracles" qu'elle pouvait accomplir permettait aux gens de mieux cerner ce qu'elle voulait dire.
Aborder l'essence divine n'était pas une chose facile, beaucoup étaient les septiques qui ne croyaient pas même aux Dieux alors que pour la jeune femme il s'agissait désormais d'une évidence, bien que longtemps après la bataille de Taulmaril, elle les avait maudit pour ne pas avoir bougé le moindre petit doigt pour l'aider, elle qui combattait pour l'ordre d'Oris, pour tenter de sauver sa famille... son frère.

"Je vois... je vais vous montrer, après... c'est regrettable, la disparition de votre mentor, mais son âme réside désormais dans l'essence divine et elle ne fait qu'un avec elle, voilà pourquoi elle n'est pas réellement partie, elle est une et indivisible avec l'essence."

C'était l'une des phrases que Simalia s'était faite tatouer dans le dos "l’Éther pour vaincre la mort", tout simplement pour prier pour le repos des corps, leur retour à la terre et l'élévation de l'âme dans l'essence ou l’Éther selon les noms que l'on pouvait lui donner. La gorgoroth ne pleurait plus les morts depuis qu'elle était elle même revenue à la vie après tant de siècles de trépas dont elle ne se souvenait même pas, elle s’était relevé, dans ce corps amaigri et qu'elle avait encore du mal à adapter au combat à l'épée, mais pour tirer à l'arc, il était maniable et elle retrouvait ses vieux réflexes, d'autant plus que ses pouvoirs télékinésique lui était grandement utile. Lorsque Irina lui parla de sa santé et de son teint pâle la jeune femme ne put s'empêcher de lui sourire de manière attendrie...

"Je reconnais bien là une des prêtresses de l'ordre créé par la grande Keysha. Mais je crains qu'aucun soin ne puisse jamais me rendre le teint plus rose et j'ai bien trop dormi ces quatre derniers siècles pour vouloir encore me reposer plus longtemps. J'ai bien peur que certaines choses ne parte jamais de mon corps..."

Elle releva simplement sa tunique au niveau de son ventre, une trace d'épée, une cicatrice plus que laide nullement suturée, hormis comme si on l'avait brulée pour cautérisé, Simalia n'en montra pas plus...

"Ne craignez pas ma nature Dame de Keysha, mais je suis une Gorgoroth, certain des autres peuples nous appel aussi, les morts vivants (elle avait alors le visage grave, mais lui sourit quelques secondes plus tard en se relevant) parfait alors suivez moi!"

Elle se mit à marcher en direction de la cascade à quelques centaines de mètres d'elles, d'un pas décidé, toujours aussi léger et sans que l'étrange sensation qui émanait d'elle ne s'évapore, au contraire, plus elle était proche d'Irina, plus la prêtresse pouvait le ressentir, ce sentiment de mort, mais de bien être également. Pendant leur approche, Simalia lui expliqua...

"L'essence... l'ether... le flux divin, je ne sais pas le nom que vous lui donner, beaucoup l'appel la magie, mais c'est une erreur, la magie est... une conséquence, une dérivation de l'essence à travers les catalyseurs, cependant, certaines personnes arrivent à manier l'éther, j'ignore si c'est parce que je ne suis plus de ce monde mais pourtant je ressens je sais, j'ai entendu vibrez l'ether qui m'a mené jusqu'à un texte ancien, ce lieu, une énigme, autrefois, l'amour d'un ange et d'un démon a apporté un présent à ce monde et il est souhaitable... il est temps maintenant que nous les retrouvions... mais je vais vous montrer l'essence divine... cela sera plus simple je crois."

Elle s'assis alors au bord du lac que formaient les chutes en tombant, ce n'était qu'un gros brouillard chaud, et tellement agréable. Simalia était assise dans la brume, sans crainte d'aucune sorte, c'est alors qu'autour d'elle se matérialisa une sorte de bouclier, une bulle enfermant la jeune femme qui lévita d'un mètre au dessus du sol en priant un Dieu...

"Ô Soulen, j'implore ta clémence, j'implore de pouvoir plier l'essence divine que vous, les dieux nous avez légué... je suis Simalia Earil-Ganiel, j'ai donné ma vie pour vous, prêtez moi désormais le pouvoir car...

La mer est source de toute vie,
L'eau est ce qui parcours mon corps,
Soulen ô toi grand génie,
Puise dans ma vie sans remord,
Pour que s'ouvre le chemin,
Que de nos yeux novice,
Nous nous sommes égaré avec dédain,
Il est temps pour nous d'arrêter le supplice,
Que l'ange et le Démon,
Puisse de nouveau s'aimer,
Au delà de toute divinité."

Alors que Simalia récitait ce chant de sa composition, l'eau commença changer de rythme, la cascade elle même sembla s'ouvrir comme un rideau de lumière et le pouvoir de la prêtresse fendit les eaux du petit lac. Elle devait y mettre toute sa concentration, mais elle révéla que derrière le gigantesque filet d'eau se cachait une grotte, là où commencerait leur aventure réellement, elle n'avait pas perdu de temps, inutile de cacher ce don à Irina. Bien entendu la Gorgoroth ne pliait pas un Dieu à sa volonté, c'était son pouvoir seul qui était multiplié par sa facilité à manipuler l'essence divine, mais elle y croyait, elle croyait plu que tout que les dieux eux même répondait. Si seulement elle avait sut...

Quoiqu'il en soit, elle pointa la grotte de son doigt à Irina, elle décroisa les jambes gardant les dents serré pour maintenir l'immense masse aqueuse en suspension, elle ne tiendrai pas longtemps, elle se mit à courir, espérant que la dame de Keysha la suivrait car au moment même où elle passa l'entrée de la grotte, l'eau se remit à couler brisant la concentration de Simalia, la gorgorth saignait du nez, jamais elle n'avait déplacé une masse aussi grosse, d'autant plus que le mouvement perpétuel était une pression supplémentaire à contenir, mais elles avaient réussie, désormais il valait s'éclairer, trouver quelque chose... et surtout, où menait ce tunnel?...

Irina avait des origines modestes, et en tant que tel elle était d'une grande simplicité. La vanité n'était pas un de ses défauts, et à vrai dire elle abhorrait ce trait par dessus tout. Aussi elle ne fit pas trop attention à la courbette de Simalia, qui bien que respectueuse, ne la touchait pas plus que ça. Certes c'était toujours plaisant de voir qu'en ces temps troubles, quelques croyants subsistaient encore. Cependant pour elle il y avait une différence entre être croyant et être crédule, ce qui probablement était la différence entre les pieux et les imbéciles. Et quelque chose lui disait que Simalia n'était pas à l'abri, étant donné son comportement et ses références incessantes aux divers dieux.
Pourtant elle avait l'air sûre d'elle lorsqu'elle avait parlé « d'essence ». Cela cadrait assez bien avec le degré de bizarrerie de son personnage, mais cela n'éclairait pas plus la rouquine sur ce dont elle était vraiment capable et curieusement,... sur le fait qu'elle soit saine d'esprit. Elle n'aima pas la façon dont elle parla d'Alana, ou plutôt le fait seul qu'elle y fasse allusion de près ou de loin, mais il n'y avait là rien d'étonnant, rien d'extraordinaire. C'était sa façon de réagir dans ce cas de figure. La tension monta d'un cran, mais ce ne fut pas encore suffisant pour qu'elle l'exprime ouvertement. Pas tout de suite. La demoiselle serra les dents et prit une profonde inspiration, ayant la sensation qu'elle ne pourrait garder son calme bien longtemps. Seulement ce fut le moment que choisit Simalia pour relever une partie de vêtement, lui montrant la vérité nue et crue. Ce fut comme une grande claque, mais en même temps ce n'était pas surprenant, à bien y réfléchir. Cela expliquait en tout cas cette sensation constante de malaise et en même temps de tranquillité. Elle était la personnification de la mort heureuse, celle qui vient prendre les malades dans leur sommeil et qui leur évitait d'atroces souffrances. Irina ne la connaissait que trop bien, se prenant parfois à souhaiter sa venue dans les cas où elle ne pouvait cruellement plus rien faire.

« Je ne connais pas la peur, qu'elle soit de ce que je connais ou bien de ce qui m'est inconnu. » C'était la plus pure vérité. De fait son don lui permettait de contrôler les peurs d'autrui, mais aussi les siennes évidemment. Le fait est tout de même qu'elle n'en avait déjà que très peu, alors les maintenir prisonnières n'était pas vraiment compliqué. Tendant lentement une main vers la blessure, elle était tentée de la toucher, de la sentir, de la comprendre. C'était un comportement qui souvent était incompris de ses semblables, mais elle n'en avait cure. C'était une partie intégrante de sa nature, et elle ne pouvait pas faire autrement. Libre à Simalia de la laisser faire ou de la repousser, ça Irina ne pouvait le prédire...

« Appelez moi Irina. Inutile de faire preuve d'autant de formalité... Nous avons de bonnes heures de travail devant nous alors ne nous encombrons pas de telles frontières. » Cela la choquerait peut être étant donnée la haute estime qu'elle attribuait aux religieuses, mais elle ne s'en inquiétait pas. Si cela lui déplaisait tant pis... Se levant pour la suivre, la prêtresse faisait preuve d'une souplesse et d'une vivacité étonnantes, le tout avec la grâce d'une danseuse. S'en suivirent les explications de la gorgoroth au sujet de cette fameuse « essence », dans le but d'éclairer la lanterne de la serpentine. Et quelque part sa démonstration atteignit l'effet escompté puisqu'elle fut plus claire que les explications qui avaient précédé. Plus concrète aussi.
Surprise de tout ce qui se passait, elle contempla la silhouette fine et élancée de Simalia léviter au dessus du sol et entrer dans un état de méditation assez différent de ce qu'elle connaissait. Sans trop avoir le temps de se concerter ou de lui demander ce qu'elle essayait d'accomplir au juste, Irina joignit ses pouvoirs à ceux de la trépassée et tendit les bras joints, qu'elle sépara comme si l'effort lui consommait une énergie considérable, ce qui était bel et bien le cas. Simalia n'était pas la seule à savoir user de télékinésie, et même si exceptionnellement la prêtresse devait utiliser son corps pour que la concentration de ce flux de pouvoir soit plus précis et plus efficace, ce n'était que le produit de l'incroyable masse d'eau à mouvoir. Son attention était si importante dans ce cas de figure qu'elle ne put même pas écouter les paroles pourtant poétiques de sa comparse. Il suffirait que l'une lâche prise pour que cette cascade s'abatte à nouveau de tout son poids, anéantissant leur projet.

N'ayant que la force d'acquiescer, son regard se posa sur l'eau qu'elle contenait, et au delà, au niveau de la caverne qui devait être l'entrée de l'endroit qu'elles cherchaient. Le temps était désormais précieux, et elles ne tiendraient pas indéfiniment... Il leur fallait profiter de cette occasion ou attendre plusieurs heures de récupérer leurs forces pour recommencer, en cas d'échec. Courant à en perdre haleine le long des berges, sachant qu'elle avait pris du retard sur Simalia, Irina retrouva l'espace d'un instant la fougue de son enfance, la liberté apportée par le vent qui lui fustigeait la figure et par les quelques gouttes d'eau qui voletaient un peu partout. Le sourire aux lèvres elle était amusée par cette situation, même si elle gardait dans un coin de l'esprit que les raisons qui l'avaient poussée à venir étaient des plus sérieuses. Mais ses muscles étaient les seuls à commander en ce moment, le besoin impérieux de l'instinct de survie leur dictant de maintenir un rythme anormalement élevé. Après tout à cela que son entraînement l'avait conditionnée... Serait-ce suffisant ?
La réponse fut malheureusement négative en partie. Obligée de déraper sur le flanc pour ne pas être assommée par le rideau d'eau qui retomberait d'un moment à l'autre, Irina eut seulement le temps de sauvegarder sa sacoche contre son ventre, dérapant sur la roche dure en serrant les dents pour ne pas jurer de ce frottement insupportable. Le voile fin qui couvrait sa peau fut insuffisant pour protéger cette dernière, et se déchira promptement contre la pierre froide. Le flanc brûlé lui arracha un râle de protestation et un juron. Elle prit juste le temps de lever la tête pour se certifier qu'elle était bien passée du bon côté, et la laissa mollement retomber, épuisée. Elle n'avait rien de grave et ses blessures se refermeraient en moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, seulement on ne pouvait pas en dire autant de ses vêtements. Elle avait perdu le voile qui dissimulait son visage quelque part dans la course, et la tunique blanche et or était déchirée sur le côté, exposant une partie de son dos et de son flanc. Elle jura une nouvelle fois, non par mécontentement mais pour évacuer l'adrénaline. Telle une enfant des rues qu'elle avait été, elle avait aimé cette expérience, même si ce n'était pas prévu.

« La vache... La prochaine fois que vous faites une chose pareille, prévenez moi. J'ai bien cru que j'allais prendre une douche forcée. Sans parler du fait que je suis partie avec du retard. Je crois que je me fais vieille, mes réflexes ne sont plus ce qu'ils étaient. »

Ses yeux émeraude se perdirent dans la contemplation du plafond, et puis contre toute attente elle se mit à rire... à gorge déployée, comme si ceci n'était que la chute d'une excellente blague. Oui elle avait un sens de l'humour particulier, mais en même temps pourquoi rouspéterait-elle ? Elles étaient en vie et visiblement elles avaient trouvé ce qu'elles avaient cherché si longuement. Se redressant tout en vérifiant que ses affaires n'avaient rien, elle fut soulagée de constater que tout était intact et que son épée-fouet était toujours solidement attachée à sa ceinture. A la bonne heure.

Spoiler:

« Par contre il va falloir me re-expliquer cette histoire de démon et d'ange... J'ai bien peur d'être un peu dure à la comprenette, je suis désolée. »

Se redressant sur son séant, Irina avait désormais les cheveux libres et voletant par une suave brise qui émanait de la grotte. Telle une crinière ardente elle entourait son visage frêle ou trônait une expression qui étonnamment reflétait sa bonne humeur. Simalia ne comprendrait pas l'exceptionnel de la situation, mais il est probable que les gens qui la connaissaient le mieux se demandent si elle avait pris un coup sur la tête si ils l'avaient vue ainsi. Comme quoi rien n'est impossible...

Cette femme était étrange, elle avait déstabilisé Simalia, son aura, l'essence divine autour d'elle lrosque la gorgorth avait parlé de sa mentor et de son retour à la rivière de la vie. Oui, Simalia le savait, elle ne devait pas aborder si simplement cette vérité sans s'être auparavant renseigné sur sa croyance. Elle ne dit plus rien sur le sujet, mais lorsqu'elle montra une de ses innombrables cicatrice, certes encore moins "belle" que les autres, elle vit la main d'Irina se rapprocher de sa peau, elle ne bougea pas, le teint gris de son visage était aussi sur sa peau, étrangement elle était encore chaude, un cœur battait, le sang, les veines, tout était en place, elle vivait, une sorte de seconde vie et pourtant elle était morte une fois, et ne voulait absolument pas que cela recommence, elle se battrait pour ce don. l'essence divine avait besoin d'elle en vie, elle en était persuadé, mais sans orgueil, elle se contentait de vivre et d'avancer pour remplir au mieux sa vie afin d'aider les autres et ce monde.

Lorsqu'elle sentit la main d'Irina la toucher son ventre eut un réflexe naturel de se rentrer, le contact avait été bref, personne ne l'avait retouché, même effleuré ainsi depuis qu'elle était revenue à la vie et ce toucher, même de quelques seconde, créait pour elle un lien étrange avec la prêtresse qu'elle devait s'évertuer de garder. Car la main d'Irina avait une vibration étrange comme si à l'intérieur de l'essence de la jeune femme une dualité étrange s'opérait. Ce fut Simalia qui redescendit sa tunique pour couvrir son corps, elle ne voulait pas laisser la prêtresse continuer son exploration plus avant, ses cicatrices lui appartenait, ce n'était ni le lieu, ni le moment et pourtant, elle aussi avait porté la main sur la joue d'Irina comme pour ressentir en elle les souffrances qui ne pouvait pas se voir. Les yeux d'ébène de la Gorgorth, son aura étrange et son sourire apaisant, mais elle ne lui dit rien. Irina se détacha d'elles et elle durent traverser cette étendue aqueuse...

Simalia sentie le pouvoir d'Irina se joindre au sien, elle voulait la prévenir, lui dire de ne pas trop en donne,r l'essence divine entourant Simalia était une essence de mort, elle aspirait la vie, en quelque sorte, du moins les pouvoirs alliés à ceux de Simalia étaient grandement absorbé. Mais voilà, l'eau bougea, s'ouvrant devant elles comme si elles étaient les élues tant attendue... et pourquoi pas? Lorsqu'elles s'étaient retrouvées derrière le rideau d'eau, la gélovigienne ne se soucia pas de son propre état, se dirigeant vers Irina qui semblait avoir subie plusieurs éraflures, mais, elle était si... joyeuse... étrange... "la vache"?? "comprenette"?? Des termes que Simalia avait énormément de mal à véritablement remettre dans leur contexte, depuis sa renaissance, elle avait vécu essentiellement avec les gélovigiens sans sortir vers le monde extérieur, par conséquent les termes les plus triviaux n'étaient même pas arrivés jusqu'à elle. Et ce parlé plutôt rural indiqua quelques nouveautés sur sa compagne de voyage. Elle se releva donc à ses côtés, contemplant le lieu dans lequel ils étaient arrivés, un lieu abandonné au regard des hommes depuis aussi longtemps que Simalia peut être même plus, l'architecture des lieux étaient encore plus anciens que ceux de Taulmaril, mais il fallait avouer qu'elle connaissait peu cette partie du monde alors après tout pourquoi pas.

"Tenez si vous le désirez, elle m'appartient, mais peut être pourrait elle vous permettre de vous changer..."

Simalia sortit de sa sacoche une tunique de rechange, approximativement, Irina et elle faisaient sensiblement la même taille et les vêtements de la Gorgoroth étaient assez large. C'était assez complexe à mettre, une association de bande directement sur la peau qui permettait de maintenir le corps, le reste une veste, des morceaux de cuir. Pendant que Irina prenait la décision (ou non) de se changer, Simalia lui expliqua...

"Je... pardonnez moi, mon langage sied parfois mal à celui de l'époque actuelle. Il existe une légende, racontant l'amour d'un ange et d'un démon, je n'en sais que peu de choses, peut être ces ruines nous en apprendront elles plus. Mais on dit qu'ils possédaient des anneaux, des artefact, j'ignore qui et pourquoi ils ont été créé, mais toujours est il qu'à la fin lorsque les Dieux furent au courant de cet union improbable, ils traquèrent les amant et les condamnèrent à errer dans un monde autre, loin l'un de l'autre... du moins c'est ce que j'ai comprit en lisant ce livre à la bibliothèque éclaris, le soir même j'ai sentis l'essence divine me... comment dire... me parler, même si elle n'a ni voix ni forme propre, m'inspirer peut être pourrais je le dire ainsi. J'ai vu ce lieu et j'ai voulu l'explorer, mais je ne sais pas comment récupérer les anneaux, la volonté des Dieux seuls guidera ma main si elle est jugé digne de parcourir le chemin."

Simalia rangea la tunique refusé dans son sac, et observa le temple, l'édifice face à elles, magnifique, il les surplombait de plusieurs dizaines de mètre, à tel point que l'idée qu'ils ne soient plus tout à fait sur Isthéria lui vint à l'esprit. Durant ces deux derniers mois, elle avait longuement réfléchis aux astres et à la possibilité de voyager avec l'aide des Dieux ou de l'essence divine peut être, mais le concept était encore trop flou pour qu'elle puisse l'aborder. Les cheveux de Simalia étaient humide à cause de l'eau ambiante, une sorte de bruine qui leur cachait certains endroits de ce lieu. Elle se mit à avancer jusqu'au grand escalier qui trônait fièrement avec tout au long de la montée sur les deux rampes, les statues de tous les Dieux pouvant exister, même Sharna était représenté. Simalia déposa un fragment de pierre précieuse au pied de chacun d'eux indifféremment. Si la plupart des gens savaient qu'il s'agissait des restes de catalyseurs qu'elle avait broyé en des milliers de fragments pour les réduire à l'état d'offrandes, ils seraient certainement tombé à la renverse. Mais en rien Simalia n'était matérialiste. en haut des escaliers se trouva un immense tableau, peint à même la pierre, une magnifique représentation de deux anges s'élevant si haut dans les cieux qu'ils devenaient des êtres sans aile, des Dieux... alors cette légende... un amour entre des Dieux. Elle l'inspecta et se dit à elle même, mais à voix haute...

"La sérénité apaise les passions..." une phrase de son crédo, elle se mit à fermer les yeux et à prier pour elle même, au bout de quelques secondes elle se résigna en regardant Irina...

"Pardonnez moi mais... j'ignore où aller. Ce tableau nous montre deux êtres, autour là, ce sont les Dieux, jaloux, envieux d'un amour qu'il ne pouvait connaitre, mais au dessus d'eux encore en haut du tableau, il s'agit d'une sorte d’entités suprême qui ne peut aimer ou haïr et qui regarde la scène... et ces mots qui entourent la scène... Anima, Exanimis, c'est un très vieux dialecte, nous ne l'utilisions presque plus déjà à mon époque et les prononcer est une possibilité rare, la vie et la mort. Chacun porte à son doigt un anneau mais... je ne vois rien de plus, la colère des Dieux. il n'y a rien que je ne puisse faire de plus."

Simalia se mit en tailleur sur le sol, la méditation l'aiderai certainement, mais jusque quand et pourquoi?, cela restait encore à déterminer.

Toute beauté cache un danger, miroir d'une contradiction. Ce qui peut être exceptionnel d'un point de vue extérieur peut se révéler d'être dès plus ordinaire de l’intérieur... comme les individus. Et un endroit, un lieu, un temple? Ne pourrait-il ne pas être tromperie? Ne pourrait-il pas être une contradiction? Ne les avez-vous pas remarqué? Les symboles inversés, les opposés gravés dans la pierre? Et si cela ne concernait pas seulement la légende?

Alors que tout paraissait lumineux, une étrange ombre s'étendait alors lentement, envahissant le lieu, comme si la lumière avait été avalé. Etait-ce la réalité ou seulement ce que votre esprit imaginait? Et là où le silence se trouvait, d'étranges bruits gutturaux se faisait entendre et le vent donnait l'impression d'être un souffle lourd, là où il faisait chaud, le froid naissait. De nouveaux contrastes, un nouveau visage de la beauté...

Puis de cet étrange mirage naquit le trouble, celui de vision, celui d'une énigme, des fantômes peut-être. Des silhouettes informes apparaissaient, disparaissaient, donnant l'impression de courir pour mieux s'évanouir. Indiquaient-elles le chemin? Où était-ce un piège? Fallait-il les suivre? Tentaient-elles d'expliquer quelque chose?

Il n'y avait qu'une chose à comprendre, le tout était rien, et le rien était tout. Jusqu'où la contradiction pourrait amener les aventuriers?

Après s'être relevée et partiellement remise de ses émotions, Irina avait regardé les environs tout en se dégourdissant les membres dont les muscles étaient encore chauds. Elle refusa poliment la tenue de rechange qui lui fut proposée et écouta les explications qui l'accompagnèrent, en auditrice attentive. Pour autant elle ne resta pas immobile et s'engageait plus profondément dans les profondeurs de ce temple bâti dans la roche. Cette construction devait dater d'une époque si reculée qu'aucun écrit n'avait trahi sa localisation, ou alors on pouvait supposer qu'un nombre fort restreint en témoignait, ce qui revenait plus ou moins au même. En tant que prêtresse Irina avait accès à un bon nombre de textes et livres anciens, et pourtant jamais elle n'en avait entendu parler. Même Alana ne l'avait jamais mentionné, et pourtant elle avait été l'une des personnes les plus instruites qu'il lui ait été donné de connaître.

« Ne vous en faites pas pour ça. Après tout je me suis moi même laissée emporter par l'émotion... et j'ai parlé de manière trop familière. » La Serpentine ne s'en excusait pas ouvertement, mais c'était un début et cela avait déjà une signification pour quelqu'un comme elle. « Alors cet endroit aurait été construit en leur honneur... pour les recueillir dans un endroit neutre et les sceller à tout jamais. » Elle était revenue elle même en partie, faisant des observations objectives, pertinentes mais dénuées de poésie ou de fioritures. On pouvait lui reprocher d'être trop directe et terre à terre, mais pas de manquer de réalisme. Montant les marches en prenant les devants, Irina ignora la brise surnaturelle qui tourbillonnait autour d'elles, comme si elle les avait toujours attendues.

Suivie de près par sa comparse, elles posèrent les yeux sur une fresque antique, tentant silencieusement de comprendre cette représentation. Irina posa ses mains à même la pierre, tentant de s'imprégner de l'énergie qui émanait de là, à la fois chargée d'un malaise corrodant et d'une paix extrême. A ce contact sa peau frissonna et sa main se mit à trembler, comme si la pierre résonnait en réponse. Une lumière persistante mais pas agressive émanait de chaque pierre, comme si le temple s'animait par la présence de nouveaux visiteurs.
Simalia s'installa à nouveau en position de méditation, mais Irina elle ne laissa pas tomber. Inlassablement elle parcourut chaque inscription des yeux et du bout des doigts, comme si elle les aspirait pour mieux les assimiler. Il ne s'agissait pas seulement de fouiller un site que personne ne connaissait, car il y avait en cet endroit quelque chose de mystique, quelque chose d’intrigant et insondable. Prise successivement de frissons et d'une sensation de chaleur qui fit perler la sueur sur son front davantage que la course qui avait précédé, elle pouvait sentir que quelque chose ne tournait pas rond. Prise d'assaut par un doute qui était aussi subtile que pugnace, elle avait une expression de panique sur le visage mais n'arrivait pas à s'éloigner pour autant. Son attention se focalisa alors sur un des murs adjacents à la grande fresque.

« Ces signes sont réguliers et précis, mais semblent être inversés, un peu comme si on les avait tracés à l'aide d'un miroir. Je ne comprends certes pas les inscriptions, mais c'est probablement parce que je les regarde à travers les yeux d'une débutante que c'est plus frappant. Les deux côtés du miroir semblent décrire chacun des deux êtres... L'Ange et le Démon. »

Tous deux étaient en lévitation, flottaient au dessus d'un paysage enneigé et blanc, ou bien peut être étaient ce des nuages ? S'approchant sur la pointe des pieds pour regarder chaque détail, la prêtresse plongea ses yeux dans ceux du démon, qui loin d'être cornu ressemblait plutôt à une entité obscure et dévorée par les ténèbres, élégante mais laide et terriblement consumée. Son expression était affreuse et pourtant elle fascinait la jeune femme d'une manière qu'elle était incapable d'expliquer. Le faciès de ce démon sembla pendant un instant se reproduire sur les traits de son observatrice, tandis qu'une ombre l'avait entourée, comme pour la bercer dans ces ténèbres enveloppantes et consolatrices. Un spectre, un fantôme, une forme immatérielle, appelez ça comme vous voulez. Ce qui est sûr c'est que quoi que cela puisse bien être c'était en train de prendre possession de la rouquine, lui faisant poser un genou à terre et se tenir à un rebord de pierre, qui céda sous la pression de sa poigne. Pourtant rien dans sa délicate silhouette ne laissait supposer qu'elle possédait une telle force. Mais était-ce vraiment la sienne ?
Levant les yeux vers Simalia, elle avait un air suppliant même si aucun cri n'avait franchi sa bouche. Pourtant ses pupilles n'avaient plus rien d'humain, puisqu'elles resplendissaient d'une lueur surnaturelle et inquiétante. Elles étaient félines et finalement tournèrent au noir complet, ses prunelles disparaissant pour accueillir une totale noirceur, une obscurité qui aurait pu contenir l'univers tout entier sans mal. Ce fut alors au tour de sa peau de se troubler, de trembler comme si un autre être couvait en dessous. Elle remuait violemment par vagues, comme si elle s'était liquéfiée. Alors Irina tendit la main vers la gorgoroth, dans un appel silencieux qui l'invitait à la rejoindre.

« Viens à moi... Viens enfin, rejoins moi pour l'éternité mon tendre amour. Saisissons cette chance et retrouvons nous... »

"Je ne pense pas qu'ils furent recueillis, ce temple caché ne les honore pas... il leur a juste lié âmes et corps, loin l'un de l'autre... c'est une triste histoire mais ainsi est le jugement des Dieux, qui sommes nous pour le remettre en cause?"

C'est ce qu'avait répondu la jeune femme devant le constat d'Irina, non qu'elle le trouvait erroné, mais elle avait peut être encore plus de sensibilité face à ce genre de chose, plus de rationalité, elle n'aimait ni ne détestait, elle constatait, ressentait et analysait avec une pré-conscience étonnante, comme si cela ne l'atteignait pas. Mais au contraire de ne pas l'atteindre, elle recevait chaque émotion qui se dégageait d'Irina et de l'endroit environnant, elle restait simplement calme et compréhensive, comme elle l'avait toujours été depuis son réveil. Auparavant, surement aurait t elle cherché à détruire ce temple, la colère se serait emparé d'elle tout simplement parce que cet amour avait été impossible, interdit par des êtres prétendu supérieurs, inutile et qui étaient incapable de comprendre ce qu'un être pouvait éprouver réellement, sur un simple plan psychique, l'ardeur dans un coeur, le désir dans un corps...

Mais voilà Simalia avait ressentit d'autres choses, elle avait ressentit les coups de celui qu'elle aimait, les lames dans son corps encore et encore. Malgré la colère qui l'avait souvent habité, elle avait réussie à la transcender à aller au delà, grâce aux Gélovigien, sa condition de Gorgorth lui offrait une nouvelle vie, pour rattraper ses erreurs car après tout, elle ne pouvait pas se venger, de qui se vengerait elle? D'hommes décédés depuis 500 très longues années?

Simalia était là, attendant avec calme qu'une réponse vienne de l'essence divine elle même. Elle méditait, ne prêtant plus attention à ce qui se passait autour d'elle, elle voyait, regardait à travers l'essence divine pour comprendre, apprendre et percevoir les secrets de ce temple. Mais c'est alors que la réponse se fit entendre, sentir, dans l'air, ce dernier devint encore plus froid que l'aura de Simalia elle même, une ombre, une sensation que la jeune femme ne connaissait que trop bien, elle l'avait sentit elle aussi lorsque la dernière lame s'était infiltré dans son corps, la laissant sur le sol, mourante, elle sentie à nouveau sur ses joue, la rosée, la douceur de l'herbe et le froid, si intense, si mordant, l'ombre, celle de la mort, l'emportant, venant à elle pour l'emmener à jamais dans le royaume de l'après vie. Elle passa sa main sur son ventre, non, il n'y avait que les cicatrices, alors à l'extérieur...

"e-xa-ni-mis..." ces mots se posèrent sur ses lèvres comme une larme de sang qui glissait sur elle, une ombre dont elle n'avait plus peur mais dont le nom pouvait encore la prendre aux tripes. Brisant sa méditation un seul nom lui vint sur les lèvres...

"Irina!" Lorsqu'elle ouvrit les yeux, brisant sa bulle, toujours en lévitation au dessus du sol, elle vit... le noir, l'ombre, la mort, et la peur... elle était là, avec ses yeux si noirs, sans attendre un instant, Simalia quitta son apparence de jeune fille frêle et empoigna son arc encochant une flèche qui brillait d'une étrange lumière dans ce monde d’obscurité...

"Relâches là" ordonna t elle d'une voix impérieuse alors que son être ne tremblait pas un seul instant, son visage, ses yeux, tout était sûr d'elle, rien ni personne ne pouvait lui échappait, elle ne regardait pas vraiment Irina, elle en vint même à fermer les yeux...

"Je vous vois..." dit elle alors calmement, ouvrant sa lumière dans l'obscurité, elle brûlait d'une envie qu'elle n'avait pas ressentie depuis plus de 500ans. La Justice, l'ordre d'oris était toujours présent en elle, quelque part.Elle était une combattante de la lumière et même si elle avait depuis sa réincarnation, apprit qu'il ne pouvait y avoir de lumière sans ombre, elle n'en oubliait pas pour autant la promesse qu'elle s'était faite... sauver des vies, le plus de vies possible, quand bien même cela lui couterait la sienne. Les Dieux lui avaient offert ce renouveau, elle devait payer sa dette, elle devait les sauver, tous, les innocents...

"Je sais ce que vous ressentez, je connais votre détresse, mais vous avez été scellé, partez ou j'userai de mon pouvoir pour vous faire partir... vous m'avez déjà prit moi, mais je ne vous laisserez pas la prendre elle!"

Elle ne faiblissait pas, chaque mot était plus puissant que le précédent. Mais c'est alors que sur son arc elle sentie une pression, et elle fut transporté, dans un monde où tout était blanc, où il n'y avait que de la lumière et douceur, à l'imagine de l'aura de la gorgorth. Et c'est alors qu'elle la vit, cette forme... Anima... . Elle était là, celle que l'on prenait autrefois pour une Déesse, incarnation de la vie, amour de ce démon sans âge. Elle baissa son arc, ne pouvant se résoudre à tuer une créature de lumière qui prit la parole en premier...

"Ne le tue pas..." la voix était cristalline, raisonnante dans ce lieu étrange où elle l'avait transporté.
"Je ne peux pas le laisser la tuer, je sais qui il est..."
"Il est celui que j'aime"
"Elle est une femme qui mérite de vivre et pas d'être le corps servant d'un autre être, ange ou démon. Prenez moi, prenez mon corps, il ne sert plus, il est déjà mort..."
"Laisse moi le voir, le toucher, une dernière fois. Ne veux tu pas contempler un pouvoir ultime?"

La voix et la forme montra à son doigt un anneau, merveilleux et d'une puissance millénaire...

"J'ai renoncé à toute possession, car aucune ne m'apporte plus que de suivre la voie des Dieux. Une dernière fois et quoi? Vous retournerez dans les ténèbres?"
"Les Dieux, ils ont nous emprisonné, ils nous ont bafoué, eux qui prétendaient être nos frères, tout cela parce qu'ils étaient jaloux! non, laisse moi le convaincre que nous devons disparaitre..."
"Je suis Simalia Earil Ganiel, une gorgoroth, mort je le suis... mais je suis dans cette vie à nouveau parce que..."
"Je sais qui tu es, nous vous attendons depuis tant d'année, l'alpha et l’oméga de l'essence divine, aucun être jusqu'à présent ne trouvait grâce à nos yeux mais aujourd'hui, vous êtes les élues, celles que nous attendions, Simalia, Irina... vous êtes l'anima et l'exanimis de cette ère..."

Et ce fut comme un choc, une sorte de révélation, celle qui se dressait devant elle était anima, la vie, était ce finalement elle, l'essence divine qui lui avait redonné la vie, était ce à elle et non aux Dieux qu'elle avait voué sa vie? Elle abdiqua, rangeant son arc, elle ne pouvait lutter, pas maintenant, ce n'était pas encore l'heure du combat...

"Raisonnez le... le monde a changé... vous ne survivriez pas, vous devez retourner à l'oublie et j'essaierai de vous faire trouver cet équilibre..."

Elle ouvrit ses bras pour accueillir la lumière et à cet instant, elle fut comme transcendé, si Siamalia était étrange habituellement, elle avait atteint le point de non retour dans cette définition. Là où Irina avait les pupilles d'un noir profond, Simalia les avait blanche, translucide, habitée par l'esprit de cet être, elle ne contrôlait plus rien et pourtant, elle était encore là, quelque part, peut être sa maîtrise de l'essence divine lui donnait cette capacité propre. Et pourtant... elle ressentait les émotions, l'amour de ces deux êtres et c'est alors qu'Anima répondit à Exanimis...

"Je suis là Amour, trop longtemps j'ai attendu cet instant, trop longtemps j'ai voulu toucher à nouveau ton corps, sentir ton odeur..."

Elle s'approcha d'Exanimis incarné, caressant sa joue, sa lumière n'étant absolument pas éteinte par les ténèbres, au contraire...

"Elles sont la descendance que nous attendions... mais l'éternité, peut on seulement y espérer nous qui sommes sommes éteint et dont les âmes sont encore prisonnières de ce lieu malgré nos corps?"

Anima était magnifique, mystérieuse, brillante, à l'opposé d'exanimis et pourtant, elle l'aimait, elle ressentait pour lui cet amour inconditionnel qu'aucun terran ne peut ressentir. Mais Simalia et Irina avaient été choisit, pourquoi, la jeune femme ne le comprenait pas, et elle attendait, patiemment au fond de l'âme. C'est lorsque Anima embrassa son époux qu'elle ressentit cette vague en elle et qu'elle les vit... dans le passé, cette chasse, traqué par des êtres, ceux que l'on nommaient des Dieux, mais qui étaient ils, elle ne pouvait pas véritablement le savoir. Elle voyait simplement, ces anneaux, ils se touchaient à nouveau.

Et sur le mur du temple la gravure changeait, elle semblait être vivante, comme résonnant d'un sceau étrange qui ne demandait qu'à être brisé.

Irina eut bien envie de répondre à la hauteur à la question qui lui avait été posée, mais finalement elle garda le silence. Qui était-elles pour remettre en cause l'injustice ? Il n'y avait pas besoin d'être de haut rang pour le faire, et à son humble avis si les Dieux leur avaient donné la faculté de tout remettre en question, c'est qu'il y avait bien une raison à cela, qu'elle quelle puisse bien être. Néanmoins quelque chose lui disait qu'entrer en pareille discussion avec Simalia n'engendrerait rien de bon, et au contraire, ce serait probablement la pomme de discorde dont elles n'avaient nullement besoin. C'était un pressentiment vif et tenace qui l'animait depuis qu'elles avaient réussi à ouvrir cette cascade et forcer leur passage : quelque chose les liait, et leur destinée était pour l'instant vouée à être partagée. Elles réussiraient ensemble ou échoueraient ensemble.

Ces pensées planèrent dans son esprit comme un brouillard persistant, jusqu'à ce que ce dernier vire au noir, lentement mais sûrement. Les ténèbres qui l'habitaient déjà furent un une végétation sèche sur laquelle se jeta un feu dévorant et impitoyable, dévastant tout sur son passage et se superposant à la volonté de la prêtresse comme si elle n'était rien. Elle se sentait complète et en même temps consumée, comme si son enveloppe charnelle était en train d'exhaler une puissance qui ne lui appartenait pas par tous les pores, ce qui était probablement le cas.
En possession de cette entité supérieure et si terriblement confortante pour quelqu'un comme elle, Irina était prise dans l'étau de ces sensations paradoxales. Si d'un côté la jeune femme avait envie de se rebeller pour reprendre le contrôle, d'un autre elle se sentait en paix avec elle-même pour la première fois. Nul besoin de se cacher d'Exanimis, cet être qui pouvait comprendre les épines obscures qui étouffaient l'enfant qu'elle avait été. Il la comprenait et ne la jugeait pas car il avait lui aussi éprouvé la même chose il y a longtemps. Ce sentiment qu'ils avaient en commun n'avait fait que se cristalliser pour s'exprimer par cette communion poussée à l'extrême.

†††††

« Ne lutte pas, je ne te ferai pas de mal. »
« Je ne peux pas abandonner. Je ne veux pas glisser vers le fond, comme lorsque le froid menaçait de m'emporter lors de ces nuits lointaines. C'est la même sensation... »
« Je ne te corromps pas, nous sommes après tout faits du même fer. Je suis seulement l'incarnation de ce qui te permet de continuer à vivre. Je suis le feu qui t'a toujours consumée depuis le premier jour, celui-là même que tu as longtemps refusé d'accepter. Je suis ce dont Alana t'a toujours protégée... »
Son corps fut agité d'un spasme trop violent pour être naturel, comme si cette vérité l'avait révulsée et révoltée si fort qu'elle ne pouvait que réagir ainsi.
« Je ne vous permets pas ! De quel droit parlez vous de ceux qui ne sont plus ?? Libérez-moi ! »
« Penses tu vraiment que j'ai besoin de ton accord pour quoi que ce soit ? Ne sois pas naïve et rends les choses plus faciles. Je veux tant la voir. Je veux juste... la voir. »

†††††

La dernière phrase avait été dite tout haut, s'échappant d'entre les lèvres semi closes d'Irina, comme si elles avaient longtemps attendu ce moment. Elle se tenait toujours très droite et digne, ne semblant pas du tout craindre Simalia ou la flèche qui était si dangereusement pointée sur sa tête. C'est même avec une certaine arrogance qu'elle se déplaça sans un bruit vers la Gélovigienne, ses pas trahissant sa grâce de danseuse. Mais bien plus que cela, son corps entier semblait flotter, se mouvant avec une aisance aérienne au dessus des dalles du temple.

« Je ne t'ai rien pris du tout et je ne suis pas non plus responsable de tes blessures, ô femme que la mort emportera à nouveau. » La voix était celle de la rouquine, mais elle semblait résonner étrangement avec une autre, plus basse et gutturale, plus emplie de douleur aussi. « Ce sont les Dieux chers à ton cœur qui m'ont tout pris, tout comme ils t'ont infligé les épreuves du passé. Ne me blâme pas de vouloir retrouver celle à qui j'appartiens, et ne me blâme pas non plus d'avoir usé cette femme... » Les mains d'Irina indiquèrent son propre corps, dans une gestuelle si naturelle qu'il était impossible de dire si elle avait cédé à Exanimis ou si elle avait spontanément décidé de coopérer. « ...pour que ma Voix puisse s'exprimer à nouveau. Les ténèbres qui sont en son cœur sont un lien plus puissant encore que si elle était la chair de ma chair, le sang de mon sang. »

Dodelinant tristement de la tête les deux êtres devenus un seul semblaient dénier la compréhension que Simalia prétendait pouvoir leur offrir. Elle avait connu une détresse profonde il pouvait le ressentir, mais sa douleur même grave n'avait rien de comparable aux siècles d'exil, à l'oubli, à la solitude, au désespoir et à la culpabilité de ne pas avoir pu sauvegarder Anima. Simalia n'était encore qu'une enfant, et son sort bien que triste à bien des égards ne le mettait pas en émoi. La mort était une sentence un milliard de fois préférable à ce qu'il avait vécu. Le démon ancestral était déjà en train de revivre une énième fois son supplice lorsque finalement comme toujours Anima lui revint en même temps qu'un nouvel espoir. Tendant la main vers elle il vit les ténèbres entourant son corps d'emprunt s'enrouler autour de cette peau pâle et féminine, alors qu'il exerçait une attraction en direction de son aimée dont la seule vue lui brûlait les yeux. Un instant il les protégea par instinct de sa main libre, jusqu'à ce qu'enfin leurs peaux se touchent à nouveau. Un rayonnement intense mais pas aveuglant se fit sentir à ce contact, les deux êtres semblant irradier une nouvelle énergie qu'ils ne pouvaient créer qu'en étant ensemble. C'était un équilibre précaire qui produisait un certain effet de répulsion, même si il n'était pas suffisant pour les faire reculer.

Le baiser partagé ne fut en rien celui des deux jeunes femmes, il fut seulement la communion ultime d'Anima et de son amant qui l'espace d'un instant retrouvèrent leur vie d'antan et les moments partagés en secret. Pourtant malgré toutes les précautions ils avaient été trahis, ils avaient été jugés parce que leur amour avait été vu comme un crime, ils avaient été bafoués et leurs fonctions usurpées injustement et cela... cela Exanimis ne le pardonnerait jamais. Alors que la fresque s'animait à nouveau d'images de deux dieux déchus s'épanouissant dans les hauteurs, le Démon lui répondit, incapable de la lâcher pour autant même si cette lumière sacrée lui brûlait jusqu'à l'âme.

« Enfin... Enfin je te retrouve. Je te chanterais bien les louanges que j'ai imaginées durant cette éternité, mais je sais que je n'ai jamais été doué pour cela. » Il l'étreignit fortement, l'entourant de ses bras protecteurs, compensant le corps incroyablement petit d'Irina par sa présence gigantesque. « Mon aimée je veux que nous récupérions ce qui nous appartient, que nous réclamions cette vie qui nous a été volée. Gardons donc ces corps, je te le demande. Je finirai bien par m'accommoder de cette enveloppe femelle tôt ou tard, et je ferai tout ce qui est possible afin qu'elle te plaise. Mais je t'en prie, je t'en conjure... ne me demande pas d'abandonner et de repartir où je viens. Ce ne sont que deux vies... Pourquoi ne pourrait pas connaître le bonheur et laisser ces menteurs se glorifier et ce vautrer dans leurs mensonges. Tu es tout ce dont j'ai besoin, tu es tout ce que je désire... »

"Utiliser ces corps? Détruire leurs esprits? Anéantir des vies pour notre propre compte? Combien de temps cela durera t il? Combien de temps devrais je t'aimer dans le secret? Si les Dieux se relèvent une fois encore nous serons à nouveau chassé, persécuté... Qui sommes nous pour juger que notre vie vaut bien plus que celle de nos hôtes? Qui sommes nous pour leur infliger ce que nous avons vécu pendant des millénaires?..."

Les yeux d'Anima étaient si doux, emplie d'une telle compassion et pourtant d'un amour absolu pour Exanimis. Elle caressait la joue d'Irina en voyant son compagnon, elle se moquait bien du corps féminin qu'avait investit ce dernier, elle parcourait chaque courbe délicatement, comme pour découvrir ce nouveau corps et pourtant à travers lui, ressentir la chaleur de son tendre aimé. Là où la lumière d'Anima brulait Exanimis, les ténres d'Exanimis brulaient Anima, comme si cette relation ne pouvait se complaire que dans la souffrance mutuel, l'amour de souffrir et le désir de faire souffrir, était ce là, la définition de l'amour pour Anima? Oui, peut-être... elle pouvait espérer, elle pouvait l'aimer, et pour cela, elle était prête à subir les souffrances de milles éternités. Si seulement on lui rendait Exanimis.
Mais pourtant, elle n'était pas prête à sacrifier Simalia, comme elle ne pouvait rester là, à voir cette humaine mourir, prisonnière d'Exanimis. S'il était prêt à anéantir, elle était prête à pardonner. Peut être l'influence de Simalia n'y était pas étrangère, mais la Gorgorth vivait en elle, elle lui avait donné la vie...

Lentement, Anima ôta les vêtements de Simalia, dévoilant le monstre que son hôte était en fin de compte, derrière toute cette lumière que dégageait Anima, était l'ombre de Simalia. Lorsqu'elle fut totalement torse nue, Exanimis pu voir les traces... toutes les traces, sur la poitrine, sur les bras, les cicatrices, les lacérations, dans le dos, les coups de poings, d'épées, les tortures qu'elle avait subit avant de mourir, tout était encore là. Seul son visage avait été laissé intact par ses agresseurs, pourquoi? Simalia elle même n'avait pas la réponse...

"Comment, Exanimis... comment pourrais tu m'aimer ainsi? Décharnée, morte... je suis dans le corps d'une morte, alors je vais mourir moi aussi, tu vas t'éloigner de moi, Exanimis..."

Elle lui tendit ses poignées, les nombreuses traces de scarifications, les veines qui avaient été ouvertes, à peine cicatrisées, les traces de brulure pour les cautériser et les rouvrir... encore et encore...
Elle restait là, son torses, ses poignets, tout était dans son plus simple appareil, comme une vérité crue. Anima, la vie, avait intégré le corps d'une morte, combien de temps pourrait elle encore survivre? Une journée? Une nuit? Peut être était ce tout ce qu'elle avait à offrir à Exanimis... c'est alors que la voix de Simalia raisonna un peu plus à traver son propre coprs pour s'adresser à Exanimis...

"Je suis désolée... car je pense que même un démon ne devrait avoir à voir mon corps offert en spectacle, ce corps mort... j'ai été pourchassée, martyrisée, torturée et laissé pour morte dans les plaines non loin de Taulmaril. Je suis morte avec ma citée, mais pas dans la gloire... je suis morte, comme un déchet que l'on jette. Aujourd'hui je suis revenu en ce monde, j'en suis convaincu, par la grâce d'Anima, qui m'a offert la vie et j'ai juré, qu'à chaque instant qui passerait à partir de ce jour, je sauverai le plus de vie possible, je ferai de mon corps, un sacrifice si cela servait seulement..."

Puis son esprit disparue, Anima revint, les larmes commencèrent à perler sr ses joues, pourtant elle restait forte, belle même dans la tristesse. Simalia s'était rhabillée. L'ange ne dit rien, des ailes d'essence divine pure vinrent se fixer dans son dos. Elle se dirigea près de la gravure et y posa sa main, ouvrant le mur pour descendre dans une salle plus noire que toutes les autres...

Spoiler:

Un lieu magnifique, où derrière cette statue d'ange au corps de démon se tenait deux cercueil, il n'était pas difficile de trouver les noms qui y étaient inscrits. Et ces deux lueurs qui virevoltait, comme pour rendre magique ce lieu de mort. Anima s'approcha de la statue et dans son dos, entre ses deux ailes, apparue un poignard. Celui là même qui avaient scellé les deux êtres des siècles plus tôt...

"Pourra tu m'aimer, au moins une dernière nuit avant que je ne replonge dans le néant? Mais ne t'inquiète pas tout va bien... tout a toujours été si merveilleux avec toi..."

Anima était un être ancestral dont la puissance non négligeable ne pouvait être surpassée, même par les dieux les plus valeureux. C'était en partie pour cela que son destin avait été d'être scellée et de disparaître aux yeux des hommes, plutôt que d'être exécutée malgré son « pêché ».Il en était de même pour Exanimis qui avait partagé son sort, bien qu'ils aient tous deux été séparés pendant tout ce temps. Cependant un trait les distinguait presque autant que leurs natures si diamétralement opposées... Exanimis ne possédait nullement le côté altruiste de son amante, pas plus que sa compassion ou son amour de l'humanité et de l'autre en général. Il était égoïste et pourri par sa propre ambition.
Jadis il avait même été un dieu égocentrique et vaniteux, se pensant au dessus de tout comme au delà des frontières et la morale fixées par les hommes. Pourtant il avait payé cher le prix de sa suffisance lorsqu'il avait rencontré Anima pour la première fois. Sa superbe n'y pouvait rien face à ce qu'elle avait réveillé en lui, et tout le savoir du monde ne pouvait non plus le débarrasser du sortilège qui avait envoûté son cœur, suscitant chez lui des sentiments pour la première fois de son existence. Rien n'avait jamais pu l'émouvoir comme le faciès de cet être angélique, apparu de nulle part et mettant tout son monde sans dessus dessous. Tel un tourbillon emportant tout sur son passage, elle avait tout emporté pour ne laisser qu'un Exanimis encore plus en proie à ses fantômes. Ce fut alors qu'il découvrit que le plus grand tourment qui puisse exister se trouve à l'intérieur de soi-même. Ce fut le jour où il apprit enfin que même lui ne pouvait tout obtenir, que même lui ne pouvait tout conquérir. La frustration et l'impuissance furent des ennemis aussi tenaces que l'opinion intolérante des dieux, qui sans nul doute condamneraient leur relation jugée indécente et déplacée.

« Peu m'importe. J'ai fait assez de sacrifices comme ça... J'ai trop longtemps perdu mon temps et cédé mon propre bien être au bénéfice d'autrui. Nous avons nous aussi le droit de vivre, nous avons nous aussi le droit de connaître à nouveau le bonheur. Et après tout pourquoi est-ce que ces mortelles ne pourraient pas faire l'affaire ? Elles sont les élues, les seules à pouvoir abriter nos esprits sans dépérir immédiatement. Je t'en prie ne fais pas ça. Ne me prive pas des moments auprès de toi. Cela ne signifie-t-il donc rien pour toi ? Nous ne leur infligerons rien de semblable à ce que nous avons vécu, ma tendre. Elles ne nourrissent pas d'amour l'une envers l'autre. Elles se connaissent à peine...Pense donc à tout ce que nous pourrions accomplir ! »

La douceur enivrante de la Lumineuse le touchait bien sur, mais son désir de la faire sienne brûlait plus intensément que toutes les flammes obsidiennes qui l'avaient dévoré pendant son exil. Il est vrai que si la présence de sa moitié apaisait le poids de tous les chagrins du monde qui pesaient sur ses épaules, elle n'était toutefois pas suffisante pour le faire changer dans sa façon d'être. Elle le complétait mais ne pourrait hélas jamais le faire lui ressembler. Le moins qu'on puisse dire c'est que d'être injustement emprisonné pendant aussi longtemps lui avait donné le temps de trouver un milliard de raisons de vouloir se venger... même si cela devait prendre une autre éternité.
Les yeux félins et perçants du démon se posèrent sur le corps semi nu de Simalia, sans que son expression change pour autant. L'aspect extérieur lui était bien égal lorsqu'il s'agissait de son aimée, même si cela paraissait invraisemblable étant donné son passé libertin et insensible. Toutefois cette époque était révolue à bien des égards, et il ne nourrissait aucun regret. Aucun si ce n'est celui de n'avoir pu la protéger. La regardant les yeux dans les yeux, il lui fit comprendre par le regard qu'il se fichait pas mal de cette apparence... Ce qu'il pensait sincèrement. Il était totalement différent quand il s'agissait d'eux deux et de leur avenir.

« Ne sois pas sotte. Peu m'importent ton corps ou ton physique...Nous sommes d'essence divine et notre amour dépasse ce concept mortel si limité. Certes je déplore que la femme assez pure pour servir de réceptacle ait été ainsi abîmée... Mais je te promets que je trouverai un moyen de la réparer le plus tôt possible. »

Il n'y avait dans ses paroles aucune méchanceté, aucun air supérieur. Il avait parlé comme un artisan qui aspire à rafistoler un outil brisé, car c'est ainsi qu'il voyait Simalia. Pas dans un mauvais sens toutefois, car il lui semblait inconcevable de dénigrer celle qui accueillait Anima de quelque façon que ce soit. En outre il ne laissait aucun doute concernant sa résolution à lutter pour leur condition. Il n'était pas question de rester les bras croisés à attendre que tout leur tombe du ciel, et il n'était pas non plus question de retourner dans le néant à nouveau... pas sans lutter et sans donner tout ce qu'il avait... Tout ce qu'il lui restait. Prenant l'angélique dans ses bras, il lui offrit à nouveau ce carcan protecteur et presque disproportionnellement grand. Cette fois il ne lui faillirait pas, cette fois il n'échouerait pas. Il ne pouvait pas, il n'avait pas le droit. Observant cette unité féminine en face de lui, il répondit à la gorgoroth cette fois... avec ce même calme trompeur dans la voix.

« Mon apparence n'est pas si lointaine que ça de ce corps presque décharné et mutilé. C'est exactement pour cela que j'ai choisi de ne pas me montrer. Je préfère encore que tu me vois comme cette femelle n'ayant que la chair sur les os, plutôt que d'insulter Anima par ma seule vue. Je ne tire aucune satisfaction du sort qui a été le tien, même si dire que je le regrette serait hypocrite, chose que je ne suis pas. Les dieux n'ont pas d'empathie, ou du moins pas celle que tu penses. Seule Anima et quelques rares autres la connaissent. » La volonté d'Exanimis était si forte que sa vraie forme apparut par à-coups, comme à travers un écran d'eau trouble. Sa silhouette était énorme, faisant presque le double de la hauteur d'Irina. Pourtant c'était à travers les traits de la rouquine que l'on voyait son visage, la seule partie de son être encore intacte. Du moins pour ce qui était de son profil gauche. S'approchant d'elle sans cacher son faciès à la fois magnifique et horrible, il s'adressa à la jeune femme d'une voix chargée d'amour. C'était plus fort que lui, il ne pouvait oublier qu'elle possédait une partie d'Anima quelque part.

« Dis moi mortelle... Toi qui sembles avoir également le sens de l'honneur, de la justice et l'esprit sacrificiel nécessaires...Serais tu capable d'abandonner ce corps qui a tant souffert à celle qui a donné un sens à ton existence ? Pourrais-tu lui faire assez confiance afin qu'elle vous offre à vous deux une consolation à nulle autre pareille ? Je ne te ferai pas de promesses creuses, le genre de balivernes qu'un démon cimenterait pour tirer de toi tout et son contraire à la fois. Regarde-moi. » Son ton était doux mais impérieux, n'admettant pas de refus. Il l'avait relâchée pour pouvoir la regarder. « Abandonne-toi à sa lumière et tu trouveras le repos que tu cherches, la soif de rédemption que je lis dans tes yeux las. Accepte de partager son sort, et je t'inonderai d'une plénitude, d'un désir et d'un amour que tu n'as jamais connus. Accepte ce pacte, et je te promets que j’œuvrerai pour ton bonheur au même titre que le sien. Abandonne-toi à moi et toi et mon hôte serez récompensées à jamais, vivantes pour toujours et connaissant plus de joies que la vie ne pourra jamais vous donner... »

Dans sa voix il y avait une émotion si forte, qu'il était dur de savoir laquelle était la plus vivace. Il y avait une tristesse si profonde que l'on ne pouvait douter d'à quel point il souffrait sans pour autant le dire. Il y avait un espoir faible mais immortel de voir enfin se lever un jour meilleur... Et finalement il y avait une invitation, une tentation à l'état pur qui quelque part avait réussi à subjuguer jusqu'à Anima elle-même. Tendant la main vers les deux êtres face à lui, c'était pourtant paradoxalement à Simalia qu'il s'adressait. Se tenant là, comme un roc indestructible, bien stable sur ses deux jambes, il attendait. Insensible à l'apparition de ces cercueils enchantés d'un sceau séparant leurs âmes, il transperçait la Gélovigienne de son regard doré. Jusqu'à elle il fit alors parvenir un courant d'air, une brise chaude et enveloppante, subtile mais persistante. A travers elle il lui donna un avant goût, un infime morceau de ce dont il était capable.
Un ensemble de voluptueuses sensations se dirigèrent vers elle, lui rendant la sensibilité de son corps avant qu'il n'ait péri. Un délice si profond qu'il aurait fait tomber d'extase n'importe quelle femme, surtout lorsque comme elle, elle n'avait pas connu l'ultime plaisir de la chair. Seulement tout cela n'était pas qu'érotisme, bien que celui-ci soit bien présent. L'espace d'un instant Simalia découvrit alors ce que pourrait devenir Exanimis au delà de ce faciès effrayant et horrible, ce qu'il était ou plutôt devenait au contact de son Autre. Le pire qu'il gardait pouvait devenir le meilleur, et le contraste si choquant de leurs natures devenait un feu consumant mais ne détruisant jamais. Elle seule avait une âme assez bonne pour correspondre à quelqu'un comme lui, tout comme un esprit assez fort pour supporter la douleur qui était indissociable de sa personne. Souriant plein d'espoir, la moitié du visage d'Exanimis se fit radieuse et parfaite comme elle l'avait été, et même son opposé si laid sembla s'adoucir. La guerrière servirait-elle cette ultime cause ?

Froids sont les mains, les os et les coeurs... froids sont les étrangers loin de leur demeure...

Simalia... ou Anima peut être, était là, regardant cet homme... ce dieu... cette femme sans jamais sourciller. Lorsqu'elle ressentit l'orgasme qu'il lui parcourait le corps, l'humaine n'eut d'autre choix que d'aimer honteusement cela, l'être Anima s'en délecta, mais pourtant, la force d'Anima ne suffit pas à ce moment là à combler le plaisir de Simalia car nul vivant, nul Dieu, nul immortel ne pourrait réparer ce qui a été fait, on ne peut réparer la mort, tout comme on ne peut la guérir, comme les gorgoroth ne sont pas des être réellement vivants, Simalia, elle, ne pourrait se détacher des douleurs passées. Car le seul contact aussi enivrant fut il, réveilla ses plaies et ses douleurs, elle ressentit le mal glisser en elle, elle ressentit les lames... toutes les lames, tout les coups, une douleur, horrible, insupportable pour qui est humain, elle se tenait le ventre et le bas ventre aussi, le premier pour servir de bouclier à ses coups, réminiscences de son esprit, le second pour palier au plaisir, pour se refuser de le ressentir. Simalia, la lumineuse, posait un genou à terre puis deux, les deux bras serrant atrocement son ventre comme si on lui arrachait une part d'elle même, elle sentit en elle la vie s'insufler... un seul contact aurait il suffit?... Peut être, mais elle ne pouvait en être consciente. A cet instant, elle ne prenait conscience que de la douleur, du mal encore et encore tant que le plaisir d'Exanimis dura... mais voilà, où Simalia souffrait, Anima souffrait également, ressentant la douleur du corps, se refusant de rendre en esclavage l'esprit de la jeune femme.

Exanimis le noble, le beau, le splendide, le charismatique, oh certes il était défiguré, du moins à moitié, mais cette moitié était une bien maigre blessure qui ne pouvait entacher la beauté que lui trouvait Anima et la beauté que trouvait Simalia en Irina. Les âmes soeurs hein? Peut être... peut être que les mots d'Exanimis avaient encore plus de sens que le dieu lui même ne voulait en donner, car si les corps leur permettaient de vivre leur amour, n'était ce pas parce que le destin avait été écrit pour les deux mortelles? N'etait ce pas parce qu'elles devaient se rencontrer et que... sans se connaitre elles étaient déjà liées l'une à l'autre, comme l'ange et le démon en des temps plus reculé? Avait il seulement pensé à cela... ce démon si attirant... oui, il attirait Anima comme le corps d'Irina attirait Simalia, des aimants, des... compléments, l'un pour l'autre, pour des siècles et des siècles... ainsi soit il.

Lorsque enfin Simalia fini par cracher du sang, emmenant avec cette marre rouge vif les douleurs et les ombres du passé. La frêle jeune femme se releva, titubant quelques peu, elle se stabilisa et commença à répondre à Exanimis, en tant que Simalia...

"L'empathie des Dieux... vous ne pouvez la juger quand bien même vous leur serez supérieur, car l'on ne peut juger avec autant de haine en soit, on ne peut juger avec autant de remords, avec autant de peine... Anima et moi ressentons votre chagrin, tout comme la peur de votre hôte... Irina Dranis, à jamais elle s'est battu contre ses démons, contre sa part noire... vous l'avez mutilé. Vous... moi, le sommes physiquement, les traces sur nos corps ne peuvent disparaitre... Exanimis, pensez avec votre esprit, aussi noir peut il être car il est doué d'une raison que votre coeur ne fait qu'assombrir... regardez..."

Elle dévoila une partie de son ventre, ses plaies avaient saignés à nouveau de tant de plaisir, mais la main d'Anima, comme un fantôme dans le corps de Simalia tentait de refermer les plaies et pourtant à chaque fois celles ci se rouvraient en quelques secondes, la gorgoroth réprima un grognement...

"On ne peut guérir de la mort Exanimis... personne ne le peut, pas même vous... pas même toi, mon amour..."

La voix sur la fin s'était retrouvé à être celle d'Anima, belle, calme, elle illuminait le visage d’albâtre de Simalia, le faisant rayonner de vie...

"Et nous, mon amour, ne sommes nous pas tombé amoureux l'un de l'autre au premier regard? Exanimis... (elle s'approcha de lui, s'engouffra dans ses bras sans penser un seul instant qu'il puisse s'agir de ceux d'Irina, elle voulait sentir la force et la virilité du démon au plus près d'elle même, elle caressa sa joue et continua) toi seul peut comprendre ce que sont des âmes sœurs. Pour être nos réceptacles...rien d'autre ne pouvait les lier que l'amour, quand bien même se trouve t il au plus profond d'elle même."

Elle caressa ce qui semblait être cette moitié de visage tant détesté par le dieu, une auto mutilation qu'il s'était infligé, certainement pour se prouver à lui même une faiblesse dont il s'accablait alors qu'il n'en était absolument rien.

"Entends le car c'est ainsi qu'il se doit être... il n'y a pas de différence entre Simalia et moi..."

Là où Exanimis régnait, Anima, elle, partageait, les ailes de la déesse, blanches, brillantes d'une lumière aveuglante enveloppèrent les deux amants. Dans une étreinte de douleur et de plaisir, les mains d'Anima parcourant le corps d'Exanimis, ses lèvres douce et chaudes se posèrent sur la nuque du démon. Elle l'aimait, plus que tout, elle était prête à sacrifier le monde pour lui. Mais là où elle partageait il régnait... là où elle offrait, il prenait, là où elle mourait... il vivait.
Lorsque l'étreinte fut moins forte, lorsque le froid revint dans la pièce, lorsque les bruits ne résonnèrent plus sur la pierre, lorsque les corps chaud redevinrent la sensation si désagréable de mort qui émanait de Simalia, elle se releva d'au dessus de lui....

"Ma soif de rédemption dont vous parliez tout à l'heure... ne se fera jamais au détriment d'une vie. J'offre aux Dieux ce que je prend à ce monde. Quelle joie pourrait donner la vie à la morte que je suis? Je ne recherche ni mon profit ni mon bonheur car je l'ai trouvé, en affrontant mes démons, en m'ôtant de mes doutes, je n'ai plus à combattre les ténèbres... me sacrifier... je le ferai, je vous offrirai la lumière que vous désirez tant car ma vie ne compte plus depuis longtemps à mes yeux. Mais pour tout ce que m'a donné Anima que je louerai comme ma Déesse à partir de ce jour... je ne peux laisser quelqu'un être prit à ce monde. Rendez moi Irina... je vous donnerez tout en échange..."

Simalia était sérieuse, un simple drap sur le corps, elle avait en elle la puissance et la prestance d'Anima, sa beauté ses yeux qui de plus en plus virait au bleu étincelant, lorsque ses pupilles seraient entièrement bleu, le contrôle de la Déesse serait totale et Simalia allait disparaitre, c'était son choix, si Exanimis respectait cette part du marché. S'il ne le faisait pas, ils allaient pleurer... tous, pour le bien de ce monde.
Elle murmura simplement cette phrase...

"L'harmonie... dresse le chaos..."

Simalia avait à l'esprit l'injuste fin qui lui avait été imposée par on ne sait quel dieu capricieux, ou peut être par le destin, peu importe comment les mortels choisissaient de le nommer. Le fait est qu'Exanimis se refusait de croire à cette fatalité. Rien n'était impossible c'était une certitude. Après tout sa toute puissance n'avait elle pas été neutralisée et tue brusquement ? Dans ce cas le chemin inverse ne pouvait leur être totalement fermé, cela il refusait de l'accepter. Dans son point de vue et étant donnée son expérience passée, il était animé d'une force incorruptible et infaillible... Celle du désespoir. Pendant trop longtemps il avait subi et avait été dans l'impossibilité de se battre, de faire quoi que ce soit pour changer son sort. Désormais il en avait tout simplement assez, il avait envie et besoin de reprendre sa vie en mains, quitte à ce qu'il doive porter le poids de son fardeau ainsi que celui de sa compagne. La douleur qu'il lui procurait était le prix à payer, il était la rançon du plaisir infini qu'il pouvait lui procurer. Et dire qu'elle avait réagi avec autant de sensibilité alors qu'il ne lui avait insufflé que la goutte de l'océan de ce qu'il avait à offrir. Il ne l'avait même pas touchée... Peut être qu'elle se montrerait plus coopérative si...Il y pensa, mais finalement se rétracta avec un rictus peiné. Même dans ces circonstances il ne pouvait pas s'imposer à Anima. Il était déjà suffisamment assommé par la honte pour en plus faire une chose pareille.

« Non c'est faux ma chère. Je ne peux mutiler quelqu'un qui sans cesse guérit seul. Je ne peux détruire ce qui sans cesse se reconstruit, et c'est précisément cela, tout comme sa dévorante part de ténèbres qui l'ont rendue apte à me servir d'hôte sans périr. » Il refusait d'entendre cette dite 'raison', car à son sens ce n'était guère plus que le reflet de la peur de disparaître de Simalia. Comme tous les autres ingrats qui clamaient haut et fort leur sens chevaleresque, elle était en train de se s'y abandonner.

« On ne peut guérir de la mort, mais on peut la combattre et la vaincre. Je ne fais pas de promesses vaines. Il est vrai que je ne possède pas encore la solution, mais je finirai bien par la trouver. Je nourrirai ces deux corps avec mon sang pour les maintenir en bon état s'il le faut, mais je refuse d'abandonner, je refuse de t'abandonner. » Son regard dévisageait son interlocutrice avec la fierté du démon, mais aussi l'inflexibilité d'Irina.
« Justement, si c'est l'amour qui les lie, pourquoi s'évertuerait on à le voir comme un obstacle ? Si elles s'aiment aussi, alors notre communion n'en sera que plus complète » Il ferma les yeux au contact de cette main qui lui avait tant manqué, ignorant la sensation poignante qui lui tordait les tripes. Il brûlait de plonger en elle et ne faire qu'un, mais d'un autre côté il voulait écarter la peau douce d'Anima de son déshonneur le plus évident le plus vite possible. N'osant pas bouger de peur de faire quelque chose de mal, il demeura immobile,tentant de replier les épines qui jalonnaient son dos afin que les ailes de l'angélique ne soient pas blessées. De fait il y parvint, mais cela lui demandait un excès de concentration qui l'empêchait de faire quoi que ce soit d'autre. Se nourrissant de la douceur offerte, il amoindrit son mal pendant une merveilleuse seconde, mais s'écroula finalement avec un genou à terre au moment où elle s'écarta. En cet instant, son image se fit plus trouble. Il était présent mais subissait douloureusement le contre-coup de la lumière de son aimée, comme à chaque fois. Car si l'obscurité pouvait corrompre, la lumière ne faisait que purifier son opposé par la destruction, par la brûlure d'une perfection hors d'atteinte. Alors ce fut Irina qui parla à nouveau, son regard émeraude brillant d'une lueur surnaturelle qu'elle avait sûrement empruntée au démon d'une façon ou d'une autre. Leur rapport semblait fusionnel et si proche, qu'ils semblaient avoir tout simplement uni leurs âmes.

« Je suis loin d'avoir la connaissance nécessaire pour apporter un point de vue utile dans ce débat d'idées on ne peut plus intéressant, je l'admets sans mal. » Elle haussa un sourcil dans une expression sarcastique qui ne laissait aucun doute sur le fait qu'elle parle librement et sans influence. « Je n'ai jamais été ni ne serai jamais un victime. Si j'ai accepté de laisser le contrôle à quelqu'un d'autre, c'est que j'avais mes raisons. Je n'ai jamais prétendu qu'elles étaient louables ni altruistes... Mais dites moi Simalia, pourquoi voulez vous tant que je vous sois rendue ?» Aussi tentant que cela aurait pu lui paraître en temps normal, en ce moment il n'y avait nulle moquerie dans sa question pas plus que de dédain. Seulement un mélange complexe de surprise et d'incompréhension, tout comme une sacrée dose de curiosité. Au fond elle ne savait rien de Simalia, et le peu qu'elle en avait appris en accéléré était du au savoir mystique d'Exanimis.
Les derniers mots avaient été prononcés par une voix étrangement bordée de surnaturel,et clairement témoin de cette symbiose silencieuse entre les deux êtres. Eux aussi n'étaient plus qu'un à leur façon, et ce même si un duel de volontés avait amorcé le tout. Cependant Irina sembla à nouveau volontairement s'éclipse, laissant la parole au dieu déchu.

« Sa volonté est la mienne, tout comme les sentiments que tu ressentiras pour elle selon la parole sacrée d'Anima sont le traquenard duquel ton cœur meurtri sera le prisonnier éternel. Toutefois je sens, je sais que nous pouvons vivre à travers vous, de simples mortelles. Mais toi la pieuse croyante tu refuses même d'essayer, tout comme tu as refusé de revivre pleinement de peur d'être blessée. Car au fond ces plaies incurables que tu portes ne sont rien comparées à la douleur sentimentale que tu crains tant. » Il la regardait avec colère dans les yeux, pas de l'agressivité ou de la haine, mais une incompréhension totale. Cela le révoltait profondément de voir qu'ils n'avaient pas le droit à une nouvelle chance après l'injustice qu'ils avaient subie. S'approchant à nouveau avec sa silhouette qui couvrait celle de la prêtresse par la taille, ils semblaient agir avec une telle harmonie, que s'en était troublant. Alors tous deux posèrent leurs mains sur leurs poitrines, écartant brusquement les vêtements en manquant de les déchirer un feu ardent brûlait dans leurs regards conjoints, alors qu'ils se tenaient droits et fiers, arrogants dans cette pose de défi. Seulement une tristesse non feinte s'échappait de chaque pore de leur peau. La poitrine seulement couverte par un fin sous vêtement de la rouquine était pâle et virginale, sa peau ayant toujours eu la faculté de guérir de toutes les blessures, même celles qui auraient du laisser des marques indélébiles.

« Puisque tu refuses de servir la déesse que tu veux louer, je ne vois pas pourquoi nous perdrions plus de temps. Je n'ai pas échappé à ma prison millénaire pour échouer maintenant. Si tu ne veux pas que cette douleur indissociable de ton être ait au moins un sens, alors prends ta lame et enfonce là à travers mon cœur. Achève moi maintenant, plutôt que de me tuer à petits feux en me tenant si proche et pourtant si loin de celle que j'aime. Vivre sans elle n'a aucun intérêt... En fait ce serait un châtiment mille fois plus cruel que celui que nous avons subi jusque là. » Il paraissait hors de lui, impérieux mais doté d'un panache indéniable, même en pareilles circonstances. « Vas-y mortelle ! Attires toi les honneurs d'avoir occis un être démoniaque, glorifie toi d'avoir mis fin à ce que tu hais le plus sur cette terre ! Que ton Harmonie anéantisse mon Chaos !! »

"Tu n'as pas compris Exanimis... tu n'as pas comprit ce qu'était le chaos..."

C'était la seule réponse de Simalia à tout ce discours que le démon avait eut. Elle avait été touché lorsqu'il avait parlé de sa peur d'une relation, oui Earil-Ganiel avait peur de vivre, peur d'être blessé à nouveau, c'était pour cette raison qu'elle avait fait le don de soi, car mieux valait mourir pour les autres en les sauvant que de vivre dans la peur constante. Voilà longtemps que la Gorgoroth l'avait comprit, elle avait médité pendant bien trop d'heure pour être ainsi jugée sur ce qu'elle était ou ce qu'elle devait être. Désormais elle n'avait plus aucune part de ténèbres, aucun mal ne pouvait entrer en elle, c'était peut être pour cela qu'elle admirait d'une certaine manière Exanimis, parce que lui ne craignait rien, ni la lumière, ni les ténèbres, ni la colère, ni la haine, ni l'amour.

"Pendant longtemps je me suis égaré dans les ténèbres, pendant longtemps je suis morte et mon cadavre laissé à la vue des corbeaux et pourtant, j'ai toujours cru en la lumière et j'ai toujours voulu combattre les ténèbres. Mais voilà, j'ai compris une chose, plus l'on tente de se battre contre sa part de ténèbre, plus elle grandit et prend le pas sur ce que nous sommes. Alors j'ai fermé les yeux et je lui ai dis, je l'ai regardé dans les yeux comme je vous regarde vous, tout puissant exanimis et je lui ai dis que je n'avais pas peur, que je ne recherchais ni la gloire ni la victoire mais seulement la paix... alors mes ténèbres s'en sont allé. Je suis prête à porté le fruit de l'union des ténèbres et des la lumière, mais dans quel but?..."

Oh Simalia n'avait pas été insensible au discours d'Irina, bien au contraire, elle avait même eut un léger sourire, celui de la jeune femme frêle et fragile qu'elle pouvait être par moment, celle qui aimait par dessus tout son frère et ses parents, celle qui vivait avant, dans cette grande ville de Taulmaril, resplendissante, merveilleuse, puissante. Avant que tout ce ne se transforme en cendre, en sang et en ruines. Elle lui avait sourit non pas à la manière d'une sœur ou d'une amie, mais d'une de ces amantes d'une nuit que l'on pouvait trouver parfois et qui au petit matin se sépare dans la pâleur du jour naissant faisant ainsi disparaitre leurs sentiments qui ne peuvent être comprit.
Depuis le début Simalia avait été ainsi, défiant les lois de la natures et de l'ordre des choses, devenant une femme combattante, une femme aimante puis rejetée et enfin une morte vivante...

"L'essence divine gouverne ma vie et mes actes, je vénère Anima et j'aime cette symbiose entre elle et moi, je peux comprendre l'amour des ténèbres pour quelqu'un de triste, mais à l'intérieur de chaque être il reste une part de lumière, insoumise et brillante... pourquoi devriez vous m'être rendu?... Irina je ne pourrez vous l'expliquer, je ne pourrais même pas me l'avouer à moi même, alors à défaut de m'être rendu, soyez rendu à ce monde, car au delà de la tristesse et de la haine se trouve, l'espoir..."

Simalia avait ce halo autour d'elle qui se renforçait, elle était cadavériquement belle, elle ne voulait pas abandonner et pourtant, si même Irina ne voulait pas être sauvé, elle ne pouvait plus rien faire. La pression d'Anima devenait trop forte, ses plaies recommençaient à saigner, alors elle tomba à genoux, devant le grand Exanimis, elle fini alors ainsi...

"Oh non Exanimis, vous n'avez pas comprit ce qu'était le chaos, Irina et vous être en symbiose... l'harmonie c'est vous. Moi qui me dresse entre vous tous ici, je ne suis que Chaos..."

Elle s'empara alors de la lame et la retourna contre elle, elle n'avait pas hésité un seul instant. Une nouvelle plaie dans dans ventre, la lame n'était pas rentrée suffisamment profondément pour qu'elle l'a tue sur le coup. Mais désormais à nouveau son sang coulait, il s'étendait là, dans la douleur d'Anima, elle n'avait pas pu l'en empêcher, elle ne l'avait pas vu. Elle se détacha de l'enveloppe de Simalia et prit la jeune femme désormais écroulé sur le dos dans ses bras immatériels, elle lui caressait son visage, le sien pleurait déjà des larmes d'anges, berçant tendrement la jeune femme.

"Pourquoi... Simalia?"

La jeune femme ouvrit les yeux, elle était exétremement faible, son essence divine partait peu à peu...

"Parce qu'il ne doit pas y avoir de chaos en ce monde, seulement l'harmonie. Parce que dans les ténèbres d'Exanimis j'y ai vu la lumière de son coeur... par ce que dans mon coeur j'y ai vu le reflet d'Irina... je... ne peux... pas expliquer... pourquoi... mais c'est la peur qui a gagné..."

"EXANIMIS! Aide là!"

Anima avait hurlé, elle regardait le sang s’écouler et souiller son corps si pur, ses ailes si blanche... le couteau, la lame utilisée était celle qui autrefois les avait scellé...

"Mais je n'ai plus peur à présent..."

Comment pouvait-elle dire qu'il ignorait ce qu'était le chaos ? Comment pouvait-elle ne fusse qu'oser sous entendre pareille sottise ? Non seulement il savait ce qu'était le Chaos, comme il était le Chaos lui même... Lui, soit l'ensemble de son être et celui d'Irina condensaient un Chaos si profond et intense que personne, aucun autre dieu, pas même Sharna ou Kron ne pourraient jamais comprendre ou imiter. Ce n'était pas quelque chose que l'on pouvait apprendre ni contrôler, car le Chaos était une force dominatrice et grisante qui prenait forme sans prévenir n'obéissant à aucun commandement et aucune règle. Et puis qui était cette femme pour lui donner des leçons sur ce qu'était son créateur premier ? Que savait-elle de ce principe fondateur de son être ? Rien, rien, rien.
La colère montait graduellement, grondante et ténébreuse, infestant le corps et l'âme d'Irina. Pourtant elle n'explosa pas tout de suite, comme si finalement Exanimis se retenait in extremis, dans un effort immense pour trouver un consensus valable, ce qui n'était pas chose aisée si on prenait en compte son tempérament. Le sang s'écoulant de ses plaies réveillait chez lui une soif millénaire, et malgré ses sentiments profonds, il n'y avait nulle pitié ni empathie dans ses yeux.

« Tout ce que je te demande c'est d'accepter de devenir le pont qui nous permettra de traverser l’abîme qui nous sépare. Toi qui vénères Anima tu peux être celle qui lui redonnera vie l'espace d'un instant. Bien sûr j'aimerais que tous deux nous retrouvions l'existence qui était la nôtre, seulement aussi douloureux que ce soit à accepter, je me dois de garder à l'esprit que ce monde infect n'est plus le notre. Tout ce à quoi j'aspire c'est de retrouver ma Dame, rester à ses côtés pour l'éternité. Je céderais volontiers toute l'étendue de mes pouvoirs si seulement j'avais la chance de retrouver ces moments privilégiés... »

Les mains d'Irina se trouvaient toujours sur sa poitrine à moitié dévoilée, et clairement proposée en position vulnérable, malgré la teinte de défi. Elle baissa cependant les yeux lorsqu'elle vit le sourire mystérieux de Simalia, comme si elle était soudainement embarrassée par ce qu'elle lui avait fait subir. Impossible cependant de déterminer lequel des deux êtres en était responsable. Peut être avaient ils réagi ainsi de commun accord, qui sait.
Ce fut alors que Simalia retourna sa lame contre elle-même, manquant heureusement de se tuer sur le coup mais se blessant sérieusement tout de même. Exanimis/Irina se ruèrent alors sur elle afin de lui porter secours, animés par une panique non simulée. Pressant leurs mains contre le ventre de la jeune femme, ils avaient bien du mal à contenir les flots de sang qui s'échappaient de sa peau fantomatique. Bien sûr ils se posaient la même question, mais ils étaient trop choqués pour prononcer quoi que ce soit. Cet acte était aussi inattendu qu'inexpliqué, et puis les raisons leur importaient peu, car cela ne résoudrait rien en tant que tel.

Exanimis semblait à nouveau transfiguré, ses traits animés d'une peine si forte et si prenante qu'il aurait certainement pleuré si il avait pu. Son désespoir était à son paroxysme, probablement parce qu'il savait pertinemment que si Simalia venait à disparaître, Anima suivrait sans tarder. Secouant la jeune femme avec une voix aussi grave que tonitruante, son expression était à mi chemin entre la haine et le chagrin.

« NON !! Tu n'as pas le droit ! »

Retirant cette lame maudite du corps de Simalia, ils la saisirent fermement et sans réfléchir à deux fois, le plongèrent en pleine poitrine, leurs enveloppes se distinguant l'une de l'autre, mais agissant dans une impressionnante synchronie. Ce fut alors avec un bruit sourd qu'ils tombèrent tous deux, un genou à terre, l'épée en plein cœur. Sur le visage d'Irina se lisait une grimace, un rictus de profonde douleur et pourtant aucune peur à l'horizon. Retirant l'arme de son corps d'un geste amer mais assuré, elle se soutint d'une paume à terre et l'autre se serra contre la plaie, nette mais profonde. Avec une précision chirurgicale elle avait visé le cœur et avait évité les poumons, ce qui lui aurait valu une mort longue et inévitable. Rampant lentement vers Simalia, ils glissèrent une main dans ses cheveux, leur sang s'écoulant en grande quantité sur son corps. Toussant à en perdre haleine, Irina savait qu'il ne lui restait pas longtemps, malgré le combat que menait son organisme pour guérir de ce genre de blessure. Ce n'était que parce qu'il guérissait sans cesse qu'elle parvenait encore à parler... Mais son temps était limité. A vrai dire elle ne savait même pas pourquoi elle avait fait une telle chose, puisqu'elle n'était pas de nature altruiste ou dramatique. Seulement une chose était certaine à l'heure actuelle : Elle mourrait d'une mort paisible, sans regrets ni remords.

« Toi et ta lumière devez continuer. Ta blessure est grave mais avec ta condition de gorgoroth et l'effet guérisseur de mon sang... du vivras. »

Exanimis sourit sarcastiquement, se tenant là, juste derrière Irina et ébauchant exactement les mêmes gestes au millimètre près. Lui aussi souffrait, et de sa poitrine à la plaie ouverte s'échappait une fumée noirâtre dont l'odeur ressemblait à celle du souffre. Lui aussi perdait ce qu'il lui restait de vitalité, puisque celle qui lui servait d'enveloppe mortelle était dans le même état. Et voilà... il avait agonisé une éternité pour mourir ainsi, sans préavis, sans torture... Si simplement. Il s'en irait pour de bon maintenant qu'il n'avait plus de corps, mais il ne comptait pas disparaître sans raison. Déposant un baiser chaste sur les lèvres d'Anima, il utilisa une langue si ancienne qu'aucun mortel ne pouvait la connaître pour susurrer des mots d'amour à sa belle, puis il lui dit adieu, s'écroulant de tout son poids sur le corps de son aimée.

« Nos corps disparaîtront, mais nos mémoires vivront pour toujours à travers toi, femme. Tâche de leur faire honneur, et de nos célébrer chaque jour un peu plus. Je m'en vais. Tu es sauve. »

Un dernier soupir, un dernier murmure... Puis le silence.

Le silence, un silence intenable lorsque Simalia sentit sur elle le sang d'Irina... non, impossible. Mais Anima était là au dessus des deux amantes, au dessus de cet amour dont elles n'avaient même pas encore conscience. Elle interpela alors Exanimis...

"Exanimis attends..."

Elle attrapa la main immatérielle de son amant et la garda proche de son cœur. Sous cette forme éthérée les deux être semblaient presque divin. Pendant si longtemps on leur avait refusé cet amour, un amour parfait, le premier amour qu'avait connu Isthéria peut-être, la première tragédie de l'histoire, Anima et Exanimis...

"Je suis prête mon amour, je vais te suivre, peut importe où tu te rende je serai avec toi, à jamais..."

Elle posa ses lèvres sur celle de Simalia pour sur celle d'Irina, écartant que la joue de la Gorgoroth cette larme. Elle prit la lame sacrée, celle qui avait provoqué tout cela, la regardant gravement. Et la sera dans ses doigts commettant ainsi un acte de rébellion envers leur emprisonnant, brisant ainsi la pureté et l'harmonie qu'elle scellait en elle.

"Ainsi je peux te suivre, mon amour."

Les ailes blanches se brisèrent ne laissant à l'entité que ce corps éthéré, pur parsemé de ténèbres. Elle se tenait dans les bras d'Exanimis, parfaite, versant une dernière larme sur le sol faisant ainsi naître un arbre, jeune pousse devenant rapidement fort et gigantesque, le temple s'effondra en une myriade d'étoiles qui entourèrent les deux amantes.

"Il fallait que je brise mon harmonie pour pouvoir te rejoindre, mais je ne regrette rien, elles vont vivre à présent Exanimis et dans l'une d'elle grandira notre descendance ainsi nous ne seront plus jamais séparé. Je ne sais pas qui avait raison, ces mortelles ou nous, mais qu'importe à présent. Maintenant que c'est la fin car je t'ai retrouvé et plus rien ne pourra nous séparer. La décision te revient mais je vais lui faire un dernier don, celui dont elle n'a jamais voulu et qui pourtant lui revient de droit, un dernier cadeau..."

Anima tendit sa main vers les doigts de Simalia du néant sortit une bague d'argent surmonté un saphir bleu, en elle était une partie du pouvoir d'Anima qui lui permettrait de protéger Irina. L'image de l'être s'approcha alors des deux femmes et elle leur murmura...

"Reposez vous mes anges car en ce jour vous avez accomplis ce que même les Dieux redoutent au plus profond de leur cœur."

Elle posa sa main sur la blessure d'Irina et en aspira toute la noirceur d'un tel acte, juste avant qu'elle ne meurt, juste avant que ses yeux se ferment sa plaie se referma. La prêtresse de Cimméria avait sauvé la Gorgoroth, en elle était une flamme bien plus pure qu'elle ne l'imaginait et peut être ne pourrait elle jamais se l'avouer, mais si au moins elle décidait d'aimer une seule personne dans son existence plus que sa propre vie alors Anima considérerait cela comme une victoire. L'être ignorait laquelle des deux portait l'enfant à naître mais quoiqu'il en soit, il viendrait au monde en humain.

Elle alla rejoindre Exanimis, mêlant son essence à la sienne pour ne devenir qu'une seule et même créature matérialisée dans cet arbre qui avait fait place au temple. Anima et Exanimis ne seraient certainement plus, mais Simalia et Irina était là, tout avait disparu, ne restaient plus que leurs corps enlacées, Anima ne pourraient jamais guérir Simalia de la mort qui était sienne mais peut être que la Gorgoroth pourrait apprendre à Irina à aimer la vie, cesser d'adorer cette mort ambiante, la mort de ses sentiments, de son cœur qu'elle avait en ce jour poignardé.

Peu à peu les chairs de la Terran se reconstruisait et alors que Anima disparaissait, elle offrait à Irina son présent, une légère pression sur son coeur... et ce fut... le battement d'une nouvelle vie.

"Je t'aime, Exanimis"

Mais voilà qu'atour d'eux se créait une autre lumière, plus belle et plus sereine, une nouvelle chance offerte par qui? Les Dieux? Ou peut être que leur œuvre n'était pas encore totalement achevée.

"Que se passe t il? Exanimis?"

Anima le regardait, elle pensait cette histoire finie, l'anneau désormais au doigt de Simalia mais un dernier combat semblait les attendre. Elle se serra contre lui, elle était prête à disparaitre, mais pas sans lui, jamais.

Dans la froideur aqueuse de ce temple enfoui au cœur de la montagne, en dessous de la force bouillonnante des cascades, se déroulait bien plus qu'une quête d'histoire et de vérité. Au delà de ce que les deux jeunes femmes auraient pu penser ou imaginer, elles avaient trouvé quelque chose qui dépassait leurs expectatives ainsi que leurs craintes. Dans ce temple souterrain elles avaient trouvé l'infini, le suprême, l'indélébile. À travers leurs actes et leurs choix, les demoiselles avaient choisi d'embrasser leurs destinées, s'acquittant de leurs rôles malgré les contraintes et les sacrifices. Sacrifice... C'était bel et bien le mot qui devait être employé, car bien qu'elles ne soient pas venues ici pour ça, entre ces murs antiques elles venaient de vouer leurs vies à servir des dieux qui n'étaient plus... et qui désormais ne seraient plus jamais.

Irina gisait immobile dans l'humidité de ce sol glacial, inconsciente d'une certaine façon, bien que ses traits apaisés montrent qu'elle respirait toujours. Perdue dans un sommeil empli de rêves étranges, elle ne s'agitait pas mais cela n'empêchait pas son esprit d'être tordu par des visions inexplicables. Dans ses songes des images tournoyaient impitoyablement, la harcelant de souvenirs qui n'étaient pas les siens, mais ceux d'Exanimis. Leur lien, bien que brisé physiquement s'en retrouvait renforcé psychiquement. D'un autre côté il semblait être le maillon qui manquait à son esprit pour trouver un certain équilibre, comblant le vide béant qu'elle avait senti depuis toujours. Peut être justement son âme avait-elle attendu ce moment pour être enfin complète... Ou peut être était-ce quelque chose d'autre.

Exanimis s'était pourtant retiré en même temps qu'Anima, sans un mot... Non seulement parce qu'il n'était plus en état, mais aussi parce qu'il n'avait plus rien à dire. Il n'y avait rien à rajouter, de plus ces deux êtres maintes fois millénaires n'avaient pas besoin de se parler pour se comprendre. Leur communion était telle que tout cela était superflu, et maintenant que leur sort était scellé, dans cette union qui les avait forcés à abdiquer de leur nature pour engendrer l'ultime libération ainsi qu'un glorieux avenir. Une bague similaire à celle de Simalia avait surgi dans le poing fermé d'Irina... Jumelle à sa nemesis, mais ornée quand à elle d'une opale noire, scintillante et tout aussi magnifique.
Exanimis était en train de disparaître lentement dans les bras de son aimée, se dispersant en une fumée ocre et sentant la mort. Il était désormais incapable de bouger, et les volutes de fumée s'échappant de ses pieds remontaient lentement, alors même qu'il n'était capable que de la regarder avec adoration, lui racontait un milliers d'histoires avec le seul éclat de ses prunelles qui s'éteignaient elles aussi. Irina quand à elle avait inconsciemment placé une main protectrice sur son abdomen, reprenant sûrement ses moyens petit à petit, bien qu'elle ne soit pas encore éveillée. Un signe avant coureur de ce qui viendrait, grâce au geste commun des deux êtres qui ensemble s'évanouissaient pour de bon, confiant silencieusement le fardeau de leur héritage.

Remuant doucement une main, puis serrant son emprise autour de la bague qui lui avait été offerte sans s'en rendre compte, Irina ouvrit enfin les yeux. Pendant de longues secondes elle essaya de reprendre ses esprits, se demandant où elle se trouvait et ce qui s'était passé. Ce ne fut qu'ensuite que la dure réalité la frappa en pleine figure, la faisant se relever immédiatement malgré les douleurs innommables qui assaillirent ses muscles. Rampant à demi, tout en gardant son poing fermé, elle se dirigea péniblement vers Simalia, qu'elle prit dans ses bras sans y réfléchir. Sans la gêne et la pudeur qui était les siennes en temps normal, en cet instant précis elle ne s'inquiétait que de l'état de la gélovigienne.
Tâtant ses blessures par la force de l'habitude, elle se rendit vite compte qu'à part les cicatrices il n'y avait pas d'autres traces à déplorer. Respirant de soulagement, elle l'agita quelque peu pour essayer de la réveiller. Voyant qu'il n'y avait pas d'amélioration elle décida de rester là, immobile et en silence, afin de se couvrir de solitude comme d'une chaude couverture. Autour d'elle et en elle il n'y avait plus rien... plus de présence oppressante et superbe dans son obscurité d'Exanimis, son autre. Il n'y avait pas non plus trace d'Animis, cet ange parfait dont la vue faisait brûler jusqu'à ses entrailles de par son pouvoir expiatoire. Serrant Simalia contre son cœur, elle caressa ses cheveux comme on caresse un enfant. De fait elle ne savait pas pourquoi, mais elle avait la certitude que leurs chemins n'avaient pas fini de se croiser. Ils se sépareraient peut être, mais ils se retrouveraient toujours. Simalia... Quelque part cette femme inconnue ne l'était plus, et dans le flou de cette situation étrange, elle était la seule chose capable de l'empêcher de tomber dans ce gouffre sans fond. Déglutissant avec peine, elle se demanda pourquoi elle en avait le ventre serré, et la sensation tenace que quelque chose de nouveau vivait en elle.

Le froid qui l'avait envahit... il ne restait plus que lui, lorsque Anima était partie. Combien de temps réellement s'était écoulé depuis le début de cette aventure?... Elle ne pouvait pas le savoir et ne voulait pas. Mais ce froid qui s'empara d'elle, elle était toujorus vivante, comme cette nuit là, lorsqu'elle avait été abandonné dans les vastes plaines... combien de temps mettrait elle à mourir? Pourtant, aujourd'hui il avait quelque chose de différent, aujourd'hui, elle n'avait pas le goût du sang dans la bouche, mais il faisait froid, Anima même déchirée restait cette entité divine, cette toute puissante créature qui avait apaisé son cœur et son âme. Peut être aurait elle du se perdre en elle, vivre à tout jamais dans son ombre pour ne plus jamais ressentir la douleur des hommes et de la terre, la vie, elle était décidément bien plus cruelle que la mort et pourtant elle s'y accrochait, désormais au bout de son doigt vivait Anima, le reflet d'une âme parfaite...

Quelle est cette chaleur? Ce n'est pas comme la première fois... non, Simalia se sent soulevée, soutenue, y a t il donc quelqu'un sur cette terre pour qui elle compte encore? Ce pouvoir, ce n'est pas un gélovigien, ni un gorgoroth, elle n'ose pourtant ouvrir les yeux pour que jamais ne se termine son rêve qu'elle est entrain de vivre, elle ne veut pas retrouver cette réalité. Sa main tombe, elle sent quelque chose, froid, humide... l'acier de ses épées encore accrochées à son dos, elle n'en a pas eut besoin, ce combat elle l'a mené avec ses mots, non avec ses armes, quelle est donc cette amertume qui lui reste au fond de la gorge? Étrange pouvoir qui circule en elle.

Pourtant ses yeux s'ouvrent, elle veut savoir, curiosité humaine, non elle ne rêvait pas... Irina, c'était elle qui l'avait prise dans ses bras, étrangement elle n'avait pas envie de la repousser, elle voulait que ce moment reste à jamais éternel, gravé dans sa mémoire jusqu'au jour de sa seconde mort pour qu'au moment où elle regarde la faucheuse cela soit avec cette image pour pouvoir sourire une ultime fois avant de rejoindre les ombres dont elle faisait partie. Elle tendit la main portant anima au visage de la prêtresse et lui sourit. Simalia avait ce corps de jeune fille mais dans son regard on lisait sa longue et tourmentée existence, ces siècles passés dans la mort, mais pourtant elle souriait de ce sourire de femme épuisée mais heureuse et ces quelques mots...

"Je ne peux pas te forcer à quoique se soit, mais je te protégerai, en l'honneur de ce jour et de tout ceux à venir où tu foulera ce monde, je serai ton ombre, ta lame et ton bouclier, avec moi tu pourra trancher tes ennemis et j'encaisserai les coups de ceux qui te veulent du mal, ô mon amour... mon exanimis."

Puis elle se tue, c'était quitte ou double, mais voilà, Simalia était une femme franche, une femme soldat élevée trop jeune avec une épée à la main et aujourd'hui 500ans plus tard de nouveau ces fils d'acier conducteurs de sa vie qui viendraient trancher ceux qui se mettraient en travers de son chemin.

"Qu'Alea pardonne mes paroles si elles t'ont choquées ô prêtresse de Kesha"

Simalia se leva avec difficulté, mais ce fut bien elle qui brisa ce moment d'harmonie, dans les ruines de ce temple désormais ouvert sur leur avenir. La gélovigienne ne savait pas où aller, si Irina la repoussait elle n'aurait plus de but, plus aucun futur, alors elle se battrait, mercenaire errante, folle entendant la parole des Dieux, qu'ils le croient ou non cela lui importait peu, l'essence divine lui parlait, elle lui murmurait les choses.
C'est ce moment que choisit Ivy pour se manifester, la puissance d'Anima et Exanimis l'ayant bridé jusque là elle se dénoua du bras de la gorgoroth, glissant le long de sa jambe et rampant doucement jusqu'à Irina pour lui faire comprendre que c'était à elle de dire quelque chose, de faire quelque chose. Ivy tenait à Simalia pourquoi et par quelle prodige la jeune femme elle même l'ignorait mais c'était ainsi.

Les larmes de Simalia se mirent à couler sans raison, sans même qu'elle ne cherche à les arrêter ou à les provoquer, c'était fini, Anima et Exanimis, tout ce qu'elles mêmes avaient vécu se terminait en ce jour. Le vent était froid, tout était froid loin du corps d'Irina, le vent fit voler ses cheveux, elle ramassa l'épée qui lui manquait mais s'y reprit à deux fois, elle n'était pas encore remise, son corps et son esprit avaient été mis à rude épreuve. La lame ne chanta pas en rentrant dans son fourreau, Simalia savait qu'elle allait devoir les changer, la présence des amants les avait émoussées. La lame du sacrifice avait elle aussi disparue, il n'y avait plus qu'elles deux et leur futur...

"Qu'allons nous faire à présent?" demanda t elle au Dieu des vent, de la nature et de tout ceux qui étaient capable de l'entendre. Le chemin du retour serait long et pénible, les artefact, oui elles les avaient trouvé, mais jamais personne ne lui prendrait, c'était son trésor, son bien, ce avec quoi elle pourrait se battre pour protéger Irina.
Simalia comprenait peu à peu que le futur ne pourrait pas s'écrire dans la paix et le recueillement auquel elle aspirait, elle faisait partit des gélovigiens mais l'ordre était comme celui d'oris, trop faible trop inconstant, si elle devait se battre toute seule elle le ferait, elle n'avait plus d'ami à voir mourir, plus de frère à décrocher de cette maudite porte, il n'y avait plus rien, il n'y avait qu'Irina et pour elle Simalia était prête à partir en guerre contre la terre entière.

Et les anneaux ont trouvés leurs âmes sœurs...

Après une longue quête courageusement menée, Anima & Exanimis sont à présent sous la responsabilité de Simalia et Irina.