La Demoiselle Blanche et le Prince de Sang Bleu [June]

Les joies d’une vie d’insouciance. Loin de tous les tourments qui pouvaient ravager ce monde. Loin de la sarnarhoa, loin du conflit Grimmi Menab, scientifique contre croyant. Non, ici et maintenant on ne parlerait pas de guerre, d’accomplissement de soi ou encore de chasse à l’artefact. On ne conterait pas non plus de l’histoire d’un guerrier revenu des mort, d’une amazone aveugle, ni même d’une jeune bourgeoise en quête d’aventure. Ici on ne parlerait que d’une jeune fille sans prétention, une jeune fille à la beauté qui n’avait d’égal que la grandeur de son cœur. Car une question qui planait toujours était de savoir ce qu’une simple servante pouvait faire de son temps libre quand sa maitresse n’était pas là et qu’elle pas non plus dans la demeure de celle-ci. Que peut-on faire de son temps libre quand on n’a pas l’habitude d’en avoir ? Elle savait que ce ne serait un plaisir que de courte durée, car la mission que Verna avait accepté, les conduirait au Haut-Monastère des Gélovigiens le lendemain même.

La Demoiselle Blanche et le Prince de Sang Bleu [June] 20110810

Maxine s’était donné pour objectif d’essayer quelques variantes de ses tartes. Elle aimait les pâtisseries en tout genre mais il lui arrivait cependant très rarement de varier les plaisirs. Pomme, poire, fraise, pêche, abricot… les grands classique en sommes. C’est pourquoi aujourd’hui on pouvait la voir devant l’étalage d’une des marchandes du village. L’avantage de ce genre de petit patelin, c’est qu’il n’y avait presque aucun secret, et que tout le monde connaissait tout le monde. On était loin de l’ambiance Tyrhénium. De plus la guilde étant le seul réel centre d’intérêt du coin, tous ses membres étaient encore plus connus.

« Alors ma p’tite Maxine, c’est pas tout les jours qu’on te voit sans la rouquine. Quel bon vent t’amènes ? »

D’une humeur contemplative, elle parcourait le stand des yeux, indécise…

« Hé bien… Verna est occupée et vu qu’elle ne voulait pas que je m’ennuie, elle m’a accordé un peu de temps libre. C’est pourquoi je viens voir ce que vous avez à proposer. J’aimerai lui faire don de quelques douceurs sucrées. »

« Quelle jeune femme intentionnée tu fais. » Elle montra ensuite son stand de la main. « Eh bien tout mes produits son frais, tu ne risques rien. En revanche évites les agrumes, ils n’ont pas encore eu le temps de mûrir, d’ici quelques jours ils seront plus sucrés. »

Elle avait la chance de pouvoir payer ses frais de bouches avec l’argent que Verna lui laissait. Elle estimait avoir suffisamment de moyen pour pouvoir nourrir sa propre servante. De toute façon elle lui rendait bien de ce côté-là. Elle acheta donc quelques fruits, mais profita du fait que la journée était encore loin d’être finie pour aller lire un peu plus loin dans les champs. Elle s’installa un peu plus loin du village, jouissant du calme plat, et de la caresse du vent. Néanmoins sa peau fragile ne lui permettait pas de rester au soleil bien longtemps, c’est pourquoi elle s’installa sous un arbre. Puis elle plongea dans son livre.

« Alors vas-tu enfin t’en sortir Brook ? »

Dalma. Petit village pas trop loin du Haut-Monastère où June était censé passer ses journées de formation à être un bon Gelovigien. Petit village donc où le jeune garçon s'était... Perdu. Encore et toujours. Après tout, ce n'était pas bien facile de se perdre vu qu'il n'y avait quasiment rien, des champs et des plaines à perte de vue, et un petit village tranquille au milieu. Enfin, impossible de vraiment savoir si c'était en plein milieu ou pas, de toute façon, on s'en fichait un peu et June était dans le même cas. Toujours est-il que June était à présent à Dalma, et regardait un peu ce qui se passait aux alentours. Des petits marchands, pas grande animation, et un beau soleil. Tout allait bien dans le meilleur des mondes. Surtout quand on est poursuivi par une bestiole de trente mètres de haut, violette avec des petites touches de vert, des crocs en forme de fiole et ayant pour seul objectif de capturer June afin de s'en servir comme dé à coudre afin de finir cette broderie mystique qu'est confection d'un élixir de doigt de pied fluorescent.

Ne vous demandez pas pourquoi la préparation de cette mixture supposée rendre les doigts de pieds luminescents est une broderie. Ni non plus comment on peut utiliser un jeune garçon en guise de dé à coudre. Mais plutôt, comment se fait-il qu'un monstre de trente mètres de haut ne provoque pas la terreur dans un village? Les trois questions ont pourtant la même réponse : Tout cela ne sont qu'hallucinations. Visions et murmures dans la tête d'un Gélovigien qui n'avait pas vraiment compris le concept de peur, et qui donc, se contentait de courir droit devant non pas par peur de devenir un dé à coudre, mais juste parce que la vision lui avait dit de courir. Vite. Et de ne pas se faire rattraper. Parce qu'après tout, c'était le machin violet qui était le chat. Sauf que le machin violet est pervers. Après tout, on a beau mesurer trente mètres de haut, si ce n'est qu'une vision, alors il sera impossible à June de le toucher. Et de ce fait, comme ce monstre est intouchable, si June devient le chat, alors, par état de fait, il aura perdu!

June s'arrêta de courir pour reprendre son souffle. Regardant à gauche et à droite, ce qu'il voyait était quelques marchands et quelques marchandes. Et plein de trucs rigolos dans des boites. Cependant, ces trucs rigolos semblaient tristes. Parce qu'ils avaient des yeux qui pleuraient. Pour une raison inconnue. Et donc, il ne valait mieux pas y toucher. Que se passerait-il si c'était un ensorcellement qui forçait les gens à pleurer? June serait touché aussi et se mettrait à pleurer. Et il serait triste. Et le monstre aussi. Le monstre lui susurra alors des instructions.

"Excusez-moi monsieur, vous auriez un arbre que je pourrais illuminer? De préférence par la droite."

Le monsieur le regarda d'un air très bizarre. Tout d'abord parce que le monsieur était en fait une dame. Et aussi parce que des arbres, cela ne se vendait pas. Après tout, ce n'était pas très facile de transporter un arbre. La dame lui indiqua donc un arbre au loin au milieu des champs. Au moins, s'il voulait faire des bêtises, ce serait loin, très loin de son étal. June commença donc à se diriger vers l'arbre. En sautillant sur un seul pied. Avant de trébucher. Deux fois. Et de se rendre compte que lorsqu'il était arrivé à l'arbre, que ce n'était pas une bonne idée de continuer à sauter parce que sinon, il se cognerait contre. Malheureusement trop tard. Boum.

"Maieuh. Espèce d'arbre qui empêche les gens de sauter!"

Et June se mit à bouder. Se mettant derrière l'arbre pour bouder. Sauf que l'endroit pour bouder était déjà occupé par un autre monsieur qui était en fait une madame... Et encore une fois, June avait découvert cela trop tard. C'est à dire, qu'il s'était pris les pieds dans la dame pour chuter.

Brook n’était pas prêt de se sortir de ce cauchemar apparemment. Il avait trompé sa femme pour sûre, mais tout semblait flou dans sa tête. Il n’avait pas de souvenir clair de cette soirée. Certes elle lui avait parlé de mariage, raison pour laquelle il s’était rendu ivre avec ses amis tant le doute l’accablait, mais il ne se souvenait pratiquement pas de sa rencontre avec la jolie jeune blonde. Sa situation ne semblait pas s’arranger pour autant, et il était une fois encore perdu dans un cauchemar. Et cette fois il entendait des pleurs de bébé s’élever des ténèbres. Un frisson parcouru le dos de Maxine, quelle vision terrifiante, se faire pourchasser par des nouveaux nés.

Elle allait tourner la page quand quelque chose ou quelqu’un lui rentra dedans. Non elle ne l’avait pas vu venir, ni même entendu, ni même senti sa présence. C’est ça quand on ne sait pas se battre et que l’on n’a pas acquis certains réflexes de bases. Elle fut bousculée, son livre vint s’échouer dans l’herbe, un petit cri de panique s’échappait d’entre ses lèvres.

« Haaa ! »

La tête en avant dans le décor, le jeune garçon venait s’étaler gentiment devant Maxine qui, comme à son habitude ne se méfiait de personne, accourut auprès de lui, s’agenouillant devant son visage.

« Ca va, vous n’avez rien ? »

Elle lui releva le visage, un bien joli minois, même pour un garçon, et vérifia qu’il ne s’était pas blessé. Rien apparemment.

« Vous m’avez fait peur… »

La jeune albinos se releva alors, puis dépoussiéra sa robe avant de tendre sa main à cette jeune personne pour l’aider à se relever, souriant aimablement comme elle avait pour habitude de le faire. Les soleils étaient forts, et la chaleur régnant dans les plaines allait de paire… elle devait faire attention à ne pas rester trop longtemps sous leurs rayons.

Face contre terre et embrassant le sol, June se demanda si c'était le bon moment pour se mettre à réfléchir. Réfléchir sur le sens de la vie qui n'allait pas de haut vers le bas, réfléchir sur la condition Terrane, réfléchir sur pourquoi est-ce que le ciel est bleu, réfléchir sur pourquoi est-ce que les cornes qu'il avait sur la tête n'avaient pas empêché cette chute en tirant des lasers. Et en y réfléchissant bien, la dernière question avait une réponse pourtant simple : il n'avait pas de cornes. Et c'était un mal à remédier d'urgence. S'il n'avait pas de cornes, il fallait qu'il trouve un moyen d'en avoir. Et c'est donc la face toujours contre le sol que June commença à élaborer des plans d'actions pour avoir des cornes passant par des tortues explosives et du lancer de bouts de fromage sur des monstres volants.

Sauf qu'un évènement tout à fait imprévu chamboula son plan d'action qui pourtant ne devait pas avoir d'interruptions avant quelques années. En effet, d'un coup, son visage semblait s'éloigner de la terre. Pourquoi voulait-on l'empêcher de réfléchir ainsi? Etait-ce donc un mal si terrible que de chercher à avoir des cornes? Oui, sur le coup, June ne percuta pas qu'il lui était encore possible de réfléchir sans avoir la tête plaquée au sol. Et même mieux, il lui était aussi possible de respirer. Cela ne l'empêcha pas cependant de commencer à se mettre en colère face à celui ou celle qui semblait prendre un malin plaisir à ruiner ses plans de conquête des cornes! Sauf que, malheureusement pour lui, quelque chose se produisit lorsque son regard croisa celui de la jeune demoiselle en face de lui... Quelque chose qui le rendit...

"Agabulupweeee..."

Oui, même June s'était rendu compte que ce qu'il disait n'avait aucun sens. Plusieurs théories pouvaient être émises quant à cette étrange incantation, et peut-être même que l'association de ces théories permettrait de se rapprocher de la vérité qui eut lieu il y a quelques secondes. La première est l'activation de son pouvoir de sang bleu. Une nouvelle fois. L'incapacitant, comme si un frisson lui parcourait les veines et les artères, donnant un coup de fouet sur tout ce qui était sur son passage, y compris son cerveau responsable du choix des paroles ou ses cordes vocales directement. Une autre approche serait que, totalement charmé par le regard de la demoiselle, June serait devenu incapable d'aligner correctement deux mots. Un autre type de coup de foudre, si l'on peut se permettre.

Une dernière théorie serait que cet étrange murmure serait en fait une puissante incantation magique. Mais si c'était le cas, les effets avaient du mal se voir, car rien d'extraordinaire ne se passa vraiment. Pas de chute d'astéroide, pas de cube de feu géant, pas de métamorphose de son bras droit en tarte Zélosienne... Et la demoiselle en face de lui ne semblait rien avoir non plus. Une dernière théorie est juste que ce mot sonnait cool à ce moment et qu'il l'avait sorti sans réfléchir au sens de ce mot, ni même si ce mot était ou non déjà porteur d'une signification. Juste Agabulupweeee. Langage inconnu, pour une demoiselle inconnue...

"Pardonnez ma surprise, ravissante demoiselle. Je ne m'attendais pas à voir une création divine aussi tôt dans mon périple. Un visage aussi doux, une chevelure si étincelante et de magnifiques ailes roses, vous ferez certainement palir de jalousie Kesha elle même. "

Un sourire charmeur mais sincère se lisait sur son visage, tandis qu'il voyait une main lui être tendue. June n'hésita pas longtemps, prenant tendrement cette main avant de se relever à moitié, avec toujours un genou à terre, avant de déposer un baiser sur le dos de cette main. Ce qui peut-être venait confirmer la deuxième théorie. Mais à ce moment là, peu importait les théories, il n'y avait qu'une chose dans l'esprit de June à cet instant, et c'était la demoiselle qui se trouvait devant lui. Ce visage qui désormais éclairerait ses journées et illuminerait sa vie, donnant de facto une véritable raison de continuer à vivre. Et rien ne pourrait remplacer cette demoiselle dans son coeur, excepté...

"A quel nom est-ce qu'une telle personnification de la pureté saurait répondre? Rien ne m'enchanterait plus que de le co... Nyu?"

... Excepté un coup de sang bleu qui la fit tituber un peu, lui faisant perdre un peu son équilibre, obligeant ainsi June à se tenir à cet arbre afin de pouvoir tenir sur ses jambes. L'expression de son visage avait changé, passant d'un June au sourire charmeur et volage à une June au sourire candide et enfantin. Une June qui avait totalement oublié ce qui s'est passé pendant ces vingt dernières secondes, et qui à vrai dire, s'en fichait un peu. Tout ce qui l'importait à cet instant était de savoir pourquoi est-ce qu'elle devait rester debout alors que se coucher était bien plus facile. Mais sans le faire puisque cela pouvait être un piège. Tendu par les tournesols maléfiques qui projetent de dominer le marché des huiles essentielles. Et June finit par remarquer, au bout d'un moment, qu'elle n'était pas seule.

"Oh. Kiwi Arc-en-ciel, madame! Moi, n'est June! Enfin... Je crois. Un truc comme ça."

Même le ton de sa voix avait changé, devenu alors plus aigu, plus jeune et moins suave. Seuls ceux qui le connaissaient bien sauraient que ce ne sont pas deux personnes différentes, l'ennui, c'est que personne ne la connaissait bien réellement...

A quoi pouvait-elle s’attendre ? A de la noblesse ? Vous m’en voyez navré jeune demoiselle, d’avoir fait preuve de tant de maladresse. Il est plus important pour moi de savoir si je vous ai blessé, que de me soucier de l’état de mon visage. A du charme ? Est-ce le destin qui m’a ainsi mis sur votre route ? Voilà que je me retrouve curieusement fasse à un ange qui semble privé de ses ailes. Ou tout simplement à de l’agressivité. Ne me touches pas salle gamine ! Qu’est ce que tu foutais là ? Au lieu de ça la réponse à laquelle elle eut droit ne pouvait être classé dans aucune catégorie si ce n’est celle de l’improvisation loupé. D’abord de la surprise… puis un sourire.
Elle n’eut pas cependant le temps de lui répondre quoi que ce soit qu’il semblait déjà passer à un tout autre registre, faisant preuve d’une élégance et d’un charme qu’elle avait déjà eu la chance de côtoyer par le passé. Ce qui ne l’empêcha pas de rougir pour autant. Mais il y avait quand même un petit quelque chose…

« Tant de flatterie monsieur… vous m’en voyez fort peu aise. »

Ce fut surtout ce baiser, si galamment déposé sur sa main qui la fit perdre sa contenance… en effet Maxine n’avait encore jamais été le centre de tant d’attention, et encore moins avec cette petite dose de charme. Séance privé avec Verna misent de côtés cela va de soi. Elle ne pouvait soutenir son regard plus longtemps… rougissante elle détourna les yeux et se résignait à lui faire part de son nom. Tout bascula.

« Quelque chose ne va pas ? »

En effet, tout avait changé chez cet homme… il n’avait même plus tout à fait l’air d’un homme. Quelque chose avait changé, jusqu’au timbre de sa voix. Elle pourrait jurer voir une jeune femme se tenir devant elle. Cherchant un appui contre l’arbre.

« Eh bien je suis ravie de vous rencontrer June-Enfin-je-crois. Je me nomme Maxine Roberts. »

Fit-elle en accompagnant la parole d’une révérence. Mais très vite elle se pencha au sol et récupéra son livre, y glissant un marque page, avant de refaire face au jeune garçon.

« Alors… qu’est ce que vous faites dans les parages ? »

Maxine, Maxine. Si June avait appris quelque chose, c'était qu'elle était extrêmement tête en l'air, à oublier très vite ce qu'elle retenait, et à ne pas retenir ce qui était important, au gré de ses changements d'humeur. Or, là, elle ne devait pas oublier ce nom, ni ce visage sur lequel coller ce nom, du moins tant que cette personne était encore présente. Il fallait donc trouver un moyen de retenir ce nom, et c'est pour cela que June sortit un carnet avant de griffonner quelques inscriptions à l'intérieur, relatifs à la demoiselle en face de lui. Qu'elle s'appelait Maxine, qu'elle semblait Terrane, qu'elle avait des cheveux blancs, et qu'elle ne prêtait absolument pas attention à l'énorme masse tentaculaire jaune à carreaux verts et roses à côté d'elles.

Sauf que June avait oublié un petit détail : Elle ne savait ni lire, ni écrire. Et de toute façon, elle ne parviendrait pas à écrire quoi que ce soit sur un carnet avec une branche morte en guise de stylo. Mais ces deux détails étaient sans importance, tout ce qu'elle devait retenir, c'est que la demoiselle en face d'elle s'appelait Maxine. Maxine Ro... Quelque chose de pas important, parce que faut pas saturer l'esprit de trop d'informations en même temps. Juste Maxine. Un rapide coup d'oeil en face de lui lui permit de voir que la demoiselle semblait faire la même chose : Prendre un livre et mettre un truc dedans. Serait-elle atteinte du même mal que June, qui l'obligerait à consigner des informations afin de ne pas oublier certains détails?

"Contente d'te connaître, Maxine. Mais l'arbre à côté de nous ne parle pas, il veut pas qu'on connaisse son nom? Pisque c'est comme ça, on n'a qu'à le bouder et pas jouer avec lui. Comme ça, il sera tout triste et deviendra un saule pleureur et ce sera bien fait pour lui. On va même l'aider, te joins-tu à moi?"

Un rire plutôt étrange et assez sinistre échappa alors des lèvres de June. Il fallait croire que la personnalité actuelle semblait révéler une certaine note de sadisme plongée au milieu d'un caractère enfantin. Comme un enfant qui s'amuse à arracher les pattes d'un insecte pour voir ce que cela ferait. Sauf qu'en l'occurrence, l'insecte en question était un arbre, et que June n'avait pas vraiment les moyens de lui arracher les pattes. Surtout qu'un arbre n'a pas de pattes mais des branches. En hauteur. Suffisamment haut pour que June ne puisse pas les atteindre, même en sautant. Mais inutile de viser si haut quand on a des parties accessible. Et c'est pourquoi June ferma son poing et frappa le tronc d'arbre. Suffisamment fort pour s'écorcher les phalanges et teinter d'un peu de sang bleu le tronc de cet arbre. Qui n'avait absolument rien, au passage.

"Aaaaaaargh! Ca fait maaaaaleuh! Normalement né toi qui devrais avoir mal, pas moi! Méchant n'arbre!"

Non, ce n'était pas un mensonge. Certes, June ne ressentait absolument pas la douleur en tant que tel, et donc, n'avait pas de sensations négatives au bout de la main gauche. Cependant, le peu d'éducation qu'elle avait reçu était de crier et de dire que cela faisait mal lorsqu'elle voyait son sang sortir d'un endroit de son corps. Et là, c'était facile à voir vu qu'elle avait le bout de la main humide par un liquide bleu ciel. Donc, elle devait crier qu'elle avait mal. Et agir en tant que tel. Elle devait se venger de ce méchant arbre. Et son estomac lui indiqua comment. June posa sa main droite non blessée sur le tronc de l'arbre et commença à se concentrer. Puis elle prit son inspiration avant, d'un seul et même mouvement, de se jeter sur l'arbre tête la première pour le mordre. Et ainsi créer un beau trou dans le tronc en forme de morsure. Avant de macher ce qu'elle avait mordu. Et l'écorce craquait doucement contre la dent. Puis June se rendit compte qu'elle n'était pas seule.

"Nomnomnom... C'pas mauvais mais ça manque un peu de sucre. Tu veux goûter n'aussi?"

En termes de bizarrerie en tout genre Isthéria était un monde qui n’était pas de mise. Il y avait des êtres qui passaient leurs vies à se dissimuler derrière une fausse identité, d’autre encore dont le corps était à demi celui d’un animal… et même certains revenaient d’entre les morts sans explications. Bien que cela fasse partie du quotidien de chacun, et en mettant de côté que Maxine n’avait que quatorze ans, il y avait toujours le risque de rencontrer quelqu’un ou quelque chose qui sortait de l’ordinaire, à tel point que l’on ne savait comment réagir.

Et là… c’était le cas.

Tantôt figée par un sentiment de gêne désemparant, elle ne savait que faire. Fallait-il prendre ses jambes à son cou ? Fallait-il appeler à l’aide ? Crow était-il dans les parages ? Si oui, allait-il prévenir Verna ? Fallait-il seulement s’inquiéter cela dit ? Certes il pouvait là s’agir d’un simple cas de dédoublement de la personnalité poussé à l’extrême mais… cela ne voulait pas pour autant dire qu’il pouvait être violent ou agressif. Il pouvait s’en prendre à elle, comme dans cet article qu’elle avait vu dans un des nombreux journaux présent dans la guilde. Un homme, un fou, s’était échappé d’un asile et avait déambulé des heures durant avant de rencontrer une femme dans la rue qui chercha à lui venir en aide. Malheureusement cela lui avait coûté sa vie, après de longues heures de souffrance que Maxine préférait ne pas imaginer. Le fou cependant avait était interpellé puis exécuté le lendemain.
Il pouvait aussi simplement, comme le suggérait ses agissement, s’agir d’un pure et simple cas de délire. Il voyait les objets qui les entouraient comme des êtres à part entières, jouissant d’une conscience propre et étant aussi doués d’intelligence. Etait-il donc simplement fou ? Ou ivre ? Ou… même drogué ? Rien ne pouvait le dire en cet instant… Cependant toutes ces questions n’apportaient pas de réponse à Maxine pour autant. Devait-elle s’emparer du premier objet contondant qui lui tomberait sous la main et frapper la tête du jeune garçon (ou fille vraisemblablement) devant elle ? Juste par pur acquis de conscience ? Non, c’était peut-être trop risqué… on en peut pas dire que Maxine savait se battre, loin de là.

Le sang coulait maintenant le long de la main de June… et le côté altruiste de Maxine la poussée à vouloir lui appliquer un petit bandage par-dessus, mais il ne fallait pas non plus oublier ce côté légèrement dérangé dont il ou elle faisait preuve. Très vite elle plaça son autre main sur l’arbre ce qui attira toute l’attention de la terrane, puis dans un élan défiant une fois encore toute logique, son visage vint se coller contre l’arbre et June en arracha carrément un morceau à pleine dent.

… Oh

…mon

…dieu

Que Delil en soit témoin, un enfant de l’homme venait de commettre un acte dés plus incongrus envers un de ses enfants. Cela n’arrangeait toujours pas plus la situation particulièrement inconfortable dans laquelle se trouvait Maxine. Malgré l’invitation, la jeune terrane ne pouvait accepter, elle prit cependant le temps de s’expliquer.

« Je suis désolé, j’apprécie vraiment votre invitation … mais j’ai bien peur de ne pas avoir assez d’appétit pour envisager de manger… un arbre. »

Elle rabattu nerveusement une de ses longues mèches derrière elle et poursuivit.

« N’y voyez là point d’insulte… Je vais me contenter de vous accompagner avec un fruit. Vous en voulez ? »

A la parole se joint le geste et elle plongea une main paniquée au fond de son sac pour un ressortir une pomme qu’elle croqua sans ménagement. En y réfléchissant quelques secondes elle se demandait le gout que pouvait avoir un arbre.