Le Miroir Déformant [PV Elerinna]

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• Cavaliers de S.: 5
• Nérozias: 6
• Gélovigiens: 3
• Ascans: 0
• Marins de N.: 4
• Civils: 15

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- Walter cherche de Preux chevaliers.
_ Raël veut des clients.
_ Deirdre a besoin d'employé!

Les Rumeurs

_ Il parait que des personnes hauts-placées seraient gravement malades.
_ Il parait que ça se bécotte "au bal de la Rose".
_ Il parait que des créanciers en sont après un des conseillers de Ridolbar.

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 Le Miroir Déformant [PV Elerinna]

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MessageSujet: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeDim 22 Fév - 18:23

Le Miroir Déformant


Umbriel. Ville ténébreuse et griffue, creusée, grattée dans les profondeurs. Les voix y sont des murmures et des échos, les autochtones des ombres et un peu de poussière. Roche et terre se mêlent et se joignent dans les parois, la lumière ne perce pas; elle danse fébrilement dans les flammes des torches.
Sur la place dite de l'Arbre Mort, une silhouette élancée surmontée d'un large couvre-chef cornu se tenait droite et sobre, les doigts croisés sur le bas du ventre, la tête légèrement inclinée en avant. Quelques personnages furtifs la contournaient, passant prestement sur cette place morne. Aucune brise pour agiter les débris et les restes d'essence – témoins d'une faible activité humaine – ni pour valser avec les étoffes.
La prêtresse de Kron avala difficilement sa salive.

           Elle s'était fourvoyée. Ou plutôt, elle s'était précipitée sans réfléchir. Partir à la recherche de Faust semblait être devenu un but ultime à ses yeux et à celui de son Dieu. Il lui avait fait comprendre que c'était tout ce qu'elle désirait et tout ce dont elle avait besoin, l'encourageant ainsi à croire qu'elle aurait son soutien absolu dans sa quête personnelle. Elle avait donc oublié toute autre préoccupation et le Myste Rouge s'était eclipsé dans son esprit, se dissipant comme un panache de fumée sur lequel on souffle. Ainsi avait-elle quitté on temple, montant à bord d'un convoi pour se rendre sur les terres sèches et noires de Phelgra, sans plus se demander si le nuage rouge était encore à craindre. Grave erreur.

           Elle avait le souffle court et une migraine permanente qui lui perçait les tempes; son essence d'ordinaire si fluide et fraîche, semblait ne plus circuler dans ses veines. Lorsqu'elle lui ordonnait de descendre et de suivre le cours de ses membres, elle semblait cogner dans son cerveau, lui glaçant l'esprit, et ses longs doigts se mettaient à trembler. Même le poids de son casque – un couvre chef ordinaire, à son sens – commençait sérieusement à lui peser sur les épaules. La Gorgoroth serra les dents et les poings, suffoquant un peu plus à chaque seconde qui passait.

          Quelques jours plus tôt, elle était encore à Ridolbar, cité maléfique et vicieuse au cœur de ce pays glauque qu'était Phelgra. Psyche y ressentait une sorte de dégoût et d'insécurité, ce qui n'était pas sans signification pour un personnage aussi croyant et fidèle à son Dieu. Elle avait placé sa « vie » entre les mains de Kron et lui faisait une confiance parfaite, aussi se sentir en danger était pour elle aussi nouveau qu'inquiétant en soi. Néanmoins, la rumeur qui l'avait poussée jusque là ne cessait de résonner dans sa tête, lui arrachant chaque fois un soupir de joie.
« Elerinna Lanetae, autrefois Grande Prêtresse de Kesha, serait morte et aurait ressuscité. Elerinna Lanetae serait en train de se rapprocher des Cavaliers de Sharna. »
Ah, les Cavaliers de Sharna. Quel monde lointain. Ce nom évoquait une sorte de charpie sanguinolente et des sourires bêtement carnassiers à celle qui avait pourtant fait partie de leurs rangs. Tous ses souvenirs étaient enveloppés d'une brume noire et lui rappelait aisément l'odeur du liquide vital sur l'humus ravagé. N'importe qui connaissant son histoire aurait songé que sa première vie avait été sa seule période de gloire mais jamais Psyche Corona n'aurait songé une seule seconde à une telle aberration. A cette époque, elle était puissante, dévouée et respectée mais elle vénérait le mauvais Dieu. Cela suffisait à la rendre méprisable à ses propres yeux.
Aussi misérable que son état actuel, faible et indolent.

          Tout Phelgra était épargné à part Umbriel, la ville sous-terraine alors pourquoi s'y rendre ? Psyche avait voyagé un peu plus d'une semaine à travers les immenses plaines cendreuses et labourrées de violence entre son Argyrei d'origine et Phelgra, et pas une seule fois le malaise qui l'avait saisie quelques mois auparavant était survenu. Elle n'y pensait plus, persuadée que le mal était désormais éradiqué. Bien fâcheusement pour elle, son enquête l'avait menée jusqu'ici, à Umbriel, là où les derniers panaches rougâtres du nuage malfaisant arrachaient encore leurs pouvoirs et leurs essences aux malheureux. La Gélovigienne n'avait évidemment pas pris la peine de se renseigner et en faisait maintenant les frais. Elle pestait silencieusement contre l'auteur inconnu du billet qu'elle avait reçu dans son auberge à Ridolbar, lui demandant de se rendre à la cité des profondeurs sans réellement se justifier. La lettre était solennelle et sérieuse et, encore épargnée par le mal dans la ville anarchiste, Psyche avait brièvement utilisé son don de vision pour en vérifier l'authenticité.

           Des visages pâles et froids – lui rappelant le sien – étaient apparus. Ils se faisaient face, murmuraient, semblaient se tenir à une distance respectable l'un de l'autre. Celui qui avait les traits les plus durs s'était tourné légèrement et, en un sursaut ravi, la prêtresse avait pu reconnaître Démégor l'Impérial, l'homme à la tête des Cavaliers. La prêtresse en avait vu assez. Un large sourire avait étiré ses lèvres sombres et elle avait mis fin à sa vision.
Encore ignorante du trouble qui l'attendait, elle avait alors accepté la requête de l'épître. Elle se tenait maintenant là, en évidence, les lèvres déformées par un rictus de souffrance constante, espérant de toute son âme que l'individu qu'elle s'apprêtait à rencontrer ne la ferait plus attendre encore trop longtemps. Cependant, même si la prêtresse commençait à se demander si cela en valait la peine – avec ses jambes fébriles et sa toux incontrôlable, elle n'était pas prête d'abandonner. La piste qu'elle suivait était glissante et sinueuse mais son instinct lui dictait de ne surtout pas la quitter.


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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeDim 22 Fév - 22:50

La pénombre enveloppait son corps maigre et blafard; Un sale goût de cendre lui brûlait la gorge dans l'obscurité pénétrante qui descendait abruptement et qui s'épaississait à mesure que l'abîme s'enfonçait dans la terre. Sur l'étroite sente qui se jetait dans les entrailles du monde, il y'avait peu de passage. Personne ne pénétrait à Umbriel de gaieté de cœur; C'était un refuge d'ombres fuligineuses, de voleurs ricanants, de crapules, de toute une tripotée de vermines et d'étrangetés bizarre qui faisaient peur, là-haut, à la surface, et qui préférait rester prostrée dans la morne tristesse souterraine plutôt que d'aller traîner leurs mauvaises savates et leur faces ravagées de douleur à la lueur d'un soleil qu'il peinait à regarder. On y trouvait tout ce qui se faisait de mieux en matière d'émanations sordides, de mercenaires plein de morgues et braillards, de commerçants vénaux, de canailles sans scrupule. Un vrai mausolée de misérables! Une cave à coquins amochés, à gorgoroths ricanant, à prisonniers enchaînes et muselés! On ne pouvait pas dire que ça respirait la joie de vivre; Ca empestait le dégueulasse.

Cette atmosphère de dégoût calfeutré, de bizarrerie vilaine glâçait Elerinna tandis qu'elle empruntait le sentier qui menait à Umbriel. Les ombres des parois rocheuses s'étalaient sur la roche comme des griffes, ou comme des lambeaux de cauchemars qu'on aurait laissé là. A les voir se jeter comme ça dans tous les recoins, comme si elles voulaient dissimuler quelque chose de honteux, l'imagination d'Elerinna s'emballait; les ténèbres s'animaient. Dans chaque coin d'ombre, il y'avait une histoire fantastique, un meurtre qui se dessinait, un crime qui se commettait. Tout un théâtre cruel et sanglant lui venait à a tête et lui chauffait la cervelle. A la fin, elle était pleine d'une morgue âcre qui lui remplissait tout le corps.

Sur le chemin, elle ne croisa personne, excepté un homme de petite taille, voutée, qui avançait en claudiquant et qui chantonnait des couplets inaudibles. Il avait le front ridé, la bouche large avec des lèvres quasi absentes, mais il était difficile de lui donner un âge; il avançait sans prêter la moindre attention à Elerinna qui le dévisageait fixement, jetant des regards plein de folies sur les parois humides. Lorsqu'il passa, il ne lui jeta pas un regard et continua sa route en claudiquant. La gorgorth aux yeux sombres ne croisa plus personne.

Le sentier finit par s'élargir; elle parvenait à la fin de son périple. Umbriel étalait devant elle sa face ravagée de misère grise, et faisait entendre sa complainte lancinante. Elle se glissa comme une ombre dans la cité cendreuse, tâchant de se fondre adroitement dans grisaille tenace de ce mausolée de misère; En marchant, elle songeait qu'elle était là, elle aussi, comme eux tous, avec son haleine de mégère, son parfum de mort et de tristesse et qu'elle leur ressemblait, à eux qui lui inspiraient tant d'effroi. Elle était une ombre parmi les vivants, que l'on n'aimait pas beaucoup voir, et qui trainait avec elle son lot de malheurs inavoués. Elle foulait une terre d'infortune et de détresse et exhalait avec elle tout ce que le monde avait de souffrance.

Rapidement, Elerinna aborda quelques passants, demanda son chemin; elle s'informa de la façon la plus courte de rejoindre la place de l'arbre Mort. On le lui indiqua avec des regards furtifs, des faces regimbantes et austères; elle se perdit deux fois malgré tout. Elle y parvint par une longue allée qui traversait sinueusement la cité sombre. Au centre, un arbre cadavérique jetait vers la voûte ses rameaux secs qui s'élevaient comme des griffes dans l'air encore rouge du mal qui avait étreint la province. De part et d'autres, on passait sans s'attarder, comme pour fuir quelque chose, ou en parlant très fort avec des accents rauques. Elerinna détailla ladite place.

Elle y cherchait quelqu'un en particulier. Une gorgoroth, elle aussi, au signalement tout à fait particulier, et dont elle avait eu vent des agissements. Ses agents lui avaient rapporté qu'elle recherchait activement des informations autour d'Elerinna Lanetae -c'est à dire elle-même-, et des cavaliers de Sharna, dans un but encore tout à fait obscur et qu'il avait été impossible d'éclaircir. La chose n'était pas banale. Dans un premier temps, Elerinna avait amassé le plus d'informations qu'elle avait pu réunir; elle avait ainsi appris que cette dernière se nommait Psyche Corona, et qu'elle était prêtresse de Kron. Elle appris qu'elle était fort dévote, très zélée, du moins, et qu'elle avait une apparence tout à fait singulière. ll lui fut impossible d'en savoir davantage.

Mue par la curiosité et par un intérêt grandissant pour la gorgoroth, elle avait décidé de la rencontrer elle-même, bien que cela présentât un danger évident, et qu'il eut été plus prudent de l'espionner davantage. On essayât de la dissuader; on fit tout ce qu'il était nécessaire de faire afin de l'empêcher de mener son projet à termes. Elle tint bon, arguant qu'elle userait de tous les artifices dont elle disposait afin de confondre cette dernière, et refusa toute contestation possible.
Ainsi, elle avait contacté la gorgoroth par l'intermédiaire d'un agent à son compte et s'était faite passer pour un indicateur, affirmant posséder un certains nombre d'information qu'elle souhaitait ardemment connaitre. Un rendez-vous fut fixé à Umbriel dans les plus bref délais; Là était toute l'histoire.

Elerinna balaya la petite place sombre et terne du regard. La brume rouge obstruait son regard; elle distinguait les choses à travers un voile, et ne distinguait que les formes. Les détails lui échappaient. Au bout d'un moment cependant, elle remarqua une silhouette, immobile près de l'arbre. Elle s'approcha; l'arbre tordait toujours ses branches filiformes. A quelque distance, la silhouette se précisa. C'était une femme, d'allure élégante et gracieuse, les bras longs et déliés, svelte, presque fragile. Son visage avait la pâleur des mort; sur son crâne, dissimulant les yeux sous d'épaisses lanières de cuirs sanglées à l'arrière de sa tête, un couvre-chef biscornu lançait en l'air des sortes de cornes métalliques qui donnait ce visage un air bizarrement cruel, quoique d'un charme glacial et crue.

D'abord, Elerinna l'observa de loin. Son allure avait quelque chose qui fascinait, comme ces choses inquiétantes qui ont le charme de l'étrange, l'esthétique des choses secrètes. Elle bougeait peu, n'exprimait rien dans son attitude. Elle était là, très simplement, et attendait; La gorgoroth aux yeux sombres s'approcha de son alter égo. Comme à elle-même, elle lui trouva le teint cireux, et comme un parfum de vie éteinte. Elle se retrouva dans cette posture, dans cette face blême, livide, qu'elle devinait sous le masque, dans cette peau morte et dans cette poitrine où plus rien ne battait. Elle s'arrêta à sa hauteur. A l'endroit où son coeur s'emballait naguère tant de fois, Elerinna ressentait une sorte de sympathie lointaine envers la gorgoroth.

- Me voilà, annonça-t-elle simplement. Vous m'attendez depuis longtemps?

Puis, après un bref silence, elle ajouta d'une voix grave:

-D'ailleurs, vous ne voulez pas que nous nous installions ailleurs, hein ? Je sais bien qu'Umbriel n'est pas très accueillant mais... il doit bien y avoir un endroit ou deux qui soient plus secrets que cette vilaine place. Et puis nous serions assis. Ce serait plus pratique pour parler. Car nous avons beaucoup de choses à nous dire, n'est-ce pas?

Dans les ténèbres d'Umbriel, le myste rouge continuait de jeter dans l'air des frimas ôcres qui s'effilochait dans l'air. L'obscurité oppressante des parois humides projetaient sur la petite place des ombres fantastiques.
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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeMar 24 Fév - 17:45

C'est en tentant de déglutir que la prêtresse ressentit l'épaisseur gluante de la mucosité qui lui prenait la gorge et les sinus. Elle eut une grimace de douleur dégoûtée en essayant de déboucher ses canaux respiratoires alors que la substance lui griffait le fond de la gorge. Elle toussa et sentit le fluide projeté sous sa langue dans un crachat vomitif. Un hoquet déchirant s'échappa de ses poumons avant qu'ils n'expulsent le mucus, directement dans sa propre main. Psyche put sentir le sel sur ses lèvres sombres et les essuya frénétiquement tout en cherchant quelque chose avec quoi nettoyer sa paume livide. Elle finit par la secouer vivement et à se débarrasser du reste sur les pans de sa jupe, complètement écoeurée.

           Peu après cette désagréable expérience, la Gorgoroth perçut les bruits de pas d'une figure lente et furtive mais qu'elle devina se diriger dans sa direction. Elle tourna sensiblement la tête vers l'auteur du son, comme pour mieux tendre l'oreille. Sa migraine avait anéanti presque entièrement cette espèce de lucidité et de clairvoyance avec lesquelles son instinct paliait sa cécité, d'autant que le malaise persistant dû au Myste Rouge intensifiait la sensation d'aliénation, d'éloignement que son état de mort-vivante lui procurait déjà. A cet instant précis, Gorgoroth aveugle et malade, Psyche était l'être le plus faible et misérable du monde.

           Elle espéra que celui ou celle qui s'approchait était l'informateur qu'elle attendait et surtout, si ce n'était pas le cas, qu'on ne lui voudrait aucun mal.
Une voix féminine et neutre, un peu vide, résonna enfin à ses oreilles. La Gélovigienne tenta d'orienter son chef vers la femme qui venait de l'aborder mais il était évident que tous ses gestes étaient fébriles et approximatifs. Elle mit un certain temps à comprendre le sens des mots, perdue dans son mal de crâne. Sa voix d'ordinaire sûre et noble se fit hésitante, vibrante sur la corde de ses vertiges et teintée d'une immonde note grasse et glaireuse.

« Oui je... Je suis d'accord. Je suppose. Je... Je vous suis. »


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Dernière édition par Psyche Corona le Jeu 7 Mai - 20:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeMar 10 Mar - 0:06

Elle semblait mal à l'aise. Ses gestes étaient empreint d'une maladresse anxieuse que trahissaient ses épaules crispées sous la robe, et les petits tressaillements de ses mains. Elerinna la regardait, la contemplait même, fascinée. Elle devinait, sous la peau blême, dans cette poitrine qui ne respirait plus, une vie piégée, une existence déjà morte. Elle ressentait profondément cette assèchement des sens, cette fourbe sensation de se mouvoir sans vivre, d'exister sans être, d'être quelqu'un à l'intérieur de quelqu'un, d'être à la fois indéfini et rigidifiée dans la mort. Malgré tout, elle ne pouvait s'empêcher de trouver une certaine beauté à cette pâleur marmoréenne, à ces membres déliés et souples, quoique désespérément froids, à cette sorte de réminiscence de ce qui avait vécu, et qui était désormais comme un spectre. Elerinna trouvait à Psyché un charme vertigineux et morbide.

Elle l'entraina à travers Umbriel. Dans les ruelles qui s'entortillaient à n'en plus finir, recouverte d'une nappe d'ombre et tourbillonnante d'une poussière noire, Elerinna s'employa à badiner du mieux qu'elle le put; Alors qu'elle marchait dans la cité de la douleur, elle tâcha d'être agréable, de babiller négligemment comme il lui arrivait de le faire naguère, en ce temps si lointain où chaque respiration la vivifiait, et où son corps était un réceptacle infinie de sensations exquises. Mais le coeur n'y était pas, ou peu; Elle était amère. Les mots ne venaient pas, et quand ils venaient, ils exhalaient ce parfum âcre qui entourent les choses mortes et souffreteuses. Parfois, entre deux tirades, elle s'enfermait dans un mutisme obcur. Elle fixait la chaussée défoncée d'un regard vide, les yeux mornes, triste, perdue dans un écrin de secrètes pensées. Elle songeait à ce qu'eut été sa vie si elle n'était pas morte; elle ne pouvait s'empêcher d'avoir honte de ce qu'elle était, et craignait le jugement de son interlocutrice: Elle se trouvait indigne de sa considération et aucun babillage n'avait de pouvoir sur ce douloureux sentiment.
A l'angle de la rue des maraudeurs et de l'avenue des cinq généraux, Elerinna aperçut un établissement qui tirait moins mauvaise mine que ses congénères: Il s'agissait d'une vilaine batisse, faite tout d'un bloc, aux larges pierres et au toit de tuile noire qui rutilait sombrement dans la pénombre. On y entrait par une large porte au linteau noirci, surmonté d'une insigne illisible mais où il était encore possible de de deviner quelques lettres. Des voix bruyantes s'en échappaient, ainsi qu'une forte odeur de bois brûlé, de soupe aux chous, et de bière. Elerinna invita Psyché à la suivre; les deux gorgoroths y pénétrèrent discrètement.

D'un regard, elle embrassa la salle. Une tripotée de vermine y croupissait, buvant à tour de bras, s'encanaillant dans le gosier des bolées entière d'alcool sirupeux et de viandes marinées, braillant à tout va, ou cuvant silencieusement, l'air hagard, la tête rentrée dans la paume des mains et engoncée dans le cou bringuebalant. Tout ce beau monde était regroupé autour de la cheminée dans laquelle brûlait un feu vif dont les flammes dévoraient avidement le bois, et qui projetaient dans les regards des brasiers inquiétants. Au mur, le torchis s'écaillait par endroit, et jaunissait à d'autres; le désordre allait de pair avec la canaille qui ricanait.

Personne ne prêta attentions à leur arrivée; l'aubergiste leur jeta à peine un regard en grognant. C'était un gros homme, au visage rubicond qui marchait en se dandinant, et qui tenait toujours à la main un torchon sale, avec lequel il essuyait négligemment les tables vides, gorgées de boissons et de sauces. Il avait une sale trogne, la peau de son visage était flasque et dessinnait des sortes de poches sous ses yeux et pendait hideusement sous son menton; son nez était immense, violacé, parcourru par tout un réseau de petite veine bleu et surmonté par un furoncle; une touffe de petits poils blancs s'échappaient de ses narines. Il parlait d'une voix forte et gaillarde en roulant ses petits yeux dans leurs orbites, avec des allures effarés. Mais son regard ne trompait pas: vif et alerte, il guettait la moindre entourloupe. Il avait l'habitude des saloperies et savait les reconnaitre au premier coup d'oeil. C'était un habitué des coups fourrés et des mauvaises farces, un à qui on ne la fait pas, pardi! Un brave parmi les pochtrons.

Elerinna choisit une petite table, un peu à l'écart. Lorsqu'elles y furent installés elle engagea à nouveau la conversation; l'aubergiste les regardait en chien de faïence, derrière son comptoire, avec ces petits yeux agiles qui furetaient dans tous les sens et qui cherchaient à les jauger toutes les deux:

-Bon, et bien maintenant que nous sommes installées, dit-elle un peu abruptement et d'une voix rauque, j'imagine que nous avons beaucoup de choses à nous dire n'est-ce pas?

En parlant, elle détaillait le visage de son interlocutrice, qu'éclairait follement la lueur du feu. Ce visage sans oeil la fascinait; elle essayait de deviner ce qui se cachait sous les lanières de cuir, et émettait les plus folles hypothèses; elle songeait même qu'elle avait peut-être en face d'elle un de ces fameux oracle, un de ceux dont parlait les légendes et qui les décrivaient aveugles mais en proie à des visions sauvages et des fulgurances d'avenir.

-J'ai entendu dire, continua-t-elle malgré sa fascination, que vous recherchiez activement des informations sur les cavaliers. C'est bien cela?

Elle s'interrompit brusquement, puis reprit, presque aussitôt:

-Et il se trouve que je pourrai bien vous apprendre quelques petites choses sur eux. Ou, en tout cas, que je sois en mesure de vous fournir quelques pistes. Bien entendu, il est tout à fait possible que je ne possède pas l'information que vous cherchez. Cependant... Je possède quelques contacts...

Au fur et à mesure, elle s'était animée. Dans la conversation, elle avait laissé libre cours à sa loghorée, s'était faite plus vive, plus pressnte; parler la distryer. Elle ne songeait plus à ce qu'elle était, aux sentiments plein d'amertume qu'elle nourrissait envers elle-même et qui lui dévorait le coeur très lentement, en le suçotant, en se délectant de son fiel et de sa souffrance. Tout d'un coup, cela devenait comme un jeu, un jeu merveilleusement distrayant, et dont elle maitrisait à peu près tout.

- Enfin quoiqu'il en soit, reprit elle vivement, pour cela, il faut que vous me disiez ce que vous recherchez. Je ne vous demande pas pourquoi -même si cela m’intéresse-, car il est probable que vous vouliez garder cela pour vous. Et c'est tout naturel bien entendu, c'est tout naturel! Mais que recherchez-vous qui nécessite une rencontre à Umbriel, hein? Avouez tout de même: c'est intriguant! Ce n'est pas ici que l'on fait l'on fait de vieux os si on peut éviter...

Et elle la dévorait des yeux en parlant, elle la jaugeait du regard. Elle cherchait à percer le mystère de cette prêtresse qu'elle trouvait férocement belle, dans la pénombre, et dont la singularité avait éveillé en elle une curiosité avide. Elle avait tout à fait oublié la mort et la douleur, désormais; et l'aubergiste les regardait toujours du coin de l'oeil, de son coin d'ombre, avec ses petits yeux fous et sa large bouche au milieu de ses formidables joues.
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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeLun 16 Mar - 20:41

Un misérable grondement guttural. C'était le seul son que la prêtresse semblait capable de produire. Ce fut le seul son qu'elle parvint à faire alors qu'elle voulait s'excuser de son indolence. La femme qui venait de l'aborder se mit en marche et Psyche s'empressa d'un pas maladroit de prendre sa suite, lui collant aux talons pour ne pas la perdre. En temp normal, lorsqu'elle était guidée par un accompagnateur, la mort-vivante laissait son instinct donner aux choses les formes nébuleuses de leurs essences et, en communion avec son environnement, semblait remédier parfaitement à sa cécité. Ici, sous la nappe de particules rougeoyantes du Myste Rouge, Psyche était le plus aveugle des êtres vivants et sa condition naturelle de Gorgoroth ne la protégeait plus derrière une toile de soie mais la retenait avec des bras griffus, l'immobilisait en lui perçant la cervelle. Son allure était gauche et trahissait avec pathétisme sa détresse. Elle se pressait dans les pas de son guide, tendait quelques fois une main fébrile pour s'assurer qu'elle était encore là. On aurait pu croire qu'elle était son sous-fifre, à trotter derrière elle, mendiant désespéremment pour un peu d'attention mais sans oser pénétrer son champ de vision. L'informatrice allait avec rythme et grâce et tentait parfois sa chance à engager une conversation de quelques commentaires futiles mais ne recevait jamais qu'un hochement de tête entendu ou un bref mot imbibé de glaire, soufflé comme on souffle sa dernière volonté.

           En entrant dans la taverne, la prêtresse fut prise d'une nausée difficilement supportable tant les odeurs qu'elle ne pouvait même pas ressentir l'agressèrent. Elle s'imaginait leur âcreté, leur puanteur, ses narines pourtant insensibles se faisaient assaillir de miasmes dont son esprit seul était à l'origine. La pauvre était en pleine hallucination, en proie à une telle angoisse qu'elle intensifiait elle-même ses vertiges. Elle se colla à son accompagnatrice, terrorisée à l'idée de la perdre, et, au moment de s'installer, se laissa tomber sur la chaise qui faisait face à celle de la meneuse. Ses mains tremblantes plongèrent entre ses cuisses serrées, les bras oppressant ainsi son buste immobile, les épaules hautes, lui donnant une allure de grande frileuse. La voix monocorde et distante de l'informatrice parvint à ses oreilles affaiblies après un long silence et Psyche se recroquevilla d'avantage.

           « Certainement... souffla-t-elle en réponse à la question peut-être rhétorique de l'autre, sans vraiment souhaiter être entendue. L'aveugle hochait la tête ici et là, les mots se noyaient dans un torrent tumultueux dans sa tête, des vagues nauséeuses s'éclataient contre les rochers pointus du mal de crâne persistant qui la dévorait de l'intérieur. Elle avait du mal à suivre et, contrairement à ce à quoi on aurait pu s'attendre, ne montra aucun signe de réjouissement. Quand un silence de plusieurs secondes survint, lui indiquant que le discours de sa compagne avait prit fin, elle tenta de rassembler les mots importants qu'elle était parvenue à comprendre et tenta une réponse après s'être râclée la gorge dans un rugissement écoueuré. Tout a commencé lorsque j'ai entendu cette rumeur... Selon laquelle Elerinna Lanetae serait revenue à la vie... Et se serait rapprochée des Cavaliers de Sharna. Le fait est que... J'aimerais retrouver... Quelqu'un. Un Cavalier. Et j'aimerais savoir... J'aimerais en savoir plus sur leur situation actuelle... Je ne veux pas prendre de risques inutiles... Elle grimaça en sentant une forte envie de régurgiter le contenu pourtant inexistant de son estomac lui prendre l'oesophage. Portant une main à sa bouche, elle s'éforça de se contenir. Je... Je me demande quels projets ils peuvent avoir. Elle était en train d'en dévoiler beaucoup et se mettait sûrement en danger à clamer haut et fort qu'elle cherchait à fouiner dans les affaires des Lanetae et des Cavaliers de Sharna... Mais avec ce malaise insoutenable qui lui donnait à chaque seconde la sensation qu'elle allait mourir une seconde fois – et pour de bon – la Gorgoroth ne pensait qu'à en finir. »


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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeSam 4 Avr - 0:12

L'aubergiste, dans son coin, avait cessé de regarder les deux gorgorths avec ses regards en chien de faïence. Il s'était tourné du côté des habitués et braillaient à nouveau avec eux, riant beaucoup, ses fortes tranches de rigolades soulevant son énorme poitrine avec un bruit de cailloux broyés. Lorsqu'il n'en pouvait plus de rire, il s'étouffait à moitié, enfouissait son menton violacé dans son cou, et essayait de dissimuler son trouble; mais il lui était impossible de le contenir plus longtemps et, râlant à moitié, il gesticulait en se frappant le thorax, et finissait par reprendre ses esprits.
Psyche, quant à elle, semblait intimidée. Ses joues étaient encore plus pâles que tout à l'heure. Lorsque ses lèvres se retroussaient, elles décrivaient une petite moue en découvrant ses dents très blanches, une moue qui traduisait une gêne ou une timidité, somme toute très charmante, mais qu'Elerinna ne lui aurait pas soupçonnée. Elle s'était toujours représentée son interlocutrice dotée d'un charisme écrasant, d'une froideur impériale qui confinait à l’inaccessible et à l'absolu. Elle l'imaginait sêche, jalouse, d'une morgue âcre et brutale, mais d'une incroyable vivacité et d'une inflexible volonté.
Etrangement, et alors même qu'il était tout à fait inopportun que cela se produisît, Elerinna sentit naître en elle une sympathie sincère envers la Gorgoroth. Sa condition évoquait en elle des chaos encore nouveau, des douleurs tenaces et muettes, des souffrances sombres qui ne s'exprimaient pas, mais qui croupissaient dans sa poitrine désormais vide. Elles partageaient toutes deux une sorte de mystère tragique, de secrets plein d'une fatalité invisible mais qui se respirait à plein nez, comme une lourde effluve, et qu'il était impossible d'oublier tout à fait. Dans leur corps, c'était la nuit, le grand vide, le chaos, l'indescriptible néant; mais elles demeuraient en vie, malgré tout, malgré l'absurde qu'il y'à a vivre sans âme et privé de sensations.
Quant à ses questionnements, il ne la surprirent guère, mais ne lui apprirent rien. C'étaient des propos, somme toutes assez généralistes et qui contournaient en quelque sorte le problème, c'est à dire tout ce qui concernait ses intentions une fois en possession de ces informations, en admettant qu'elle ne lui eut rien caché.

- Vraiment? L'interrogea-t-elle enfin avec un long regard scrutateur. Tout cela est est confus si vous me permettez. Mais je crois avoir compris l'essentiel: vous recherchez quelqu'un, et vous pensez qu'Elerinna Lanetae pourrait vous y aider, n'est-ce pas?

Vraiment, Psyché ne paraissait pas à son aise. Elerinna prenait un plaisir fou à la regarder hésiter, comme prise en faute, avec ses petites épaules qui tressaillaient et ses longues mains pâles serrées contre elle. Son long cou blanc se détachait nettement dans l'obscurité sale, surmontée de son visage de spectre sensuel et affaibli. Elle poursuivit néanmoins; sans se presser:

- Et bien, j'imagine que ladite Elerinna est prête à vous aider, il est bien évident que je ne serai pas ici dans le cas contraire. Néanmoins... Quelle garantie nous offrez-vous? Qu'est-ce qui nous assure que vous n'êtes pas vendus aux mains de l'ennemi, hein?

Puis, elle éclata de rire. Psyché avait certainement raté un ou deux battements du coeur qu'elle n'avait plus; néanmoins son visage n'avait rien trahi. Elerinna avait cru remarquer, cependant, un frémissement des lèvres, une tension subtil dans les épaules, un changement d'attitude.

-Allons allons! Rassurez-vous, reprit-elle guillerette, heureuse de son petit effet comme peuvent l'être certaines âme malades qui cherchent à se distraire par tous les moyens, il y'a toutes les raisons de croire qu'Elerinna est prête à coopérer! Tenez. Les cavaliers sont en ce moment même en train de prépare la guerre à ses côtés. Ils mobilisent leur force afin de partir en campagne, et ce vieux Démégor a décidé d'engager toutes ses troupes dans la bataille et de soutenir les Lanetae. Quant à Elerinna, je dirai que je suis la plus digne de ces représentantes et que je suis ici sur son ordre. Il y'a donc tous lieux de croire qu'elle est encore bien vivante en effet...
Prenez cela .. Je ne sais pas moi...


Elle eut une moue agacée, claqua des doigts de la main droite, puis lâcha:

-Prenez cela comme un présent, comme une sorte de marque de confiance. Ayez simplement conscience qu'Elerinna prend un certains risque en vous transmettant cette information dans un lieu si peu sur. Alors, avant d'aller plus loin, dites m'en plus. Vous recherchez quelqu'un, très bien: qui donc? Et pour quel motif ? Cet individu a-t-il un rapport avec ladite Elerinna, ou lui est-elle tout à fait étrangère? Et quant à vous, où avez vous appris tout cela? Comprenez bien que, de notre côté, nous devons prendre toutes les précautions nécessaire. Beaucoup souhaitent sa mort, et la guerre qui se prépare est un terrain tout ce qu'il y'a de plus propice à un assassinat en règle.
Ceci dit, je suis disposée à croire que vous ne lui voulez pas de mal. Alors, tâchons d'être utile l'une à l'autre, d'accord? Je suis certaine qu'avec un peu de bonne volonté, nous retrouverons celui que vous cherchez. En échange, je ne vous demanderai que quelques informations. Cela parait-il correct?


Accoudée à la table, elle considérait Psyché avec une moue un peu  boudeuse tout en éructant ces fadaises avec un ton d'officiel et une morgue cynique. Il lui tardait d'en finir avec ces salamalecs et d'aller droit au but. La gorgorth qui lui faisait face la fascinait plus qu'elle ne se l'avouait, et elle ne dissimulait son trouble qu'avec peine.
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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeMer 6 Mai - 19:43

Ses sinus encombrés sifflaient de manière régulière, s'accordant aux bourdonnements de sa cervelle meurtrie. Dans sa gorge pourtant aseptisée de nature, le fluide gras et collant de sa faiblesse retenait ses mots. Jamais Psyche Corona n'avait été malade. Pas une fois, pas un rhume. De ses deux vies, cela n'était jamais arrivé. Ici, figée, les mains enfouies, la tête tombante, les épaules hautes, elle commençait à comprendre ce que l'on entendait par « être mourrant » ; elle se sentait fondre, se glacer, fondre de nouveau et chacun de ses gestes lui coûtaient, et ses poumons immobiles se remplissaient de poussière, et ses tempes blanches semblaient brûler comme l'acide. Elle se croyait dans un Enfer des sens, agressée par toutes ces voix et ces odeurs insupportables et tout à fait imaginaires. Le flot de parole de son accompagnatrice semblait être la seule douceur, la seule caresse au cours de cette session de torture. Alors qu'un frisson parcourait son échine, la mort-vivante tenta de se calmer un instant et de se concentrer à tout prix sur les mots de son interlocutrice. Pour cela, elle abandonna tous ses autres sens et se força à rentrer dans une certaine langueur. En temps normal, c'était une démarche agréable, c'était même en réalité son état naturel et s'en extirper était le vrai combat, mais le Myste Rouge semblait plonger profond en elle et lacérer tout ce qui faisait d'elle une Gorgoroth. C'est en balançant la tête de droite à gauche de manière quasi-imperceptible et en se focalisant sur sa foi et la présence de son Dieu qu'elle parvint à retrouver, dans sa conscience, le voile vaporeux de son trépas passé et de s'en envelopper. Il sembla lui piquer un peu la peau et s'alourdir ici et là, mais il l'apaisa sensiblement. Son imagination, jusque là si vivement affolée, s'endormit, et les sons les plus lointains, et les odeurs, s'atténuèrent.

           La femme qui lui faisait face demandait confirmation, de ce ton si solide qui révélait une confiance en soi innée. Psyche percevait à peine son essence, elle ne voyait qu'une toute petite tache grise, mais en comparaison aux autres taches alentours, inexistantes, celle-ci ressortait clairement. La prêtresse comprenait qu'en temps normal, le nuage qui se tenait à la place de l'informatrice aurait été aussi dense qu'une pelote de laine et aurait scintillé au point de l'éblouir. « C'est exact » souffla-t-elle sur une note qui manquait de conviction. Le discours se poursuivit, fort et vivant, parsemé de questions réthoriques auxquelles l'aveugle répondait chaque fois d'un sourire tellement factice et faiblard qu'il ressemblait plutôt à un tic nerveux. Lorsque le rire – élégant mais puissant – de l'autre éclata et résonna aussi bien dans l'auberge que dans les oreilles pourtant filtrées de la mort-vivante, son corps entier fut parcouru d'une secousse à la fois paniquée et perdue. Elle porta une main tremblante à son front bandé, laissa ses lèvres s'étirer pitoyablement, feignant un amusement diplomate. L'envoyée d'Elerinna poursuivit.

           A plusieurs moments, la Gélovigienne acquiesca d'un signe fébrile de la tête. Elle tentait de paraître plus présente et plus sûre d'elle, croisant ici et là les doigts, penchant la tête sur le côté, ourlant ses lèvres d'une moue sérieuse... Elle commençait à reprendre le dessus sur ses hallucinations mais son mal de crâne et les substances qui griffaient ses sinus et sa poitrine étaient loin d'avoir disparu. Elle se râclait régulièrement la gorge dans des souffles rauques et parfois, ses tempes la lançaient tellement qu'elle devait y porter deux doigts et les presser dans l'espoir de chasser la douleur. En même temps, son accompagnatrice posait d'importantes questions et délivrait des informations pertinentes dont la prêtresse se devait de ne perdre aucune miette. Alors qu'elle venait de se débarrasser d'un dernier éclair perforant de sa migraine, la trépassée s'empressa de prendre la parole, répondant d'abord à la question qui lui était posée.

            « Cela me parait tout à fait raisonnable, bien sûr, déclara-t-elle posément. Je sais parfaitement ce que je risque et je me doute que m'informer n'est pas sans danger pour Dame Lanetae. A sa place, je n'accorderais aucune confiance à une simple prêtresse de Kron curieuse et solitaire. Elle esquissa un sourire humble, un peu fébrile. Comme je vous l'ai dit, je suis à la recherche d'un Cavalier – une connaissance que je ne fréquente plus depuis fort longtemps – et non Dame Lanetae elle-même. Il se trouve que cette personne me doit quelque chose et que j'ai déjà attendu trop longtemps. C'est une affaire personnelle qui n'a pas le moindre rapport avec l'alliance des Lanetae avec les Cavaliers de Sharna et leurs projets militaires, précisa-t-elle sans trop de fermeté mais désireuse d'insister sur son innocence. Ainsi, si Dame Lanetae ne peut ou refuse de me renseigner, je n'insisterai pas et partirai suivre une autre piste. Je ne veux en rien me mêler d'évènements qui me dépassent. Tout ce qui m'importe, c'est de retrouver ce Cavalier, rien de plus, et il se pourrait qu'elle ne le connaisse même pas. »


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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeMar 12 Mai - 20:56

C'était à pein croyable. La gélovigienne, malgré son allure élégante, ses membres fins et déliés, sont port de tête volontaire, semblait extraordinairement fébrile. Ses gestes étaient mal assurés, ses épaules relevées, comme pour se protéger d'un danger, sa bouche avait parfois de très légers tics nerveux que la Gorgoroth ne manquait pas de remarquer; elle paraissait hésitante, n'osant parler très franchement, comme si elle, Elerinna, l'impressionnait, alors qu'elle ne représentait rien d'autre qu'une envoyée quelconque et sans importance. Tout, dans son apparence, pourtant, dénotait une nature franche et volontaire, un esprit farouche et indépendant. Quelles raisons la poussaient donc à agir de la sorte? Il y'avait là un mystère de l'âme, un mystère obscure, paradoxale, diablement appétissant.

Elerinna ressentit brusquement le besoin de jouer avec la Gorgoroth, de prendre un risque. Elle ressentit l'envie insensée de se dévoiler, de se mettre à nue, de se révéler toute entière à cette femme qui n'était ni tout à fait vivante, ni tout à fait morte, et qui hésitait tant devant elle. Elle eut l'envie de faire tomber les masques, de ne plus jouer aucun rôle, de ne penser à rien, d'avoir,enfin, une relation ordinaire dans une situation extraordinaire. La joie des conversations piquantes et déliées lui manquaient; son coeur était las des conseils de guerre, des décisions à brûle-pourpoint, des longues veillées, la nuit, à ne pas sentir battre son coeur et à songer au visage crispé, éructant de rage et d'ironie de Léogan, lorsqu'il lui avait tranché la gorge. Elle était lasse de tout ce cirque dans lequel elle s'était embarqué et dans lequel elle s'était noyé jusqu'à perdre la vie; Elle songeait à la douceur de se laisser vivre, tout simplement, dans la franche amitié et sans penser à rien d'autre qu'à vivre quelques jours de plus, paisiblement. L'absurdité de sa condition la révulsait tout à fait; elle était incapable de songer à quoique ce fut d'autres et elle ne songeait qu'à s'évader.

-Un cavalier, répéta-t-elle en écho à son interlocutrice. Très bien... Très bien ... Un cavalier...

Puis, brusquement elle abattit ses mains sur la table, et jeta d'une voix de conspiratrice:

-Bon, écoutez-moi. Ecoutez-moi bien, et sans m'interrompre d'accord? Je vais vous révéler tout un tas de choses que vous n'êtes pas censés savoir et que moi, bien entendu, je suis tenu de garde secrète. Sinon, ce ne serait pas drôle, vous comprenez... Les secrets, c'est là que tient tout le malheur du monde. Mais s'il n'y en avait pas, on se ficherait sur la figure tous les quarts d'heure et ce serait encore pire. Allez comprendre... Enfin peu importe! Ecoutez-moi.

Elerinna déglutit et tâcha de bien choisir ses mots. Il n'était pas question d'effrayer son interlocturice, du moins pas plus que de raisons. Elle prenait déjà un risque considérable en cédant à son caprice ... Et puis zut!

-Et si je vous disais, continua-t-elle sur un ton gouailleur, que je ne suis pas l'envoyée d'Elerinna Lanetae, et que la dénomée Elerinna n'est pas occupée, dans un de ses camps fortifiés, en train de décider du sort du monde, qu'est-ce que vous diriez? Qu'est-ce vous diriez si je vous disais qu'Elerinna Lanetae, c'est moi, et que je suis venu vous trouver un personne parce que vous avez su m'intéresser et parce que ... parce que je n'ai pas envie de diriger les hommes comme des pions, vous voyez? Parce que j'ai eu envie de voir autre chose que des militaires froids et guindés drapés dans leur dignité de guerrier couillus et vaniteux? Et puis oh merde à la fin! Parce que j'avais envie de vous connaitre, tout simplement.

Sa voix s'était mie à trembler et s'était faite un peu plus forte.

-Vous êtes morte, vous aussi, souffla-t-elle, et pourtant vous êtes encore en vie. Tout comme moi. On vous a tué. Votre coeur ne bat plus, vous ne respirez plus. Et pourtant, comme moi, vous marchez, vous pensez, vous agissez toujours. Comme un vivant plein de sang chaud et d'ardeur. Mais votre corps est froid comme la mort qui est entré en vous. Comment avez-vous accepté tout cela? Je ne vois plus de sens à ce que je suis. Vous comprenez? J'ai beau faire la gouailleuse, ça me ronge, c'est effroyable. Voilà tout ce qu'est devenu Elerinna Laenatae.

Elle s'interrompit un court instant. Elle avait craché son nom avec dédain. Elle ne l'estimait plus, elle ne s'estimait plus; elle se voyait comme un cadavre dénué de sens, comme une existence dont on aurait enlevé la substantifique moëlle et qu'on aurait laissé là, comme une poupée de chiffon, en ricanant méchammant et en lançant des moqueries.

-Alors, qu'est-ce que vous en dites? lâcha-t-elle enfin, accompagné d'un léger sourire ironique.
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MessageSujet: Re: Le Miroir Déformant [PV Elerinna]   Le Miroir Déformant [PV Elerinna] Icon_minitimeMer 10 Juin - 22:58

Spoiler:

Les mains de la messagère claquèrent sur la table comme un couvercle de bois que l'on rabat précipitemment pour que les choses qui s'y cachent demeurent secrètes et la prêtresse ne put retenir un sursaut. Le hoquet qui s'échappa de ses lèvres ressembla plus à un dernier soupir voilé par son état fiévreux. Elle se crispa d'avantage, ses cuisses se serrèrent tel un étau sur ses mains et ses épaules atteignirent presque la hauteur de son menton. A la fois concentrée sur l'effet aliénant de sa nature pour lequel elle devait présentement se battre, perturbée par les bourdonnements dans sa tête et l'absence tiédasse de son essence, dégoûtée par les substances gluantes qui lui collaient la trachée, et omnubilée par les informations déjà satisfaisantes que l'on venait de lui livrer, la Gélovigienne eut un mal fou à saisir le sens des mots que l'émissaire lui lançaient maintenant à la figure. Elle les entendit, tous, dans l'ordre, ils étaient prononcés avec puissance et autorité, une forme de passion que l'informatrice dévoilait précipitamment, avec ce qui sonnait comme une douleur et un déchirement toujours plus approchant. La prêtresse qui avait reculé sur sa chaise et s'appuyait désormais avec conviction sur son dossier, donna clairement l'impression de se sentir agressée. Quand enfin elle se fit au ton de son interlocutrice et commença à comprendre ce qu'il y avait à comprendre, elle retira enfin les mains des plis de ses jupes et porta sa senestre à son menton. La stupeur se muait en une joie un peu souillée, une satisfaction tellement plus instinctive que raisonnée. Elle sentit une chaleur d'excitation gonfler sa poitrine. Elle se sentait autant en danger que bénie des Dieux.

           Le discours de la jeune femme – d'Elerinna, d'Elerinna Lanetae – était largement taché de haine et de douleur, des sentiments que Psyche ne pouvait pas vraiment prétendre avoir connus mais qu'elle semblait saisir chez autrui. La prêtresse déchue dévoilait un visage balafré et une âme meurtrie et sa semblable, droite et raide sur son siège de bois, voyait l'image qu'elle s'en était faite se craqueler, et se briser tel un miroir.

           Elle s'adressa à elle, crachant sa mort, régurgitant la prestance qu'elle avait encore quelques minutes plus tôt. Psyche sentit ses lèvres s'étirer en un sourire ému, les commissures tremblantes. Sans doute ses yeux se seraient-ils humidifiés si elle les avaient gardé ouverts.
Le silence qui s'installa pendant un instant sembla englober la taverne entière. Le monde entier. Aux oreilles tamisées de la religieuse, même les Dieux s'étaient tu. Elerinna lâcha sa dernière réplique avec une sorte de détachement fataliste, une tristesse ironique. Psyche releva la tête, comme si elle avait pu plonger son regard dans ceux de sa congénère. Le nuage d'essence qui épousait sa forme scintillait encore plus.

           Elle esquissa un sourire qui sembla lui restituer toute sa distinction habituelle.

          « Dame Lanetae. J'en dis que je meurs de m'entrenir avec vous loin d'ici. »


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