[EVENT] Omnia, la fête de tous les dieux!

La cité de Hellas, beauté gelée du continent de Cimmeria, accueille de biens courageux visiteurs capable de faire face aux froids. Toutefois, pour Omnia, le Maire fait appel à de grands magiciens – disposés dans un endroit clos et calme - qui veillent à contenir une bonne température au sein même de la ville, afin de permettre à tous les habitants de profiter brièvement d'une journée moins rigoureuse.

Nul vent mordant ne viendra vous griffer la peau, et vos vêtements les plus chauds deviendront même assez encombrants. C'était une journée exceptionnelle que beaucoup profite afin de pouvoir admirer la réelle grandeur de la cité. Ceux qui viennent de loin attendent d'ailleurs les festivités d'Omnia afin de pouvoir y venir.

Afin d'émerveiller ses habitants et ses touristes, la cité organise des concours au thème principalement artistique : des statues de glace, des plats locaux, de poésies, de musiques, d'élevages et de domptages... Tout est fait pour vous en mettre plein la vue... et peut-être vous faire tomber amoureux de la Cité.

Chrysallia avait entendu parler de la fête d’Omnia mais elle n’y avait jamais pris part. Elle s’était renseignée sur le sujet en demandant à tous les commerçant qu’elle croisait ce qu’ils savaient des différentes fêtes qui se feraient. Un jour, elle rencontra un homme d’un certain âge qui l’informa de ce qui se passerait à la cité d’Hellas. Il y aurait de nombreux concours et surtout grâce à des mages, la cité ne serait pas couverte d’un grand froid comme à son habitude. La jeune demoiselle avait décidé d’y aller après son excursion à Hesperia. Il mirent plusieurs jours, mais cela en valait la peine. Elle arriva dans la cité le jour où la fête commença. Il n’y avait pas grand monde encore car il était tôt, il n’était que sept heures du matin.

La demoiselle descendit de cheval et alla l’attacher à un arbre dans la ville à un endroit où il ne gênerait personne. Elle déambula dans les rues et croisa plusieurs personnes, au bout d’un moment, elle entra dans une boulangerie et demanda si elle pouvait aider à quoi que ce soit. Le boulanger réfléchit un moment avant de lui indiquer l’arrière boutique où sa femme et sa fille travaillait à la décoration florale de la ville. Elle avait de nombreux bouquets qu’il fallait aller déposer dans différent vases qui se trouvaient un peu partout dans la ville. Elles lui demandèrent si elle pouvait en déposer au moins quelques uns, cela leur en feraient moins. Chrysallia accepta rapidement et demanda si ils avaient une carte pour qu’elle se reperd. On la lui donna et elle prit une vingtaine de bouquet. Elle retourna auprès de Starlight et lui demanda de la porter encore un peu. Elle regarda une fois la carte et déposa dix bouquet de suite. Elle regarda une deuxième fois la carte et alla déposer les dix autres bouquets avant de revenir à la boulangerie. La famille s’étonna qu’elle n’est pas mis plus de temps, mais en profita pour lui donner les reste des bouquets. Chrysallia s’en occupa aussi rapidement, elle n’avait regardé la carte que très peu de foi mais maintenant, elle connaissait la ville comme si elle y habitait depuis sa naissance.

Une fois de retour à la boulangerie, la famille la remercia et lui demanda ce qu’ils pouvaient faire pour la remercier, elle osa demander un lit le temps de la fête car elle ne savait pas combien de temps elle durerait en précisant qu’elle aimerait ne pas payer. La famille ria et la mère lui répondit qu’il n’y avait pas de problème, ils lui fourniraient également les repas. S’ils avaient ris c’était parce qu’ils s’attendaient à ce qu’elle demande bien plus de choses. Chrysallia les remercia et alla chercher son sac. Le boulanger sortit et conduisit Starlight à leur grange. Là, le cheval pourrait se reposer tranquillement.

Chrysallia continua d’aider la famille, ils avaient pris du retard, ils allaient participer au concourt des plats locaux. Et cela était assez compliqués quand on dirigeait une boulangerie. Chrysallia les aida tant qu’elle put et quand elle aperçu que les rues se remplissaient, elle demanda si elle pouvait les aider, mais ils la remercia et lui dirent qu’elle pouvait aller se balader. Elle pourrait rencontrer d’autres touristes. Elle demanda juste où elle pouvait se changer. Elle alla dans la chambre de la fillette où elle dormirait et se transforma. Elle changea de robe, elle laissa sa robe noire et prit une robe de couleur, une robe de fête. Elle attacha ses cheveux en deux couettes et laissa quelques mèches dépassées.
Elle mit des ballerines à ses pieds et prit sa flûte traversière au cas où elle aurait le droit d’en jouer.

Spoiler:

Chrysallia partit donc de la boulangerie et alla de nouveau parcourir la ville à la rencontre des habitants et des touristes.

-Monod, Tarnac et Arastor. Vous êtes d'escorte. Allez rejoindre l'équipe de Mac Gonovan aux écuries. Havelle, toi tu fais la ronde. Ils manquent d'hommes avec la fête. Tu es sous les ordres du Sergent Coumst. Repos.

Le Capitaine repartit avec sa liste continuer à distribuer les ordres de mission. Les quatre compères reprirent les postures normales d'un réveil en fanfare habituelle et finir de se préparer presque en silence si l'on faisait fi des habituels grommellements d'Alexandre, envieux de la mission de son camarade au chaud dans la ville dégivrée pour l'occasion.
Veto pour sa part était plutôt déçu. Surveiller des rues toute la journée n'était pas la perspective qu'il préférait à une expédition dans le grand froid, bien que cela puisse paraître étonnant. Il n'avait rien d'un tire-au-flanc et préférait l'action à la facilité comme le mordant du froid à la caresse du soleil.

Le petit déjeuner se fit rapidement et le jouet du destin dut supporter tant bien que mal les insinuations du frileux au sujet d'éventuels pistons dont il profiterait. Il lui répondit qu'il ne savait pas de quoi il parlait et lui conseilla une autre paire de chaussette avant de les quitter un petit sourire au coin des lèvres après cette provocation fuyante et le dos arrosé d'insultes de la part de son ami ainsi que de miette de pain.

-Pas de familiarités ! Vous n'êtes pas des guides touristiques ! Si j'en prends un à compter fleurette ou à jouer les bons samaritains, je lui ferai regretter personnellement !

Pauvre sergent aigri et xénophobe. Ce Terran ne supportait pas que l'on foule ces pavés sans les connaître. Toute l'année, ses habitants supportaient ce climat volontairement et aucun étranger n'avait assez de cran pour venir tenter de découvrir cette magnifique cité et ses trésors si ce n'est lorsque le maire établissait le décret du microclimat. Pour lui cela n’indiquait qu’une chose : il n’y avait que des faibles à croiser en ces temps de fête.
Par chance, lorsque les deux équipes sous les ordres de ce supérieur obtus se séparèrent, ce fut sous les ordres du caporal-chef Gardif que Veto se retrouva et il constata bien vite que lui portait un jugement bien plus neutre sur la situation. Une fois les 9 autres gardes suffisamment éloignés, il fit son propre briefing :

-Tout ce que moi je vous demande, c’est de surveiller voleur à la tire, fauteur de trouble dans les auberges et vandales. Pour le reste, ne tuer personne. Nous allons faire quatre binômes pour couvrir notre secteur.

Ils étaient pour leur part, chargés de surveiller une bonne partie de la place où se déroulaient la plupart des animations artistiques prévues. Une longue estrade d’un mètre ou deux de hauteur avait été installée au pied de la grandiose mairie. Depuis ce perchoir, un conseiller supervisait les derniers préparatifs, ses ordres lancés au travers d’un porte-voix et ses yeux perçant traquant la dizaine d’ouvriers installant les tréteaux, barrières et autres drapeaux.

Avec son binôme, il fit rapidement le tour de quelques stands en construction. Dans le ciel, seule Ignias et son halo rouge s’obstinait à rester perchée au sommet du beffroi malgré l’apparition progressive des premiers rayons du premier soleil à l’opposé.
Il ne fallut guère plus d’une demi-heure pour que la fête soit prête et accueillit les premiers curieux matinaux.
La magie et les premières lueurs de Ziria réchauffaient déjà l’atmosphère malgré la brise matutinale.

-Alors ? Paraît que t’as sillonné Eridania avec le maire ! C’était comment ?
-Il faisait chaud.
-Ah ah ! On se la joue modeste, hein ? Vous en escortez du beau monde dans votre branche. J’aimerai bien voyager aussi. Surtout en bonne compagnie comme ça !
-Rien ne t’empêche de te faire muter.
-Mouais… C’est pas trop dur quand même ?
-De sortir le matin à travers le désert de glace ou de faire des courbettes en armure sous un soleil de plomb ? Non… Le plus dur c’est les condamnations au labyrinthe. Parce qu’il faut y rentrer un peu quand même dans le bazar ! Tu sais ce que j’ai vu là-bas ?
-Non. Et c’est mieux comme ça !

Veto sourit au dos de son compagnon qui prenait la tête de la marche. Il n’aimait pas les envieux et les versatiles. Peut-être qu’il s’amuserait encore à moucher ce désireux d’aventure facile et de chevalerie mollassonne : il se doutait que cette première douche froide ne l’empêcherait pas de revenir à la charge. À moins qu’il ne trouve d’autre occupation moins maussade.
Il n’était pas content d’être ici et son collègue risquait en effet de pâtir de sa mauvaise humeur.
Du coup, il repensa à sa mission au duché d’Arghanat. Il en avait encore un ressentiment confus, ne sachant trop quoi en penser.

En tout cas, il se souvenait clairement d’une chose, c’est qu’il faisait chaud et que cette journée sous protection magique ne lui annoncé rien de meilleur malgré son accoutrement léger.
Pantalon de toile, botte peu fourrée, débardeur en chanvre grossier et plastron de cuire. Ne restait qu’une cape pour couper le vent au cas où il se serait tromper sur les températures à attendre mais malheureusement, cela semblait mal parti.
Son épée et sa dague au ceinturon, il n’avait pas pris son bouclier. En ville, il n’était pas indispensable étant donné les adversaires rares et peu équipés qu’on y croisait.

-Allons vérifier qu’il ne reste pas de traine-savates ou de poivrot dans les caniveaux par là-bas.

Veto inclina la tête l’air grave sans dire un mot. Il le suivit, désormais convaincu qu’il ne pourrait pas s’entendre avec cet homme sur bien des points.
Dégageant sa cape de sur ses épaule, il apprécia le vent frai lui mordant la peau et ébouriffant ses tiffes qu’il devrait vite songer à couper.
Le nez en l’air, le garde évita de justesse une collision avec une petite fille aux cheveux bleus et rejoignit son compagnon à l’abouchement d’une ruelle sur la place. Le bougre était déjà au-dessus d’un miséreux sans une once de charité dans la poigne qui secouait le pauvre homme à terre.

La fête d'Omnia a toujours été porteuse d'espérances et spécialement pour les ladrinis ; toutefois, jamais Enteri n'aurait-il laissé quiconque semer le trouble durant ce jour, excepté chez ceux qui se montraient particulièrement vil : à ceux-là, la fête annuelle promettait des surprises moins agréables. À ce moment même était-il probable qu'un homme se fît agresser mais il n'avait nulle crainte ; ce genre d'évènement était longuement préparé et il était formellement interdit aux autres initiés de profiter de l'ampleur des festivités sinon pour s'amuser en tant que citoyen.
Et c'est d'ailleurs dans ce but que chaque année le noble qu'il était également cherchait à étendre son influence. Il avait déjà gagné quelques prix mais ne participait pas pour ces babioles - qu'il conservait néanmoins - . La musique, la danse et la poésie étaient trois arts qu'il aimait pratiquer et s'il rêvait de voir un jour le sable de l'arène de Tyrhénium, il s'en gardait bien car le risque qu'on le remarque était trop élevé. De plus, il était sûrement plus redoutable avec les mots qu'avec une épée, sous sa tenue de gentilhomme tout du moins...

Ses vêtements amples s'accordaient avec sa gestuelle presque théâtrale, mais l'accessoire notable de son accoutrement était une lyre dissimulée sous ses habits. S'il n'était pas un virtuose émérite, il savait capter la foule avec des improvisations simples mais prenantes, jamais rien de somptueux mais toujours parfaitement harmonieux. Pourtant quelques erreurs subsistaient dans ses prestations et l'année dernière il avait perdu le concours de musique ; cette année il tenterait pour la première fois une compétition qui mêlait à ces mélodies la fraicheur de la poésie. Toutefois il concourrait seul et non en duo. Le but n'était bien sûr pas de gagner, quoiqu'il l'envisageât sérieusement, mais de provoquer un écho qui ferait résonner son nom, celui de sa famille. Rêveur à cette idée, il franchit les portes de la cité d'Hellas, un sourire charmeur au coin des lèvres (ou une malformation niaise au milieu de la face, suivant le point de vue que l'on adopte...) .

En effet, la chance était une vertu derrière laquelle il avait l'habitude de courir sans jamais la rencontrer et dès ses premiers pas dans le domaine il avait rencontré un groupe de bandits qui profitaient de la situation pour se remplir les poches... Dès que leurs yeux se croisèrent, il comprit et fouilla dans les couches de soie qui le recouvraient, ce qui tira une grimace malveillante de la part des brigands qui se voulaient intimidant. Néanmoins nulle arme de poing ! Seulement un ridicule instrument, pire qu'une eau bénite, une petite lyre. Ils craignaient un prêtre, mais n'avaient affaire qu'avec un piètre dignitaire ! Souriant de confiance, ils hésitèrent aux premières notes aiguës que joua le bourgeois : le vacarme avait fait se retourner quelques passants mais aucun garde à l'horizon, seulement des gens qui le prenait pour un fou ou l'ignoraient simplement. Ainsi, l'homme à l'haleine de chacal accompagné de ses deux comparse s'approcha du noble et l'intima de les suivre. Seul au milieu des loups, le bourgeois avait arrêté de jouer : les voleurs l'emmenaient dans une ruelle sombre si bien que plus personne ne pouvait les voir...

Pourtant Enteri gardait son calme. Il s'était douté qu'un riche, seul, était une proie bien trop alléchante et sa réaction n'avait fait qu'exciter ses nouveaux amis. Avant que ceux-ci ne se décidassent à le frapper, élément nécessaire sans quoi le vol ne serait pas amusant, il prit la parole d'une voix travestie par une fébrilité marquée.

«Je... S-s-s'il vous plaît, laissez-moi p-p-poser ma lyre. Je vous don-d-donnerai tout mon argent m-mais je tiens v-vraiment à ce... à cet instrument...»

Extérieurement, son masque de peur était parfait ; intérieurement, il jubilait. Et comble de son allégresse, les idiots acceptèrent. Sous leurs yeux amusés, il déposa délicatement l'objet. Sous leurs yeux étonnés de ne voir nulle peur, il passa sa main dans sa chevelure avant de reprendre la parole d'un ton ferme.

«Faisons un jeu. Vous allez chacun me donner un nombre, et je vous briserai autant d'os.«»

Les rires tonnèrent, puis l'un d'eux ironisa en annonçant "trois !" Tandis que ses deux acolytes dégustèrent ce spectacle qui leur était donné entre deux ricanements bruyants, le troisième qui avait du mal à garder son sérieux s'avança pour frapper. Son coup n'en demeura pas moins vif et précis, mais beaucoup trop prévisible. Enteri fit un pas en avant et plaça son avant-bras droit sur celui de son ennemi pour entraver son attaque, avant d'enrouler son bras autour de celui du pendard hagard. Un craquement ; un temps. Dans un volte-face semblable à une danse, le ladrini envoya ensuite son genou dans les côtes du voyou avec violence mais élégance. Enfin, il fit se relever la brute malmenée en la tirant par les cheveux avant d'enfoncer son poing dans son nez. Un temps. Comme s'il s'était souvenu d'un détail, la victime interpella ses agresseurs avec une moue hésitante.

Enlevez-moi un doute, le nez est bien un os ? ... Mince, j'oubliais qu'il n'y a que du cartilage ! Je ferai mieux de me rattraper ou vous pourriez vous sentir lésés...

Les voleurs s'échangèrent un regard affolé. Ce n'était pas un piètre dignitaire, mais un maître en la matière. Déjà les tortionnaires se dispersèrent, cependant qu'Enteri ramassa sa lyre. Il s'arrêta net lorsqu'il sentit quelqu'un d'autre dans son dos. Il ne savait pas depuis combien de temps elle était là, mais non loin se dressait une petite fille. Craignant de lui faire peur et ne sachant quoi dire, il joua une douce mélopée qui pourtant lui parut un peu trop fade ; c'était cependant le meilleur moyen qu'il avait trouvé pour témoigner de sa bienveillance.

«Pardonnez-moi, jeune fille, mais chercheriez-vous quelqu'un ? Il n'y a personne ici, qu'un citoyen Tyrhénien. Nous devrions rejoindre la rue principale, on ne trouve ici que des canailles bestiales...»

Chrysallia parcourait les rues, il commençait à y avoir du monde pour la fête. La fillette était heureuse, elle découvrirait certainement des personnes inconnues et des points de vues différents. C’était avec une pensée de bien être et surtout une imagination débordante qu’elle passa devant deux gardes qui avaient dus être envoyés à la cité d’Hellas spécialement pour l’occasion.

Elle marchait tranquillement dans une rue en regardant les magasins ouverts quand elle entendit des voix près d’elle. Elle en chercha la source et tomba sur un groupe de personnes. Il y avait parmi eu, en homme en bleu avec comme elle les cheveux bleus. Il avait un instrument de musique avec lui, elle n’en avait jamais vus de tels. L’un des hommes allait le frapper, au moment où la jeune fille allait crier, l’homme de bleu vêtu arrêta son agresseur. Pris de panique les autres s’enfuirent. Cela fit sourire Chrysallia mais l’homme l’aperçu. Elle aurait voulu fuir, elle aussi mais quelque chose lui disait qu’elle ne risquait rien.
L’homme joua une musique qui la charma avant de s’adresser à elle. Chrysallia qui avait eu des cours avec Ision Lorindiar, savait maintenant reconnaître un noble sur deux. Et cet homme était très certainement l’un d’eux. Quand il eut finit de parler, la demoiselle lui fit une révérence.

« Bonjour monsieur. A vrai dire je ne cherche rien ni personne en cette ruelle, mais j’ai entendu des voix et celles-ci m’ont conduites jusqu’ici où je vous ai vu combattre. Enchanté de faire votre connaissance, laissez moi me présentez: Chrysallia Tirlas. Il serait mieux effectivement de regagner la rue principale, nous y serons plus en sécurité. »

Sur ce, la demoiselle et l’homme prirent la ruelle dans l’autre sens et se dirigèrent vers la rue la plus animée de la citée.

« Veuillez m’excusez mais je tenais à vous demander plusieurs choses? D’abord, êtes vous musicien? Ce n’est pas pour être méchante ne vous inquiétez pas, je voudrais à vrai dire devenir musicienne moi-même. Deuxièmement, êtes vous venus pour participer à une épreuves organisé ou bien pour être seulement spectateur de tout ce qui se déroulera ici? Mais si vous ne voulez pas répondre, je comprends tout à fait. Je n’ai pas à me mêler de la vie des autres. »

Chrysallia baissa la tête pour accepter le refus de l’homme. Après tout la plupart des nobles n’était pas très bavard et surtout il n’aimait pas parler de leur vies. C’était eux qui posaient des questions aux autres.
Ils finirent par regagner la rue principale et la place où certains concours allaient bientôt participer. Chrysallia s’était inscrite aux concours de musique et de danse qui aurait lieu dans l’après midi.

Ils croisèrent plusieurs gardes dont un quelle avait déjà vu plus tôt dans la journée.

Alors qu’il arrivait à hauteur de son compagnon, son regard était encore tourné vers la petite fille qu’il avait manqué de renversé. Elle lui semblait très jeune et surtout très peu accompagnée en cette heure si matutinale pour s’aventurer dans les rues plus loin qu’elle empruntait déjà. Cela lui parut non pas suspect mais inquiétant pour sa sécurité…
Et puis il fut tiré de ses inquiétudes par les paroles des plus humiliantes et insultantes de son collègue qui durait déjà depuis un moment.

-Oh ! Tu m’entends pauvre mer’…

Veto excédé le poussa presque doucement, se retenant à temps de ne pas l’envoyer valdinguer contre le lampadaire le plus proche.

-Je prends le relais.

Il s’accroupit pour se mettre à hauteur du pauvre bougre avachi dans la crasse et les odeurs de vomi et d’excrément.

-Monsieur. Je ne suis ici ni pour vous juger, ni pour vous faire la charité. Nous sommes chargé de faire apparaître le plus beau visage de cette ville en ce jour de fête et…

L’homme se mit à bredouiller sans que Veto ne comprenne tout ce qu’il disait.

-Des menteurs… M’avez promis… Tout perdu… Tout…

Au dessus du garde consterné par ce qu’il entrevoyait du passé miséreux de cet homme, la voix toujours aussi glaciale de l’autre se fit à nouveau entendre, plus maussade, mécontente d’avoir été mise à l’écart.

-Laisse tomber… Il n’y a rien à faire avec ces gens là.

Veto retint son bras d’aller chercher sa dague mais pas d’aller saisir le col de ce pédant condescendant. Cette fois-ci, il ne put éviter de le plaquer contre le poteau à luminaire. Les mots ne venaient pas pourtant. Seul son visage tordu dans une moue de dégoût et de rage se tenait là, à quelques centimètres de celui stupéfait du soldat malmené.
Le jeune Havelle savait que quoi qu’il dise, cela ne servirait à rien. Pire encore, quoi qu’il fasse, ça ne changerait rien à la condition de cet homme derrière lui. On devinait que le destin l’avait déjà trop profondément enfoui sous les désastres.
Son visage perdit de la rage et se renforça en dégoût avant que les mains ne lâchent l’idiot et que les pieds ne fassent volte-face.

-T’es malade ? Faut te faire soigner mon gars. Recommen’…
-Vas « vérifier qu’il ne reste pas de traine-savates ou de poivrots dans les caniveaux » de l’autre côté de la place avant qu’il n’y ait un mort de ce côté-ci.

Le garde resta interloqué encore un instant puis se ressaisit, et, se drapant de tout son orgueil, il partit d’un air bougon, sifflant entre ses dents des insanités.

Veto, toujours la tête vers le sol, retenait ses poings de trembler comme il le pouvait, calmant sa respiration. Devant lui, le clochard n’avait pas bougé, perdu dans ses lamentations, soliloquant, les yeux agars rivés sur une pierre en face de lui.
Et puis il y eut ce « laissez-moi mourir ».
En un instant, dans l’obscurité de la ruelle, les deux hommes disparurent, l’un empoigné par l’autre.
Un mince rayon de lumière venait éclairer leurs visages tout proches, réverbéré par l’éclat d’une dague sous la gorge du plus sale. La précipitation et la froideur de la lame sur sa gorge le laissait tétanisé. Veto n’avait plus aucune émotion lisible sur son visage et sa respiration bien que puissante paraissait calme, semblable à celle de ceux pour qui tuer n’est pas si compliqué.
Ils restèrent un moment là sans rien dire ni l’un ni l’autre. Et puis ce fut le miséreux qui réagit.

-Vous… Vous allez me… ?
-Ce n’est pas ce que vous vouliez ?
-Je…

Cette hésitation valut à l’homme une pression bien plus douloureuse sur le côté de la gorge, comme si c’était finalement décidé.

-Non !

La douleur disparut et la poigne sur son col avec.
Se tenant la gorge, le souffle court et les yeux stupéfaits, le rescapé regardait son agresseur sans rien comprendre.

-Mais…
-Vous ne voulez pas mourir.
-Je…
-Ne répétez plus jamais ces inepties pondues par des lâches incapables de comprendre ce que leurs avantages superflus pourraient apporter à ceux qui en ont besoin.

L’homme resta silencieux, toujours aussi atterré face à ce jeune homme au visage mi-triste, mi-énervé qui sortait les phrases d’un érudit.

-Ressaisissez-vous, nom d’un chien ! Il y a tant de petits commerçants surchargés, de nobles à la recherche de toujours plus de serviteurs.

Une gifle fouetta le visage de l’homme qui ne voulait pas changer d’expression depuis un moment.

-Réveillez-vous ! La vie est faite pour être vécue !

Une bourse de 550 Dias fut placée de force dans la main du gueux.

-Achetez-vous à manger pour la journée et des vêtements pour demain. Il est temps de regagner espoir.

L’homme resta coi un instant et puis ses jambes commencèrent à flageoler.
Une nouvelle gifle vint le cueillir avant qu’on ne l’empoigne par les épaules et le redresse. Le garde à nouveau proche de lui, le visage consterné le secouait de temps en temps pour ponctuer son sermon.

-Quoi ? Vous n’avez pas le courage de repartir de zéro ? Mais réagissez un peu ! La chance vous sourit à nouveau ! Ne crachez pas sur elle. Oubliez votre orgueil mais ne perdez pas votre honneur d’homme ! Relevez-vous et marcher ! Arrêtez de regarder en arrière.

Les larmes aux yeux, il se passa encore un moment avant que l’homme finisse par se jeter au cou du garde. Celui-ci hésita encore un moment et puis lui rendit son étreinte.
*Depuis combien de temps n’a-t-il pas ressentit un peu de chaleur humaine ?*

Soudain, deux hommes arrivèrent depuis l’autre bout de la ruelle.

-Tu crois qu’on l’a semé ?
-Ouais…
-Non mais c’était qui ce mec ?
-Aucune idée…

Et puis, ils se figèrent tous les quatre. Le garde et le miséreux restant un peu trop collé, laissant l’ambigüité de la situation.

-C’est un garde ça ?
-Et le père Godare…
-Me dis pas que...

Leur idée était déjà faite. Deux hommes à l’abri des regards dans une ruelle sombre. L’évidence s’était imposée à eux. Et puis ils virent la bourse qui modula un peu leur avis : le vieux Godare vendait désormais son corps à un garde déviant.
Leur évidente homophobie et leur envie de revanche due à une défaite sans doute récente les poussa à l’erreur suivante : attaquer.

La dague encore sortie, malgré le peu de luminosité, trouva une première main malvenue et le poing libre un nez qui allait avec. Marchant sur le premier homme à terre, la ruelle étroite mena le garde directement sur sa cible qui n’avait pas encore eu le temps de reculer, lui envoyant un pied dans le plexus solaire.
Il revint vers le pauvre erre du début et lui intima de changer de quartier, de vite quitter les bas-fonds et de tirer un trait sur cette facette-ci aussi de sa vie. Il n’y avait rien de bon à tirer de ce genre de relations.

Lorsqu’il sortit enfin de cette ruelle, l’esplanade s’était remplie et les stands étaient prêts. Les festivités allaient bientôt commencer mais il fallait qu’il trouve son supérieur. Il y avait deux malfrats à mettre en lieu sûr. Poussant celui-qui se tenait le nez et trainant l’autre qu’il avait fini par assommer pour cause de trop houleuses protestations et surtout d’un nouvelle assaut, il ne fallut pas longtemps à son collègue de tout à l’heure pour le rejoindre avec le caporal-chef et un autre. Il faut dire que cette attraction inattendue attirait l’attention.

-He bien ! C’est une belle prise. Howen et… Murdoc. Il en manque deux mais c’est déjà pas mal.

Veto ne répondit rien et resta humble. Apparemment, ces hommes étaient connus pour leurs méfaits.

-Midiar. Vous étiez son coéquipier, non ? Où étiez-vous ?
-Mon caporal ! Je…
-C’est ma faute mon caporal. Je lui ai faussé compagnie.

Gardif hésita un moment, toisant ce garde dépêché sous son commandement puis envoya Midiar et l’autre garde mettre ces deux malfaiteurs en cellule et demanda au jeune Havelle de le suivre dans sa ronde.
Ce fut avec un certain soulagement que Veto confia sa prise à son ancien coéquipier qu’il regardait partir.

-J’ai moi aussi du mal avec Midiar.

Le seconde classe regarda son supérieur comme pris la main dans le sac et celui-ci sourit, désormais certain d’avoir fait mouche.

-Marchons. J’ai dans l’espoir que vous me trouverez plus attractif que cet idiot.

Veto le suivit, croisant la petite fille de tout à l’heure accompagnée d’un homme qu’il ne manqua pas de reconnaître. Enteri.

-Vous avez de la chance d’être tombé sur moi. Le Sergent vous aurez enfermé avec vos proies.
-Sauf votre respect mon caporal, il me semble que seul un supérieur officiel peut blâmer ou condamner ses hommes. Or, je ne fais pas partie de votre corps d’armée.

C’était osé mais il savait qu’il avait raison.

-Il n’est pas rare que l’on demande de réprimander pour nous des soldats un peu trop arrogants à nos collègues de la sécurité.

C’était aussi vrai. Mais quelque chose disait au soldat que cet homme le testait. Il lui tint donc tête.

-Je ne suis pas certain que mes supérieurs me punissent d’avoir arrêté deux criminels.

Le Caporal-chef sourit de manière bienveillante et continua de marcher sans le regarder, les bras croisés avant d’ajouter :

-En effet. Par contre, pour manquement au respect du à un supérieur, je suis sûr que ma parole suffira.

Veto sourit à son tour et ils continuèrent leur ronde, échangeant ainsi de manière presque décontractée, prenant garde l’un et l’autre de ne pas oublier et de rappeler leurs différences de grade tantôt pour plaisanter, tantôt parce qu’ils le jugeaient nécessaire.

À force de tourner, ils finirent par se retrouver à nouveau non loin de la petite fille et du noble.

Enteri ne s'attendait pas à une enfant si bavarde et un tel flot de question le surprit tout autant que l'éducation de la (très) jeune damoiselle marquée par sa tempérance. Elle pétillait d'intelligence du haut de ses quelques années, néanmoins... Quels parents la laisserait vagabonder seule ? Intérieurement, le jeune homme n'émit aucune hypothèse et se dit qu'il avait là une bonne occasion de tester ses capacités de déduction, c'est pourquoi il décida de ne pas l'interroger sur des aspects trop intimes. Elle devait de toute façon être habituée à ce genre de questions, peut-être gênée, et il ne souhaitait pas la froisser.

«Ne vous hâtez point autant, cueillez plutôt chaque instant ! Se brise l'harmonie en étant si débitant.»

Soudain l'homme se sentit vêtu d'une coquille de cheveux gris. Comment une fillette de son âge pouvait-elle comprendre son habituel galimatias de bourgeois ? Il reprit donc en évitant ses discours pédants et pompeux.

«Musicien, et bien... j'en suis hélas assez loin. Tout ce qui m'importe est ce qui m'emporte : être harmonieux et faire de mon mieux. je ne sais pas composer, à peine puis-je improviser.»

Dans l'espoir de divertir la jeune fille, il lui livra sa vision du monde où chacun vit une mélodie qui lui est propre. S'il n'était point un musicien, il n'en était pas moins un esthéticien et l'importance qu'il donnait aux résonances lui avait permis de très vite rivaliser avec ses pairs plus expérimentés mais étrangers à sa sérénité. Toutefois son envolée lyrique - car très vite s'était-il exalté - lui avait fait oublier la seconde question, c'est pourquoi il reprit avec le même enthousiasme.

«Pardonnez-moi, cela m'échappait mais, je désire en effet prendre part à un concours en... Duo... Il y a peu de chance qu'ils me laissent passer seul cependant, et peut-être... Oui ! Vous qui avez le talent, vous pourriez tel un ange, m'accompagner en un chant, pour quelques louanges !»

De nouveau ses yeux pétillaient comme si une gouttelette s'était écrasée dans le lac doré de son iris scintillant et à la prunelle dilatée. Certes n'avait-il aucune idée de sa voix, ni si elle était réellement la diva qu'il avait dépeinte ; pourtant il avait foi, et croyait réellement qu'elle fût capable d'un tel exploit. Des chanteurs, il y en aurait beaucoup, quelque jeunes cantateurs et cantatrices aussi, mais il émanait de la jeune fille une seine auspice. Il ne savait pourquoi, comment, mais à cet instant, le kairos était à portée : il en était persuadé.
Humblement lui avait-il demandé de l'aider, et même s'il était très probable que de prime abord elle refusât par humilité, il évoqua le "pari pascalien" qu'il avait lu d'un autre auteur : en acceptant, elle avait une chance de gagner ; en refusant, elle n'en avait aucune. Il n'y avait rien à perdre mais le noble accepterait également son refus, bien évidemment. Son esprit rêveur l'emporta pourtant plus loin : le concours en trio qui se passerait dans la soirée pourrait bien être gagné par un duo. Toutefois, la folie de son raisonnement l'apeura et il préféra en rester là.
Il se dirigea en tout cas avec encore plus de hâte vers le concours pour s'enregistrer car pour rien au monde n'aurait-il privé sa harpe de vibrer. C'est là qu'il le vit.

C'était un soldat qu'il avait rencontré au banquet d'Arghanat, joyeux festin, et qui s'était démarqué suite à une... Légère erreur. Mais ce qui avait surpris Enteri avait été un profond sens du respect de la hiérarchie, vertu bien rare, le soldat moyen étant souvent brutal tout du moins dans la capitale. Il lui fit donc signe et le salua d'une révérence ainsi que son supérieur.

«Messire, signore !»

Ouvrant les bras et montrant ses pommes, il leur signifia clairement qu'il n'était armé que de bonnes intentions et n'avait rien d'hostile. Il demanda ensuite s'il existait un passage plus cours pour rejoindre la place où aurait lieu le spectacle, préférant être dans les premiers inscrits pour s'entraîner tranquillement. En faisant le tour néanmoins, et eu égard à la foule qui pullulait, peut-être n'aurait-il pas même le temps de s'inscrire ! Il ne pouvait en outre pas utiliser les ruelles coupe-gorges seul avec une enfant mais avec l'aide de ces brave soldat à l'armure étincelante... Il aurait même été prêt à payer, car la sécurité a son poids en or après tout.

* Ainsi, il n’est pas musicien mais il possède une harpe.*

L’homme qu’elle venait de rencontrer lui parla de la vision qu’il avait de la musique. Chrysallia ne comprenait pas tout mais acquiesça d’un mouvement positif de la tête à chaque nouvelle idée que l’homme rajoutait.
Ensuite, il en revint à la seconde question de la fillette.

* Il veut prendre part à un concours intéressant… moi ! Mais…*

« Et bien je ne sais que dire lord. Il est vrai que j’aime la musique et que je sais plus ou moins en jouer mais chanter ? Comment dire ? A moins que vous ne m’appreniez, je ne sais pas si j’en serais réellement capable. »

Chrysallia fit un peu la moue, elle n’avait jamais pensée que quelqu’un d’un haut rang viendrait à s’intéresser à elle, fillette qui parcourait le monde. C’était ainsi qu’en marchant et en parlant avec le noble qu’elle retrouva le garde qu’elle avait déjà croisée un peu plus tôt. L’homme avec qui elle était s’arrêta et demanda aux gardes de lui indiquer comment rejoindre le lieu des inscriptions du concours. Il ne voulait certainement pas passer dans une petite ruelle vu ce qui c’était passé avant. Elle ne fit pas attention à ce que les gardes répondirent mais ils les accompagnèrent à travers diverses rues et tous arrivèrent devant le stand des inscriptions. Il n’y avait pas beaucoup de monde qui s’inscrivait. La demoiselle se tourna vers les soldats et s’inclina.

« Je vous remercie messieurs de nous avoir accompagnés. Je vous souhaite une bonne journée et fête d’Omnia à Hellas. »

Chrysallia fit à nouveau une révérence et partit en direction du stand. Là bas, elle discuta avec une dame charmante.
« Bonjour ma petite. Que puis je pour toi ?
_ J’aimerais m’inscrire au concours de musique.
_ Tu dois savoir que le premier concours qui aura lieu se fait en double.
_ Je le sais et je compte m’inscrire avec l’homme en bleu que vous voyez là bas avec les gardes.
_ Ah. Bon je vais prendre vos noms. Je vous écoute.
_ Chrysallia Tirlas et …. Et …. »

La fillette réalisa qu’elle ne savait pas comment il s’appelait et fut prise de panique. Elle chercha dans sa mémoire si elle l’avait déjà rencontré, si elle avait entendu parler de lui quelque part. La dame la regarda et lui demanda l’autre nom qu’elle devait inscrire. La fillette releva la tête avec ses yeux qui commençaient à s’emplir de larmes et au moment où elle allait lui dire je ne sais pas, le lord arriva et finit sa phrase.

« Et Enteri Klypsène. »

Chrysallia releva la tête et le regarda, il venait de la sortir d’embarra, comment avait il su qu’elle avait eu besoin de lui, elle n’en avait aucune idée et ne faisait plus attention à ce que disait la femme. Quand il s’éloigna du stand, Chrysallia le suivit. Il s’arrêta devant une fontaine et là Chrysallia se mit à poser la question qui la tracassait depuis tout à l’heure.

« Excusez moi Sir Klypsène, mais comment avez-vous deviné que je me trouvais dans uns situation embarrassante. Vous êtes arrivée au bon moment pour vous présenter car j’avais oublié de vous demander votre nom, je pensais que vous me l’aviez dit lorsque nous nous sommes rencontrés et pourtant non. »

Son supérieur était un "ami" du Major Millena et elle semblait lui voir touché un ou deux mots à son sujet, de quoi attiser sa curiosité. Ils parlaient de l’avenir du seconde classe quand on vint les interrompre de manière originale.

[Emporté par l’imaginaire qui nous entraîne et nous…]

Veto prit Enteri par le col et le soulagea du poids de son corps, le malmenant alors une seconde ou deux au milieu des badauds ennuyeux. S’assurant que le guichetier les lorgne, il exposa du noble la trogne.

-Cet homme prétend être inscrit au concours. Est-ce vrai ?
-Mais non, du tout. J’ai fait part de mon souhait mais n’ait point évoqué le passé.
-Vraiment ? J’en suis désolé. Veuillez m’excuser cette brutalité. Quoi qu’il en soit, vous voilà au seuil du guichet, celui dont vous rêviez. Profitez sans me remercier.

Et les artistes ne tarirent alors d’aucun argument pour manifester leur mécontentement.

-Voulez-vous donc le même traitement ?

[l’appel à la réalité]

-Havelle. Vous venez ?

Le garde cligna des paupières, hébété. Son imagination était décidément trop débridée. Était-ce le récit de son ami Fenri de l’arrivée de ce noble au banquet d’Arghanat qui avait ainsi inspiré son inconscient cette scénette burlesque ?

Marchant à l’arrière de cette escorte improvisée, il suivit son supérieur le long d’un pâté de maison qui les fit contourner le vivier grouillant dans la fosse de cette esplanade pourtant vaste.
Enteri à porté de voix, il l’aborda.

-Jolie souris. Elle a vos cheveux. Belle ville pour une promenade familiale bien que je la préfère sous les flocons, engonssé dans son menteau immaculé, elle semble hors du temps et du monde...

Arrivé le long du dos des tribunes rudimentaires montées en demi-cercle devant l’attroupement, ils arrivèrent juste à l’ouverture d’un nouveau stand d’inscription destiné à désengorgé les deux premiers.

-Eh bien jeune gens, on peut dire que vous avez de la chance.

La stature des deux gardes fi hésiter les profiteurs pressés qui auraient pu prendre la place des deux protégés et les militaires en jouèrent. La petiote fort bien éduquée prit l’initiative administrative tandis que Veto reprenait la discussion.

-Il me semble ne connaître de vous que le nom et la lignée, messire. Quel est ce titre qui vous fait si loin voyager ?

Les mondanités débutantes furent interrompues après un instant d’attention par celui-même qui les avait lancées. Le jeune Havelle avait remarqué que quelque chose clochait au guichet et en informa le deuxième intéressé.

-Monsieur. Pourriez-vous dégager le passage que les vraies artistes puissent accéder aux inscriptions maintenant ?
-Qu’avez-vous de plus vraies qu’eux ?
-Je suis le barde du haut conseiller de la culture de cette ville.
-Et bien vous connaissez le jeu des protections et des privilèges dans ce cas. Ne vous en plaignez pas.
-Déneigez devant votre porte, messire et nous entendrons vos plaintes.

La société était donc la même en tout pays. Pathétique.

*

Sur le côté désormais, ils virent arriver leurs deux touristes avec un sourire chaleureux tandis que Veto finissez d’indiquer le chemin de la course de traineau à la porte sud.

-Alors ?

[Fort désolé messire, jeune demoiselle. J'espère ce torchon avoir au moins le mérite de ne pas vous rendre aveugles.]

Alors que les deux hommes se sourirent, Enteri se départit très vite du sien pour laisser place à une face confuse. "Jolie souris", certes ! "Elle a vos cheveux", passe encore (en dépit de sa tignasse plus foncée et moins soyeuse). Mais... "une promenade familiale" ? ! Il regarda le charmant visage de l'enfant qui l'accompagnait et lança un rire franc, clairement amusé par l'équivoque coïncidence. Derrière cet éclat toutefois, il dut avouer n'avoir personne à qui se vouer, ni enfant à éduquer ni quiconque à entraîner ou à qui partager des acquis si peu âgés. Il repensa alors à Artemius et Erelda mais il ne les avait pas revus depuis si longtemps...

«Oh, vous vous méprenez, de moi elle n'est pas née ! »

Enteri expliqua alors qu'ils s'étaient rencontrés peu auparavant mais resta extrêmement prudent. Il était à la fois précis, évoquant ses ennemis, mais laissait également planer un voile confus en avançant qu'ils avaient fui du fait de leur affligeante faiblesse. Ce qui était vrai, mais il n'avait pas parlé de leur combat sinon en expliquant qu'il avait très vite tourné à son avantage.
Ce court exposé achevées, il avait ensuite présenté ses excuses à l'homme accompagnant le soldat Havelle et s'était humblement présenté comme étant une connaissance fortuné cherchant la fortune de la connaissance. Ce genre de chiasmes étaient valorisés dans un milieu de bourgeois mais il n'en faisait pas partie pour l'heur et à cet instant il se demanda s'il n'était pas ridicule. Il l'était, mais qu'importait ? Chacune de ses remarques, prise seule, était peut-être risible ; toutes ensemble, elle formait une certaine harmonie qui rendait son discours fluide et c'est ainsi qu'il avait toujours raisonné, raison pour laquelle il n'était pas si ridicule quand bien même sa langue et ses gestes appartinssent plus au théâtre qu'à son quotidien. Vraiment, peu importait. Car il ne souhaitait aucunement écraser les autres et se parait d'une telle vertu, altruiste et désintéressée, élégante et noble, qu'il espérait sincèrement ne pas donner cette mauvaise image.

Très vite se retrouvèrent-ils devant les bancs d'inscription et une foule en passion. Passion pour ceux s'exaltant à l'approche de l'évènement ; passion pour ceux attendant leur proche anéantissement (sans croire à ce candide sarcasme, le candidat en avait le fantasme) . Il émergea toutefois de ses pensées lorsqu'il vit un mouvement dans les longs et épais cheveux bleus de l'enfant. S'inclinant tout en s'excusant de devoir partir, le bourgeois remercia une dernière fois les deux soldats avant de rejoindre sa diva. Et cela juste avant que n'arrive un barde plutôt arrogant. Ce n'était pas le moment.

«Et Enteri Klypsène. Nous aimerions concourir en duo.»

On leur expliqua alors comment tout allait se dérouler. Les couples-participants passeraient les uns après les autres puis le jury délibèrerait dans un lieu isolé pendant que le public pourrait voter - à main levée - . Une fois que les observateurs auraient annoncé leur résultat, les favoris du public puis du jury passeraient de nouveau pour déterminer un gagnant bien qu'il arrivât déjà plusieurs fois qu'aucun ne parvînt réellement à prendre l'ascendant : il y avait alors deux vainqueurs. Les candidats avaient une heure pour se préparer, avant de se réunir pour s'apprêter à passer.
Enfin la dame avait-elle terminé son explication - et qu'il devait être dur pour elle de le répéter à chaque nouveau participant ! - , et Enteri se dirigea vers une fontaine. Il avait vu la jeune fille absorbée par quelque chose et il espérait que ce ne fût pas du désintérêt, dans quel cas il abandonnerait tout simplement. Il leur fallait du calme en tout cas et l'écoulement de l'eau flatterait leur quiétude.

«Excusez moi Sir Klypsène, mais comment avez-vous deviné que je me trouvais dans uns situation embarrassante ? Vous êtes arrivé au bon moment pour vous présenter car j’avais oublié de vous demander votre nom, je pensais que vous me l’aviez dit lorsque nous nous sommes rencontrés et pourtant non.
C'était harmonieux, répondit-il dans un sourire. Lorsque nous sommes gênés, nous éprouvons une démangeaison dans le cou ou une infime piqûre et nous nous massons à cet endroit. Pour une jeune fille il est plus simple de regarder sur quelle jambe elle se tient ou si elle les croise et au moment où tu as changé de jambe de maintien tu signalais par là le changement d'humeur que tu ressentais. De plus, nous effectuons parfois ces gestes par anticipation : tu n'as pas attendu que l'on te pose la question pour te sentir mal à l'aise ! Je recherche encore pourquoi notre corps est parfois plus éveillé que notre esprit mais maintenant, tu sais quel est mon travail au moins.»

Caressant du regard les murmures de la cascade, Enteri s'était abandonné à une sereine rêverie. Il ne savait pas encore ce qu'il allait jouer mais pourtant il restait calme alors que certains concurrents travaillaient sur leurs morceaux depuis de nombreux mois. Trop rationnels ! Comment pouvaient-ils ignorer que les deux choses nécessaires à un résultat harmonieux était un sentiment embrasant et l'embrassement du manque de temps ? À cet instant l'enjeu n'était plus une victoire ou une défaite, mais la transcription d'une vérité ineffable, suprême. L'euphonie parfaite d'une efflorescente impétuosité.
Il visait haut même s'il s'était peut-être légèrement enflammé...
Prestement, presque brusquement, il prit papier et encre puis écrivit tout en reprenant à la hâte.

«Nous avons très peu de temps pour nous préparer ; heureusement que je suis bien accompagné ! As-tu déjà chanté ?»

Poussant un soupir, le point final était posé. Il se relut et remarqua quelques maladresses mais souhaita demander son avis à la jeune chanteuse qui était donc directement concernée. Si elle n'était pas très expérimentée, sa voix juvénile était aussi pure que l'eau qui, à côté d'eux, s'écoulait lentement.

Chrysallia était au comptoir des inscriptions et se trouvait idiote, c’est à ce moment là que comme un ange, il était apparu, son sauveur, il était venu et l’avait sortie d’embarras. Elle lui en était très reconnaissante. La jeune femme ayant pris leur nom leur expliqua comment allait se dérouler le tournoi. Tous les couples passeraient les uns après les autres et il y aurait un deuxième tour pour départager les vainqueurs.
La fillette remercia la dame de leur avoir expliquer et quand ils partirent en direction d’une fontaine, la demoiselle pouvait entendre la femme réexpliquer de nouveau ce qui se passerait. Cela devait être dur de toujours répéter la même chose à tous les participants, elle devait avoir soif mais elle ne pouvait pas bouger de son post car une foule de candidats s’était formée.

Chrysallia avait fini par repenser à son compagnon, comme cela il s’agissait d’un certain Sir Klypsène, mais comment avait il su arriver au bon moment ? Chrysallia se posant la question finit par la lui poser et la réponse qu’il lui donna la surprit quelque peu. Elle en était tellement perplexe qu’elle répétait comme une leçon ce qu’il lui avait répondu.

L’homme avec qui elle était s’était alors mis dans une sorte de rêverie, Chrysallia revint avant lui à la réalité et entendit la femme débitée de nouveau l’explication du tournois. Alors que l’homme avait le regard plongé sur la cascade de la fontaine, la demoiselle courut aussi vite qu’elle pouvait avec sa robe et prit plusieurs carafe avant de retourner à la fontaine, de les remplir et de les ramener à nouveau à la dame. Celle-ci en fut très étonnée et remercia la fillette. Chrysallia s’inclina en une révérence et repartit auprès du poète. Elle espérait ne pas avoir été trop longue, mais non, au moment où elle était revenue, lord Klypsène parlait de nouveau et lui demanda si elle avait déjà chanté ? Quelle question ! Si on lui avait dit ce qui se passerait, elle n’y aurait jamais cru.

« A vrai dire, Sir Klypsène, non. Du moins si j’ai déjà chanté mais je préfère jouer de la flûte traversière ou encore danser. D’ailleurs cela me fait penser qu’il faudra que j’aille voir si je peux m’inscrire au concours de danse tout à l’heure. Mais revenons à nous moutons, je suis sure que si vous m’apprenez, je peux arriver à chanter. Pouvez-vous me faire voir la partition que vous avez écrite ? A moins que ce ne soit les paroles de la chanson. Dans ces cas là, je m’occuperais de la mélodie si vous voulez bien. »

Le lord lui tendit la feuille c’était donc les paroles. Pris d’une envolée lyrique avant même de regarder la feuille, Chrysallia lui dit :

Au grand regard de tout le monde, je vis ma vie.
Elle est claire comme l’eau d’une fontaine et sans souci.
Voici mon quotidien dans lequel je grandis.
Sous le nom de Chrysallia, je mène ma vie.

Elle pencha son regard sur le bout de papier et lus plusieurs fois les paroles, elle sortit sa flûte traversière ferma les yeux et commença un nouvel air musical spécialement pour l’occasion. Un air qui s’accompagnait parfaitement avec les paroles qu’elle avait en tête. Elle reprit la feuille et demanda le crayon, elle déposa la partition en dessous du chant et retendit la feuille au lord. Après tout, ce serait à lui de jouer de la musique pendant qu’elle chanterait. Il lui avait demandé son accord pour les paroles, elle en faisait de même pour la mélopée.

C’était le problème des artistes : leur monde hermétique. Les deux lyriques les snobèrent, peut-être sans s’en rendre compte, se dirigeant vers une fontaine sans doute inspiratrice.
Les deux gardes se regardèrent et haussèrent les épaules avant de reprendre leur ronde. Il y eut bien quelques voleurs à la tire qui détalèrent avant même qu’ils n’aient pu vraiment être sûrs de leurs exactions, un soiffard un peu trop agité qui resta raisonnable face à l’uniforme et partit finir de cuver chez lui et quelques xénophobes désireux de rester discrets face aux deux hommes armés.
Durant les temps morts, les deux soldats parlèrent du potentiel que le moins gradé ne voulait pas reconnaître, des avantages sans inconvénients qu’il pouvait espérer en passant ses certificats militaire et technique, évoquèrent quelques missions effectuées, comparant cicatrices et chaleurs ressenties par leurs postérieurs dans moult situations périlleuses…
Une sorte de camaraderie franche se tissait entre eux bien qu’ils ne se connaissent que depuis fort peu de temps.

Après encore une ou deux actions d’officiers du tourisme (sûrs de ne pouvoir être surpris par leur sergent rébarbatif) ils revinrent à la scène où les premiers concurrents s’installaient. Le premier tour allait débuter.
Jetant quelques coups d’œil aux gradins pour surveiller les pickpockets mal dissimulés, ils eurent l’occasion d’apprécier cependant ce premier numéro. Surtout le caporal. Un mélomane. Veto n’était pas très porté par cet art. Il était plus visuel. Et à moins que la musique ne soit à texte, et à texte trouvant écho en lui, il n’y accordait pas tellement d’attention.
Ainsi, son regard et ses oreilles se tournaient plus vers le reste de la place où des saltimbanques effectuaient des tours d’agilités remarquables dans l’espoir de recevoir une ou deux piécettes. Il inclina la tête sur le côté, notant la similitude entre certains de leurs mouvements et ceux martiaux appris à la caserne.

Il ne se sentait pas spécialement à sa place au milieu de ces festivités. Adepte des grands espaces et du silence du désert de glace, ici, il se sentait oppressé par la foule et ses oreilles, agressées par le capharnaüm. Il n’était pas un artiste dans l’âme. Son côté discret et terre à terre le rendait bien trop indisposé à ce genre de manifestations exhibitionniste et talentueuse.

« La compétition sera rude. » Annonça soudain le caporal-chef, ramenant alors le soldat parmi les éveillés. Gardif remarqua alors l’état de son subordonné.

-Vous semblez vous ennuyer. La relève arrivera en début d’après-midi. Vous pourriez participer avec vos deux amis à une animation.
-Oh non… Je n’en connais qu’un sur deux et pas tant que ça encore… Et puis je ne me sens pas de…
-Vous ferez bien ce que vous voudrez de votre temps libre. Vous avez vu nos deux touristes ? Je dois dire que je suis impatient de voir leur prestation maintenant qu’ils ont attisé ma curiosité.

Veto appuya ses coudes sur la rambarde et commença à son tour à rechercher les deux tignasses bleues parmi la foule d’artistes et de spectateurs, réfléchissant à cette éventualité de participation. Y aurait-il une compétition qui pourrait lui convenir ?

[HRP : Autant de retard pour un post si... Je n'ai certes pas eu de vacances mais j'aurais pu y passer plus de temps. Je suis par conséquent affreusement désolé pour cette réponse et surtout pour l'attente qu'elle a provoquée.]

Physiquement présent, Enteri s'était mentalement rendu dans les limbes de l'imagination. Dans sa tête d'improbables syllabes se combinaient, fuyaient pour mieux se refondre dans un complexe casse-tête parfois sombre, parfois somptueux. Involontairement, il avait joué quelques notes aléatoires qui, quant à elle, n'avait rien de sublime...
Peu à peu les paroles prirent forme, puis la mélodie aussi tandis qu'ils griffonnait sur une feuille. Au retour de Chrysellia, il avait presque fini et il lui tandis ainsi le morceau de papier, puis apprécia sa répartie poétique. Assurément, les autres candidats n'avaient aucune chance ! Il lui demanda ensuite si elle avait des modifications à apporter aux paroles avant de commencer à jouer la mélodie qui s'y accordait.

~

Réunis dans leur plus beaux atours, les participants passaient tour à tour. Chrysellia n'était peut-être pas préparée aussi bien qu'elle l'aurait voulu néanmoins peu importait : tant qu'ils pouvaient réussir leur prestation, l'apparence passerait en second. Toutefois ils n'avaient pas réellement eu le temps de revoir leurs partitions c'est pourquoi régnait une certaine tension.

«Tout va bien ? N'oublie pas, ce qui compte, c'est de s'amuser !»

Certes. Mais lui-même espérait la victoire si fort qu'il ne pouvait s'empêcher d'apprécier à chaque respiration la douce étreinte de la pression, si poignante et exaltante. Tel un cyclone assaillant son poitrail, la déferlante de ferveur l'animait d'une rugissante ardeur. : il allait défendre son honneur par une improvisation de dernière heur. Un public silencieux l'accueillit arborant le poids de l'ennui que son précédent rival avait produit ; calmement lança-t-il un dernier sourire à Chrysellia, cachant avec peine l'extase qui faisait vibrer ses membres ainsi que les premières cordes de sa petite harpe.
Il n'aurait pas le temps de tenir assez longtemps, cela il le savait. La mélodie s'accordait avec les notes qu'il avait jouée à Chrysellia, toutefois ne suffirait pas à satisfaire tous les jurés c'est pourquoi il allait falloir trouver un moyen de rallonger un peu la représentation, et ce moyen il l'avait déjà trouvé. Le juré qui serait probablement le moins intéressé par sa musique, douce et harmonieuse, aurait besoin d'un son un peu plus dynamique...
Les deux premières strophes furent délicate, andante, au point que les murmures du vent semblaient capable d'en briser comme un écho lointain. Toutefois elles n'en demeuraient pas moins intense au point de capter l'attention de tous les membres du jury. Sauf un.
Sforzando. Subitement, il changea le mouvement en invoquant la mélodie d'une autre musique qu'il avait apprise. Puis de nouveau il reprit le rythme convenu, c'est pourquoi il lança un regard à sa chanteuse pour qu'elle reprenne. C'était la première fois qu'il fit une pareille composition sans la moindre fausse note et il espérait qu'en se terminant tranquillement, la mélodie leur assurerait une place de prestige.

Les deux participants d'après étaient désemparés mais le couple suivant avait un peu plus de talent ; l'un jouait toutefois de l'ocarina sur une musique trop lente si bien que le jury se souvint de la voix candide de la jeune fille. Finalement, aucun véritable concurrent n'avait su pimenter les choses. Tout sa passa donc sans fausse note, même si à vaincre sans péril... Un consensus au sein des votes leur éviterait toutefois de repasser, à moins qu'un candidat n'eut payé les spectateurs pour s'assurer la victoire ? À y repenser, cela aurait été une manoeuvre judicieuse, mais dénué d'intérêt car la gloire ne s'achète guère. Il avait en tout cas le temps de parler avec Chrysellia pendant que le jury délibèrerait, mais il pouvait aussi en profiter pour aller voir le soldat Havelle. Après tout, certains concurrents allaient sûrement se balader dans les gradins pour y faire tomber quelques pièces d'or...

«J'espère que je ne t'ai pas surpris ? Je me suis dis qu'avec ceci, tu aurais le temps de revoir ton chant... Il était surprenant et très poignant ! Peut-être est-ce ton âge, mais ta voix était ineffable ! »

Peut-être en faisait-il un peu trop, néanmoins plus que s'il n'avait été avec n'importe quelle cantatrice de renom il avait apprécié leur prestation autant que la voix de la jeune artiste. Se demandant ce qu'en avait pensé Veto, il proposa à Chrysellia d'aller le rejoindre en attendant les délibérations du jury.

Enteri lui tendit la feuille des paroles qu’il venait de composer, elle y jeta un coup d’œil et n’eut rien à redire. Elle ne répondit que par un coup de tête négatif.
Elle étudiait les paroles très attentivement pour les apprendre par cœur, comme si elle les savait depuis des mois. Le moment du concours arrivait, ils devaient se préparer au concours.

Dans les coulisses improvisées pour le concours, la famille où dormirait la fillette la nuit même vint à sa rencontre. La mère avait plusieurs choses dans un sac. Elle l’a fit s’asseoir et lui brossa les cheveux. Ensuite, elle lui fit une queue de cheval et à la place du chouchou habituel, un ruban multicolore. Elle lui murmura à l’oreille :

« Tu sais, si tu veux rester plusieurs jours dans la ville, on sera heureux de te faire visiter. A vrai dire, j’aimerais que ma fille te ressemble.
_ Merci madame. Je ne sais pas encore si je vais accepter la proposition mais je vous remercie. Merci aussi pour la coiffure.
_ Je suis sure que tu seras jeune demoiselle, extraordinaire sur scène.
_ Merci monsieur. Il faut que j’y aille. »

Elle retrouva Enteri et passa la tête par l’embrasure. Elle remarqua qu’il y avait du monde. Elle vit la famille s’asseoir et tenta de se donner du courage. L’homme avec qui elle concourait lui demandait si tout allait bien. Bah pas vraiment, chanter c’était pas ce qu’elle préférait. Il lui demanda de s’amuser, c’était tout ce qui comptait. Et bien, elle essayera. Elle n’eut pas le temps de lui répondre qu’elle était un peu angoissée que le présentateur du concours les priait de monter sur scène.

L’heure était venue, elle se mit à chanter sur la mélodie assez lente mais poignante. La fillette avait fermée les yeux pour absorber la musique et la transmettre en plus fort dans son chant. Chrysallia rouvrit les yeux et regarda le musicien surpris de la mélodie rapide. Mais, bientôt, elle redevenait lente et il lui fit signe de reprendre la chanson. Chrysallia lui rendit son sourire et se remit à chanter. L’atmosphère était lourd, personne ne parlait, ils avaient captés l’attention de tout le public et jury. Chrysallia termina la chanson, les notes continuaient à sonner de moins en moins fort jusqu’à s’arrêter.

H.S : voici les paroles écrites par Enteri

Spoiler:

Tous deux sortir de scène et le groupe suivant se mit en place. Le concours allait bientôt se terminer et le jury choisirait le gagnant à moins d’un deuxième tour, ce qu’elle n’espérait pas.
Le lord lui demanda s’il ne l’avait pas trop surpris.

« A vrai dire, oui vous m’avez surprise de manière agréable. Je n’avais jamais entendu quelqu’un jouer de cette manière. La mélodie que vous avez écrite était vraiment magnifique. Et j’ai été heureuse d’être votre partenaire pour ce duo, même si je ne suis pas très à l’aise pour le chant. Je préfère jouer de la musique et de ma flûte en particuliers. Pour votre deuxième question, je ne vois aucun inconvénient à aller saluer les gardes qui nous ont conduits ici. Après tout, je serais heureuse de savoir quel est leur point de vue et puis toute critique est bonne à prendre. Je vous suis.»

Les deux bleuets montèrent enfin sur scène. Veto ne les quitta pas du regard comme toute l’assistance. L’introduction commença, calme, claire, mélancolique, triste même. C’était une belle musique d’ambiance, en effet. Mais si le caporal-chef fut à nouveau charmé, Veto retint un soupire. Il est difficile de ne pas retrouver trop de similitude dans ce qui ne nous passionne pas. Trop lent, trop calme, pas assez entrainant. Il allait détourner le regard lorsque la jeune fille commença à chanter. Le souffle enfantin se permettait de telles notes ! Sa voix cristalline le captiva à nouveau, le laissant alors s’envoler vers des songes éveillés comme il en avait l’habitude.
Décidemment, ils avaient fait mouche. La petite histoire le laissa s’imaginer les scènes vécues par la l’orpheline. Le renforcement de la musique le surpris également. La dureté le fit entrevoir les corps déchiquetés par les bêtes sauvages affamées, et le retour au calme, le désespoir de la fillette. Il la vit même jouer à la place d’Enteri, pleurante et seul au milieu de la végétation dense. Et bizarrement, son esprit un peu sadique fit bouger un fourré.

Lorsque la musique s’arrêta, Enteri salua dans le corps de la fillette et une bête sauvage les percuta tous deux, éjectant l’image imaginaire déjà condamnée de la pauvresse imprudente de l’enveloppe du musicien qui souriait, inconscient.

Veto pouffa doucement, baissant la tête, amusé par ses songes toujours aussi fougueux, et accueillit les deux ménestrels par quelques claquements de mains silencieux et privés.
Ce fut le supérieur qui commença l’éloge le premier.

-Et bien ! Belle prestation ! Ça valait la peine de vous faire passer devant.
-Déroutant. Agréablement déroutant.

Lâcha simplement Veto avec un sourire sincère avant de jeter un œil aux concurrents suivants qui s’installaient.
Du coin de l’œil tout à l’heure, il avait vu le jury très intéressé. Lorsque le nouveau duo commença, il fit la même moue lassée que la plupart des votants, se rassurant ainsi quand aux chances de leurs deux poulains.

-Vous faites quelque chose cette après-midi ?

Veto regarda interloqué son supérieur qui semblait très amusé de sa petite question à voix basse, respectueuse des artistes sur scène. Malheureusement, le garde commençait à redouter les plans de ce Gardif qui avait légèrement tendance vouloir diriger sa vie pourtant si tranquille. Après lui avoir fait admettre que monter en grade était une bonne chose, voilà qu’il sentait bien qu’il voulait planifier son après-midi.
Cependant, il resta silencieux. Les caprices des haut-gradés sont des méfaits que doivent bien supporter les troufions.
Finalement, tout ceci faisait peut-être parti du même plan qui voulait l’inciter à passer ses certificats. Si c’était le cas, il avait mis toutes les chances de son côté.

[Hum... Pour ma part, cette réponse ne me plait pas... Surtout pour un event. Enfin... Que dire à part désolé ?]

[Hors-RP : Une réponse courte mais nous ne pouvons pas avancer sans avoir l'avis de chacun sur la suite des évènements ; nous sommes 4 ce qui fait deux groupes de deux, nous pourrions donc changer de partenaire si vous voulez =) ?]

Lorsqu'il s'approcha de lui, Enteri put voir un subreptice sourire sur le visage amusé de Veto, mais très vite celui-ci revint à la réalité : à quoi donc avait-il bien pu penser ? ! Puis vinrent les éloges que le noble estima indues et à vrai dire il ne ferait pas le second tour, si second tour il y avait lieu d'avoir. Non pas qu'il sous-estima les autres concurrents, il ne voulait simplement pas perdre de temps à refaire ce qu'il venait de jouer, fut-ce avec d'autres notes et paroles. Sa récompense, il l'avait déjà obtenu en jouant en compagnie de la jeune demoiselle et c'était là une richesse bien plus grande que tout ce dont pouvait prétendre les autres concurrents. Il voulait donc partir, toutefois si la jeune fille voulait rester il n'aurait d'autre choix que de faire avec elle un hypothétique second tour.
Il voulut lui adresser la parole cependant le supérieur de Veto fut plus rapide et interrogea ce dernier ; le noble s'enquit aussitôt de ses desseins, craignant d'en avoir été impliqué :

«Oh oui, j'aimerais beaucoup vous voir sur le devant de la scène ! Dites-moi, quel est votre domaine ?»

Peut-être qu'Enteri avait été trop optimiste car cet homme, pour tout imposant qu'il semblât, ne paraissait pas vouloir se donner en spectacle ; en s'adressant à lui, il s'était peut-être lui aussi fait la cible de ce qui ressemblait à une mise à l'épreuve. Il n'y avait pas tant d'activité en solo et cela soulevait une question : duo ou... Duel ? Quelle qu'en soit la réponse, il lui fallait l'éviter.

«D'ailleurs Chrysallia, y a-t-il d'autres concours auxquels tu voudrais assister ou préfèrerais-tu ici rester ? Le deuxième tour ne m'intéresse pas et quel que soit le résultat, en ayant avec toi joué je ne peux qu'avoir gagné ! Pour une compétition à deux si tu veux de l'aide, je peux te donner la mienne, sauf si tu veux être avec l'un d'eux ; ils semblent vouloir eux aussi participer aux festivités. On peut certainement trouver un arrangement ?»

Il pensait plus ou moins savoir ce que voudraient Chrysallia et le soldat mais le chef demeurait une inconnu à ses calculs. Dans tous les cas, il pourrait bien trouver une activité tout aussi amusante quoiqu'il espérât quelque chose de plus physique. En voyant des acrobates au loin, il n'imaginait pas encore qu'il pourrait être l'un d'eux, l'espace d'un jour ou deux...

[hors-rp: j'espère que la réponse vous va et qu'elle ne vous déroutera pas. s'il y a un quelconque pb, je rectifierais.]

Les deux musiciens arrivèrent près des gardes, ceux-ci lui donnèrent leurs impressions qu’accueillit d’ailleurs chaleureusement Chrysallia.

« Merci beaucoup, vos pensées m’aideront pour la suite. »

Chrysallia attendit qu’on lui demande ce qui se passerait pour elle par la suite. Il y avait un concours qui la tentait surtout mais ce n’était que plus tard dans la journée. Enteri finit par lui demander ce qu’elle voulait faire, elle lui répondit alors calmement :

« A vrai dire, il y a un concours qui m’intéresse et c’était au départ pour celui-là que j’étais venue, un concours en solo mais c’est ce soir, en attendant je ne sais pas. La famille qui m’héberge pour la nuit va rester et attendre de voir s’il y a un deuxième tour mais attendez, regardez le jury est déjà revenu. »

On entendait le présentateur annoncer les résultats. Il n’y aurait pas besoin d’un second tour pour tous les séparer, et le gagnant était… son cœur se stoppa net, elle attendait avec impatience le verdict, elle avait mis toute son âme dans cette chanson.

« Le groupe gagnant est celui d’Enteri et de Chrysallia. Félicitations aux deux gagnants. S’ils veulent bien venir sur scène, le comité de la ville va maintenant leur décernés un ruban pour les féliciter de leur performances. Il est vrai que ce n’est pas grand-chose mais c’est surtout symbolique. »

« On… on … on a gagné. Je n’en reviens pas. »

Chrysallia venait de participer à son premier concours et elle avait gagné, cela lui mettait du baume au cœur pour son prochain concours. Elle courut comme elle put dans sa robe jusqu’à la scène où elle alla chercher le ruban. Elle remercia le jury et le présentateur. Puis fit une révérence et retourna dans les coulisses. Elle n’avait pas fait attention si Enteri l’avait suivit.

La famille qui l’accueillait pour la nuit vint la féliciter et lui dire qu’ils étaient persuadés qu’elle deviendrait une grande musicienne plus tard. Elle les remercia et s’aperçut que les hommes parlaient entre eux, peut être devrait-elle s’éclipser et laisser ses adultes qui semblaient se connaitre discuter tranquillement.

« Me revoici, mais je pense que je vais vous laisser parler tranquillement d’affaires sérieuses auxquelles je risque de ne rien comprendre. Après tout, tout le monde sait bien que les enfants ne peuvent pas comprendre les affaires des grandes personnes. Je vous remercie messieurs de nous avoir accompagnés jusque ici ainsi que de nous avoir écouté. Sir Klypsène, je vous remercie d’avoir joué avec moi, je n’oublierais jamais ce concours, cette expérience me sera bénéfique soyez en sûr. A bientôt messieurs du moins je l’espère. »

Chrysallia les salua d’une révérence puis s’en alla dans la ville, elle traina un peu puis se dirigea vers la maison de ses hôtes, ils s’y trouvaient et travaillaient. Chrysallia leur proposa leur aide mais ils la refusèrent. Elle monta donc à l’étage et trouva leur fille. Toutes deux eurent une longue discussion.
_ Coucou Chrysallia, tu as été superbe tout à l’heure.
_ Merci ce compliment me va droit au cœur.
_ Dis moi, tu comptes participer à un autre concours aujourd’hui ? Rester un peu dans la région après ?
_ Pour ce qui est du concours, oui, je voudrais faire le concours en solo de ce soir. Pour ce qui est de la région, je ne sais pas vraiment encore. C’est une éventualité que je ne peux pas refuser.
_ Je peux te poser une question ?
_ Oui, bien sur, vas-y.
_ Comment es-ce de voyager toute seule ?
_ Et bien c’est chouette, tu rencontres beaucoup de monde. Certaines rencontres sont géniales mais d’autres peuvent se révéler très dangereuses. Des fois, j’aimerais n’être pas partie de chez moi. Etre en sécurité entre mes parents et mon frère.
_ J’aimerais être plus comme toi, savoir parler aux gens comme tu le fais, être aussi douée que toi pour quelque chose.
_ Ça te dirais d’aller faire un tour en ville pour te changer les idées ?
_ Oui pourquoi pas.

Ainsi, toutes les deux, elles partirent dans la ville où elles firent plusieurs magasins. Julie oublia ses petits soucis et décida d’acheter un vêtement à Chrysallia. Elle voulait que la demoiselle paraisse dans une nouvelle robe le soir même pour son autre concours. La fillette aux cheveux bleus avait tentée de lui dire que ce n’était pas la peine mais la fillette avait tellement insisté que Chrysallia n’avait pas eu d’autre choix que d’accepter.
Elles firent donc plusieurs magasins avant de tomber sur une boutique où elles passèrent toute l’après midi. Chrysallia chercha les robes qui lui plaisaient, Julie cherchait les robes qui pourraient aller à la demoiselle. Elles finirent par trouver la robe parfaite qui allait avec son visage.

Le soir arriva donc assez vite. Chrysallia courut pour s’inscrire au concours et une fois inscrite, elle retrouva la fillette. Celle-ci l’habilla et la coiffa. Chrysallia avait un peu le trac mais tout se passerait bien si elle mettait autant d’émotion que lors du premier concours. Elle ne savait pas vraiment si les sieurs de la journée allaient venir la voir ou même si Enterry s’était inscrit au concours. Les candidats passaient les uns après les autres puis ce fut son tour. Chrysallia monta sur scène avec sa flute traversière et entama un morceau de sa composition. C’était le voyage qui lui avait inspiré cette mélodie douce mais rapide. Elle avait l’habitude de danser sur ses musiques et ne s’en priva pas et la robe qu’elles avaient achetées étaient parfaite.

Quand elle rouvrit les yeux, elle se trouvait dans sa chambre d’invité. Elle venait de rêver, elle était montée à l’étage, avait bien et bel parlé à la fillette mais cette dernière avait refusé d’aller en ville, Chrysallia était donc partie se reposer. Rien d’autre ne s’était passé. Chrysallia redescendit et trouva les femmes en pleine couture. La mère l’informa que la robe qu’elles confectionnaient serait pour elle car c’était une enfant adorable et qu’elles voulaient lui faire le plus plaisir possible. Chrysallia sortit de la maison et remarqua qu’un concours de duel allait avoir lieu. Elle se dirigea donc en direction des gradins.

Le devant de la scène… Hum… Perspective désagréable au discret garde. Il n’était ni recherché, ni particulièrement difforme, pourtant, le regard des autres le gênait. Timide ? Oui. Surement.
Veto écouta distraitement Chrysallia alors qu’il cherchait à décrypter entre les traits du visage de son supérieur, le plan qu’il fomentait à son encontre. Que lui valait donc cet étrange intérêt ?

« Le groupe gagnant est celui d’Enteri et de Chrysallia. »

Veto cessa d’observer son caporal-chef et reprit une mine plus détendue, plus de circonstance, pour accompagner ses applaudissements et ceux de Gardif.
C’est alors que la plus jeune musicienne s’élançait que le garde le plus galonné se pencha vers le Jouet du Sort.

-Croyez-moi, pour grimper, il faut prouver que l’on est un tantinet raffiné. Votre future carrière vous demandera plus que votre simple talent militaire. Montrez-moi que vous êtes plus qu’un simple fourreau parmi les autres.
-Quelle carrière ?
-Celle que l’on vous construira. Que vous le vouliez ou non. N’en doutez pas. Vous intéressez beaucoup de monde en haut lieu.

Veto continuait d’applaudir, restant aussi détaché de son interlocuteur que lui de sa propre personne. C’était une conversation officieuse. Le jeune blondinet ne le savait pas encore, mais bientôt, sa vie ne serait plus faite que de messes basses.
Alors que les prix des deuxièmes et autres étaient distribués, Veto réfléchit. Encore une fois, il n’avait pas le choix. Mais après tout, faire ses preuves ne serait que bénéfique. Il n’avait encore aucune idée de ce qu’on lui préparait dans l’ombre, et peut-être que s’il l’avait su, il n’aurait rien changé. Il n’avait qu’un projet : réunir assez d’argent pour se préparer à repartir à la recherche de son passé après avoir servi assez longtemps les prêtresses pour effacer la dette qu’il avait à leur égard.

La petite Chrysallia revint, toujours aussi pleine de vie et loquace. Elle semblait bien humble pour son âge. Son éducation la faisait s’effacer et personne ne put la retenir alors qu’elle disparaissait dans la foule. Décidément, elle était étrange cette gamine.

Veto se tourna vers Enteri qu’il repéra rapidement à ses cheveux parmi la foule.

-Mon chef a raison. Il serait agréable de se dégourdir en votre compagnie, si vous soufrez ma compagnie d’avantage. Je n’ai de talent ni en musique, ni en chant, mais la vision de ces acrobates là-bas me fait me demander si je ne serais pas capable d’en faire autant. Il y a un concours de danse acrobatique en début d’après-midi. Il débute par les duels et se clos en début de soirée par les équipes. Que diriez-vous de nous retrouver à l’auberge à droite de la Mairie lorsque je termine mon service, à l’heure du repas ? Nous pourrions décider ensemble de ce qui nous convient à tous deux.

Dans la foule, les yeux bleu-gris se frayèrent un chemin jusqu’au supérieur, comme pour l’informer qu’il relevait le défi. Il était assez fougueux dans son genre et aimait relever les défis. Celui-ci prouverait d’ailleurs son courage à se montrer.
Plus loin, il se rassura en voyant un acrobate faire une pirouette qu’il connaissait. Il savait qu’il avait une chance. Se montrera-t-il seulement assez audacieux ?

Ce n'est qu'en entendant Chrysallia que le noble comprit qu'il avait gagné et si cela le laissait de marbre, il était content de voir sa camarade remplie d'allégresse. Elle était prestement revenue sur scène avant même que lui-même n'y songeât, pourtant il fit un signe gêné aux soldats pour leur expliquer qu'il ne serait pas long ; ainsi, il n'avait pas entendu le discours entre les deux gens d'arme.
Il revint quelques minutes plus tard, juste après le retour de Chrysallia, pourtant il n'était pas allé sur scène. À son retour, il comprit que ses deux amis n'avait pas remarqué qu'il n'était pas retourné devant le public c'est pourquoi il ne se justifia pas. Il fut d'ailleurs interpelé avant même de rejoindre tout à fait le jeune blondinet. Déjà, Chrysallia ne tenait pas en place et s'en était allée, mais il savait qu'elle demeurait proche et s'il n'avait pas eu les réponses à toutes ses questions, il espérait bientôt les obtenir. Pourquoi était-elle chez des hôtes ? Pourquoi voyageait-elle seule du haut de ses 10 ans pour toute mature qu'elle semblait être ? Que de suspense, mais de le découvrir quelle bonheur...

L'invitation du garde le plongea dans la méditation. Il savait que ce genre d'exercice était plus encore de ceux qu'il maîtrisait d'une part car il parvenait à apprendre très rapidement et d'autre part car il possédait déjà une certaine agilité. Ou tout du moins, le ladrini qu'il était, qu'il surnommait parfois Altérie, ce qui posait un problème de taille : s'il se servait de ses entraînements il paraîtrait beaucoup plus agile qu'un simple noble et si trop souvent il arborait sa souplesse longuement travaillée, peut-être qu'un jour quelqu'un ferait le rapprochement... En fouillant dans les divers passés qu'il s'était créés, il vint à la conclusion qu'il s'était déjà forgé une garantie au cas où les choses devaient tourner ainsi, si bien que l'accusation ne l'effrayait pas plus que ça. Il répondit donc qu'il était d'accord mais il prévint le soldat : il ne passait en effet pas son temps que dans les livres.
D'un autre côté, les soldats de Cimmeria n'étaient absolument pas des amateurs eu égard aux conditions dans lesquelles ils s'entraînaient. Son adversaire n'avait en effet rien à lui envier et son collègue semblait lui aussi reconnaître l'intérêt de l'entreprise. Quelque chose n'était pas net dans cet individu, bien trop mystérieux à son goût. D'une façon ou d'une autre, il fallait en apprendre un peu plus sur ses intentions.

«Zvarri ! Je vous prenais pour un ami, mais il est clair que vous n'êtes pas frères, car vous êtes vous aussi un militaire ! Veuillez me pardonner, mais dites-moi signore, comment dois-je vous appeler ?»

Il s'était adressé au soldat inconnu avec une joyeuse curiosité mais en dépit de ses questions, il n'attendait pas de réponses... Verbales. S'il était du même grade que Veto, pourquoi y avait-il cette lueur maligne ? Et s'il était son supérieur, pourquoi paraissait-il si distant ? Il attendit que réponde l'étrange personnage pour conclure.

«Mais vous devez être en service, je ne devrais pas vous importuner de la sorte... Nous nous reverrons... À l'auberge près de la mairie, ajouta-t-il en se tournant de nouveau vers le soldat Havelle.»

Le quator fut très rapidement dissout et aussitôt qu'Enteri fut hors de leur vue, il se hâta de rejoindre l'auberge qu'il avait déjà commandée. Là-bas, il pourrait se changer, avant de retourner à d'autres occupations plus sérieuses... Bandé, il revint dans la ville avec une tenue sombre afin de passer inaperçu. Il avait encore le temps avant l'heure du repos et il comptait bien l'utiliser.
Plusieurs heures plus tard sonna l'heure du repas. Au-dessus d'un pantalon souple, il portait une veste légère, rouge foncé, cintrée et sans manches, dont l'encolure était touffue des mêmes poils de lapins que la doublure. Le vêtement intérieur était plus foncé encore et chaque manche était parée de trois lignes dorées qui descendaient en colimaçon le long de ses bras pour rejoindre le poignet évasé afin de courir sur l'extrémité pour former d'autres formes sinusoïdales. Un accoutrement léger mais résistant grâce à sa fourrure, une véritable perle qui pourtant ne lui avait pas coûté si cher. Parfait pour les entraînements, mais à dire vrai légèrement étrange pour l'auberge dans laquelle ils s'étaient donné rendez-vous...

Chrysallia venait de se réveiller alors tout ce qui venait de se passer n’était qu’un rêve et bien quel beau rêve. La fillette passa la tête à sa fenêtre, nous étions encore le matin, il n'alalit pas tarder à être midi. Elle se changea et mit un habit plus simple : une robe blanche et légère. Elle attacha ses cheveux en une queue de cheval et descendit dans le magasin. Son hôte était occupé dans la boulangerie à s’occuper des clients bien plus nombreux en ce jour que d’habitude.

La petite alla dans la salle à côté, la mère et la fille préparaient ce qu’il fallait au pater. Chrysallia proposa son aide mais il n’y avait rien à faire dans la boutique, toute fois, Julie lui demanda d’aller acheter des tissus, elle lui remit une liste et lui demanda de le ramener le plus rapidement possible.

Chrysallia s’exécuta aussitôt. Elle courait dans la foule et tournait dans diverses ruelles. Elle finit pas tomber devant une boutique de vêtements, elle entra et demanda timidement au gérant s’il avait tous les tissus marqués sur la liste. Il déposa le tout dans un sac et demanda qu’on le paye. La fillette lui donna l’argent qu’on lui avait prêté et attendit qu’il lui rende la monnaie.

Chrysallia rentra en courant et donna en main propre et les tissus et l’argent. On lui dit qu’elle pouvait aller flâner dans les rues mais de revenir pour midi afin de déjeuner. Elle passa devant diverses boutiques vendant de tous: tissus, robe déjà faite; bijoux,... Ensuite, elle arriva sur une place où un marché s'était installé, il y avait très certianement des marchands ambulents qui venaent exprès pour la fête. La fillette en fit le tour puis s'assit sur un banc et regarda le ciel.

« Tu me suis depuis quand ? »
Pour toute réponse, la louve émit un petit bruit et s’allongea à côté de Chrysallia, la tête sur ses jambes. Il n’y avait pas beaucoup de monde sur la place. Elle se demandait où se trouvait les trois adultes avec qui elle avait passé la matinée. Elle vit passer divers gardes mais pas ceux qu'elle avait rencontré.

Puis, elle retourna chez ses hôtes. La boutique était maintenant déserte, il était l’heure de manger. Tout le monde passa dans la cuisine et ils déjeunèrent. La mère lui demanda si elle avait l’intention de participer à un autre concours et la fillette lui répondit que oui. Le dernier concours de la journée, celui qui clôturait la journée : une épreuve de musique en solo.
Après le déjeuner, la famille laissa partir Chrysallia en avance pour le premier concours d'acrobatie, les hôtes la rejoindraient plus tard.

Il n'y avait personne, le concours ne commençait pas avant une heure, Chrysallia décida donc d'aller vois si elle retrouvait les adultes qui l'avaient accompagné dans les coulisses.
Mais il n'y avait personne, elle revint près des gradins et rencontra l'un des gardes qu'elle avait rencontré plus tôt dans la journée.

Veto sourit à la réflexion du noble au sujet des livres. C’était une très bonne chose pour ce concours mais peut-être leur sujet de conversation serait-il restreint, lui qui était un passionné de lecture.

-D’habitude on me donne du Caporal-chef. Mais ne vous encombrez pas de protocole. Appelez-moi simplement Gardif.

Ce qui sépara Veto des retrouvailles à l’auberge fut d’un banal affligeant.
Toujours est-il qu’il arriva dans la salle emplie de fumée de viande et de sauce avec quelques minutes de retard, le temps de repasser se changer à la caserne.
C’est donc vêtu d’un ensemble bleu azur qu’il pénétra dans l’établissement dont il connaissait le gérant. Un débardeur en toile de jute assez ample, enfroqué dans un pantalon du même tissu, épais et résistant, serré par un large ceinturon de cuir brut auquel pendait toujours cette dague désormais compagne éternelle.

Le garde n’eut aucun mal à retrouver son interlocuteur. Décidemment, ils appartenaient bel et bien à des milieux différents. Il se sentit mal à l’aise en comparant mentalement leurs vêtements. Et puis il passa outre et s’approcha de lui.

Toujours un peu guindé, il resta debout face à lui, s’inclinant légèrement pour marquer un salut avant de se résigner à prendre place face à son riche comparse.

-Veuillez excuser mon retard. Je vous propose de commander et de discuter de notre encore hypothétique concours. Ça nous évitera de perdre d’avantage de temps.

N’attendant pas son consentement, ayant personnellement assez faim pour manger un bœuf, il fit signe au tenancier de lui envoyer quelqu’un pour prendre leur commande.

-Comme je vous le disais plus tôt, je ne pense être à la hauteur qu’en acrobaties. J’espérais que vous pourriez apporter à mes capacités la touche d’esthétisme que risque de me manquer. Oui ! Je prendrais comme d’habitude Roberta. Une entrecôte bleue et votre poêlée de légume. Allez-y, sir Klypsène. Ils ont beau être importés, ils n’en sont pas moins succulents. N’est-ce pas ?

La serveuse confirma et Veto laissa son interlocuteur commander sans plus faire de commentaire, attendant d’avoir à nouveau son attention pour reprendre.

-Donc, je n’ai comme agilité, que celle du militaire. Mais j’apprends vite et notre entrainement au corps à corps, bien que je n’y sois pas parfaitement rompu, me laisse capable d’effectuer des mouvements assez fluides et j’ai une bonne coordination. Quelles sont ces dispositions que vous laissiez entendre avant que nous nous quittions ?

Attentivement, il écouta l’homme, son imagination adaptant ces idées à ce qu’il créait déjà à tour de bras avant même qu’Enteri ait ouvert la bouche. Son imaginaire s’inspirait de la grâce qu’il avait vu dans les mouvements sur scène et en dehors du musicien, des pirouettes des acrobates de la places et inventait de toutes pièces de mouvements qu’il ne pensait pas, à tord, impossibles.

-Hum… Que diriez-vous de confronter nos arts ? Je vous propose une sorte de combat amical sans nous toucher qui… Oh ! Vous avez fait vite ! Merci Roberta. Une sorte d’improvisation qui servirait de base à une chorégraphie. Mangeons et je nous mènerai sur une petite placette souvent déserte et forte agréable.

Il avait déjà attaqué la viande quand il se rendit compte de son empressement et de son débit de paroles. Il se figea, la viande au bout du couteau, la cuillère dans l’autre main. La bouche ouverte, il releva son regard vers le noble et happa le morceau sanguinolent en souriant, peinant à garder la bouche fermé. Il se redressa et réussit à avaler avant de s’excuser.

-Pardon. J’ai tendance à m’emballer une fois une idée en tête. Mangez tranquillement. Les duos ne se font qu’en début d’après-midi. Une dernière chose. Je me disais que si nous retrouvions cette Chrysallia, nous pourrions peut-être l’inviter à nous rejoindre à la compétition par équipe de fin de journée. Le trio est le minimum accepté.

Le couteau attaqua à nouveau la viande sans pitié alors que la conversation continuait, Veto se faisait plus discret et moins oppressant. Finalement, il n’était plus gêné par l’accoutrement de celui qu’il considérait finalement comme son homologue.

[HRP]Désolé Chrysallia mais tu vas un peu trop vite pour nous. Je propose qu’Entery s’occupe de l’entrainement dans son post et que toi, Chrysallia, et tes hôtes, vous rendiez compte que vous étiez un peu en avance, assistant ainsi à notre prestation à deux qui je l’espère te plaira. Tu pourras alors nous rejoindre dans un trio. Qu’en dis-tu ?[/HRP]

Au premier regard, Enteri salua l'élégance et la simplicité de l'habit dans lequel Veto était accoutré. Un habit parfaitement adapté tant au spectacle qu'au combat ce qui tombait plutôt bien puisqu'ils s'apprêtaient à faire un peu des deux à la fois... Le noble pensait que son ami lui ferait un salut beaucoup moins solennel mais en le voyant s'incliner ainsi, il posa son poing contre son coeur et se courba également élégamment.

«Trêve de bienséance, nous sommes entres amis !
- Comme je vous le disais plus tôt, je ne pense être à la hauteur qu’en acrobaties. J’espérais que vous pourriez apporter à mes capacités la touche d’esthétisme que risque de me manquer. Oui ! Je prendrais comme d’habitude Roberta. Une entrecôte bleue et votre poêlée de légume. Allez-y, sir Klypsène. Ils ont beau être importés, ils n’en sont pas moins succulents. N’est-ce pas ?
- Perfecto ! Je prendrai pour ma part une sole avec un peu d'eau... ( à quoi pouvait-on s'attendre de la part d'un musicien, après tout ? ) Et comme fioriture...
- Avec des moules ?
- Si ! J'en serais charmé.
- Et de la laitue ?
- Fa, fa...»

Mentalement, il imagina Veto lui demander depuis quand "fa" signifiait "non", à quoi il aurait répondu naïvement "J'ai dit fa ? Euh, ça ?" . Certes il n'était pas très doué pour les blagues mais comme souvent, leur seul intérêt n'était pas que de faire rire. Les anciens peuples appréciaient tout particulièrement la daurade et la sole, les moules et les huîtres - excellent goût par ailleurs - ; la laitue, elle, était plutôt un aphrodisiaque, d'où son refus.
La discussion s'enchaîna très vite et une once d'hésitation parcourrait certains mots du soldat. Pour sûr il allait être redoutable - heureusement ce n'était pas un combat - mais il ne faisait aucun doute que ses aptitudes serait d'une impressionnante efficacité. De son côté, Enteri n'avait jamais pratiqué ces acrobaties mais avait deux avantages : son agilité en permanence mise à l'épreuve ainsi que sa capacité à apprendre presque instantanément. Le problème était qu'il devait cacher en partie son agilité et qu'il ne pouvait reproduire que ce qu'il avait vu, ce qui serait toutefois suffisant pour donner du spectacle. À eux deux, ils enverraient du rêve !
Lorsque son plat fut servi et après avoir mandé de féliciter le chef pour sa présentation, il s'adonna à un étrange rituel : il mangeait une partie de son poisson, puis prenait une moule pour mélanger les saveurs dans son palais et attaquait de nouveau une partie de sa sole de façon toute aussi méthodique avant de reprendre une autre moule, qu'il dégusta avant de l'accoler à la première. À la fin du repas, il aurait non seulement terminé sa sole et ses moules en même temps mais obtiendrait aussi une magnifique ribambelle des moules qu'il avait mangées. Il lui arrivait en effet d'être légèrement trop rigide et qui plus est, d'une manière totalement inconsciente puisqu'il ne regardait qu'à peine son assiette. Somptuoso déclarerait-il en appréciant avec délicatesse la dernière bouchée. Pour autant il ne montrait nulle condescendance en voyant le soldat Havelle apprécier d'une méthode autrement plus radicale les délices qui lui avaient été présentés car lui-même aurait fait de même s'il avait eu affaire à un tel plat. Croquer vigoureusement dans la chair était un plaisir qui ne l'avait jamais abandonné et pour tout noble qu'il était, il lui arrivait d'en faire autant - loin des regards acerbes et des langues vindicatives - . Il avait par ailleurs porté une attention particulière aux propositions, toutes aussi délectables que leur repas, de Veto et il considérait la chose d'un œil bénéfique.

«Pardonnez ma distinction déplacée mais j'apprécie votre voracité : mes... semblables sont moins expressifs et tellement plus ennuyeux. Cela me rappelle certains doctes qui expliquaient que dans notre approche face à nos désirs, nos besoins, nous agissions plus ou moins de la même façons. Plus prosaïquement, ils pensent que nous mangeons de la même manière que nous... Peu importe. J'ai moi aussi tendance à me disperser... Une placette pour nous entraîner ? Ce serait divin, surtout en raison des nombreux artistes qui voudront s'entraîner comme nous et nous pourrions effectivement... Confronter nos arts... Je ne suis nul soldat cependant, mais je passe beaucoup de temps à l'entraînement. Vous savez ce que l'on dit, mens sana in corpore sano, ajouta-t-il dans un rire discret mais plein d'entrain. Par contre, ajouter un enfant à notre duo me semble assez difficile. Et pourquoi pas ce brave et fier Gardif ? Ou plutôt, corsons les choses et prenons un homme au hasard. Qu'en dites-vous ? J'aurais peur de blesser un enfant pour être honnête...»

Il avait évité la question jusqu'alors mais cela dans le seul but de trouver le moment opportun. Il attendit ainsi que la première discussion se conclût pour aborder un tout autre sujet.

«Votre caporal-chef, serait-il... Non c'est impossible, excusez-moi... Mais il semblerait qu'il... Non, vraiment, je ne peux pas ! Ah, pourtant, je dois le reconnaître... Cet homme... C'est un vétéran !»

La chute était décevante. Ses mouvements de va-et-vient, murmurant lorsqu'il était sur le point de finir sa phrase, reculant quand il se ravisa, cette étrange mimique montrait le gêne qu'il ressentait pour conclure de cette façon. Toutefois, la conclusion était bien plus profonde et de nouveau il se rapprocha solennellement pour continuer discrètement.

«Corrompu.»

Un brusque retrait et des regards affolés à droite et à gauche s'ensuivirent. Lentement, il plaça son doigt sur sa bouche pour prévenir qu'il n'avait pas terminé. Non, il n'en avait pas terminé.

«Vous a-t-il paru familier - et ce serait tout à fait normal en bon militaire proche de ses recrues - ? Est-ce qu'il est proche de vous - et c'est tout à fait normal car vous êtes tous deux militaires - ? Vous cache-t-il... Des choses ? Je veux dire, pas des choses comme des plans de bataille, le lieu où il range son rhum ou son dernier amour. Non, non... Mais la raison de cette... Sincère... Amitié ?»

Désormais, le noble fixait son semblable droit dans les yeux.

«Les aristocrates connaissent des histoires. des hommes qui domineraient, partout, dans chaque strate de la société. Des hommes bons, des hommes de biens. Mais le pouvoir, mon ami, attire aussi des personnes moins... transparentes. Des êtres qui mouillent dans le secret, à qui l'on fait confiance pour les flatter. Oh croyez-moi, reprit-il avec plus d'émotion, j'en ai connu. J'allais devenir puissant, très puissant. Aujourd'hui mes richesses sont contrôlées et je reste un subordonné, quoique riche, qui ne peut qu'assister à des ridicules banquets mais sachez ceci, certains nobles sont corrompus. Des médecins aussi, oui, ce sont eux qui m'ont abusés, des médecins... Oui... Et à ce qu'il paraît, certains militaires. Peut-être. Je ne fais pas confiance à ce Gardif. Je ne le connais pas non plus, évidemment. Les risques qu'il soit de cette trempe sont infimes. Mais les chances que je puisse vous protéger, elles, sont réelles. Ne doutez pas de sa parole, l'ami, vous êtes homme de confiance. Mais demeurez averti et si un doute vous assaille, une crainte ou un soupçon, ne faites pas la même erreur que moi. Sous votre chaise se trouve la carte de mon établissement. Attendez que l'on termine le repas pour la prendre. Nous n'avons jamais eu cette conversation.»

À cet instant, Roberta passait avec quelques plats vides en main si bien qu'Enteri lui demanda la note en précisant qu'il allait payer. Si Veto souhaitait continuer la conversation, il serait bon de le faire dans un lieu plus festif.

HRP : Mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri, mon pseudo est Enteri... xD Avec un "r" et un "i" comme dans "il a ri" ou "hilarant" :) .[/HRP]

Chrysallia s’aperçut qu’elle était énormément en avance, elle alla donc voir le garde.

« _ Re bonjour monsieur, comment vous portez-vous?
_ Jeune demoiselle, je vais bien merci et vous ? Qu’est-ce que cela vous fait d’avoir gagner le concours de ce matin ?
_ Je vais très bien, pour votre deuxième question, cela me fait extrêmement plaisir et me donne confiance pour la suite des évènements. Je l’ai dit ce matin mais je ne sais pas si vous l’avez entendu, je compte participer au dernier concours de la journée. Celui qui clôture la journée, c’est un concours de musique en solo.
_ Je vous souhaite bonne chance.
_ Merci monsieur, mais je dois vous déranger, je suppose que vous êtes encore en service.
_ Ne vous inquiétez pas jeune demoiselle, je suis en service, mais il n’y a pas beaucoup de monde. Cela vous dirait il de vous balader en ma compagnie. Je continuerais de travailler et nous pourrons parler.
_ Cela me va. »

Chrysallia et le garde se mirent en marche, ils passèrent devant la boutique de ses hôtes où la fillette passa pour leur dire de ne pas s’inquiéter s’ils ne la voyaient pas quand ils iraient sur les gradins pour voir le spectacle. Elle ne devrait pas tarder à arriver. Ils reprirent la route et le garde lui demanda si les personnes qu’ils venaient de voir faisaient partis de sa famille. Chrysallia rit et se mit à raconter :

« Non, pas du tout, ce matin quand je suis arrivée en ville, ils étaient encore de parfait inconnus. Je leur aie proposé mon aide car il n’y avait encore personne, je dois avouer que je suis arrivée très tôt. Je les aie aidé et pour me remercier, ils m’ont proposé de m’héberger, depuis je les aide comme je peux et ils me nourrissent gratuitement et ce soir je passerais la nuit chez eux.
_ Mais alors, où sont vos parents ?
_ Et bien, ils sont chez moi. Nous habitons près de la forêt de Sphène. Mes parents m’ont permis de voyager seule, ma mère est très inquiète et du coup, quand je reste dans une ville plusieurs jours, je leur envoie une lettre pour leur dire comment cela se passe.
_ Et votre père ?
_ Mon père ? C’est lui qui a insisté auprès de ma mère pour qu’elle me laisse partir. J’aime voyager et rencontrer des personnes, apprendre de nouvelles choses que je n’aurais pas pu apprendre chez moi. J’ai déjà rencontré de nombreuses personnes et toutes plus différentes les unes que les autres. Des marchands, des nobles, j’ai même rencontré une cavalière de Sharna, je sais qu’il n’y a pas de quoi en être fier mais je suis sûre que si je suis encore en vie, c’est parce que je ne suis qu’une enfant. »

Le garde acquiesça, ils avaient parcourus du chemin, le garde l’arrêta un instant et sépara deux jeunes garçons qui se bagarraient dans une ruelle. Il les avertit que s’il les reprenait à se battre, il serait plus sévère. Ils reprirent leur balade et le garde qui était tout aussi curieux que tous les adultes qu’elle avait rencontré, lui demanda d’autres choses sur elle. Il tourna la tête et s’aperçut qu’un loup les suivait. Il se retourna et sortit son épée en demandant à la demoiselle de rester derrière lui, il la protègerait.

Chrysallia hurlait que ce n’était pas la peine, qu’elle connaissait l’animal et qu’elle ne lui ferait aucun mal.
Ils se trouvaient devant une auberge, le garde ne voulait pas la croire, il allait attaquer quand Chrysallia se précipita sur sa louve afin de la protéger. Elle se trouvait recroqueviller sur la louve, en pleurs.

Le garde lui demandait de se pousser pour qu’il tue l’animal, elle refusait, hurlant que c’était son animal de compagnie, et que Naige ne ferait aucun mal à personne tant que Chrysallia ne lui en donnerait pas l’ordre, la louve avait été dressée, elle avait été élevée en même que la fillette.

Sur ce, deux personnes sortirent de l’auberge.

[hors-rp : les deux personnes c’est vous, mais si j’ai mal compris vos post, faites le moi savoir, je changerais ce que j’ai marqué.]

Sa voracité ? Veto sourit en continuant de dévorer le morceau de viande. Quel délice cette viande de bovin typique d’Hellas ! Il n’avait pas pensé à la recommander elle aussi à Enteri. Tant pis. Ça ne lui gâcherait pas son plaisir. Et puis les paroles de son convive se buvaient avec autant de plaisir que le sang qui coulait dans sa bouche.

-Nous ferons comme vous voudrez et selon la situation du moment.

Il engloutit une pleine cuillère de légumes juteux avec entrain, voyant que l’affaire était conclue. Il éprouvait finalement de l’excitation à l’idée de cette prestation. Bien sûr, il ne savait pas comment il réagirait une fois sur scène mais préférait ne pas y penser. Pour l’instant, seul importait qu’ils allaient préparer ensemble quelque chose qu’il n’avait jamais imaginait faire un jour. Ce serait sans conteste une expérience enrichissante pour lui.

Soudain il s’arrêta de mâcher. La conversation prenait un tout nouveau tournant. La première chute le laissa perplexe. Il confirma pourtant, pressentant que le fond de la pensée n’était pas encore là.

-Oui… Je suppose. Je ne connais pas son âge mais il pourrait très bien être un vétéran…
-…corrompu.

Veto se figea un peu plus. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Comme Enteri, Veto se redressa et regarda alentour en reprenant sa mastication. Ses sourcils s’étaient froncés. Où voulez en venir ce noble en diffamant sur son supérieur ? Il redoubla d’attention à l’égard des paroles qui suivirent.

Le fait qu’il fasse mouche à chaque question mettait Veto de plus en plus mal à l’aise. Pourquoi tout tournait mal ? Encore d’avantage et il serait forcé de mettre fin à cet entretient. Il ne pouvait laisser passer de telles accusations.

-Vous cache-t-il... Des choses ?

À nouveau, la mâchoire du garde se stoppa. « Sincère amitié ». La raison… C’était vrai. Il ne l’avait jamais rencontré avant ce jour. Et pourquoi était-ce lui qui avait été affecté à cette unité et pas les autres ? Comment ce Gardif avait su le mettre en confiance aussi facilement ? Il commençait à entrevoir toute l’étendu de cette farce. Il n’était qu’un pion.

Il posa sa cuillère. Il n’en manquait plus beaucoup pour lui couper l’appétit qu’il avait pourtant d’ordinaire coriace. Pour l’instant, il reportait simplement d’avantage son attention sur les dires de ce Klypsène. Nobles corrompus, médecins, militaire… Cet homme savait des choses.
Azryel avait habitué le jeune homme aux phrases énigmatiques, à toujours chercher les faux-semblants et les sens implicites. Doucement, dans l’esprit de Veto, les nobles devenaient le maire ; les médecins, des prêtresses ; les militaires, ses supérieurs...
Il se trouvait au milieu des toiles d’araignées et se posaient une question : devait-il être insecte ou arachnide ? Il ne voulait pas être la proie. Mais s’il choisissait d’être prédateur, serait-il tisseur ou chasseur ? Sans doute était-il trop tôt pour le deuxième choix. Le premier était fait en tout cas.

Gardif était un émissaire ; des Prêtresses, sans nul doute. Malgré cette mise en garde d’Enteri, il le suivrait. C’était le second pas, celui pour ne pas être dévoré. Le premier avait été obligé par le major au banquet. Le retour en arrière était celui de l’insecte et il ne se laisserait pas dévorer.

La cuillère se remplit à nouveau et le repas se termina en silence après que l’addition eut été demandée. Seul un tintement sonore précéda leur départ de la table. Le couteau avait chu au sol. En le ramassant, un papier resta discret dans la main du garde qui rejoignit sir Klypsène.

*

La porte s’ouvrit sur la ruelle. Veto passa en premier grâce devant la politesse du noble. Dehors, le spectacle était déconcertant.
Gardif rangeait son arme résigné devant une fillette en pleure et une petite louve blanche. Le jeune Havelle resta perplexe et puis le caporal-chef expliqua la situation. Quelques échanges de mondanités et d’excuses se firent. Un petit palabre se fit entre les quatre protagonistes qui se retrouvaient par hasard, par un coup du Sort. La fillette eut alors le temps de se calmer, l’animal fut remit en confiance et les intentions de chacun furent exposées.
Le militaire en service annonça qu’il ferait un tour de ronde sur la place de la mairie avant de les rejoindre dans quelques instants.
Veto proposa à Chrysallia de les suivre, Enteri et lui et prirent le chemin de la placette dont il avait parlée.

*

-Bien ! Je vous propose un petit échauffement sous forme d’échange de mouvements de base. Nous pourrons ainsi faire le point sur nos différences et peut-être nos complémentarités. Chrysallia. J’ai cru voir une flute en votre possession. Pourriez-vous nous donnez le tempo ? Cela vous permettra de vous exercer en prévision de ce soir, qu’en pensez-vous ?

Il souriait. Depuis cinq ans passés en caserne et au contact de personnes haut placées, le jeune Havelle avait appris à cacher ses sentiments. Même s’il avait été troublé par le discours de son partenaire du moment à table, il n’en montrait rien. De même que sa perplexité tantôt apparente à table avait laissé place sur son visage à la concentration joviale. Pourtant, elle était toujours là.

Veto improvisa une sorte de salut, s’inspirant de celui que lui avait rendu le noble au début du repas. Se tournant de côté, il posa un poing sur son cœur qu’il ouvrit doucement dans un geste ample du bras pour tendre une main en position d’offrande vers son faux adversaire. L’autre poing se tenait dans son dos. Il souriait d’un air étonnement digne pour quelqu’un de sa classe sociale. Décidemment, il n’était pas un garde ordinaire malgré ses efforts.

Après un temps laissé à son homologue pour lui répondre, il baissa son bras et avala rapidement la courte distance qui les séparait. Sa première attaque fut molle et sans grande menace. Il valait mieux commencer doucement que trop fort. C’était un coup de paume destiné au menton de son adversaire qui l’esquiva sans mal. Veto nota sa réaction naturelle. Son sourire disparut mais pas son entrain. Il se concentrait d’avantage.
Le garde se retourna, destinant à son adversaire son coude gauche. Suivit un genou puis le pied qui repoussa enfin l’adversaire doucement en s’appuyant sur une défense toujours présente.

Le jouet du Sort accélérait doucement. Il continuerait progressivement d’augmenter le niveau. Pour l’instant, il n’avait aucun souci à se faire. La marge entre ce qu’il venait de démontrer et ce qu’Enteri semblait être capable de supportait était grande.

L’assaut reprit. Les défauts étaient nombreux dans la garde du soldat, comme des invitations. Soudain, des murmures flottèrent doucement au milieu des coups. D’abord des propositions d’enchainements, puis des demandes de conseils sur certains mouvements. Et enfin, plus bas, lors des saisies surtout, des questions moins banales transpercèrent, loin des oreilles de Chrysallia.

« Pourquoi vous intéresser tant à Gardif s’il vous effraie ? », « Pourquoi vous intéresser à moi ? », « Qu’est-ce que cet établissement ? », « Que savez-vous réellement ? »… Entre manchettes, crochet et tranchant de la main, le regard pénétrant du cimmérien ne lâchaient plus celui du noble.

-Qui êtes-vous réellement ?

Soudain, Veto esquiva de justesse un coup qu’il n’avait pas vu venir. Il perdait en concentration. À moins que... Ses sourcils se froncèrent et il prit un peu de distance. Son souffle s’était accéléré comme son rythme cardiaque. L’adrénaline bandait ses muscles et excitait son cerveau. Il sourit et reprit son souffle.

-Qu’en penses-tu Chrysallia ? Sommes-nous un bon thème d’improvisation musicale ? Moi, je trouve que tu es très douée. Enfin, je ne suis qu’un néophyte !

Il s’étira et fit quelques mouvements d’assouplissement en écoutant la réponse de leur spectatrice toujours un magnifique sourire aux lèvres. Le tutoiement s’était imposé. L’enivrement du combat le gagnait au détriment des bonnes manières.

Dans un petit sautillement, il annonça tant à l’intention l’une que de l’autre : « Bien ! On reprend ? ».

Il refit son salut comme précédemment mais cette fois il resta stoïque et attendit. Les rôles seraient inversés pour cette manche. Il voulait voir jusqu’où irait l’autre. Le coup de tout à l’heure n’avait rien à voir avec les précédents.
Le noble en cachait plus que ce à quoi Veto s’attendait. Il s’apprêtait à mettre le holà avant longtemps. Gardif arrivait juste à temps pour assister au plus intéressant.

Veto souriait de plus belle, les yeux pétillants et malins.

C'était le moment. En sortant de l'auberge, Enteri et son ami virent Chrysallia aux côtés d'une louve, hurlant qu'il ne fallait pas la tuer. Par la même occasion, elle occupait Gardif - qui d'ailleurs devait se sentir gêné d'une telle scène - et Veto entra dans l'échange. Pendant une poignée de secondes, il était seul. Le ladrini s'approcha d'un tonneau. Il observait de loin la scène, posa et s'en alla auprès des protagonistes d'un pas hésitant : la louve était-elle réellement inoffensive ?
Ils repartirent ensuite et le soldat Havelle les mena directement au lieu d'entraînement.

«Un échauffement ? D'accord mais doucement je vous prie, j'ai peur de...»

Il s'arrêta en observant le salut du soldat en face de lui et pendant un instant, il crut avoir devant son visage une bien plus grande menace que le simple garde qu'il avait rencontré plus tôt. Un combat ? Mais foutredieu il n'avait aucune chance ! Bon, il ferait de son mieux. À son tour il étendit son bras droit sur le côté comme une aile qui se déploie en parallèle de laquelle son pied droit avait suivi le mouvement. Cependant qu'il se baissa doucement, son bras aquilin décrivit un demi-cercle et sa jambe droite croisa l'autre en achevant sa lente course sur la pointe du pied ; discrètement, le bras gauche s'était déporté dans son dos. Un salut royal. Tous deux avaient reflété une dignité gestuelle autrement supérieure à ce que présageaient leurs acteurs.
Très vite, le premier coup fusa et ce n'est qu'en trébuchant que le noble parvint à l'éviter ; assurément il lui faudrait de l'entraînement... Dans un mouvement de gêne, le même noble se gratta la nuque si bien que son bras et son avant-bras formèrent une protection contre le coup de coude du soldat ; encore un joli coup de chance. Il recula, peut-être de peur, et évita ainsi de justesse le coup de genoux toutefois la dernière attaque était de trop : le coup de pied le repoussa en le touchant sous le plexus solaire, c'est pourquoi la douleur fut presque nulle.

Toutefois, c'est en reculant qu'Enteri perçut le groupe d'acrobate précédent. Soucieux du spectacle qu'il offrirait, il croisa les bras et lentement leur fit prendre position : ses jambes étaient fléchies au point qu'une vingtaine de centimètre seulement séparait de ses genoux le sol qu'il caressait d'un doigt de sa main gauche. Le bras droit, cassé, remontait quant à lui au-dessus de sa tête comme pour lui permettre à la fois d'attaquer d'un coup de paume ou bien de retomber en arrière pour s'aider du sol. Il murmura : Un seul mouvement.
Le premier assaut fut dévié par un coup qu'il ignorait s'appeler queixada, puis enchaînant avec fluidité il sauta en imitant de façon presque parfaite l'evergado de l'acrobate en face de lui. Ce faisant, il perdit également de vue son modèle et n'eut d'autre choix que d'improviser. Ce n'était pas un combat. Il se releva en se protégeant d'un large mouvement circulaire du bras gauche tandis que le bras droit préparait la même attaque que Veto lui avait préparé au tout début de leur entraînement, de sorte à faire une diversion pour mieux placer un coup de paume au ventre. De nouveau il se baissa en accomplissant un ample balayage, trop pour être efficace, assez pour donner du spectacle. Jamais il n'utilisa une brèche dans la défense de son coéquipier pour attaquer mais toujours pour enchaîner et il ne marqua pas un seul instant de pause.
Après avoir effectué un coup du tranchant de la main, il proposa son bras et tandis que des clés et contre-clés s'enchaînèrent sans de donner de vainqueur, il s'était offert la liberté de continuer à discuter, glissant quelques mots déliés : «Bien Commun », «Vous êtes Juste », «Tenez bon ». La troisième réplique ne fut cependant pas la réponse à la troisième question puisqu'à ce moment Veto avait parfaitement maîtrisé le bras de l'acrobate qui, subito presto, sauta de sorte à empoigner de ses jambes le cou de son camarade. Grâce à la gravité, et sûrement avec la coopération de son ami, Enteri fit basculer son camarade avec une certaine délicatesse afin que la chute puisse leur permettre de se relever aussitôt, toujours à l'aide de mouvements fluides.
Le noble n'avait toujours pas l'avantage physique mais toutes ces questions faisait se disperser l'esprit du guerrier qu'il affrontait. Puis de nouveau ils repartaient avec force de manchettes, crochets et tranchants de la main. Jamais leurs regards ne se quittèrent. «Que savez-vous réellement ? » ; «Qui êtes-vous réellement ? » Alors sonna le kairos. Enteri s'avança, tenta un coup de coude droit qu'il savait perdu d'avance, utilisa l'élan obtenu pour feinter un coup de pied sauté en tournant sur lui-même, cassa littéralement son mouvement pour effectuer une gauche - ratant volontairement son objectif - qui lui permit de s'agenouiller ; là, il usa de la force de tous ses muscles pour se relever de la manière la plus brutale qui soit, visant un point résistant toutefois et ralentissant son attaque menaçante. Au final, il n'y eut qu'une redoutable rafale de vent sans aucun danger.
Il venait d'apprendre à maîtriser le pouvoir du vent.

«Mon nom est Enteri Klypsène, glissa-t-il à Veto Havelle, fils d'une avocate éliminée, fils d'un chevalier empoisonné et frère d'une patrie envenimée.»

Sa façon de le dire, clairement joviale fit passer sa présentation pour une discussion frivole aux yeux de quiconque les aurait écouté. Plusieurs passants étaient arrivés et pas un n'aurait su départager les deux jeunes hommes, ce qui à vrai dire était le but recherché. Ce n'était pas un combat.

«Je vois que nous avons des spectateurs... Bien, à ton tour de te calquer sur mon rythme !»

Sa dernière parade lors de leur prestation précédente était en réalité une erreur puisqu'il avait pris la main, cependant il ne l'avait fait que parce que son coéquipier s'était dispersé. Cette fois, il se focaliserait sur leur danse et sur rien d'autre. Il ne serait plus celui qui improvise mais celui qui propose des ouvertures et pour cela il devait attaquer. Heureusement pour lui, Enteri avait bien analysé les mouvements de Veto Havelle et ils étaient assez récents pour qu'il parvienne à s'en servir. Ses attaques seraient donc exactement les mêmes que celles qui avaient été dirigées contre lui juste auparavant. Le résultat, pour sûr serait étonnant. Et il commença par effectuer exactement le même salut que son compagnon.
Un premier coup de paume, peu vigoureux ; un coup de coude un peu fébrile, puis de genoux avec l'exacte même vitesse que celui qu'il avait subit ; crescendo des mouvements, lent et sans danger, pourtant très élégant. Une seule chose différait du premier combat, les yeux qu'arborait le noble. Ils ne reflétaient aucune combativité, comme s'ils observaient la scène en spectateur. Ils n'attendaient qu'une chose, une seule ; que son homologue s'impatiente. Soit il ne ferait rien de contraire à son rythme précédent, soit il le changeait brutalement.
Et le moment arriva finalement. Un coup qu'il ne pouvait intercepter. Et pourtant, de son côté était le vent. Il se prit l'attaque et fut violemment repoussé dans un flip flap qui s'acheva en un double salto tant l'élan avait été puissant. Immédiat fut son retour au combat. Cette fois, il utiliserait certains gestes de l'acrobate mais aussi et surtout ceux que lui montrait son coéquipier. À première vue, ses gestes pourraient sembler aléatoires cependant une certaine logique demeurait : Une attaque prompte, semblable à celles du soldat Havelle, frappait en premier suivie d'un mouvement circulaire, d'une esquive ou bien d'un mouvement de défense. Ce mouvement donnait un élan proportionnel à l'attaque qu'il subissait de sorte à enchaîner avec un mouvement plus ou moins complexe. Ce mouvement était principalement ample afin de donner du spectacle et offrait une ouverture à son camarade qu'il devait rapidement reconnaître. Plus la danse s'éternisait, plus il était confiant et plus la vitesse augmentait, lui donnant plus d'élan et offrant de plus larges ouvertures à son opposants et ainsi de suite. Schématiquement, le tour reposait sur la confiance que l'un accordait à l'autre et puisque celle-ci avait une importance croissante, elle augmentait également.
Peu importe combien ils pouvaient continuer, ils ne pouvaient plus faire de fausse note aussi sûr qu'un miroir reproduit fidèlement son image. La dernière appartiendrait d'ailleurs à Veto.
Heureusement que ses vêtements, légèrement amples, étaient en matières naturelles : il paraîtrait presque ne pas transpirer...

«Je crois... Que nous sommes prêts... Pour le concours... Huf...»