_ Il parait que des personnes hauts-placées seraient gravement malades. _ Il parait que ça se bécotte "au bal de la Rose". _ Il parait que des créanciers en sont après un des conseillers de Ridolbar.
Too busy. Always working. How long until you completely disappear ?
L'aigle s'approcha de l'arbre et se posa le long d'une branche couverte d'une mousse épaisse, ses griffes largement déployées dans l'écorce pour ne pas tomber. Une longue branche jumelle à une seconde lui laissait une place confortable pour s'y allonger. C'était un de ces endroits que l'aigle appréciait. Pour son silence, la sérénité qu'il lui offrait. Et pour cela, l'aigle pouvait y passer des heures.
La femme n'en restait pas moins l'oreille affûtée mais elle se savait en sécurité perchée en haut de ces branches à deux mètres du sol. Elle avait même une petite couverture de mousse sur le corps comme si elle se trouvait dans la couverture de son lit. Ce n'était pas pour autant sa place et elle avait toujours bien de choses à accomplir dans la journée. Quelques fois, comme celui-ci, elle s'offrait pourtant ces moments d'oisiveté ; son cœur animal le lui demandait tant.
Et aussi soudainement qu'il était apparu ; il disparut. Ce calme. Ce silence.
« - Bonjour. »
Ses yeux étaient toujours clos. On aurait dit qu'elle dormait, du haut de son lit. On aurait également dit une peinture tant elle se fondait dans le décor avec ses couleurs chaudes. Elle se laissait tant bercer par le concert de la nature qu'un petit sourire avec même fondu sur son visage.
C'est un étrange spectacle, songea-t-elle. Elle doutait qu'il s'agît d'un élusien mais s'il avait réussi à pénétrer aussi loin dans la forêt, il n'était pas réellement un étranger. C'était une règle qu'elle avait finie par apprendre et qui expliquait pourquoi son cœur était adouci.
« Puis-je vous aider ? » demanda-t-elle d'une voix douce et lente.
Ses ailes se déployèrent lentement. Un peu comme un chat qui s'étire. Et puis finalement, ils retombèrent sur son dos, recouvrant son corps nu.
C'était la première fois depuis cinq ans qu'elle discutait avec un étranger. Elle avait un terrible accent qu'elle n'imaginait jamais posséder un jour. C'était étrange mais elle était également excitée à cette idée. Elle avait l'air de vouloir effacer le poids qu'elle avait sur ses épaules, le temps d'une discussion. C'était bien plus amusant de n'être personne que d'être quelqu'un.
« Vous n'êtes pas tout à fait d'ici. Qu'est-ce qui vous y amène ? »
. Les journées de Raël se ressemblaient sans vraiment être identiques. Il parcourait le monde à la recherche d’herbes qu’il ne trouvait pas ailleurs. Raël commençait à avoir un fort bagage d’exploration de terres où peu de gens n’osaient mettre les pieds. Il n’avait que faire des bêtes sauvages – après tout on pouvait presque dire qu’il en était une lui-même-, des bandits – même chose- ou même de son droit ou non d’aller dans une région. Tant qu’il ne s’agissait pas d’habitations privées, où il comprenait à minima que les étrangers n’étaient pas admis, pour Raël, aucun régent, aucune règle ne lui dictera les endroits où il pouvait ou non se rendre, tant qu’ils se trouvaient dans la nature car la nature n’appartenait à personne.
Appartenant à la race des yorkas, c’était naturellement qu’il ne s’était posé aucune question à se rendre ou non à Elusia. L’endroit était un peu à l’écart, dans le sens où il ne passait jamais par là pour ses (très longues) balades. Ainsi, il y était rarement allé, pourtant, peut-être avait-il raté des choses. Au-delà des plantes qu’il pourrait trouver – et il n’était pas un simple pilleur-, il était aussi curieux de savoir comment étaient certaines zones de ce monde.
Alerte, Raël marchait dans la zone boisée, en périphérie d’Elusia. Même Yorka, il ne rentrera pas dans un village ou une ville s’il n’en avait pas besoin.
Un bonjour lui hérissa le poil. Non pas parce qu’on avait été poli avec lui mais parce qu’il n’avait pas remarqué la personne qui venait de le saluer. Comme il était incapable de répondre à un bonjour il ne dit rien et continuait simplement sa marche. De l’aide ? Avait-il l’air d’avoir besoin d’aide ? Surtout que la demande n’avait pas l’air d’être ironique, du moins de ce qu’il était capable d’en juger. Il avait repéré une forme sur une branche là-haut, aidé par le son de la voix, il pouvait savoir d’où elle provenait et il avait levé la tête. Ça avait l’air louche comme proposition. Vu sa carrure, personne ne lui proposait d’aide, et de toute façon le scorpion n’en avait aucunement besoin. Il préféra donc simplement ne pas lui répondre. Ses intentions se dévoilèrent doucement quand elle lui demandait la raison de sa présence ici. Raël soupira. De quoi se mêlaient les gens de nos jours ?
« Ça ne te regarde pas. »
C’était le genre de personne auxquelles il fallait répondre sinon elles continuaient à vous harceler… Enfin, il le pensait.
Too busy. Always working. How long until you completely disappear ?
« - Ça ne te regarde pas. » rétorqua-t-il tout à coup.
Un long bâillement décrocha la mâchoire de la reine. C'est ennuyant, songea-t-elle.
Une longue onomatopée faite de « ah » s'échappa dès lors de ses lèvres. On aurait dit un soupir las comme si ses propres questions l'ennuyaient autant que l'homme. Quelque part, elle essayait de se donner bonne conscience en agissant de la sorte. Pour elle et certainement pour toujours, c'était une étrange chose que d'être une reine et il lui était parfois difficile d'assimiler cette nouvelle.
L'homme avait l'air farouche mais elle avait su dompter des créatures bien moins dociles. À première vue, il ne s'agissait que d'un malotru. Politicienne et reine. Pirate et tortionnaire. Religieuse et diplomate. Hinaya avait toutes les cartes en main pour se faire fondre dans la masse ou tout du moins, pour correspondre à n'importe quel milieu. Et dès lors, sa curiosité envers cet homme était certainement due à un caprice de sa part : elle voulait s'assurer de ses capacités. Certains diront talent.
« - Il y a un piège à votre droite, très cher. » railla-t-elle, l'air et la voix toujours endormies.
Un petit rire glissa naturellement ; la blonde semblait amusée de la confiance de l'étranger. Elle appréciait ce genre de répliques acerbes. C'était une différente forme de respect à laquelle elle était confrontée depuis qu'elle était devenue reine. Les élusiens avaient certes une conception bien définie de la royauté qui se rapprochait difficilement de l'idée commune mais ils lui offraient tout de même l'estime qui devait lui être réservée. Presque soulagée, l'aigle appréciait ainsi d'autant plus ce genre de discussion simple.
« Voyez, j'ai des connaissances qui pourraient vous être utile. »
D'un geste de la main, elle aspira l'air avec son contrôle de cet élément, ramenant vers elle cet étranger. Au fil des années, Hinaya avait appris à comprendre ce qu'était la véritable forme de pouvoir, l'ultime dirait-elle. Le savoir. Quelque part, elle essayait ainsi de l'appâter avec ses connaissances, bien qu'elles étaient certainement modestes.
« En échange, offrez-moi de quoi me couvrir. »
On dirait un conte, se fit-elle la réflexion.
Sourire malicieux sur les lèvres. Sur un arbre, perchée. Hinaya avait tout à coup des allures de renard. Bien loin de la sagesse de son totem, elle gardait tout de même la royauté de son aigle. C'était comme si elle était née pour prendre cette place. Bien sûr, elle nierait si on lui faisait la remarque.
Raël n’aimait pas être embêté pendant ses balades. Après tout ce n’était pas pour rien qu’il voyageait seul. Une mésaventure passe encore, mais cette femme avait l’air plutôt bavarde. Pourtant en observant sa carrure, la grande majorité des personnes ne lui adressaient pas la parole – et cela lui allait très bien- mais là cela n’avait pas l’air d’être le cas. Il pensait être débarrassé d’elle en l’ayant envoyer balader. Visiblement, c’était une erreur.
Un piège ? Et puis quoi encore ? Raël ne faisait pas confiance à ce genre de discours. Si piège il y avait il saurait le discerner. Il était tombé sur un drôle d’oiseau… Au sens propre comme figuré, même s’il l’ignorait encore… Dans tous les cas le scorpion ne répondit pas à ses sollicitations. Il avait d’autres choses à faire. Il avait de toute façon l’habitude de ne pas répondre aux gens.
Quand il sentit un air fort essayer de l’attirer il dégaina immédiatement son poignard de son étui et le planta aussi rapidement dans un tronc d’arbre solide pour éviter de se faire emporter. Raël avait des réactions plutôt vives, il était toujours alerte. Le vent eu cependant effet de lui enlever sa capuche, dévoilant ainsi son visage et ses nombreuses marques rouges.
« Je ne t’ai rien demandé. Je ne sais pas ce que tu me veux mais je te déconseille de continuer. »
En principe, Raël serait juste parti, mais il n’avait pas forcément l’impression qu’elle le laisserait s’en aller, elle pouvait être dangereuse. Et s’il avait un doute le scorpion n’hésiterait pas à attaquer. Au-delà de se voir dans son regard, cela se ressentait aussi dans le ton de sa voix. Il n’y aurait qu’un seul avertissement, pas deux.
Too busy. Always working. How long until you completely disappear ?
« - […] je te déconseille de continuer. »
Un rire s'envola. De ceux dont les intentions restent mystérieux. Ses poils s'hérissaient presque d'excitation. Le jeune homme se révélait être une source de distraction délicieuse, attirant son attention plus que jamais. Pourtant et en réalité, n'importe quel péquenaud vulgaire et étranger aurait pu la contenter : elle avait uniquement besoin de stimuler son esprit.
Après tout, voila une éternité que l'on ne lui avait pas adressé de tels propos.
« - Convainquez-moi, répondit-elle simplement.
De son vocabulaire et de son comportement, la dame paraissait exagérément sereine. C'était sans l'ombre d'un doute volontaire : en effet, à ses yeux, il n'y avait rien de plus fragile que l'excentrisme et c'était exactement l'idée qu'elle voulait renvoyer en agissant de la sorte. Pour tout dire, voilà des années qu'elle n'avait pas ressenti autant de sérénité. Ou en tout cas, sous cette forme.
« Je vais vous épargner des tourments inutiles : je suis aveugle. Voyez, mes yeux ne sont même ouverts. »
La dame s'essaya même à sourire tandis qu'elle balançait ci et là ses jambes. Il était difficile d'y voir une reine tant son comportement s'apparentait à être celui d'un enfant immature. Il était clair qu'elle lui disait silencieusement de la divertir, bien que cela ne devait certainement étonné que l'homme en face d'elle.
« Et puis, vous ne voudriez pas l'occasion de posséder de si précieuses informations, n'est-ce pas ? »
Parfois quand on lui disait qu’il était bizarre, étrange, Raël haussait un sourcil en se disant qu’il y avait certainement des gens plus étranges que lui, et surtout bien plus excentriques. Il en avait trouvé une aujourd’hui. Elle n’avait pas l’air de le prendre au sérieux, se contentant de rire. Pire, elle lui demandait même de le convaincre. A cela, le scorpion haussa simplement un sourcil rien d’autre. Pour qui se prenait cette femme ? Raël se dit qu’il n’aurait même pas dû lui répondre, en réalité, c’est comme s’il était entré dans un jeu. Un jeu dont elle dictait les règles, visiblement.
Enfin, le scorpion n’était pas du genre à jouer. Et clairement, elle l’emmerdait. Il n’avait que faire de ses envies, de ses demandes, ou même du fait qu’elle soit aveugle, qu’est-ce que cela pouvait bien lui faire ? Elle semblait se donner tellement d’importance qu’elle lui proposait quoi… un échange d’information ? Encore une fois, le bleuté ne lui avait absolument rien. Il n’avait aucunement besoin d’elle et les informations, si tant qu’il en ait besoin, pouvaient se trouver dans différentes mains.
Il reprit son poignard dès que le vent ne souffla plus et le rangea dans son étui. Elle lui faisait perdre du temps et il se contenta de marcher dans la direction opposée sans lui adresser, ni un mot, ni un regard.
Il n’avait rien à lui dire et ne prenait d’ordre de personne, et encore moins d’une personnalité aussi puérile que celle qu’il venait de rencontrer.
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Sujet: day ■ ft. raël 
Lun 1 Mar - 23:48
