[TERMINER][Event] Modus Operandi

« Nivalessa, le 16ème jour de Fonclan,

Un chasseur s’est présenté aujourd’hui avec une inquiétante nouvelle. Je ne sais encore quoi en penser, mais je reste sur mes gardes. Ursa n’est pas rassuré non plus, mais nous avons décidé d’un commun accord de conserver notre sang-froid. La précipitation ne nous sera d’aucune utilité si la situation s’avère grave.

Le chasseur en question – Draugnard, de son nom – venait nous rapporter la présence d’un groupe de malades dans la vallée dont les symptômes ne disparaissent pas. J’ai essayé d’en savoir plus, il m’a parlé d’une fièvre préoccupante et grandissante que même les potions ne parviennent pas à défaire, en plus d’une grande fatigue. Cela ne me surprend pas, la saison s’y prêtre. Mais il n’est pas de fièvre que les potions modernes ne peuvent pas faire tomber. Pourtant, il est bon de prendre du recul. J’ai immédiatement envoyé des émissaires gélovigiens dans le village, et en fonction de leur retour, je me déplacerai moi-même.

Ursa m’a indiqué qu’il était plus sage que je reste à Nivalessa, que ma position ne me permettait pas de me mettre en danger. Pourtant, il m’est impensable de songer qu’il est en ces terres des malades qui n’auraient pas un accès aux soins, un accès à la médecine. Les villages les plus reculés et les masures de chasseurs et de bergers sont encore mal desservis par les routes et les sentiers. Leur accès à des dispensaires corrects est rendu difficiles par le terrain, et maintenant que je connais mieux le duché, je constate que les dernières années ont érodées les dernières voies encore praticables. Une fois que nous aurons assez de finances, il faudra leur donner de meilleures routes, où nous allons au-devant de problèmes plus graves.

Si les nouvelles ne sont pas bonnes, je me rendrai dans ce hameau. Ce n’est peut-être qu’une fausse alerte – je l’espère sincèrement. Mais l’ombre de la sarnaroah est encore toute proche, et depuis la convergence, j’ai l’impression que quelque chose s’est brisée. J’ai quelques jours devant mois pour m’y préparer. »

« Nivalessa, 28ème jour de Fonclan ;

Je reviens simplement du hameau où Draugnard nous a signalé des cas suspects. Et la situation est effectivement… Préoccupante. Les soldats sont toujours au frond, à l’Est, et je ne peux me résoudre à démobiliser les médecins que j’ai envoyé aux fronts. Mais les mots me manque pour décrire l’inquiétude qui pèse sur mes pensées.

Pourtant, d’apparence, ce n’est rien. Rien qui devrait m’inquiéter.
Nous nous sommes rendus dans la vallée une semaine après les rumeurs, après que le retour des éclaireurs nous implore de ne pas venir. Selon eux, seuls trois des habitants, sur une douzaine de masures, étaient touchés par le mal, une fièvre assez tenace qui rendait les bergers fébriles, mais épargnait les bêtes. Mais leurs derniers mots m’ont… Marquée. « La fièvre est résistante aux potions, mais ça doit être dû à l’isolement des patients, rien qui ne devrait alerter. » De ma courte existante, il ne m’est jamais arrivée de venir au-devant d’un coup de froid ou d’une angine de gorge résistante aux potions – nous savons réprimer ces maladies de saison depuis des centaines d’années.
Il n’était pas à exclure que les maux aient changés, et se soient fortifiés. Mais il m’était impossible de croire que nos remèdes ne parvenaient pas à dépasser le mal. Je fis mander Athema, Vermundt et Draugnard, pour nous guider dans la vallée ; et nous sommes partis le lendemain.

Nous y sommes parvenus après trois jours de route à cheval. Le village n’était pas grand, une trentaine d’âmes peut-être. Et sur ceux-là, trois présentaient effectivement des signes de fièvre apparents : des frissons, des vertiges, des faiblesses. La plus âgée était particulièrement touchée – Une vieille femme native du village, une terrane de soixante ans nommée Elofée. Son front était bouillant, alors que ses extrémités étaient par moment glacées, par moment pétries de feu. Une fièvre bien trop intense et généralisée pour que ça soit l’œuvre d’un simple mal de saison. Et pourtant, ça en était les symptômes.
J’ai tenté de leur administré pendant trois jours des potions communes pour soigner les souffrances de poumons et de crâne, pour baisser la température. Seuls les bains froids dans des baquets gelés parvenaient à les rafraichir assez, avant que leur température ne remonte inexorablement.
Athema me soutient encore qu’ils ont développé une forme tenace d’un rhume eridanien, mais je n’en crois pas un mot. Elle a, certes, toute la forme d’une fièvre de gorge, elle n’en est rien. Les potions se sont montrées si… Inefficaces. Elles n’ont pas montrées le moindre signe d’amélioration, pas aidé à la disparition des symptômes.

Les trois malades sont actuellement en route jusqu’à Nivalessa, où ils seront accueillis à l’hospice des vertus. Avec eux, une quatrième personne, un petit garçon, qui montrait des premiers signes de fièvre. Je ne peux me résoudre à laisser ces personnes subir seuls, et à laisser cette fièvre intouchable et intouchée. Il doit exister un remède efficace pour la mettre à mal, ou pour au moins la faire fléchir.
Tout devrait m’inquiéter. Tout. »

« Nivalessa, 13ème jour de Mésoa,

Les arbres Nivériens se parent d’un magnifique feuillage vert et doux. C’est dommage que je ne puisse découvrir le duché et ses changements de couleurs ; Mais il est sage de voir le tableau dans son ensemble et de ne pas se presser, j’aurai tout ce loisir une fois la crise passée.

De nouveaux cas ont été recensés, beaucoup, en réalité. Il a fallut imposer une quarantaine à l’hospice, afin d’y contenir les cas de cette mystérieuse fièvre. Du hameau d’où l’épidémie est partie, il ne reste plus que deux miraculés qui ont échappés à l’infection. Le reste est en ce moment avec les médecins de l’ordre. Nous avons fait installer des dispensaires, le long des chemins et dans les bourgs où des granges étaient accessibles. Les prêtres sont mobilisés sur les nouveaux malades, et heureusement les pertes au front sont limités, et m’on permis de libérer des médecins pour les installer au chevet des fiévreux. Mais la situation est délicate, et tant que nous ignorons comment cette fièvre se propage, j’ai conscience que tous les soignants peuvent en être eux-mêmes victimes.
Contre l’avis d’Ursa et du reste des habitants de Nivalessa, j’ai décidé de me joindre aux autres médecins de l’ordre et d’affronter la maladie avec eux. Cela me permet de consigner mes observations – je ne pourrais rien à distance, et je suis intimement persuadée que ce n’est pas de l’ordre de la simple maladie de saison.

Ce qui me permet de l’affirmer est le caractère tenace de cette fièvre ; qui contrairement à un simple rhume, ne permet pas au corps du malade de lutter. Là où nous sommes égos devant le mal, et nous parvenons tôt ou tard, pour un sujet bien portant, à évacuer l’infection par voies naturelles et par nos propres défenses, ici les patients sont au dépourvu. Comme… Incapables de fournir les défenses nécessaires pour se battre.
Selon mes premières observations, les potions communes et plus rares se montrent inefficaces pour apporter l’aide nécessaire aux corps. Mais j’ai pu établir qu’à proximité d’une source de froid suffisamment intense, la fièvre parvenait à diminuer de façon encourageante. Mais malgré nos efforts et des chutes suffisantes, la température du patient finissait inlassablement par remonter.

Il m’apparaît clair que le froid n’est qu’un obstacle, une façon d’endiguer la maladie. Mais c’est pourtant la seule barrière qui peut aujourd’hui se dresser contre elle : et c’est toujours une nouvelle arme pour gagner un temps précieux, car à l’heures actuelle, j’ignore encore tout de son rythme et de son développement.

Voici néanmoins le fruit de mes premières constatations. Les premiers signes de cette maladie apparaissent rapidement, dans les premières heures au contact de cette maladie. Il semblerait qu’elle circule d’un corps à un autre uniquement par contact prolongée, ou par une voie différentes – j’ai remarqué des traces de piqûres sur la patiente que je suppose avoir été la première infectée dans le duché de Nivéria. L’œuvre d’un insecte, peut-être ? Il est encore trop tôt pour l’affirmer, mais la maladie est peut-être d’origine animal – je ne constate pourtant aucune prédominance raciale, à ce stade, parmis les patients.
Les symptômes principaux de cette maladie sont une fièvre croissante, et tenance, une fatigue chronique, une rigidité musculaire souvent accompagnée de faiblesse, et une certaine lueur rougeoyante dans les capillaires de la peau. Le signe d’un feu, peut-être.

Dés demain, je demanderai à Ursa d’apprêter et d’envoyer plusieurs volontaires sains pour rapporter des nouvelles du reste du pays. La situation en Nivéria est certes inquiétante, mais pour l’instant maîtrisable. Mais le hasard serait trop grand pour que le duché soit à l’origine de cette épidémie. Et recevoir des nouvelles nous aidera à y voir plus clair, et à cerner les limites de la maladie – ou son ampleur, même si je pris pour que ça ne soit pas le cas.

Dés demain je commencerai des testes plus poussés sur de nouvelles recettes à base d’algues cimmériennes, connues pour leurs propriétés frigorifiques.

Faites que Kesha nous garde. »

« Le Haut-Monastère, 25 ème jour de Mesoa,

Malgré le flux constant en provenance de l’extérieur, nous parvenons à garder la situation sous contrôle. Mais plus les heures passent, plus mes doutes s’affirment avec plus de ténacité.
J’ai pu observer quelques évolutions de la maladie, aujourd’hui, chez des patients atteints depuis plusieurs semaines. La fièvre a semblé diminuer spontanément, tout comme tous les signes tangibles de la maladie – faiblesse, rigidité… Comme si les constantes revenaient à la normal. Si l’on peut y voir un signe encourageant de l’effondrement de la fièvre, je reste sur mes gardes. Il n’est pas sage de spéculer sur la fin d’un mal avant d’avoir laissé passer quelques temps, et je suppose que cette apparente amélioration cache de possibles évolutions plus néfastes encore.

Le nombre de patients est en augmentation perpétuelle. D’abord par les arrivées en provenance du reste du royaume et du continent, mais également car les soignants, malgré leurs efforts, commencent à recenser des cas de contamination. Mais nous parvenons à garder la main mise sur les nombres, et l’isolement des sujets dans le dispensaire est pour l’instant encourageant, même si je demeure pessimiste sur l’évolution globale de la situation. Malgré nos efforts, le dispensaire n’est pas extensible, et ne pourra bientôt plus abriter tous nos fiévreux. J’ai déjà proposé que l’on déplace les malades dans les quartiers des prêtresses et prêtres de Kesha, quitte à trouver ailleurs où nous reposer. Il faudra bien ça pour endiguer les contaminations.
J’ai également imposé à ce que l’on autorise aux malades un accès vers les salles d’eau, avec l’obligation de profiter du froid. Même si nous travaillons d’arrachepied avec Duscisio pour créer un calmant suffisamment fort pour permettre aux malades un peu d’accalmie, le froid reste pour l’instant notre meilleure arme contre cette maladie.

Cela fait maintenant plusieurs jours que nous sommes arrivés avec la délégation de Kesha, et je dois admettre, sur une note personnelle, qu’il m’est agréable de travailler entourée de visages familiers. Même si ce fut une surprise étonnement mouvementée, c’est tout de même plaisant de pouvoir travailler de nouveau avec Duscisio, et d’avoir pu le découvrir comme Haut-Prêtre.
J’ai également pu rencontrer un de mes nouveaux voisins, monsieur Veldar, malheureusement atteint. Une rencontre agréable, avec un homme de mots et de sympathie. Une raison supplémentaire de défaire cette maladie, afin de le rendre à son comté dans la meilleure des formes.

Mais il demeure aujourd’hui trop de zones d’ombre dont il faudra percer les secrets. Je ne peux encore me permettre de faire retomber la pression et de m’appesantir avec nos maigres acquis. Les méthodes de transmissions restent trop obscures, et j’ai besoin de savoir comment prolifère la maladie, comment elle parvient à dévorer le patient de l’intérieur. Comment elle l’enflamme.
Si nous parvenons à comprendre par quel mécanisme elle fonctionne, par quel organe elle s’épanouit et grandit, nous aurons déjà résolu une partie de l’énigme. Et ce sera un pas de plus vers le remède.

Dés demain, je commencerai des études de cas plus poussées. Je ne pouvais encore m’y résoudre, mais je vais devoir récolter des échantillons, prélever du sang, de la peau, tout ce qui me rapprochera de la clef de l’énigme.
Mais Kesha m’attend dans la chapelle, tous comme mes sœurs et mes frères. Nous aurons toujours un souffle pour prier, au monastère. »

« Le Haut-Monastère, 3ème jour de Mirios,

Etude de patient n°87 : Greka. Une terrane d’une trentaine d’année, touchée par la fièvre depuis Fonclan, originaire du duché de Méphrit.
Elle présente une liste certaine de symptômes ; plus ou moins importants. La fièvre reste le plus grand des problèmes, même si notre calmant montre des signes extrêmement encourageant pour la garder sous laisse. Avec la formule actuelle, les malades ont quatre à cinq heures devant eux avant que les symptômes ne se réinstallent ; et je suis certaine que nous pouvons encore améliorer la recette en ajustant les doses.
Greka date ses premiers symptômes d’il y a un mois et demi, ce qui coïncide à peu près aux premiers cas repérés à Nivéria, ce qui situe le patient zéro, en Eridania, au début du mois de Fonclan. Les nouvelles de Cebrenia nous indique avoir dénoté des cas similaires antérieurs à cela ; j’ai bon espoir que nous puissions retrouver l’origine de cette maladie en retraçant le chemin des malades. J’ai fait envoyer des émissaires gélovigiens à la rencontre des pays voisins. Si Cebrenia, Argyrei, Noathis et Cimmeria pouvaient nous confirmer les dates d’apparition des premiers malades, nous en saurions plus l’origine précise de la fièvre ; et comment elle est apparue pour la première fois.

Greka est présente au monastère depuis un mois, et est entrée sous ma garde aujourd’hui. J’ai pu, avec son accord, faire de premiers prélèvements. J’ai pu récupérer deux flacons de sang, quelques cheveux, trois échantillons de salive. Des maintenant, je commencerai à expérimenter – j’ai élaborer un protocole strict, puisse-t-il me faire comprendre comment fonctionne cette fièvre. Et si je peux sauver Greka, ce ne sera pas en vain.

Le taux de malades arrivants est en constante augmentation, et ma crainte est que les patients ne finissent par contaminer les prêtres et prêtresses sains. Ce n’est pas le moment que nous commencions à tomber nous même malades. Le monastère tient encore par miracle, et malgré le calmant, la situation ne fera qu’empirer si nous ne parvenons pas à trouver la recette du remède.
La maladie n’a rien à voir avec la sarnharoa, son fonctionnement est plus complexe, plus intelligent. Moins… Spontané. Nous ne devons pas nous relâcher.
Je vais renforcer les protocoles sanitaires, et demander l’isolements des malades. Les équipes de soignants devront garder une distance imposée, et tourneront régulièrement pour garantir une exposition minimale.

Notre départ pour les terres de Vanes sont proches. Et pourtant j’ai l’impression d’abandonner mes responsabilités. Que je laisse derrière moi un travail inachevé. La situation devient critique, et même si nous soulageons les malades, c’est seulement pour qu’ils retrouvent une fois les effets dissipés une souffrance plus grande. A ce rythme, c’est Kron qui les attend. Et je ne peux permettre cela. A mon retour, je devrai travailler plus grandement. Il doit exister un remède. »