Rinna s'en va-t-en guerre!

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- Walter cherche de Preux chevaliers.
_ Raël veut des clients.
_ Deirdre a besoin d'employé!

Les Rumeurs

_ Il parait que des personnes hauts-placées seraient gravement malades.
_ Il parait que ça se bécotte "au bal de la Rose".
_ Il parait que des créanciers en sont après un des conseillers de Ridolbar.

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 Rinna s'en va-t-en guerre!

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MessageSujet: Rinna s'en va-t-en guerre!   Rinna s'en va-t-en guerre! Icon_minitimeMer 8 Oct - 22:10

Maëva attendait dans un petit salon, au premier étage, que les premiers invités arrivassent. Elle regardait nerveusement par la fenêtre entrebâillée dans laquelle s'engouffrait un vent frais, espérant qu'un bruit - le sabot d'un cheval, le cri d'un cocher, qu'importe!- perturbât le silence morne qui étreignait l'endroit. C'était un silence lourd, remplie d'une attente sourde et de la frustration souterraine qu'on ressent à l'approche d'un évènement important mais qui n'en finit pas d'arriver; c'était un de ces silences qui dilate le temps, qui vous envahit comme une lente et agaçante torpeur, et qui vous procure l'insoutenable sentiment de n'être propre rien ou, du moins, de ne rien entreprendre qui vaille la peine. Maëva se sentait si lasse d'attendre qu'un rien l'irritait: Un bruit inconnu la faisait sursauter, bien qu'elle tendit l'oreille autant que cela lui était permis afin de discerner tous les sons; le silence l'oppressait et l'agaçait. Quant au reste, elle n'osait y songer sans inquiétude.
Parfois, Viviane, sa soeur, affairée à toutes sortes de menus détails, s'arrêtait sur la porte du petit salon dans laquelle elle observait la cour. Elle penchait légèrement la tête sur le côté, passait sa main dans son adorable chevelure aux boucles brunes et folles et lui demandait invariablement, avec le même air ingénu et moqueur : 'Toujours à bailler aux corneilles?'. Maëva maugréait une sempiternelle réponse évasive de mauvaise grâce que Viviane n'écoutait point. Puis, cette dernière repartait du même pas indolent par lequel elle était venue. Elle revenait chanter sa ritournelle tous les quarts d'heure.
L'instant, pourtant, était grave. D'un moment à l'autre, les alliés de la famille allaient franchir le vaste portique de l'antique demeure afin de répondre à l'appel de Rash Lanetae, chef incontesté et vénérable de leur famille. Ce dernier avait décidé de les convoquer ans le but de leur évoquer un évènement d'une grande importance et aux funestes conséquences. Certes, le patriarche possédait une influence considérable au sein de Canopée; il n'en restait pas moins que la convocation de tous leurs plus puissants alliés n'était pas chose aisée, et que c'était un fait extrèmement rare. D'autant que le sujet qu'il désirait aborder était complexe et délicat.
Brusquement, Maëva se leva. Elle avait crut entendre le bruit caractéristique d'un hennissement de cheval. Elle accourut à la fenêtre, qu'elle n'avait pas perdu des yeux, mais dont elle s'était éloignée afin de s'assoier dans un confortable sofa qui jouxtait une commode au bois sombre et qui sentait la cire. Elle manqua de déraper sur le tapis aux grandes et fines arabesques rouges qui s'étalait sur le sol, parvint à retrouver son équilibre, puis ouvrit la fenêtre d'un grand geste de la main. Un bourrasque folle se jeta à son visage et gonfla brutalement ses poumons; Maëva tendit l'oreille. Une sourde rumeur lui parvint, comme un bruit étouffé, métallique et qui ne cessait de se répéter, de s'amplifier, et sur lequel venait se poser comme le bruit qu'un tambour fait quand on le frappe. Quelques instants plus tard, la jeune sindarin aperçut des cavaliers, au loin. Sans plus attendre, elle poussa une exclamation désarticulée se précipita dans la chambre de sa soeur, qui jouxtait le petit salon dans lequel elle se trouvait, et ouvrit la porte avec fracas. Surprise, Viviane, qui se reposait dans son lit, se releva dans un sursaut.

-Viviane! Viviane! S'exclama Maëva, qui ne se contrôlait plus.

L'intéréssée considéra ça sœur d'un œil morne, leva un sourcil, et répondit d'un ton sarcastique

-Bonjour ma sœur, c'est toujours un plaisir de te voir!

La jeune sindarin fit mine de n'avoir rien entendu, et poursuivi sur le même ton, parlant vite et fort, bredouillant parfois en plein milieu d'un mot:

- Ils sont là, tu entends? Il sont là!

Et elle battait des mains, comme à l'approche d'un heureux évènement.
Viviane considéra sa sœur du même oeil morne et leva le même sourcil. Elle ne comprenait pas l'enthousiasme de sa jeune sœur. Certes, l'évènement était d'importance; Toutefois, c'était de ces choses lourdes, pesantes, qui accablent les coeurs et qui troublent la quiétude des âmes. Il s'agissait d'une question de la plus haute importance pour leur famille, et rien que l'évoquer la fatiguait d'avance.

- Oui, oui, j'entends Maëva. répondit-elle d'une voix lasse. Mais ce n'est pas un jeu, tu sais?

-Non, je sais bien, rétorqua cette dernière avec une petite moue boudeuse. Mais tout de même! Tout ce monde, toutes ces grandes questions, le sort de notre famille, peut-être, qui va être décidée ce soir! Cela ne t'excite pas?

Viviane lâcha un profond soupir, mais s'autorisa à sourire devant tant de naïveté et de candeur:

- Comme tu es ingénue! dit-elle enfin. Mais je ne te le reproche pas. Si seulement je parvenais à voir le monde comme toi! Ce qui t'enthousiasme m'effraie au contraire.

Elle se tut quelques instants puis, s'apercevant que sa soeur ne répondait pas, elle repris:

-Tu sais, ce qui va se décider ce soir, ce n'est pas un jeu, ou une bonne chose. On ne parle pas d'un bal, d'un réception ou d'une promenade dans nos propriétés.


- Je sais, Viviane, mais peut-on laisser Elerinna dans une position si inconfortable ? Parfois, l'immobilisme ne mène à rien. Et il n'est pas amusant du tout.


Viviane ne répondit pas tout de suite. Peut-être, finalement, que sa soeur avait raison: n'était-elle pas toujours trop pessimiste? Ne voyait-elle effroi, inquiétude et angoisse là où il n'y avait à voir que mouvement et entrain?

-Quoiqu'il en soit, finit-elle par déclarer 'un ton neutre, tu as raison sur un point.

-Lequel ? La questionna Maëva, les yeux brillants.

- Ils sont là, et il nous faut les accueillir.

La jeune sindarin acquiesça, et les deux soeurs se hâtèrent de descendre attendre leurs invités dans le grand salon où avaient lieux toutes les réceptions. Lorsqu'elles y parvinrent, leur troisième soeur, Rose, les y attendait. Sa chevelure rousse encadrait son visage volontaire où se dessinait parfois un sourire carnassier et cruel; elle avait une silhouette filiforme qui se mouvait souplement. Elle portait mal la robe et semblait se déplacer un peu gauchement dans celle qu'elle portait, comme engoncée dans un flot de tissu dont elle ne comprenait pas la physique et qui la gênait, l'entravait même, du moins lui déplaisait fortement. Quand elle aperçut ses soeurs, elle s'empressa de les rejoindre, et lâcha, gouailleuse:

-Toujours à trainailler, à ce que je vois!

Maëva parut scandalisée, fit la moue, et répondit d'un air mutin:

- Bonjour ma soeur, comment allez vous? Oh! moi? Je vais bien, merci, vous êtes charmante!

Viviane, elle aussi, y alla de son petit bonjour:

- Rose, tiens donc, toujours aussi amène! Quel bon vent t'as poussé à nous adresser la parole?

L’intéressée éclata de rire et s'empressa d'étreindre ses soeurs : Elle ne les avait vu depuis de longues semaines, occupée qu'elle était à vagabonder à travers Cimméria pour diverses affaires urgentes. Puis, Maëva détailla la pièce.
Pour l'occasion, des sofas et des fauteuils avaient été disposés en demi-cercle autour , provenant de l'ensemble de la demeure: le nombre de leurs alliés étaient considérables, et c'étaient des gens prestigieux. Il ne s'agissait pas de mal les recevoir. En outre, les domestiques avaient nettoyé chaque pièce, avaient ravalé la façade, taillé les haies du domaine et les cuisiniers avaient préparé une gargantuesque collation afin de sustenter les invités. Tout avait été préparé afin qu'éclatât le luxe et la puissance de la famille Lanetae, et afin d'adoucir le sujet grave pour lequel les avait convoqué Rash. Alors que Maëva s'extasiait des merveilles de fastes déployé par son père, elle entendit les premiers invités pénétrer dans le vestibule.
Il s'agissait des Trenn, allié de longue date et qui possédait d'immenses domaines à l'est des terres des Lanetae. Etait venu Falgor, le chef de famille et ses deux fils, Orïn et Gmann. De leur père, ils possédaient l'imposante carrure et les cheveux d'un noir profonds. Ils parlaient fort, d'une voix grave et chaude, et plaisantait à propos de tout. L'un portait une livrée rouge sombre aux boutons gravés du loup blanc, symbole de la famille Trenn. L'autre portait une redingote noire et un pantalon beige qui lui serrait les cuisses. Leurs bottes claquaient avec un bruit sec sur le parquet de la maison; ils avaient l'air braves et francs. Maëva s'empressa d'aller se présenter, et fit tout son possible pour être agréable; elle crut même plaire à Orïn, dont les yeux ne se détachaient pas d'elle.
Puis, quelques temps plus tard, arrivèrent les familles Fran et Muend'hal. Ils pénétrèrent dans la cour dans de somptueux carrosses et entourés de nombre de leurs gens qui apportaient des cadeaux et des gages de loyauté. Ils étaient venus avec femmes et enfants, et faisaient preuve de grandes largesses. Viviane apprit à Maëva que c'étaient les plus anciens alliés des Lanetae et que c'étaient les plus fidèles et les plus puissants. Ils possédaient une fortune considérable, qu'ils faisaient prospérer avec soin et dont ils se servaient toujours à bon escient.
Enfin, vinrent les Ulter, les Frest, les Noem, les Ubriom et les Norden, tous parlant fort et apportant avec eux de nombreux cadeaux; Maëva eut la sensation de se trouver à l'un de ces grandes réunions de famille dans lesquelles tout le monde se salue sans vraiment connaître et où tout semble irradier de joie. Son sentiment, hélas, fut de courte durée; En dernier vinrent les Almarël et les Jézékaël.
Ils arrivèrent dans de grandes capes, montés sur des chevaux noirs qui marchaient au pas, paisiblement, et ils avaient le regarde perçant. Daeron chevauchait à côté de sa femme, Tanaëlle, en tête du cortège; et accompagnée de la vénérabe Eren Venait ensuite Maëllan et Idril Jézékaël, ainsi que Faëlle. A la fin du cortège, chevauchait Gillean, fils de Daeron, la mine pâle, le visage pensif.
Ils furent introduits cérémonieusement, et Maëva fut tant intimidée qu'elle crut ne jamais pouvoir se présenter. Elle y parvint néanmoins, mais se trouva sans grâce, et fut particulièrement gênée par le regard de Daeron; son regard lui faisait froid dans le dos, et elle ne pouvait songer à celui-ci sans frémir.
Alors, comme toutes les familles étaient réunis, Rash déclara qu'il était temps de se réunir. Les invités se rassemblèrent dans le grand salon et s'installèrent sur les sofas et sur les fauteuils mis à leur disposition; des domestiques s'empressèrent de leur proposer une collation et de veille à leur confort. Lorsque tous furent installés, Rash se tint debout, au milieu d'eux, et prononça d'une voix grave:

-Mes amis, je suis content de vous voir aujourd'hui. Non seulement parce que ces réunions sont trop rares: elles nous rapprochent, et nous nous rappelons pourquoi nous sommes alliés en buvant et en mangeant jusqu'à n'en plus pouvoir.

A cet instant, des hourras furent lancés, et des verres se levèrent tandis qu'on riait et qu'on s'interpellait. Lorsque l'agitation se fut éteinte, Rash continua:

-Hélas, je ne vous ai pas convoqué uniquement parce que j'aime faire bombance et festoyer, entouré d'alliés fidèles, et d'amis. Si je vous ai convoqué, c'est parce que j'espère de vous tous que vous soutiendrez notre famille dans les troubles qu'elle s'apprête à peut-être subir et vous ne faillirez pas à vos engagements. Mais de cela, mes amis, je ne doute pas un instant!

Des murmures se firent entendre dans toute la salle et, finalement, une voix demanda:

-Et quelles sont ces troubles dont tu nous parle? Que peux-il nous arriver, aujourd'hui ? Ne sommes nous pas riches et puissants?

Alors, Rash prit un air grave, et prononça d'une voix prophétique:

-Mes amis, C'est de la guerre dont je vous parle!


Dernière édition par Elerinna Lanetae le Mer 10 Déc - 13:02, édité 3 fois
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Rinna s'en va-t-en guerre!   Rinna s'en va-t-en guerre! Icon_minitimeJeu 9 Oct - 20:32

Installé avec désinvolture dans un sofa pourpre capitonné, les jambes croisées, Daeron observait tous ses semblables autour de lui qui parlaient fort et lançaient de grands rires lumineux comme des oriflammes sur un champ de bataille, et il souriait doucement. Tandis que le patriarche de la famille Ulter, avec laquelle les Jézékaël avaient conclu récemment des alliances économiques fructueuses, lui jacassait mille sornettes d'un ton mielleux à souhait, Daeron lui répartissait des traits d'esprit pleins d'humour et, imperceptiblement, passait au peigne fin toute la composition de cette réunion mondaine organisée par les Lanetae. Il faisait tourner insoucieusement dans sa main un ballon de cognac et faisait mine de partager l'enthousiasme festif de toutes ces belles gens. Mais quand la plupart d'entre elles s'amusait sincèrement et prenait ce rassemblement pour un motif de réjouissance, Daeron n'avait que l'air de la légèreté.
Il était habillé plus sobrement que d'usage et avait abandonné ses couleurs extravagantes pour un frac noir long, élégant, aux manches boutonnées proprement, mais sans fioriture, sur des gants en flanelle blanche. Le col de sa chemise était redressé par un ascot en satin noir, épinglé d'une minuscule broche en onyx ciselé d'argent qui figurait le soleil noir de la lignée Tombeciel. Son pantalon droit, taillé sur mesure, tombait sur ses bottes en cuir dans une descente sobre et stricte. La seule couleur qu'il s'était permise était celle de son gilet, rouge grenat, brodé d'arabesques complexes, dont l'éclat était cependant atténué par les pans sombres de son frac. Même sa crinière de lion, blonde et sauvage, il avait su l'attacher sagement dans son dos. Il avait l'air cependant si décontracté qu'on remarquait à peine qu'il ne buvait presque rien de son cognac et qu'il méprisait la collation qu'on leur avait servie. On ne convoquait pas un homme de son importance, qui cumulait les titres de conseiller auprès de la reine et de grand propriétaire, ainsi que d'autres fonctions officieuses, en urgence au milieu de la semaine pour boire le thé. Les Lanetae, malgré leurs grands déploiements de faste et de frivolité, ne devaient pas l'avoir perdu de vue.
Il était déjà considérablement agacé de ne pas savoir pour quels motifs on l'avait fait accourir ici, mais l'insouciance gaillarde de cette famille lui avait toujours porté sur les nerfs. Il n'avait aucun mal à imaginer Rash, dans un élan de générosité et d'optimisme irréfléchi, bombarder Léogan de petit capitaine déluré à commandant en à peine quinze ans d'exercice parmi les officiers, parce qu'il fantasmait son mariage avec sa fille aînée. Les figures brillantes de cet homme, de Maëva et de Rose, dans le salon, lui inspiraient une exaspération croissante. Il avait un milliard de choses à faire et il semblait qu'on ne l'avait fait venir que pour boire, manger, et peut-être valser en fin de soirée. Et que dire de toutes ces familles frivoles, venues avec des montagnes de cadeaux comme chez l'empereur et avec leurs petits enfants qui se bousculaient entre les meubles en jouant, au milieu de ce dont on lui avait parlé comme d'une réunion d'ordre politique ? Daeron et Tanaëlle avaient laissé chez eux leurs deux benjamins, qui n'avaient pas leur place dans ce genre de rassemblement, mais il semblait que les autres n'avaient pas eu la même prévoyance si subtile.
Pourtant, il ne lui échappait pas, dans cette atmosphère de brouhaha fumeuse, où il distinguait à peine les palabres de son interlocuteur, qu'il allait se jouer ici quelque affaire d'importance. S'il ne pouvait pas compter sur les airs bonhommes de Rash pour le deviner, il voyait assez d'ombres et d'angoisse sur la figure de Viviane pour suspecter les Lanetae d'être confrontés à un péril trop grand pour leurs forces – et par les dieux, cette jeune fille était sûrement la dernière lueur de raison qui brillait encore dans cette maison inconséquente. Il la regarda un moment d'un air pensif, puis, remarquant qu'elle avait levé ses yeux vers lui, lui sourit poliment pour s'excuser de sa maladresse.
Qu'allait-on leur demander ? Qu'allait-il devoir céder ?

Enfin, Rash somma tous ses invités de se rassembler dans le salon et Daeron décroisa ses jambes avec soulagement. Il lui démangeait de regarder l'heure à sa montre pour compter le temps précieux qu'il venait de perdre, mais il tâcha de faire bonne figure comme de coutume et se contenta de poser tranquillement son verre de cognac sur le plateau d'un domestique qui passait par là. Tanaëlle, qui discutait avec bienveillance des affaires du temple de Delil avec la mère de la famille Trenn, vint s'asseoir à ses côtés sur le sofa, dans un frôlement de flanelle violette. Ils échangèrent un regard plein d'affection. Il remarqua qu'elle n'avait pas mangé non plus et qu'elle avait l'air grave, et il s'en rengorgea comme d'un haut-fait digne d'orgueil – son épouse était lucide et pragmatique, comme il l'était lui-même, ainsi que son fils aîné, qui s'était assis près d'eux sur un fauteuil après avoir discuté galamment avec quelques demoiselles, et qui inspectait les lieux avec la même méticulosité dissimulée que son père. Quant à Fa'ëlle, assise lascivement sur un récamier, habillée d'une robe drapée aux couleurs flamboyantes, elle avait ses manières habituelles, son regard arrogant et son sourire carnassier. Elle mangeait une poire en discutant avec les héritiers Norden, mais Daeron était assez averti de sa façon de faire pour détecter les mouvements imperceptibles de ses yeux verts et venimeux, qui n'étaient pas moins perçants et perspicaces que les siens. Maëllan et Idril, enfin, s'étaient assis dès leur arrivée sur un sofa confortable, où ils avaient installés Eren, doyenne de la réunion à qui les chefs de famille venaient rendre hommage un par un et qu'elle recevait avec une froideur antique.
Daeron eut à peine le temps de couvrir tous ses proches d'un regard satisfait que Rash appela à l'enthousiasme général d'un ton chaleureux et débonnaire. A défaut d'avoir encore un verre à lever, Daeron échangea un rire joyeux avec ce bon vieil Ulter qui venait de faire une plaisanterie au goût plutôt douteux, mais qui fut au moins assez utile à son interlocuteur pour donner l'illusion de participer à tout cet entrain incompréhensible.

Il regagna son sérieux avec d'autant plus de facilité qu'il n'éprouvait pas cette gaieté mièvre qui semblait les avoir tous contaminés ce jour-là. Rash poursuivit d'un ton cérémonieux, en rappelant les engagements promis par ses alliés, et un sourire carnassier frémit légèrement sur les lèvres de Daeron – nous y voilà, mon bon vieux Lanetae, qu'as-tu donc derrière la tête ? Dans quelle galère veux-tu encore tous nous embarquer ?
Ulter, assis non loin, posa la question la plus stupide à poser en ce genre de circonstances – comme s'il était aisé de demeurer riches et puissants dans un monde en déliquescence tel qu'Isthéria – et Daeron n'eut heureusement pas le temps de s'en exaspérer, car déjà Rash rebondissait sur ce propos pour prendre son ton le plus grandiloquent et lancer un pavé – que dis-je, une maison en briques ! – dans la mare.

Il y eut un long silence, nécessaire à tous pour s'interroger d'un regard où se mêlait étroitement la stupeur à l'alarme, et puis, soudain, un épais brouhaha tourbillonna dans le salon et s'éleva en exclamations indignées de plus en plus intelligibles. Daeron demeurait immobile, accoudé sur ses genoux, le visage posé pensivement sur ses doigts croisés.

« Pardon, la guerre ? protesta Tanaëlle, d'une voix aiguë, près de lui. Mais enfin, nous n'avons conclu aucun engagement de cette nature avec votre famille, Rash, qu'est-ce que cela signifie ? Personne sur Isthéria ne désire faire la guerre depuis plus de la moitié d'un millénaire !
– Depuis le carnage infâme de Taulmaril, où deux de mes fils ont perdu la vie, en effet, compléta Eren, d'un ton aussi calme que lugubre.
– J'ai aussi perdu un père et un frère, ajouta le patriarche des Norden. Pour nous qui sommes des races centenaires, certaines plaies ne se sont pas refermées. Cinq cents ans paraissent bien longs pour la terre d'Isthéria mais pour les Sindarins, cette guerre est encore une blessure dont souffre une génération. Je ne pense qu'on puisse en parler d'un ton aussi léger et insoucieux, Rash.
– Et au-delà de ces considérations, comme l'a souligné Dame Tanaëlle, reprit un Frest avec nervosité, il ne me semble pas avoir convenu d'accords avec les Lanetae qui impliquent quoi que ce soit en matière de campagne militaire. Je vous offre mon blé à un prix qui défie toute concurrence depuis deux siècles, Rash, je vous suis tout acquis, mais il n'a jamais été question de lever une armée avec vous...
– Mes amis, du calme. »

Tous se tournèrent tout à coup vers Daeron, qui venait enfin de prendre la parole d'un ton grave et tranchant.
Il se redressa lentement et posa sur Rash son regard charbonneux, opaque et crépitant d'intelligence. Il avait appris à ne jamais réagir spontanément aux provocations comme celles-ci, il avait attendu que tous paniquent et poussent des cris de vierges outragées tandis qu'il prenait de la distance.
Les hommes étaient des créatures si aisément impressionnables. Il suffisait qu'un loup vînt à crier un peu fort près de leur bergerie pour tous les effaroucher – Rash avait décidé d'être ce loup. Il n'en tirerait pas grand avantage. Il y avait des manières plus habiles d'entamer un discours au propos si sensible : il se mettait d'ors et déjà en situation difficile. Ce que les hommes voulaient, c'était la sécurité. L'assurance d'un projet. Un chemin bien tracé. La rationalité. Et c'était ce que Daeron, en avançant avec méthode et sérénité, venait toujours leur apporter. C'était ce pourquoi il était tant apprécié.
Il sourit tranquillement à Rash.

« Hé bien, voilà une déclaration percutante, dit-il avec un amusement qui sonna innocemment. Vous avez toujours eu l'art d'entrer en matière, Rash – on reconnaît là le militaire de carrière des forces de Canopée. Nous sommes tous prêts à boire vos paroles désormais. »

Il sourit à nouveau, d'un air plus entendu qui signifiait « Tu as eu ce que tu voulais, n'est-ce pas ? Bien joué. », mais poursuivit en prenant un visage sévère.

« Mais je vous en prie, ne nous échauffons pas inutilement. Il n'est pas encore question de s'épouvanter de ce que deviendront notre blé, nos frères, nos pères, nos fils, nos futures veuves et nos orphelins, non. Quoi que ce soient des questions d'une importance première, elles ne viendront qu'en second pour être tout à fait pertinentes, nuança-t-il, à l'adresse de sa femme qu'il sentait se tendre d'indignation près de lui, tout en posant une main aimante sur les siennes.
Non, j'irai droit au but, reprit-il, les yeux toujours fixés sur le patriarche Lanetae. Que tentez-vous de nous faire comprendre, Rash ? demanda-t-il, d'un ton calme où il fit percer une pointe d'étonnement. Une guerre ? Contre qui ? Pourquoi ? Votre domaine a-t-il été menacé de quelque façon que ce soit par un ennemi dont les forces armées de Canopée valent moins la peine d'être averties que vos alliés politiques ? En avez-vous seulement parlé à la reine ? »


Dernière édition par Léogan Jézékaël le Ven 12 Déc - 19:37, édité 11 fois
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MessageSujet: Re: Rinna s'en va-t-en guerre!   Rinna s'en va-t-en guerre! Icon_minitimeMar 9 Déc - 18:00


Spoiler:

(Rash s'éclaircit la gorge avant de parler. Mine de réflexion, expression grave, prestance.)

- Le monde, Daeron, ne sera pas éternellement en paix. Ce n'est pas dans sa nature, et seule la peur de mourir peut empêcher les hommes de se battre. Et cela, tu le sais pertinemment, c'est pourquoi tu profites autant que cela se peut du luxe que tu possèdes, tout en prenant soin de protéger tes arrières afin de n'être jamais pris en défaut.
Le mouvement, mes amis, c'est là l'essence du monde. Aujourd'hui nous sommes riches et puissants, oui. Mais cela ne signifie pas que nous le serons dans l'avenir, ou que nos enfants connaîtront la paix, et la quiétude de notre existence. Il est au contraire certains qu'ils connaîtront des troubles que nous n'imaginons guère, et dont, peut-être, notre volonté à préserver la paix pour la paix aura provoqué.


***

Daeron fronça les sourcils avec agacement, mais ce sentiment passa fugacement dans ses yeux et sa voix coula doucereusement entre ses lèvres.

« Tout ça est très bien, j'y consens volontiers, en vérité. Toutefois, je vois en effet que vous avez fort réfléchi à la nature de la guerre et à celle du monde, ce qui est une entreprise très louable pour un chef militaire de votre trempe, mais cela ne répond pas tout à fait aux questions que nous nous posons tous. »

Pour sa part, quoi que Rash comme ses enfants avait la fâcheuse manie de tutoyer les gens qui les entouraient, il n'y était pas très familier et préférait garder une distance avec son interlocuteur. Il se redressa d'un air sévère et demanda lentement, le regard brillant :

« Expliquez-nous donc de quel conflit inévitable vous nous parlez, car pour ma part, je ne vois pas bien où vous voulez en venir. Quels sont les ennemis de Canopée aujourd'hui ? Que vous ont-ils fait ? Pourquoi devrions-nous plonger nous-mêmes nos enfants innocents dans les troubles dont vous parlez ? Je ne vous suis pas. »

Il y eut un murmure d'approbation parmi ses alliés les plus proches, notamment à l'endroit de ce bon vieil Ulter, que toute cette philosophie laissait tristement sur le carreau.

***

Rash toisa Daeron et fronça les sourcils.

' Tes enfants, Daeron, resteront, quoi qu'il en soi bien à l'abri; de cela, je n'ai aucun doute.
Sachez, mes amis, que ma fille, Elerinna, court un grave danger, au sein de l'ordre des prêtresses de Cimméria. Vous savez qu'elle y officie en tant que Grande prêtresse, et que nous en retirons de grand bénéfices. J'ai appris récemment que sa position était désormais contestée, et qu'on parlait de la destituer; pire encore, peut-être est-elle promise à l'exil dans la labyrinthe de Zaléra.'

Il toisa à nouveau Daeron, puis embrassa le public d'un regard brulant et s'écria de sa voix puissante d'homme et de père :

'Alors je vous le demande à tous: Pouvons-nous laisser l'une des notres, ma propre fille qui plus est, être traité de la sorte, et peut-être condamner à une mort certaine? Mes amis, pendant que nous buvons et mangeons sans nous soucier d'autres choses que de ce qui se passe dans nos frontières, certains d'entre nous, et de noble ascendance, risquent la déchéance et la mort.'
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MessageSujet: Re: Rinna s'en va-t-en guerre!   Rinna s'en va-t-en guerre! Icon_minitimeMar 9 Déc - 18:18

Ah. C'était donc cela. Daeron se renversa dans son sofa en écoutant Rash, la mine grave. Il se tut. Gillean, son fils aîné, lui jeta un regard inquiet, qu'il lui rendit avec confiance – cela attendrait, mon garçon, encore un petit instant.

« N'y a-t-il pas d'autres moyens pour sauver ta fille, Rash, demanda le patriarche de la famille Trenn, alliés chers aux Lanetae, que d'envoyer des troupes armées attaquer une ville fortifiée telle qu'Hellas ? Je conçois ton angoisse, bien sûr, et ta colère, je l'aurais sans doute ressentie moi-même si un de mes fils avait été menacé par la loi d'une contrée étrangère. Mais nous n'avons sans doute pas la force de nous frotter à l'armée de tout un pays... Nous devons disposer, à nous tous, de peut-être...
– Dix-mille hommes en tout, compléta le Frest qui s'inquiétait tout à l'heure fébrilement de ses finances. Dans le cas où nous déciderions de joindre tous nos forces aux vôtres, Rash.
– Dix-mille hommes, ce n'est pas encore assez, et c'est tout ce que nous pourrons opposer à l'armée cimmérienne, continua le patriarche Trenn. A moins que tu n'aies d'autres forces armées sous le coude, cette incursion ne sauvera pas ta fille et nous tuera tous, mon ami. »

Après avoir écouté ces remarques, toutes fort justes au demeurant, mais malheureusement fondées davantage sur du sentimentalisme que sur une raison solide, Daeron souleva un sourcil contrarié et secoua la tête en soupirant.

« Je retiendrais d'abord ce que dit Falgor Trenn, releva-t-il, en inclinant respectueusement son chef vers le patriarche. N'avez-vous pas examiné d'autres moyens que la guerre ? Nous constituons ensemble le cercle des plus puissantes familles de la cité. Nous tous, nous représentons le grand peuple sindarin aux yeux de tout Isthéria. Si nous nous levons contre Cimméria, pour le monde, ce sera le peuple sindarin lui-même qui se lèvera contre un pays étranger. Les conséquences diplomatiques engendrées pour le sauvetage d'une seule d'entre nous seraient catastrophiques. Qui sait combien d'alliés de la nation du Nord se retourneraient contre nous, plus forts militairement que jamais nous ne pourrons l'être ? C'est très regrettable, mais bien que notre peuple soit parmi les plus brillants de ces terres, Canopée n'est pas faite pour soutenir une entreprise guerrière. Les Sindarins sont grands et sages, mais leur nombre est faible, et la natalité de leurs enfants, basse. Vous parlez d'écraser notre puissance et d'étouffer notre rayonnement en vous montrant si belliqueux, Rash. Il convient avant d'en arriver à de pareilles extrémités de calmer nos ardeurs et de réfléchir ensemble à des alternatives plus mesurées, d'autant que vous n'avez pas cherché à informer la Reine de vos projets, si je ne m'abuse – et nous lui devons tous allégeance avant de vous devoir fidélité en tant qu'alliés, dois-je vous le rappeler, Rash. Vous êtes un de ses plus loyaux sujets, ne laissez pas votre rage effacer vos principes. »

Il se tut un instant et croisa ses doigts contre l'arrête de son nez, ses yeux noirs pleins de souci et de calculs.

« D'autre part, reprit-il, d'un ton moins grandiloquent, il faut aussi envisager ce qui se passe à Cimméria avec un peu plus de recul pour ne pas nous enthousiasmer en vain et nous illusionner férocement. En tant que conseiller auprès de la Reine, j'ai soin de me tenir au courant des activités politiques et juridiques de nos voisins. Sachez, mon vieil ami, que Cimméria a aboli la condamnation du labyrinthe de Zaléra depuis quelques années, d'après ce que je sais. Et à moins que les prêtresses ne veuillent passer pour les nombreuses alliées dont votre fille dispose encore à travers le pays, pour des despotes injustes et sans principes – ce qui m'étonnerait – Elerinna échappera sans aucun doute à cette mort-là. Ceci étant dit, comme tous ici je comprends votre colère. Mais elle ne doit pas vous égarer. Nous pouvons employer d'autres moyens et sauver votre enfant adorée avec plus de certitude et de légitimité qu'en déclenchant une guerre. » dit-il, d'une voix douce.

Autour de lui, on commençait à trouver en effet un peu fort de devoir prendre les armes pour un simple coup de sang paternel, alors que la menace qui pesait au-dessus de la tête d'Elerinna semblait tout à coup très lointaine et surtout très floue. L'évocation du labyrinthe de Zaléra les avait tous paralysés de terreur, car c'était l'image la plus forte qu'ils avaient de la barbarie du Nord, mais maintenant qu'elle semblait écartée, on renâclait davantage à s'exposer aux périls d'un conflit armé.
Daeron reprit cependant une dernière fois, de sa voix hypnotique qui berçait l'assemblée comme une chanson rassurante :

« Quand votre fille Elerinna est partie de Canopée, comme beaucoup de jeunes aventuriers intrépides le font désormais, elle a quitté notre sphère politique pour en gouverner une autre, c'était là son projet. Je n'ai jamais bien compris pourquoi elle a préféré travailler pour un pays étranger à celui qui l'a vue naître, mais c'est ainsi, et ce don gratuit de sa personne à des gens à qui elle ne devait rien est admirable, ma foi. Elle a du reste pourvu votre famille d'un petit appoint financier et politique, et par extension, elle en a également pourvu vos alliés a minima, ce dont nous lui en sommes tous reconnaissants. Nous aurions sans doute pu profiter davantage de son intelligence et de ses largesses si elle avait contribué à l'essor de notre cité, mais dans son projet qui nous est inconnu, elle a été d'une grande prodigalité. Certes.
Mais sa position au sein du pays de Cimméria ne nous concerne pas, nous autres, Sindarins. Sans doute que c'était en tout bien tout honneur, et sans doute qu'elle nous a donné quelques piécettes en rétribution, mais elle nous a quittés, elle a quitté notre zone de légitimité politique, et si l'ordre des prêtresses de Kesha doit lui reprocher quelque chose, c'est certainement qu'elle y a posé problème. Nous la sauverons, Rash, bien entendu. Nous pouvons envoyer une petite garde pour lui permettre de fuir les menaces qui doivent encore peser sur elle, j'entends bien, malgré l'abolition de la condamnation au labyrinthe. Ses alliés au sein d'Hellas la feront sortir de la ville et nous la protégerons jusque chez nous où elle n'aura plus rien à craindre. Mais qui ici veut mettre en péril la situation diplomatique de notre cité pour un problème politique étranger, dont nous ne savons rien et vis-à-vis duquel nous n'exerçons aucune légitimité ? Elle a échoué à Cimméria, mais ce sont là les jeux de la politique. Qu'Elerinna réintègre son peuple, qu'elle vive parmi nous, nous lui réserverons une place de haut-rang et l'accueillerons à bras ouverts. »
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Rinna s'en va-t-en guerre!
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